La CEDH valide le refus de reconnaître la filiation d’un enfant né d’une GPA à l’étranger

La CEDH valide le refus de reconnaître la filiation d’un enfant né d’une GPA à l’étranger

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Dans son arrêt de Chambre du 18 mai 2021, la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) conclut à l’unanimité que refuser de reconnaître deux personnes comme parents d’un enfant né d’une gestation pour autrui (GPA) ne viole pas la Convention européenne des droits de l’homme.

Il s’agit de l’affaire Valdis Fjôlnisdottir et autres contre l’Islande. Elle porte sur le refus de l’Islande de reconnaître le lien parental de deux femmes mariées à l’égard d’un petit garçon né d’une mère porteuse aux Etats-Unis, en 2013. À leur retour, trois semaines après la naissance, elles demandèrent l’inscription de l’enfant à l’état civil en tant que citoyen islandais et en tant que leur fils. En Islande, la GPA est illégale. Les deux requérantes n’ont donc pas été reconnues comme parents de l’enfant, avec lequel aucune d’elle ne détient d’ailleurs de lien biologique. Les autorités islandaises considérèrent l’enfant comme mineur non accompagné en Islande, « le placèrent néanmoins en accueil familial auprès des deux premières requérantes ». Elles ont ensuite entamé une procédure d’adoption, qui s’est interrompue en 2015 par le divorce des deux femmes car elles n’étaient plus admissibles à adopter conjointement un enfant. Concernant l’octroi de la nationalité islandaise, le droit en vigueur ne lui permettait pas de l’obtenir, mais en 2015, le vote d’une nouvelle loi lui accorda.

Après leur divorce, l’enfant fut placé en accueil familial auprès de chacune des deux premières requérantes en alternance, pour une durée d’un an à chaque fois. Depuis 2019, l’une des deux femmes et sa nouvelle épouse accueillent l’enfant de manière permanente, l’autre femme et sa nouvelle épouse se voyant accorder un droit d’accès égal.

En 2016, Le tribunal jugea qu’en Islande, la mère biologique devait être la mère, et que les autorités n’avaient pas l’obligation, dans les circonstances de la cause, de reconnaître les requérantes comme parents, conformément au certificat de naissance étranger.

Elles ont alors porté, en 2017, l’affaire devant les juges de la CEDH, invoquant l’article 8 (droit au respect de la vie privée et familiale) et l’article 14 (interdiction de la discrimination) combinés avec l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme, les requérantes ont allégué que le refus des autorités de les enregistrer comme parents constituait une ingérence dans leurs droits.

Dans son arrêt, la CEDH juge que malgré l’absence de lien biologique, les liens existants constituent « une vie familiale » que les autorités islandaises protègent suffisamment, notamment par la reconnaissance de la nationalité islandaise qui a été accordée à l’enfant, et que le refus de les reconnaître comme parents repose sur une base suffisante en droit interne. Elle rappelle aussi que l’adoption aurait été possible, si elles n’avaient pas divorcé.

Les magistrats européens ont également rappelé que les États disposaient d’une « marge d’appréciation » compte tenu des « questions éthiques que pose la GPA ».

Selon la jurisprudence de la CEDH, la reconnaissance du lien de filiation entre un enfant et sa « mère d’intention » ne s’impose pas aux 47 Etats membres du Conseil de l’Europe. La CEDH n’impose pas une retranscription des actes de naissance d’enfant nés de GPA, en mentionnant comme mère la mère dite « d’intention » qui n’a pas accouché, puisque ces actes seraient faux.

En effet, selon la Cour : « L’intérêt supérieur de l’enfant ne se résume pas au respect de ces aspects de son droit à la vie privée. Il inclut d’autres éléments fondamentaux, qui ne plaident pas nécessairement en faveur de la reconnaissance d’un lien de filiation avec la mère d’intention, tels que la protection contre les risques d’abus que comporte la gestation pour autrui ».

Cependant, lorsque dans les pays, ce lien n’est pas reconnu, la CEDH demande à ce que d’autres modalités soient envisagées, comme l’adoption.

Pour Alliance VITA, la position est toujours ambiguë, puisque la Cour européenne des droits de l’homme ne condamne pas la gestation pour autrui, en tant que telle, mais promeut un détournement de l’adoption. Rappelons que l’adoption est une institution qui a pour vocation de réparer un préjudice, quand la GPA organise délibérément de graves atteintes aux droits de l’enfant en consacrant, avant même sa conception, son abandon programmé pour le rendre adoptable. Une telle adoption post-GPA est d’ailleurs contraire aux règles de l’adoption internationale, la Convention de la Haye prohibant les accords passés avant la naissance entre mère de naissance et candidats à l’adoption.

Doublement du congé de paternité : renforcer la relation père-enfant

Doublement du congé de paternité : renforcer la relation père-enfant

Doublement du congé de paternité : renforcer la relation père-enfant

 

Le Journal officiel a publié un décret, le 12 mai 2021, précisant les modalités du prolongement du congé paternité de 14 à 28 jours.

Voté il y a cinq mois dans la loi de financement de la Sécurité Sociale (LFSS) pour 2021, le décret précise les modalités du nouveau dispositif. Au premier juillet, ce congé passe de 14 à 28 jours, dont 7 sont rendus obligatoires à la naissance de l’enfant. Le reste du congé pourra être fractionné en deux périodes d’au moins 5 jours à prendre avant les six mois de l’enfant. Un rapport de l’IGAS de juin 2018 soulignait les inégalités de prise de ce congé en fonction du statut de l’employé.

Le taux de recours est de 80% pour les salariés du privé en CDI contre 48% pour les détenteurs d’un CDD. Le système d’indemnisation de ce congé est inchangé, l’employeur ayant les trois premiers jours à sa charge.

Cet allongement figure parmi les nombreuses mesures proposées par la Commission des 1000 premiers jours dans son rapport publié en septembre 2020. Intitulé « les 1000 premiers jours, là où tout commence », ce rapport d’expert a été lancé en septembre 2019 par le Président de la République et confié à Adrien Taquet, secrétaire d’État à l’enfance et aux familles auprès du ministre des Solidarités et de la Santé : il est présidé par le neuropsychiatre Boris Cyrulnik.

Les 1000 jours font référence, selon le rapport, à la période s’étendant du quatrième mois de la grossesse aux deux ans de l’enfant. Le rapport signale également l’acception comme s’étendant de la période préconceptionnelle aux 3 ans de l’enfant.

Ce choix indique une continuité de développement avant et après la naissance.

Le rapport indique d’ailleurs s’appuyer sur de nombreuses données scientifiques pour souligner l’importance de ces 1000 premiers jours pour le développement de l’enfant.

Les auteurs expliquent que « Le congé de paternité renforce la relation père-enfant. Un congé réservé au père de quelques semaines seulement entraîne déjà une plus grande participation du père aux soins et à l’éveil de son enfant. Une étude allemande montre que les pères qui bénéficient d’un congé de huit semaines renforcent davantage leur relation avec leur enfant à long terme, ce lien plus construit étant jugé très précieux par les pères.

Une autre étude récente a montré que l’implication du père dans l’éducation et les activités de leur petit enfant, ainsi que sa sensibilité pendant l’interaction au moment du jeu, sont déterminées par des facteurs tels que le nombre réduit d’heures passées au travail au profit de plus de disponibilité auprès de l’enfant. »

 

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Publication d’une enquête sur la prématurité en France

Publication d’une enquête sur la prématurité en France

enquête sur la prématurité
En France, la prématurité est la première cause de mortalité néo natale et est responsable de la moitié des handicaps d’origine périnatale. Elle touche chaque année environ 55 000 naissances, soit 7.5% des naissances.

La revue The British Medical Journal vient de publier l’enquête EPIPAGE-2 incluant au départ 5170 enfants nés prématurément entre avril et décembre 2011. Le suivi de ces enfants s’est donc déroulé sur plusieurs années et dans 25 régions. Les chercheurs de plusieurs équipes[1] pilotées par l’INSERM, se sont intéressés à leur devenir, à leur insertion scolaire, à leur recours à des prises en charge, ainsi qu’aux inquiétudes ressenties par leurs parents. L’objectif est de mieux comprendre les conséquences de la prématurité pour les enfants, plus précisément sur leur devenir neuro-moteur, sensoriel, cognitif, comportemental ainsi que pour leurs apprentissages.

Nés entre 24 et 26 semaines d’aménorrhée révolues, les enfants sont considérés comme extrêmes prématurés. Entre 27 et 31 semaines, comme grands prématurés. Entre 32 et 34 semaines, comme modérément prématurés.

Au cours de cette enquête, 3083 enfants ont été revus dans le cadre de consultations spécialisées dédiées à l’enquête à l’âge de 5 ans et demi, car cet âge « correspond à un moment clé du développement de l’enfant permettant notamment le diagnostic de difficultés d’apprentissage et l’étude des compétences cognitives qui avant cet âge sont beaucoup plus difficiles », souligne Pierre-Yves Ancel, responsable de l’équipe EPOPé.

Les résultats de l’enquête montrent qu’à l’âge de 5 ans et demi, 35% des enfants nés extrêmes prématurés, près de 45% des grands prématurés et 55% de ceux nés modérément prématurés auront une trajectoire développementale proche de la normale.

L’étude révèle que quel que soit le degré de prématurité à la naissance, plus d’un tiers des enfants présentaient des difficultés dites mineures. Elle révèle aussi que plus la prématurité est grande, plus les enfants présentent de difficultés du neuro-développement et plus la scolarité de l’enfant nécessite d’être adaptée. Alors que 93% des enfants modérément prématurés étaient scolarisés dans des classes ordinaires (sans soutien spécifique), cette part ne concernait plus que 73% des enfants nés extrêmes prématurés.

Plus de la moitié des enfants nés extrêmement prématurés bénéficiaient d’une prise en charge de soutien au développement (orthophonie, psychomotricité, ou encore soutien psychologique, etc.) ainsi qu’un tiers des enfants nés grands prématurés et un quart de ceux nés modérément prématurés. Néanmoins, 20 à 40% des enfants avec des difficultés sévères n’avait pas de soutien. « On ne peut accepter que des enfants et des familles qui ont besoin d’aide n’aient pas accès à ces aides alors qu’elles existent », a relevé le Pr Ancel lors d’une conférence en ligne.

La prématurité est une source d’inquiétudes réelles pour les parents, même quand le développement de l’enfant est considéré comme normal. Les troubles du comportement (troubles de l’attention, difficulté à maîtriser ses émotions…) sont la préoccupation la plus fréquemment signalée par les parents. L’enquête souligne ainsi l’importance de l’environnement dans lequel évolue l’enfant et insiste sur la nécessité de proposer aux familles un accompagnement coordonné, à la fois médical, éducatif et social.

La première partie de cette enquête, publiée en 2017, également via The British Medical Journal montraient que, depuis 20 ans, les enfants nés prématurément vivent mieux et ont moins de séquelles.

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[1] Enquête EPIPAGE-2, réalisée par les chercheurs de l’équipe Inserm-Université de Paris EPOPé – « Equipe de Recherche en Épidémiologie Obstétricale, Périnatale et Pédiatrique », du Centre de Recherche Epidémiologie et Statistiques (CRESS, Unité 1153) et impliquant des équipes de l’AP-HP ainsi que du CHU de Lille.

Trisomie 21 : la France au-dessus de la moyenne européenne pour le recours à l’avortement

Trisomie 21 : la France au-dessus de la moyenne européenne pour le recours à l’avortement

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Une étude situe la France au-dessus de la moyenne européenne pour le recours à l’avortement dans les cas de détection d’une Trisomie 21.

Une étude publiée fin 2020 dans le European Journal of Human Genetics, et relayée dans une tribune récente, s’est penchée sur la population de personnes atteintes de Trisomie 21 en Europe, et sur l’impact du diagnostic prénatal sur leurs naissances. Les auteurs notent que selon les pays, les études sont d’inégales précisions, disparates voire absentes. Ils ont donc utilisé des méthodes statistiques à partir de plusieurs facteurs : âge de la mère, mortalité infantile du pays et pyramide des âges, prévalence du syndrome à partir de données de l’ONU…, pour aboutir à des évaluations chiffrées pour l’Europe sur la période 2011-2015.

Les principaux résultats de l’étude concernent  la taille de la population (417,000 personnes vivantes atteintes par la trisomie 21 en Europe en 2015) et surtout l’impact du diagnostic prénatal sur la prévalence du syndrome à la naissance. Les auteurs estiment que sur la seule période 2011-2015, un fœtus sur deux atteint de ce syndrome n’aurait pas vu le jour, en raison d’une interruption médicale de grossesse.

Cette moyenne (54%) masque de grands écarts entre les pays. Les taux d’avortement sont estimés à 20% au Portugal, 50% en Allemagne, 68% en France et 83% en Espagne. Les auteurs notent la différence avec les États Unis où ce taux est à 33%, et où le taux de prévalence à la naissance (12.9 enfants sur 10000 naissances) a légèrement monté entre 1981 et 2011 alors qu’il n’a fait que baisser en Europe, suggérant l’application sur le vieux continent d’une politique plus systématique d’avortement lorsqu’une trisomie 21 est détectée.

Pour la France, le chiffre présenté de 68% ne se recoupe pas avec d’autres études. L’Agence de la biomédecine donne un taux de 77.3 % de recours à une interruption de grossesse pour les trisomie 21 diagnostiquées.

Pour expliquer les différences selon les pays, l’étude met en avant des facteurs comme la richesse et les choix de politique d’avortement. Mais ils soulignent aussi l’impact de la culture et de l’acceptation de la Trisomie 21 : les Pays Bas ont un taux de 20% alors que le Danemark atteint 42%.

Un facteur de préoccupation supplémentaire souligné par l’étude est l’utilisation plus importante des tests dits non invasifs (DPNI) dans la période récente et qui pourrait faire monter le taux d’avortement. Ils font référence à une publication de 2019 montrant l’impact négatif des tests sur le choix de de recourir à l’avortement

Cette étude souligne aussi que les mères acceptent mieux le diagnostic lorsqu’il est annoncé après la naissance. L’étude montre un progrès dans l’espérance de vie des personnes atteintes de Trisomie 21, en particulier en Europe de l’Ouest, avec un meilleur accès aux soins.

En France, des associations (Trisomie 21 France, Tombée du Nid…) des fondations (Jérôme Lejeune), des entreprises sociales (Cafés joyeux….) œuvrent au quotidien pour faire progresser la recherche médicale, prendre soin des personnes porteuses de handicap, leur donner toute leur place, favoriser leur inclusion par le travail et pour changer le regard de nos sociétés sur le handicap.

Europe : une proposition très contestable sur la “santé et les droits génésiques et sexuels”

Europe : une proposition très contestable sur la “santé et les droits génésiques et sexuels”

droits génésiques et sexuels

Les 10 et 11 mai 2021, la Commission des droits de la femme et de l’égalité des genres (FEMM) du Parlement européen a adopté une proposition de résolution « sur la situation concernant la santé et les droits génésiques et sexuels dans l’Union, dans le cadre de la santé des femmes », sous le rapport du député européen Predrag Fred Matic. La proposition, très orientée idéologiquement à ce stade, ne constitue pas le texte final qui doit être débattu en séance plénière en juin prochain.

L’expression « santé et droits sexuels et génésiques » est foncièrement ambiguë. Sans claire définition, elle est notamment utilisée dans ce contexte pour banaliser, au nom de la santé, la question délicate de l’avortement, pratique qui ne relève pas de la compétence de l’Union européenne.

De plus, le texte ne prend pas en compte les dimensions éthique, sociale et culturelle de l’avortement. Il s’attaque au droit à l’objection de conscience en prétendant que celui-ci permettrait « aux professionnels de santé de choisir de ne pas fournir les produits et services auxquels ils sont moralement opposés, y compris l’avortement ou la prescription, la vente et les conseils relatifs aux méthodes contraceptives ». Or, le droit à l’objection de conscience est garanti par l’article 10.2 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne. Il a également été clairement et explicitement affirmé concernant les actes d’avortement par la résolution 1763 (2010) de l’assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe.

Si ce type de document n’a pas de valeur contraignante, il exprime un point de vue. En l’occurrence dans ce cas, il outrepasse la compétence européenne. Or en matière de maternité et de prévention, d’autres orientations méritent d’être privilégiées, notamment pour assurer un soutien adapté à la maternité, prévenir l’infertilité, et lutter contre toutes les formes de gestation pour autrui (GPA) qui constituent une grave atteinte aux droits des femmes en Europe et dans le monde.