Dons d’organes : vers des chimères homme-porc ?

Dons d’organes : vers des chimères homme-porc ?

porc

Des chercheurs américains proposent de développer des organes humains dans des chimères animales pour permettre davantage de greffes.

Afin de pallier la pénurie de don d’organes, des scientifiques californiens ont développé une méthode pour créer des organes humains dans le corps d’un porc. L’animal chimérique ainsi créé ne serait alors qu’un réservoir d’organes, un incubateur. Pour parvenir à ce résultat, ils utilisent la technique CRISPR-Cas 9 qui permet, entre autres, de corriger des morceaux du génome.

Dans le cas présent, la partie de l’ADN permettant au pancréas de se former est retirée pour être remplacée par des cellules souches humaines. Le pancréas va ainsi se développer avec des cellules humaines. L’embryon est ensuite implanté dans la truie jusqu’à l’interruption de la gestation au 28ème jour. Pablo Ross, un biologiste de la reproduction, explique leur espoir “que l’embryon porcin se développe normalement tout en ayant un pancréas presque entièrement composé de cellules humaines et compatible avec un patient pour une transplantation.”

Cependant cette technique soulève plusieurs questionnements éthiques, tant vis à vis de l’homme que de l’animal. En effet, l’implantation de cellules souches humaines dans l’embryon porcin nécessite la destruction d’embryons humains. Il y a également un risque, mais qui reste minime, de transmission de virus animaux au receveur. Du point de vue médical, la principale difficulté concerne le risque de rejet immunitaire par le receveur de l’organe greffé.

Une des craintes majeures reste de voir se développer dans le cerveau de l’animal des cellules humaines qui changeraient son comportement. “Si vous aviez des cochons avec un cerveau partiellement humain, vous pourriez obtenir des animaux qui développeraient une conscience comme l’homme” s’inquiète Suart Newman.

Pour ces différentes raisons, l’Institut national de la santé américain (US National Institutes of Health) a établi un moratoire en septembre 2015 sur la recherche sur ces “chimères”, en attendant d’en savoir davantage sur les implications.

“L’une des préoccupations, que beaucoup de gens ont, est cet aspect sacré de l’homme que manifeste l’ADN”, explique Jason Robert , bioéthicien à l’Arizona State University . “En insérant cette partie d’ADN dans d’autres animaux et en leur donnant potentiellement une partie des capacités de l’homme, ce pourrait être une sorte de violation, voire même une manière de se prendre pour Dieu.”

« Mères porteuses insoumises » – Extrait du livre de Tugdual Derville

« Mères porteuses insoumises » – Extrait du livre de Tugdual Derville

 

letempsdelhomme

La Gestation pour Autrui occupe à nouveau l’actualité française et européenne.

A l’occasion de la sortie du livre Le temps de l’Homme de son délégué général, Tugdual Derville, Alliance VITA publie un court extrait intitulé « Mères porteuses insoumises »

« En dégradant la femme au statut de productrice d’enfants, comme si c’était une machine, la GPA préfigure les véritables machines à fabriquer des enfants. Ces « utérus artificiels », ceux qui voient dans la nécessité d’une porteuse humaine le dernier obstacle à leur toute-puissance les appellent de leurs vœux. Car la femme porteuse, même si elle a décidé, intellectuellement, de ne pas « investir » sa grossesse, est dotée d’un cœur de mère, toujours susceptible d’entrer en rébellion pour s’attacher profondément à celui qui prend corps en elle. Même un surcroît de gratification financière ne peut garantir sa soumission. Se passer d’une femme au profit d’un dispositif technique docile serait plus simple.

Si la porteuse peut sembler, pour les commanditaires, le maillon faible du dispositif, c’est à cause de son humanité. Quand ils attendent un produit fini de qualité, la gestatrice peut y faire obstacle, malgré la précision des dispositions qui lient les co-contractants. Les cas d’avortement exigés par les « futurs parents » sont les marques les plus significatives de la soumission exigée de la « porteuse » : « réduction embryonnaire », en cas de grossesses multiples, ou avortement « médical », en cas de suspicion de handicap. L’Américaine Melissa Cook s’est ainsi rebellée quand le commanditaire de sa grossesse, un homme de 47 ans, a réclamé qu’elle avorte de l’un des triplés qu’elle attendait, conçus in vitro avec son sperme et des ovocytes d’une donneuse de 20 ans. Le père invoquait une clause du contrat. Mais la mère porteuse n’a pas voulu avorter d’un des fœtus : « Ce sont des êtres humains, je me suis attachée à ces enfants », a déclaré la mère de famille. Melissa Cook récuse désormais le système des mères porteuses comme un « marché des bébés ». Nés le 22 février 2016, les bébés ont été arrachés à leur mère, comme prévu. Sa défense a argumenté en vain : « Le processus d’attachement, à la fois physiologique et psychologique, entre la mère enceinte et l’enfant qu’elle porte pendant les neuf mois de la grossesse est le même processus et la même expérience, que cette mère soit reliée génétiquement à l’enfant ou non. » L’avocat de la jeune femme a expliqué qu’à peine nés, les enfants lui ont été retirés, le personnel hospitalier lui ayant interdit de les voir : « Nous avons une mère qui les aime, qui s’est battue pour eux, qui a défendu leurs vies, qui est prête à prendre soin d’eux. Vous ne pouvez pas dire à une mère qui vient de donner naissance à des enfants que, quoi qu’il arrive à ces enfants, ce ne sont pas ses affaires. »

Si personne ne peut forcer une Américaine à subir un avortement sélectif, rien ne peut empêcher un commanditaire de se faire livrer les nouveau-nés, quitte à les séparer aussitôt en en offrant un ou plusieurs à l’adoption ! Les enfants sont à l’acheteur. L’imbroglio fait jaillir l’absurdité d’un éclatement de la maternité qui conduit des protagonistes à se retrouver devant la justice pour se disputer le sort d’enfants non encore nés. Marie-Anne Frison Roche, agrégée en droit privé, impliquée dans le Collectif pour le respect de la personne (CoRP) qui demande l’abolition de la maternité de substitution, souligne que c’est la légalisation de la GPA qui induit sa judiciarisation : « Certains affirment que si le droit français acceptait d’abandonner le principe d’interdiction de la GPA, principe posé par l’article 16-7 du Code civil, les procès s’arrêteraient. Quand on suit l’activité, on observe au contraire que les procès se multiplient, et qu’ils sont particulièrement sordides. »

Pour en savoir plus sur “Le Temps de l’Homme” et commander le livre

Portugal : veto sur la GPA

Portugal : veto sur la GPA

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Le président portugais a mis son veto le 7 juin 2016 sur une loi autorisant la gestation pour autrui (GPA).

La loi qui modifie les conditions de recours à la procréation artificielle a été votée par une courte majorité le 13 mai dernier. Elle étend la procréation médicalement assistée (PMA) aux célibataires ou aux couples de même sexe, hors indication médicale.  Elle autorise également le recours à des mères porteuses pour des couples confrontés à une infertilité féminine liés à des dysfonctionnements de l’utérus.

Le président, Marcelo Rebelo de Sousa, a promulgué la loi le mardi 7 juin mais a mis son veto sur la pratique de la gestation pour autrui, invoquant les recommandations Conseil national d’éthique et des sciences de la vie.

Pour Caroline Roux, directrice de VITA International : « Le vote du Parlement portugais allait à l’encontre de l’élan international actuel de réprobation de la pratique de la gestation pour autrui. En décembre dernier, le Parlement européen a condamné à une forte majorité toute forme de GPA. Le veto du président portugais est un acte politique d’une grande portée. Plusieurs pays sont en train de revoir leur législation pour restreindre très fortement la pratique de la GPA, comme l’Inde, le Népal, la Thaïlande ou le Mexique. Il n’y a pas de GPA qui pourrait être « éthique », même en avançant qu’il n’y aurait pas de contrepartie commerciale. C’est le principe même de recourir à des mères porteuses qui est contraire aux droits des femmes et des enfants. Il est cependant inquiétant de constater que la PMA hors indication médicale puisse être légalisée, privant délibérément des enfants de père. Il s’agit d’une grave injustice pour les enfants ainsi conçus ».

Alliance VITA est partie prenante de l’appel international No Maternity Traffic pour l’interdiction universelle de la gestation pour autrui. Cette pétition européenne a été reconnue valide le 26 mai dernier par le Conseil de l’Europe, et a donc été transmise à la Commission des questions sociales en charge de la réflexion sur la GPA pour que la voix des citoyens européens soit prise en compte.

La Suisse autorise le DPI de manière particulièrement large

La Suisse autorise le DPI de manière particulièrement large

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Les Suisses ont voté le 5 juin 2016 en faveur de la révision de la loi sur la procréation médicalement assistée (62,4% des votants), pour autoriser le diagnostic pré-implantatoire (DPI) malgré les réticences exprimées par des associations de personnes handicapées.

Le diagnostic pré-implantatoire consiste à prélever une ou plusieurs cellules d’un embryon conçu in vitro pour rechercher dans l’ADN la présence d’une maladie génétique, l’objectif étant de trier les embryons pour ne réimplanter dans l’utérus de la mère que ceux qui sont non porteurs des maladies recherchées. 

Le projet de loi avait été introduit dès 2013 pour autoriser le DPI en cas de maladie héréditaire. La loi amendée et adoptée par le Parlement le 12 décembre 2014 dépassait le cadre initial et a été très controversée, autorisant le dépistage des maladies chromosomiques lors de DPI ou de toute démarche de fécondation in vitro. Un premier vote avait eu lieu le 14 juin 2015 pour modifier la Constitution qui interdisait de produire plus de trois embryons à la fois, afin de permettre de développer jusqu’à 12 embryons par cycle de FIV et de les congeler.

Puis la loi du 12 décembre 2014 a été contesté par un réferendum rassemblant 58 634 signatures déposées à la Chancellerie fédérale,  dont 58 112 ont été validées fin décembre 2015.  En conséquence, le Conseil fédéral a décidé le 27 janvier dernier de soumettre cette loi  à la votation populaire, laquelle a donc eu lieu le 5 juin 2016.

Des questions éthiques d’une particulière gravité ont été soulevées vis-à-vis de cette loi qui conduit la Suisse à avoir une législation particulièrement discriminante pour les personnes handicapées, en englobant de manière floue la notion de maladie grave ; selon le quotidien suisse 24 heures qui rapporte les explications du Conseil fédéral, « il pourrait s’agir de fortes douleurs résistantes aux traitements, de sévères limitations de la motricité, de maladies psychologiques graves ou d’une dépendance permanente à des appareils importants comme ceux à oxygène ».

Dans un communiqué, Procap, le principal groupement d’associations de personnes handicapées, regrette l’issue du scrutin et déclare attendre maintenant «  de la part des partis et des autorités qu’ils s’engagent fermement, par des actions concrètes, en faveur de la solidarité avec les personnes avec handicap. » Les 19 associations ont conduit une campagne qui s’opposait à la loi sous la devise « La diversité au lieu de la sélection ».

Les Pays-Bas autorisent la création d’embryons humains pour la recherche

Les Pays-Bas autorisent la création d’embryons humains pour la recherche

embryonLe Ministère de la Santé des Pays-Bas a indiqué, ce 27 mai 2016, qu’il allait autoriser la création d’embryons humains pour des « recherches scientifiques spécifiques », précisant que ces recherches seraient menées sous certaines conditions, pour porter notamment sur l’infertilité, la reproduction médicalement assistée ou encore les maladies héréditaires.

Dans un communiqué, la ministre néerlandaise de la santé, Edith Schippers, a précisé vouloir changer la loi pour « offrir la perspective d’avoir un enfant ou un enfant en bonne santé ».

Actuellement, la loi n’autorise la recherche que sur les embryons issus de fécondation in-vitro (FIV), après accord des donneurs, quand ils ne souhaitent pas les implanter. Se sentant limités, les chercheurs ont demandé à ce que la création d’embryons pour la recherche soit autorisée.

Cette décision fait des Pays-Bas l’un des premiers pays au monde à autoriser la fabrication d’embryons in-vitro pour la recherche. Cette autorisation laisse aussi entrevoir la possibilité de pratiquer sur ces embryons des techniques de modifications génétiques, comme CRISPR-Cas9.

Pour Tugdual Derville, délégué général d’Alliance VITA et porteur de la pétition Stop Bébé OGM,

« Une telle décision est inquiétante et révélatrice de la logique relativiste qui prévaut aux Pays-Bas. Ce glissement dans la loi néerlandaise instrumentaliserait à la fois l’embryon, réduit à un matériau de recherche, mais aussi les donneurs de gamètes. De plus, cette promesse attrayante de l’enfant en bonne santé, dissimule une forme d’eugénisme… Est-ce un pas de plus vers la perspective d’enfants génétiquement modifiés ? Il s’agit en tous cas d’une grave alerte bioéthique, qui rend d’autant plus légitime notre demande “Stop Bébé OGM” d’un moratoire international sur l’utilisation du CRISPR-Cas9 sur les gamètes et l’embryon. »

Pour aller plus loin