Jeunes placés à l’ASE : une précarité résidentielle qui perdure (INED)

Jeunes placés à l’ASE : une précarité résidentielle qui perdure (INED)

Jeunes placés à l’ASE : une précarité résidentielle qui perdure (INED)

 

L’INED a publié, en avril 2021, une étude sur les difficultés de logement des jeunes après un placement, à partir des données de l’enquête ELAP (Étude longitudinale sur l’accès à l’autonomie après le placement), menée en 2013 et 2015 : parmi les enquêtés, 36% jugent que « leur prise en charge s’est arrêtée trop tôt », 16% ont connu la rue depuis leur sortie, quand la décision de fin de placement a été la décision unilatérale de l’Aide Sociale à L’Enfance (ASE).

L’enquête a été réalisée en deux vagues, en 2013-2015 et en 2015, auprès de 1 622 jeunes âgés de 17 à 20 ans avec comme objectif de mieux connaître les conditions de sortie et leurs conditions de vie dans le placement à la veille de leur sortie et après. Elle peut aider à orienter les efforts des pouvoirs publics pour améliorer les trajectoires de sortie de l’ASE.

En France, 138 000 enfants sont pris en charge par l’ASE, au titre de l’enfance en danger, soit 1,6% des mineurs : cela englobe soutien matériel, éducatif et accompagnement des jeunes. Si les enfants ont rejoint le dispositif à différents âges, ils ont en commun de devoir en sortir à 18 ans et subvenir à leurs besoins. En 2019, la Fondation Abbé-Pierre, dans son rapport 2019 sur l’état du mal-logement, alertait : « Un quart des SDF nés en France sont d’anciens enfants placés ». Cela représente 10 000 personnes. « Ce taux atteint 36% parmi les jeunes sans domicile ente 18 et 25 ans ».

« Etre majeur, ne signifie plus être autonome »

Depuis 1974, alors que la majorité est passée de 21 ans à 18 ans, un dispositif a été mis en place : le contrat jeune majeur, pour accompagner les jeunes au-delà de 18 ans. « Alors que le contrat engage le jeune à ne pas abandonner une formation professionnelle, des études, l’ASE est engagée à respecter ses obligations. L’hébergement est encore à la charge de l’ASE : le jeune peut loger chez une assistante familiale départementale, en appartement, dans une chambre d’hôtel, en foyer. Le jeune reçoit un accompagnement psychologique, une aide financière ainsi qu’une aide pour la scolarité. »

La durée du contrat s’élève à un an. Il peut être renouvelable. En effet « être majeur, ne signifie plus être autonome, ni être indépendant. » soulignent les auteurs du rapportSortir de la protection de l’enfance à la majorité ou poursuivre en contrat jeune majeur”, publié en 2018. « En population générale, seulement 17% des jeunes de 18 à 24 ans disposent de leur propre logement qu’ils financent eux-mêmes. Les autres décohabitants (26%) dépendent tout ou en partie de leurs parents qui financent le logement et 57% vivent toujours chez eux ».

Des parcours marqués par l’instabilité résidentielle

Selon l’étude, près de la moitié des jeunes placés (âgés de 17 à 20 ans) étaient passés par « au moins trois lieux de placement » et plus du tiers déclarent qu’ils ont dû quitter des lieux dans lesquels ils auraient souhaité rester. « La prise en charge par l’ASE les expose à un “ballotage” de structure en structure. » A cela s’ajoute le manque de place dans les structures d’accueil et des restrictions budgétaires qui conduisent à faire sortir les jeunes pour accueillir de nouveaux entrants.

C’est ainsi que la majorité déclare n’avoir pas choisi le moment du départ. D’où le risque de se retrouver sans abri. Par contre ce n’est pas le cas quand le départ est vécu comme anticipé et consenti.

Une dégradation de l’application du contrat jeune majeur.

L’étude conduite en 2018 pré citée a mis en évidence le bénéfice de la mesure contrat jeune majeur, « pour la poursuite des études et même sa nécessité pour rattraper le retard scolaire afin d’obtenir un diplôme au moins supérieur au BEPC.

L’aide aux jeunes majeurs permet aussi d’acquérir tout un ensemble de compétences peu accessibles avant la majorité ou mal anticipées (comme le permis de conduire, l’expérience professionnelle, la constitution d’un pécule, la mise en place d’un compte en banque, le relais avec les aides de droit commun, etc.) ».

Cependant depuis 40 ans qu’elle a été mise en place, on constate une dégradation de son application, en grande partie pour des causes budgétaires, se focalisant sur les jeunes qui ont des projets. « L’aide par projet n’accorde que peu de place à ceux qui n’en n’ont pas ou qui n’en n’ont plus. » D’où la nécessité de revoir l’application de cette mesure pour l’adapter aux besoins actuels.

Une proposition de loi visant à renforcer “l’accompagnement des jeunes majeurs vulnérables vers l’autonomie” a été votée en première lecture en 2019 à l’Assemblée nationale. Elle vise à assouplir le système et à le poursuivre au-delà de 21 ans pour tenir compte également des études plus longues et du temps de l’insertion professionnelle et d’acquisition de l’autonomie. Pour le moment, le processus législatif n’a pas été encore poursuivi au Sénat.

 

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Le Défenseur des Droits dénonce des atteintes aux droits des personnes en EHPAD

Le Défenseur des Droits dénonce des atteintes aux droits des personnes en EHPAD

Le Défenseur des Droits dénonce des atteintes aux droits des personnes en EHPAD

 

Dans un rapport publié le 4 mai, le Défenseur des droits dénonce de nombreuses atteintes aux droits fondamentaux, au respect et à la dignité des personnes accueillies en EHPAD. Le rapport met en lumière la façon dont la crise sanitaire a encore aggravé cette situation.

Actuellement dirigé par Claire Hédon, le Défenseur des droits est une autorité administrative indépendante chargée par la Constitution de veiller au respect des droits et libertés. Dans un rapport intitulé « Les droits fondamentaux des personnes âgées accueillies en EHPAD », l’institution a souhaité alerter sur les nombreuses réclamations provenant de personnes accueillies dans ces établissements. « Sur les six dernières années, le Défenseur des droits a ainsi instruit plus de 900 réclamations de personnes contestant les modalités de leur accompagnement médico-social ou celui de leurs proches. 80% de ces dossiers mettent en cause un EHPAD ».

Parmi les multiples atteintes évoquées, le Défenseur des droits révèle des atteintes à la liberté d’aller et venir des résidents, la pratique de la contention physique et médicamenteuse (sédation), de fréquentes atteintes à l’intimité et à la dignité des résidents, des limitations de visites, des pertes et des vols d’objets…

Pour le Défenseur des droits, les situations dont il est saisi montrent que la maltraitance provient surtout « de carences d’organisations liées à la pénurie de personnel, à la rotation importante, à l’épuisement des professionnels ou au manque d’encadrement. »

Fait préoccupant, les atteintes aux droits et libertés des résidents se sont multipliées depuis le début de la crise sanitaire. Le Défenseur des droits décrit un recours accru au « droit souple » (protocoles, recommandations, plans…) qui échappe à un contrôle juridictionnel. Il fait état de restrictions à la liberté d’aller et venir et au droit de visite qui se poursuivent bien au-delà des périodes de confinement et alors même que les personnes ont été vaccinées.

Le rapport insiste sur les conséquences psychologiques pour les résidents : « nombre de témoignages et réclamations font état de personnes ayant perdu le goût de la vie, souffrant de dépression, exprimant le sentiment d’être emprisonnées ou encore leur envie de ne plus vivre ». Le rapport révèle également la façon dont la crise sanitaire a affecté la continuité des soins et l’accompagnement en fin de vie.

Dans son communiqué, le Défenseur des droits rappelle que « les droits et les libertés des résidents ne peuvent pas être la variable d’ajustement face au manque de moyens et de personnels au sein des EHPAD ».

À l’issue de ce constat alarmant, le rapport formule 64 recommandations en vue d’améliorer la prise en charge de ces résidents et d’assurer l’effectivité de leurs droits.

 

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Fausses couches : progresser dans la prise en charge

Fausses couches : progresser dans la prise en charge

fausses couches

Les fausses couches sont fréquentes, elles concernent environ 15% du total des grossesses et touchent une femme sur dix, au cours de sa vie. Environ 23 millions par an dans le monde se produisent, ce qui correspond à 44 fausses couches par minute.

Malgré cela, leur impact et leurs conséquences sont encore trop sous-estimées, minimisées. C’est la conclusion d’une série de 3 études publiées par The Lancet qui remet en question nombre de fausses idées et plaide pour une meilleure prise en charge globale. « De nombreuses femmes se plaignent du manque d’empathie avec lequel elles sont prises en charge après une fausse couche : certaines ne reçoivent aucune explication, et le seul conseil qu’on leur donne c’est de réessayer » déplore le Pr Siobhan Quenby, co-auteur de l’étude.

Les recherches s’étalent sur les 20 dernières années. Le premier des trois rapports étudie l’épidémiologie et les impacts psychologique, physique et économique des fausses couches. Le second s’est concentré sur la démonstration de l’importance et de l’efficacité des soins à apporter, et le dernier insiste sur les cas particuliers des fausses couches à répétition.

Les auteurs rappellent que les fausses couches sont souvent vécues dans une certaine solitude, que les femmes et leur conjoint croient souvent devoir se débrouiller seuls et se sentent parfois coupables. Nombre d’idées fausses perdurent : celles que les fausses couches seraient inévitables, qu’il serait nécessaire de devoir en traverser plusieurs avant d’investiguer…

La série présente les facteurs de risque identifiés : les antécédents de fausse couche, l’âge des femmes (moins de 20 ans et plus de 35 ans), et, dans une moindre mesure, des hommes (après 40 ans), l’indice de masse corporelle, très faible ou très élevé, l’alcool, le tabagisme, la pollution de l’air, les pesticides, le stress persistant et le travail de nuit…

Concernant les grossesses suivantes, l’étude montre que la plupart des femmes ayant vécu une fausse couche portent ensuite leur bébé à terme sans complications. Cependant, elle montre aussi qu’il existe un risque plus élevé d’accouchement prématuré, de retard de croissance fœtale et d’autres complications obstétricales lors des grossesses ultérieures. Pour la santé des femmes, une fausse couche antérieure est également associée à un risque plus élevé à long terme, cela concerne par exemple les maladies cardiovasculaires mais aussi les complications psychologiques : risque d’anxiété, de dépression, de trouble de stress post-traumatique. Le rapport aborde aussi la prise en charge obstétricale des fausses couches et les stratégies de prévention.

Forts de ces travaux, les auteurs plaident pour une meilleure prise en charge globale des fausses couches mais aussi des grossesses ultérieures. Enfin, les auteurs plaident pour un échange de données entre pays, pour faciliter la comparaison, associer la recherche, améliorer la prise en charge des patients et la considération politique de ces données.

Euthanasies clandestines : des chiffres biaisés en France

Euthanasies clandestines : des chiffres biaisés en France

euthanasies clandestines

Le 8 avril dernier était débattue à l’Assemblée nationale la proposition de loi du député Olivier Falorni visant à légaliser l’euthanasie et le suicide assisté en France. Parmi les arguments présentés par ses partisans, un chiffre est régulièrement utilisé pour dénoncer l’hypocrisie de la situation française : il y aurait 2 000 à 4 000 euthanasies clandestines chaque année, il faudrait donc mettre fin à ce scandale. Cet argument fait en réalité une utilisation biaisée d’une étude scientifique de 2012, comme le rappelle le journal La Croix dans un article du 26 avril 2021.

L’étude de l’Institut national d’études démographiques (INED) portait sur les décisions médicales de fin de vie en France. Le cœur de l’analyse peut être résumé de la façon suivante. Sur près des 5 000 décès ayant fait l’objet de l’étude (soit 0,01% des décès en France à l’époque), l’INED écrit précisément ceci : « Les actes d’euthanasiemettre fin à la vie d’une personne malade à sa demande ») représentent 0,6 % du total des décès, dont 0,2 % sont pratiqués en administrant délibérément une substance pour mettre fin à la vie (11 cas). Dans ces derniers cas, moins de 4 sont définis par le médecin comme une euthanasie, les autres étant généralement considérés comme des sédations pour détresse terminale. »

Les partisans de l’euthanasie ont utilisé la formulation un peu ambigüe de l’INED pour retenir le chiffre le plus élevé de 0,6%, puis l’ont appliqué au total des décès sur une année pour arriver à près de 4000 « décès par euthanasie ».

Une des responsables de l’étude a plusieurs fois mis en garde contre cette extrapolation erronée. D’une part, une partie des actes correspondaient en réalité à des sédations dont le statut était encore assez flou à l’époque : si l’on retient plutôt le pourcentage de 0,2%, on arrive à un peu plus de 1000 actes susceptibles d’être euthanasiques. D’autre part, il n’est pas scientifique d’utiliser un tel pourcentage tiré d’une seule étude pour l’appliquer à tous les décès.

Ce récent article de La Croix ne fait que confirmer, une fois de plus, ce que d’autres médias ou organismes ont déjà souligné ces dernières années. Dès 2012, le Comité Consultation National d’Ethique (CCNE) avait tenu à rétablir la réalité des faits dans son avis « Fin de vie, autonomie de la personne, volonté de mourir ». Au moment des Etats Généraux de la Bioéthique, au 1er semestre 2018, cet argument des euthanasies clandestines a été à nouveau largement utilisé par des nombreuses personnalités politiques et médiatiques. Le journal Libération avait fait alors sa propre analyse « CheckNews » pour aboutir à la même mise en garde, dans un article intitulé « Y a-t-il vraiment 4 000 euthanasies par an en France ? » Peu après, la Société Française d’Accompagnement et de Soins Palliatifs (SFAP) a publié une note très argumentée intitulée « 4 000 euthanasies clandestines par an en France ? C’est faux. »

L’insistance des partisans de l’euthanasie à interpréter de façon fallacieuse l’étude de l’INED finit donc par paraître particulièrement choquante à de nombreux observateurs et spécialistes de ces questions. En témoigne par exemple cette interview de janvier 2019 de Tanguy Chatel, spécialiste des soins palliatifs et de l’accompagnement des personnes en fin de vie, à qui on demandait comment il interprétait cette désinformation : « On a eu l’occasion, à de très nombreuses reprises, de dire poliment et posément aux personnes qui les propageaient qu’ils faisaient une interprétation erronée de l’étude. Les auteurs de l’étude ont aussi publiquement dénoncé l’usage qui était fait de leur travail. Cet usage abusif et répété révèle qu’on n’est pas seulement en présence d’une erreur qui serait excusable mais en présence d’une construction délibérée servant des objectifs idéologiques et politiques. Ce chiffre, au même titre que d’autres informations erronées, est utilisé sciemment pour pousser à la légalisation de l’euthanasie en faisant croire qu’il y aurait en France plus d’euthanasies clandestines que dans d’autres pays où celle-ci a été légalisée. En réalité, c’est exactement l’inverse qui semble se passer. »

La question des pratiques clandestines dans les pays qui ont légalisé l’euthanasie ou le suicide assisté reste en effet entière. Plusieurs études ont par exemple montré que les euthanasies non déclarées sont restées très nombreuses en Belgique, pays présenté comme un modèle à imiter. Non seulement la légalisation de l’euthanasie n’a pas supprimé les actes clandestins, mais ceux-ci sont maintenant considérés comme une sorte de fatalité devant laquelle les autorités s’inclinent.

Ainsi, le président de la Commission fédérale de Contrôle et d’Évaluation de l’Euthanasie (CFCEE), le Pr Wim Distelmans, commentait le rapport publié en 2015 avec la remarque suivante : « Reste dans l’ombre, rappelons-le, le nombre d’euthanasies posées mais non-déclarées, ce qui nous empêche d’avoir une vue réelle sur l’ampleur de la question ». De façon encore plus officielle, la Commission de contrôle explique dans son rapport officiel 2018-2019 (page 47) : « Comme déjà signalé dans les précédents rapports, la Commission n’a pas la possibilité d’évaluer la proportion du nombre d’euthanasies déclarées par rapport au nombre d’euthanasies réellement pratiquées ».

Une étude menée par des chercheurs de l’Université libre de Bruxelles et de celle de Gand a été publiée dans Social Science & Medicine en juillet 2012. Il s’agit d’une enquête approfondie auprès d’un échantillon représentatif de 480 médecins de Flandre et 305 de Wallonie. Celle-ci révèle que les déclarations à la Commission de contrôle ne concernent seulement que 73% des euthanasies pratiquées par les médecins flamands et 58% pour les médecins wallons. Autrement dit, 27% des euthanasies en Flandre et 42% en Wallonie n’étaient pas déclarées.

Cette proportion préoccupante d’euthanasies non déclarées (et donc par définition illégales) en Belgique est d’ailleurs corroborée par une seconde étude publiée en 2018 dans le Journal of Pain and Symptom Management, dont il ressort qu’au moins 31% des euthanasies réalisées en Flandre en 2013 n’ont pas été déclarées à la Commission de contrôle. Une part non négligeable de ces euthanasies non déclarées correspond à l’injection d’une sédation au patient (avec ou sans son consentement) dans le but d’accélérer sa mort. L’étude indique que nombre de médecins ne considèrent pas cet acte comme une euthanasie et que sa déclaration à la Commission est donc superflue. L’injection d’un produit, intrinsèquement létal ou non, dans l’intention d’accélérer la mort du patient constitue pourtant bien une euthanasie au sens médical et légal du terme, du fait de l’intention poursuivie par le médecin.

 

Fin de vie : étude sur la détresse morale des médecins

Fin de vie : étude sur la détresse morale des médecins

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Une étude qualitative a été récemment réalisée dans une unité de soins intensifs en Irlande du Nord. Son objectif est d’explorer les causes de détresse morale chez les médecins et les conséquences qui en découlent dans la prise de décision pour les patients en fin de vie.

« La détresse morale survient quand on connaît la bonne action à poser ou la bonne chose à faire mais que les obstacles et des contraintes organisationnelles empêchent d’agir dans ce sens » d’après le Dr Andrew Jameton, un des premiers éthiciens qui a étudié la détresse morale des infirmières en 1984.

L’étude publiée dans le Journal International de Médecine révèle que « Les soins de fin de vie sont une source de détresse morale, car parmi les patients admis dans les unités de soins critiques (USC), environ 13 à 20 % décèdent à la suite de décisions de ne pas intensifier et/ou de retirer une thérapeutique vitale. Les directives anticipées des patients sont rarement connues et il incombe alors à d’autres personnes de prendre des décisions dans l’intérêt du patient. »

A partir d’études de cas de patients, une vingtaine d’entretiens approfondis avec des médecins seniors et juniors ont été analysés. Il en ressort que les décisions sont souvent prises « dans des conditions émotionnellement intenses et sont compliquées par l’administration de thérapies de maintien en vie et les difficultés à prédire le décès ». Deux thèmes prédominent dans les résultats :

  • Chez les jeunes médecins, les cas de détresse morale sont déclenchés par le sentiment de futilité, le manque de continuité, les décisions prolongées et l’incapacité à assurer une « bonne mort ». Les médecins seniors semblent moins impactés par la détresse morale du fait de leur plus grand degré « d’autonomie » dans la prise de décision.
  • Les conséquences de la détresse morale affectent la vie personnelle, les relations de travail et le choix de carrière des médecins.

Cette étude menée au Royaume-Uni est la première à explorer la détresse morale des médecins dans les décisions de fin de vie en soins intensifs. Ses résultats ont des implications dont il faut tenir compte pour la formation des médecins. La pandémie de Covid-19 a été un révélateur de ce que les soignants ne sont pas toujours suffisamment préparés à l’approche de la mort. En France, la Limitation et Arrêt de Thérapeutiques Actives (LATA) est réglementée par la loi Leonetti du 22 avril 2005 relative au droit des malades et à la fin de vie.

Cette étude a mis en évidence l’incompréhension potentielle du rôle des soins palliatifs qui permettent de soulager les symptômes et peuvent améliorer la qualité de vie du patient pendant toutes les phases de sa maladie, en prenant en compte de manière globale les dimensions psychologiques, relationnelles et spirituelles. Les soins palliatifs de support peuvent coexister harmonieusement et simultanément avec les objectifs du traitement ; cela montre la nécessité d’intégrer les soins palliatifs aux soins intensifs et aux programmes d’enseignement des étudiants en médecine.