par NexDev | mars 28, 2019 | Démographie, Grand âge
Le rapport « Grand âge et autonomie » a été remis, ce jeudi 28 mars, à la ministre de la Santé, Agnès Buzyn, par Dominique Libault, président du Haut Conseil du financement de la protection sociale, à la suite de cinq mois de concertation avec différents acteurs sociaux.
Le constat est le suivant : la France compte aujourd’hui 1,5 million de personnes âgées de plus de 85 ans. D’ici 2050, leur nombre aura triplé pour atteindre 4,8 millions et le nombre de personnes dépendantes pourrait presque doubler. « Nous n’avons pas le temps d’attendre. C’est un luxe qui ne nous est pas donné » s’inquiète M. Libault dans la préface de son rapport. « Tout le rapport vise à passer d’une gestion de la dépendance au soutien à l’autonomie. (…) Les personnes âgées doivent continuer à être incluses dans l’ensemble de la société, elles ne doivent pas être isolées, soit chez elles, soit entre elles dans des établissements, il faut concevoir un autre regard, une autre prise en charge des personnes âgées dans notre société ».
Pour prendre en charge quelque 40.000 personnes dépendantes supplémentaires par an à partir de 2030, le rapporteur propose 175 mesures, dont une dizaine sont des « priorités » pour répondre à trois objectifs : favoriser le maintien à domicile (solution plébiscitée par les Français), améliorer la prise en charge en établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) et remédier à la pénurie de candidats aux « métiers du grand âge ».
Afin de favoriser le maintien à domicile, « nous proposons pour les aidants qui sont encore salariés, qui sont encore au travail d’indemniser le proche aidant, son congé », pour un peu plus de 50 euros par jour, sur le modèle de l’allocation journalière de présence parentale.
La problématique du personnel soignant en sous effectif dans les EHPAD a fait couler beaucoup d’encre ces deux dernières années. Le rapporteur préconise d’augmenter de « 25 % le taux d’encadrement d’une personne âgée en Ehpad d’ici à 2024 par rapport à 2015 ».
Face à la pénurie de personnels à domicile et en établissement, va être lancé un « plan national pour les métiers du grand âge » pour les rendre plus attractifs.
Les acteurs de la concertation regrettent que les tentatives de solidarités de proximité soient trop faibles et pas assez appuyées.
Une partie de ces mesures ne nécessiteront pas une réforme législative et pourraient être annoncées avant l’été. Mme Buzyn a annoncé qu’elle déposerait un projet de loi à l’automne.
La question du vieillissement est un enjeu essentiel, non seulement pour la France, mais dans toute l’Europe. C’est un défi majeur qu’Alliance VITA souhaite souligner par une campagne à destination des candidats aux Européennes pour bâtir une Europe solidaire, qui prenne en compte le droit des plus fragiles.
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Pour aller plus loin : discours de Mme Buzyn, lors de la remise du rapport Libault
par NexDev | mars 28, 2019 | Maternité et paternité
Un petit bébé japonais né très grand prématuré, à 22 semaines de grossesse (24 semaines d’aménorrhée) et ne pesant que 268 grammes, vient de rentrer chez lui en bonne santé, après 5 mois d’hospitalisation. Un nouveau record a été franchi dans le domaine de la néonatalogie.
Depuis trente ans, la médecine néonatale a réalisé de très grands progrès dans la prise en charge des enfants nés prématurément. Edward Bell, médecin en néonatologie et professeur de pédiatrie à l’Université de l’Iowa (États-Unis) le constate : « Je fais ce métier depuis 40 ans, et j’ai vu le seuil de viabilité reculer d’une semaine tous les 10 ans dans mon hôpital ».
Une naissance prématurée a lieu avant le terme de la grossesse qui correspond à 41 semaines d’aménorrhée (à compter de la date des dernières règles). Un enfant est considéré comme prématuré s’il naît avant 37 semaines d’aménorrhée (SA), soit à 8 mois et demi de grossesse. On distingue trois niveaux de prématurité :
- la prématurité moyenne qui correspond à une naissance intervenant entre la 32e et la 36e semaine d’aménorrhée révolue (7 mois à 8 mois de grossesse),
- la grande prématurité correspondant à une naissance intervenant entre la 28e et la 32e SA (6 mois à 7 mois de grossesse),
- et la très grande prématurité pour les naissances intervenant avant 28 semaines, soit en deçà de 6 mois de grossesse.
Parmi les traitements permettant les progrès de la médecine néonatale figurent l’invention des surfactants artificiels (facilitant la respiration des prématurés aux poumons immatures), l’injection de stéroïdes à la maman avant l’accouchement, lorsque cela est possible (ce qui aide les poumons du bébé à maturer plus rapidement) ainsi que le perfectionnement des appareils respiratoires. D’immenses progrès ont été réalisés grâce au soin accordé à la relation de l’enfant avec ses parents, en particulier la relation mère-enfant. La présence des parents auprès des enfants est vivement encouragée et facilitée, ce qui améliore grandement le développement des bébés et réduit leur inconfort, en particulier affectif. Le personnel médical encourage le « peau à peau » et les conditions de mise en place de l’allaitement.
La survie et le développement sans séquelles du nouveau-né dépendent de plusieurs facteurs, en particulier l’âge gestationnel, le poids, les conditions de naissance, le sexe et les raisons de la prématurité. Les risques sont liés à l’immaturité globale, en particulier des poumons, du système digestif, du cerveau et du cœur. Le nouveau- né doit pouvoir continuer son développement dans des conditions bien plus difficiles qu’in utero.
Jean-Christophe Rozé, professeur de pédiatrie à l’Université de Nantes explique qu’ « en France, la limite inférieure de prise en charge se situe à 24 semaines d’aménorrhée du fait d’un certain nombre de complications dont on pense qu’elles ne seraient pas acceptées, comme les troubles de cécité ». Pour le vice-président de la société française de néonatalogie « La France est plutôt considérée comme une société handicapophobe, c’est-à-dire qu’elle fait peu de place au handicap. Or, dans la prise en charge des extrêmes prématurés la question n’est pas de faire survivre un poumon, un cœur, deux jambes et deux bras mais bien d’assurer le meilleur développement possible à l’enfant. En d’autres termes, il convient de mesurer les conséquences ultérieures associées à la prématurité ». Mais le professeur de pédiatrie précise qu’ “on a également récemment fait des progrès pour remédier à cette peur du handicap et de difficulté développementale.”
On est train d’évoluer. Notamment, une grande étude, nommée EPIPAGE, a été menée sur les enfants prématurés nés en 2011. Ce professeur explique que « Les résultats initiaux à la sortie de la maternité mettaient en évidence qu’en France, nous étions un peu en retard par rapport à d‘autres pays c’est-à-dire dans tous les centres on ne prenait pas en charge ou peu entre 24 et 25 semaines d’aménorrhée. Pour résumer, comme on n’avait pas de bons résultats, on ne proposait pas aux familles la prise en charge comme on ne prenait pas en charge activement on ne préparait pas bien le fœtus à la naissance, donc on n’avait pas de bons résultats et on était ainsi dans un raisonnement circulaire. On s’est posé beaucoup de questions après cette étude, qui ont conduit à prendre en charge de manière plus active ces enfants à 24 semaines un peu partout en France. Et depuis, progressivement, on abaisse le seuil de prise en charge ».
Deux études très récentes attestent aussi de ces immenses progrès. D’abord, celle du Journal of the American Medical Association détaillant les chances de survie des grands-prématurés en Suède. Le taux de survie des plus petits, naissant à 22 semaines, est passé de 3,6 à 20 %. Les nouveau-nés à 26 semaines survivent, quant à eux, huit fois sur dix.
La deuxième concerne les États-Unis et s’est intéressée à la survie des bébés nés entre 22 et 26 semaines à moins de 400 grammes dans 21 hôpitaux entre 2008 et 2016. 13 % des bébés de cette catégorie ont survécu, le plus petit d’entre eux pesait seulement 330 grammes.
La prise en charge de la prématurité est un problème de santé publique très important.
En France, selon l’INSERM, entre 50 000 et 60 000 enfants naissent prématurément chaque année. Parmi eux, 85% sont des prématurés moyens (32-37 SA), 10% sont des grands prématurés (28-32 SA) et 5% sont des très grands prématurés, nés à moins de 28 SA.
Comme dans de nombreux pays développés, le taux de naissances prématurées augmente régulièrement en France, il est passé de 5,9% des naissances en 1995 à 7,4% en 2010.
Pour améliorer encore la prise en charge de ces tout-petits, le professeur Jean-Christophe Rozé rappelle qu’ « Il y a un élément majeur qu’on a du mal à faire entendre aux autorités, c’est de parvenir à un ratio soignant-soigné extrêmement élevé, c’est-à-dire quasiment une infirmière pour un patient. Actuellement dans la loi c’est une infirmière pour deux patients. Ensuite, tout repose sur un meilleur suivi de ces enfants né prématurés sur le long terme ».
Le professeur Picaud, chef de service de néonatologie et de réanimation néonatale à l’Hôpital de la Croix-Rousse à Lyon, explique que les taux de survie des très grands prématurés varient donc selon les pays. « En 2005, les chiffres estimaient que la survie des très grands prématurés nés à 24 semaines d’aménorrhée au Japon était de 77%. Elles n’est que de 31% en France, 55% aux États-Unis et 67% en Suède, qui a le meilleur résultat d’Europe. Le Japon est un pays très riche qui peut bénéficier d’un soin au “un pour un” : une infirmière ou un médecin pour un bébé, ce qui autorise de très bons résultats. Les compétences du Japon dans ce domaine sont réputées dans le monde entier. En France, nous n’avons en général qu’une infirmière pour deux bébés en réanimation, puis une pour trois en soins intensifs et, enfin, une pour six en pédiatrie néonatale ».
par NexDev | mars 15, 2019 | Recherche sur l’embryon
Un nouveau moratoire sur les Bébés OGM, stop ou encore ?
Dans une communication via la revue Nature du 13 mars 2019, d’imminents scientifiques – dont l’une des co-découvreuses de CRISPR-Cas9, la française Emmanuelle Charpentier – appellent à un « moratoire mondial » sur l’utilisation des techniques de modifications génétiques sur les embryons et les gamètes humains, visant à faire naître des bébés génétiquement modifiés.
Immédiatement après son titre accrocheur, cette tribune précise que ce moratoire ne s’adresse pas à la recherche scientifique : toute expérimentation devrait rester possible, à partir du moment où les embryons ne seraient pas implantés dans des utérus, en vue de faire naître des bébés génétiquement modifiés.
Bien que les auteurs s’accordent à reconnaître que la modification de l’ADN n’est ni sûre, ni efficace et que les risques d’induire des mutations non intentionnelles sont élevés, ils ne demandent aucunement une interdiction. Ils proposent que chaque pays reste libre de ses choix et suggèrent simplement de n’appliquer cette technique sur des embryons ou des gamètes pour faire naître des bébés OGM que si « certaines conditions sont remplies »…
Les auteurs estiment qu’il convient de se donner encore du temps (ils évoquent une période de 5 ans), pour continuer à étudier les implications techniques, scientifiques, médicales, sociétales, morales, afin de mettre au point un encadrement international. Chaque pays pouvant ensuite librement décider de maintenir un statu quo, d’interdire ou au contraire de réfléchir à autoriser ces nouvelles pratiques intervenant dans la procréation humaine.
Les signataires proposent que les pays qui souhaiteraient légaliser cette nouvelle pratique procèdent au préalable à une consultation pluridisciplinaire et publique, pour vérifier si la demande est justifiée, pour informer ses concitoyens tout en vérifiant qu’il existe un consensus favorable dans la société.
Pour Blanche STREB, directrice de la formation d’Alliance VITA et auteur de Bébés sur mesure – Le monde des meilleurs :
«
Cet appel porte bien son nom… Moratoire vient du latin moratorius qui veut dire “retarder”. Clairement, ce que proposent ces scientifiques de premier plan se résume en : « reculer pour mieux sauter » ! Ce type de déclaration en demi-teinte n’est pas de nature à nous rassurer. Pourtant, la secousse liée à l’annonce des premiers bébés OGM nés en Chine devrait susciter des prises de positions politiques et scientifiques beaucoup plus fermes. Il convient de prémunir l’humanité contre ces tentations de bricoler ainsi l’être humain à son commencement, en dépit de tout principe de précaution pour ces enfants cobayes ».
Les auteurs suggèrent qu’un « organe de coordination » mondial soit mis en place, chargé notamment de fournir aux pays qui le souhaitent les informations requises pour entrer dans une démarche de consultation et d’autorisation. Cet organe, qui pourrait dépendre, selon eux, de l’Organisation mondiale de la santé, devrait aussi publier des rapports régulièrement. Les signataires expliquent qu’il serait préférable que deux sous-groupes distincts soient créés dans cet organe.
L’un composé de spécialistes biomédicaux pour les considérations techniques, scientifiques et médicales, et l’autre composé de spécialistes des questions de société, d’éthique et de morale.
L’OMS a par ailleurs annoncé récemment avoir créé un Comité consultatif d’experts pour l’élaboration de normes mondiales pour la gouvernance et la surveillance de la modification du génome humain. Il doit se réunir justement les 18 et 19 mars à Genève pour convenir du plan de travail pour les 12 à 18 prochains mois.
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Pour aller plus loin :
Retrouvez l’action “Stop Bébés OGM” qu’Alliance VITA a lancée en 2016.
CRISPR-Cas9 : La modification du génome humain en question
Bébés sur mesure – Le monde des meilleurs. Blanche STREB (Artège, 2018)
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par NexDev | mars 13, 2019 | Communiqués de presse
Alliance VITA dénonce la tentative de suppression de la clause de conscience des médecins et des professionnels de santé au détour d’amendements à l’article 17 du projet de loi santé, examinés en commission des affaires sociales aujourd’hui.
Alors que le projet de loi vise à réformer le système de santé, quelques députés LREM et France insoumise s’en prennent, contre l’avis du gouvernement, au droit à la liberté de conscience des professionnels de santé concernant la pratique de l’avortement, clairement inscrit dans la loi. L’article Article L2212-8 du code de la santé publique dispose que « un médecin n’est jamais tenu de pratiquer une interruption volontaire de grossesse mais il doit informer, sans délai, l’intéressée de son refus et lui communiquer immédiatement le nom de praticiens susceptibles de réaliser cette intervention (…). Aucune sage-femme, aucun infirmier ou infirmière, aucun auxiliaire médical, quel qu’il soit, n’est tenu de concourir à une interruption de grossesse. »
Pour Tugdual Derville, Délégué général d'Alliance VITA :
« Si la loi de 1975 a assorti la pratique de l’avortement d’une clause de conscience explicite pour les professionnels de santé, c’est en raison de la nature même d’un acte qui met fin à une vie humaine. On ne peut forcer un professionnel à agir en contradiction formelle avec sa conscience. La manœuvre idéologique de certains députés laisse aujourd’hui entendre que les professionnels de santé ne sont que des prestataires de service. Or, la clause de conscience légitimement reconnue dans le cas de l’IVG, par respect pour les convictions personnelles des soignants, est indispensable à la protection de leur liberté de conscience. Cette liberté démocratique fondamentale est bafouée dès lors qu’on se trouve forcé de pratiquer des actes gravement contraires à sa conscience. Cette attaque contre la clause de conscience risque d’insécuriser davantage de nombreux soignants, au moment où l’on affirme travailler à la restructuration du système de santé. Elle peut aussi entraîner de graves discriminations entre soignants dans la mesure où certains seront contraints à abandonner le métier qu’ils ont choisi. »
La France détient un fort taux d’IVG avec plus de 210 000 avortements par an. Pour Alliance VITA, c’est l’absence d’une réelle politique de prévention de l’avortement qui devrait alarmer les responsables politiques, plutôt que la stigmatisation des professionnels de santé qui agissent selon leur conscience. Alors que notre pays traverse une crise sociale grave, nous demandons solennellement au gouvernement de prendre ses responsabilités et de rejeter fermement cette disposition liberticide.
Mise à jour du 15 mars 2019 :
Les amendements de suppression de la clause de conscience des professionnels de santé relatifs à l’avortement ont été rejetés par la Commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale.
par NexDev | mars 8, 2019 | Droits de l'enfant
Une mission d’information sur l’aide sociale à l’enfance responsable du suivi des enfants placés a été créée à l’Assemblée nationale en pleine réflexion du gouvernement sur la protection de l’enfance.
Un documentaire polémique diffusé sur France 3 avait motivé cette décision : il dénonçait des dysfonctionnements dans le circuit de protection de l’enfance (violences dans les foyers, jeunes ballottés de foyer en familles d’accueil, carence de formation chez les éducateurs, etc.). Perrine Goulet, Député LREM, elle-même enfant placée, avait dès janvier entraîné plusieurs autres députés pour créer une commission d’enquête sur le fonctionnement de l’aide sociale à l’enfance.
En France, 341 000 mineurs sont concernés par une mesure de protection de l’enfance (fin 2017) et plus de la moitié d’entre eux sont placés dans des institutions spécialisées ou dans des familles d’accueil.
23 députés participent à cette mission d’information. Parmi les sujets qui y seront abordés figurera la question de la répartition des compétences entre l’État et les départements, celle de la formation des personnels et aussi celle de la mise en œuvre de mesures éducatives. Cette mission, qui sera applicable jusqu’au bout de la législature, impliquera des déplacements dans toute la France et à l’étranger.
En parallèle, un plan a été initié fin janvier par le gouvernement pour la protection de l’enfance avec des mesures qui devront être confirmées cet été. La prise en charge par l’aide sociale à l’enfance, la formation des professionnels et leurs moyens de recrutement sont également des sujets importants pour une “exécution plus rapide des mesures judiciaires de placement“, selon Adrien Taquet, secrétaire d’État à la protection de l’enfance.
L’autre enjeu important est d’éviter un abandon de l’État lorsque la majorité est dépassée et d’instaurer un dispositif pour accompagner ces jeunes, qui finissent pour une partie d’entre eux sans abri après leurs 18 ans. Selon une enquête de l’INSEE publiée en 2016, 23% des adultes privés de logement sont des anciens enfants placés.