Les étapes de la révision des lois de bioéthique

Les étapes de la révision des lois de bioéthique

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On peut distinguer 3 grandes phases, qui se recoupent partiellement au niveau du calendrier. Les 2 premières correspondent aux « Etats généraux » prévus par la loi du 7 juillet 2011.
1) Le temps des débats citoyens
2) Le temps des rapports des organismes nationaux
3) Le temps de l’élaboration de la loi

I. Le temps des débats citoyens : janvier à avril-mai 2018

C’est une phase de consultation de la population : citoyens, associations, sociétés savantes, organismes divers locaux, etc.

A) Site internet national

Il doit être lancé début 2018, pour permettre à tout citoyen d’exprimer un avis et des suggestions.

B) Consultations organisées par les ERER (Espaces de Réflexion Ethique Régionaux)

Elles sont organisées au niveau des 13 grandes régions françaises, sous la coordination du CCNE (Comité Consultatif National d’Ethique).
Elles prennent en général la forme :
– de conférences-débats sur un ou deux thèmes choisis par les ERER, dont au moins une conférence à un public jeune/étudiant. La presse locale sera associée à ces événements.
– de questionnaires en ligne que tout citoyen peut remplir.

C) Contributions d’organismes spécialisés

– Comités d’éthique des grands organismes de recherche (CNRS, INSERM…),
– Académies (des sciences, de médecine…) et sociétés savantes spécialisées,
– Conférence nationale de santé (instance de réflexion sur les droits des usagers) et Conférences régionales de Santé et de l’Autonomie (CRSA),
– Etc…
Chaque ERER ou organisme spécialisé remettra le résultat de ses consultations et travaux au CCNE.
Il est également prévu un (ou plusieurs ?) panel de citoyens tirés au sort, mais son organisation et son rôle ne sont pas déterminés à ce jour.

II. Le temps des rapports des organismes nationaux : 2ème trimestre 2018

A) Les organismes spécialisés

Aux contributions scientifiques, éthiques et citoyennes s’ajouteront des rapports d’évaluation de la loi bioéthique de 2011 élaborés par :

  • L’OPESCT (Office Parlementaire des Choix Scientifiques et Technologiques),
  • L’ABM (Agence de la Biomédecine),
  • Le Conseil d’Etat (chargé d’une étude sur les enjeux éthiques et juridiques, demandée par le Gouvernement). Celui-ci procèdera également à des consultations diverses.

S’ajouteront à cet ensemble de rapports des éléments issus des comparaisons internationales et des réflexions menées par les instances éthiques européennes et internationales (Conseil de l’Europe, Groupe européen d’éthique de l’Union européenne, etc).

B) Le CCNE

Le CCNE lui-même conduira également des auditions pour recueillir l’avis des parties prenantes intéressées, sociétés savantes et associations notamment.
Puis le CCNE rédigera un rapport de synthèse à partir de l’ensemble de ces contributions, qui sera transmis à l’OPECST (Office Parlementaire des Choix Scientifiques et Technologiques, qui regroupe des membres de l’Assemblée nationale et du Sénat), vraisemblablement vers la fin du printemps 2018.
Il est prévu de clôturer ces Etats généraux par un évènement national le 7 juillet 2018, date anniversaire de la loi du 7 juillet 2011.

III. Le temps de l’élaboration de la loi : 2ème semestre 2018 et 1er semestre 2019

A) Le projet de loi du Gouvernement

Les travaux d’élaboration du projet de loi, qui nécessitent une coordination interministérielle, débuteront parallèlement aux Etats généraux.
Ils s’appuieront, au fur et à mesure, sur l’ensemble des contributions locales et nationales mises à disposition, afin de préparer au mieux l’intégration au projet de loi des apports des Etats généraux. L’objectif est la finalisation d’un projet de loi à l’été 2018 pour un dépôt au Parlement à l’automne (Source : Circulaire ministère de la santé du 29 novembre 2017).

B) La discussion parlementaire et le vote de la loi

En préparation des travaux parlementaires, vraisemblablement après le dépôt du projet de loi, l’OPECST procèdera à l’évaluation du rapport de synthèse du CCNE ” en faisant ressortir les éléments scientifiques indispensables à la bonne compréhension des enjeux de la réforme envisagée ” (article L1412-1-1 du Code de la santé publique, issu de la loi bioéthique de 2011).
La procédure parlementaire nécessite en principe plusieurs lectures dans chacune des deux assemblées. L’adoption de la loi devrait donc intervenir dans le courant du 1er semestre 2019, selon le calendrier prévisionnel établi par le gouvernement.

Débat sur la PMA et la GPA : Tugdual Derville, invité de Sud Radio

Débat sur la PMA et la GPA : Tugdual Derville, invité de Sud Radio

Tugdual Derville était l’invité de Philippe David sur Sud Radio, le 23 janvier 2018, face à Martine Segalen, ethnologue et sociologue, et Pascal Neveu, psychanalyste, dans l’émission « Prenez la parole », pour débattre de la PMA et la GPA, alors que les Etats généraux de la bioéthique viennent de s’ouvrir.

Extraits de l’intervention de Tugdual Derville :

[En réponse au sondage paru dans La Croix le 3 janvier 2018, sur “Les Français et la bioéthique”]Les Français sont généreux, leur état d’esprit compassionnel ; lorsqu’on demande s’ils sont favorables à un droit, ils répondent oui ; lorsqu’on demande aux mêmes Français si un enfant né par PMA a le droit d’avoir un père et une mère (sondage Opinionway de septembre 2017), ils répondent oui à 72%. Ils sont perdus, car ils ne sont pas allés sur le terrain de ces sujets.

[La PMA] est une revendication extrêmement profonde, liée au désir d’enfant ; les désirs se font tellement forts que la conscience est comme anesthésiée. Nous disons pour les femmes et pour les enfants que la société s’honore d’avoir des lois qui protègent les faibles des forts.

Alliance Vita vient de lancer une pétition auprès du président de la République, pour demander que l’enfant soit protégé du grand marché mondialisé ou étatisé de la procréation. La France doit continuer à résister à la marchandisation du corps ; je ne vends pas mon sang, mon rein, même les gamètes, contrairement à ce qui peut se passer à l’étranger (comme on le voit avec la montée de la vente d’ovocytes en Espagne, avec la croissance de la misère, alors que c’est un prélèvement chirurgical lourd, voire dangereux pour les femmes).

Quand une femme qui porte un enfant pendant neuf mois, avec toutes les interactions si importantes [in utero] qu’on connaît maintenant, va devoir ne pas investir sa grossesse, et se séparer [de son bébé] ; que va-t-elle dire aux enfants qu’elle a déjà ?  Que celui-là, on va le donner ? On ne donne pas un enfant, un enfant n’est pas une chose, c’est une personne, il s’accueille inconditionnellement. La GPA ne peut pas être altruiste, elle est forcée par des conditionnements.

La société vient aider les familles en difficulté, les familles monoparentales, les enfants orphelins : il faut reconnaître leur souffrance et les accompagner. Mais c’est autre chose de créer de toute pièce la souffrance de cette séparation, cette rupture d’avec la moitié du patrimoine biologique, avec en plus des imbroglios juridiques très compliqués. On aboutit à un système d’éclatement de la procréation, entre donneurs, géniteurs, parents éducatifs… avec une multiplicité de parents.

Sur la PMA, j’ai ressorti cette affiche publiée par Act Up : “Je veux du sperme, pas d’un mec”. Je ne me sens pas, en tant qu’homme, respecté dans ce genre d’affiche ; on ne peut pas réduire un homme, une paternité, au sperme qu’on balancerait comme ça à droite et à gauche. (…) La revendication de la PMA pour les femmes s’exprime comme ça aujourd’hui ; au lieu d’accueillir la paternité, alors que la société souffre énormément de la rupture avec les pères, on va créer des enfants délibérément coupés de pères.

Il y a des interdits qui ne souffrent pas d’exception ; sinon ça ruine la règle même.

Le désir d’enfant, de transmission, de prolongement de toute sa vie, est un des désirs les plus beaux, les plus forts de l’humanité. Il faut respecter les désirs, les entendre. Pour autant, la loi est là pour réguler les désirs des plus forts pour protéger les faibles. C’est là que la question se pose. Est-ce qu’il est légitime, pour répondre à un désir, qu’un enfant soit privé d’un père ou d’une mère ?  À nos yeux non, car la parité dans l’engendrement est un principe d’écologie humaine. Nous sommes tous issus d’un père et d’une mère, sur le plan génétique ; c’est un des fondamentaux de notre identité d’hommes et de femmes.

Si nous décidons que nous nous affranchissons de cette règle, et cela va bien au-delà des demandes des personnes homosexuelles, si on dit qu’on peut avoir un bébé en demandant du sperme, comment l’Etat va-t-il organiser les choses ? On va faire des banques de sperme ? On va demander une “masturbation citoyenne” aux citoyens de sexe mâle, pour qu’ils puissent donner leur sperme aux femmes? Résultat : marché étatisé, on tombe dans du Orwell. L’état va prendre la main sur des stocks de gamètes, et au lieu de faire des bébés sous la couette, comme ils en ont le plus besoin, on va organiser un marché étatisé de la procréation ! Il faut au moins qu’on respecte la parité homme-femme dans l’engendrement, qui est vraiment la ligne rouge à ne pas franchir sous peine de basculer dans ce grand marché, c’est très “casse-gueule” pour l’humanité.

La France a des valeurs particulières, c’est le pays des Droits de l’Homme ; elle reconnaît la dignité de la personne. Elle sait lutter contre la prostitution. C’est ce qu’on demande au président Macron : d’affirmer que l’enfant est au cœur de sa politique. Aux Etats-Unis, il y a un marché d’occasion de l’enfant adopté ; si les enfants adoptés ne plaisent pas aux parents, ils peuvent les “refiler” sur internet… C’est quand même incroyable ! En France, c’est différent.

Nous considérons que cette rupture programmée [de la GPA] est en elle-même une injustice, quelles que soient les conditions et le supposé encadrement. L’enfant a besoin d’avoir une unité de la maternité, pas d’une maternité éclatée entre plusieurs femmes. C’est une atteinte grave à l’enfant que de le séparer de sa mère à la naissance. Il a envie de goûter le sein de sa mère ; il a besoin de l’odeur de sa mère : quid de l’allaitement, du peau à peau (parfois pratiqué avec les commanditaires) ? La maternité est un continuum, l’enfant naît dans un écosystème avec des interactions très fortes. Cette séparation est d’une violence inouïe. C’est une grande injustice pour l’enfant.

Attention, l’amour peut être un preneur d’otage ; on peut aimer beaucoup un enfant, s’en occuper très bien, mais si l’enfant n’a pas le droit de contester l’injustice qui lui a été faite, alors c’est une oppression qu’on lui fait subir. Moi j’attends de voir, à l’adolescence, ce que diront les enfants qui ont été privés de leur père ou de leur mère délibérément.

Bilan démographique 2017 : baisse de la natalité et plus de décès

Bilan démographique 2017 : baisse de la natalité et plus de décès

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Malgré une population plus importante (plus de 67 millions d’habitants au 1er janvier 2018), la France a connu en 2017 une nouvelle baisse de la natalité et une augmentation des décès, selon l’Insee.

Baisse de la natalité

En 2017, la natalité a chuté en France pour la troisième année consécutive : 767 000 enfants ont vu le jour en 2017 soit 17 000 de moins qu’en 2016. L’indicateur de fécondité continue à baisser avec 1,88 enfant par femme. Le taux était de 2 enfants par femme en 2014, puis de 1,96 en 2015 et de 1,93 en 2016.
Cette baisse de la natalité peut s’expliquer en partie par la baisse du nombre de femmes en âge d’avoir des enfants issues des générations nées après le baby-boom (1946-1973). Par ailleurs, elle peut également s’expliquer par la baisse de fécondité des femmes de 25 à 34 ans qui reste toujours la tranche la plus féconde mais n’est plus compensée par la fécondité des femmes de plus de 35 ans, restée stable. De même l’âge moyen des femmes à l’accouchement continue d’augmenter. Il est de 30,6 ans contre 29,8 ans il y a dix ans.
Pour l’Union Nationale des Associations Familiales (UNAF), la baisse de la fécondité est une « des conséquences des réductions faites sur la politique familiale » ces dernières années. C’est également ce qu’avait souligné un sondage IFOP commandé par la Manif pour tous en 2017 : « la politique familiale de ces dernières années est de nature à conduire les couples à renoncer à une nouvelle naissance ou à la différer ». Cette baisse impactera “d’autres politiques publiques, comme l’équilibre des retraites, qui repose sur une fécondité de 1,95 enfant par femme”, estime la présidente de l’Unaf, Marie-Andrée Blanc.
Pour autant, la France reste le pays d’Europe le plus fécond devant l’Irlande si l’on se réfère aux derniers chiffres disponibles au niveau européen (2015).

Augmentation des décès

Contrairement à l’année 2016, 603 000 personnes sont décédées en 2017 soit 9 000 de plus qu’en 2016 ce qui s’explique principalement par le vieillissement des générations du baby-boom ainsi qu’un épisode de grippe hivernale.
L’espérance de vie a de nouveau progressé pour les hommes en 2017 (79,5 ans) mais reste stable pour les femmes (85,3 ans). L’écart entre les sexes se réduit donc encore, passant de 7,9 ans en 1996 à 5,8 ans en 2017. Mais cette augmentation de l’espérance de vie est aussi le signe du vieillissement continu de la population. Les plus de 65 ans représentent désormais 19,6% de la population (un habitant sur cinq est âgé de plus de 65 ans) contre 19,3 en 2016 ou encore 15,5% il y a 20 ans.
Le solde naturel (la différence entre les naissances et les décès) s’élève à 164 000, un niveau « historiquement bas », le plus faible depuis l’après-guerre (hors Mayotte) selon l’Insee. Compte tenu du solde migratoire de + 69 000 personnes, la population française a augmenté de 233 000 personnes, soit une hausse de 0,3 %. en 2017.

[CP] Euthanasie : Alliance VITA dénonce les tentatives de passage en force

[CP] Euthanasie : Alliance VITA dénonce les tentatives de passage en force

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A l’heure où la priorité est d’évaluer la façon dont la loi fin de vie de 2016 est appliquée sur le terrain, Alliance VITA dénonce la pression mise soudainement par certains parlementaires pour tenter d’imposer la légalisation de l’euthanasie en France : la proposition de loi de la députée Caroline Fiat (La France insoumise) a été en effet examinée et rejetée ce jour par la Commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale. Elle sera néanmoins débattue en séance publique le 1er février prochain.

La loi Claeys-Leonetti du 2 février 2016 commence à peine à être connue et mise en œuvre, puisque les décrets d’application datent d’août 2017. De nombreuses initiatives officielles sont en cours ou prévues à court terme pour étudier si la prise en charge de la fin de vie s’améliore en France : le gouvernement a lancé une enquête via l’Inspection Générale des Affaires Sociales (IGAS) ; le Parlement prévoit un groupe d’étude et des auditions dans les semaines à venir ; le CESE s’est également autosaisi du sujet ; et des évaluations médicales sur la pratique de la « sédation profonde et continue jusqu’au décès » sont en cours via le Centre National des Soins Palliatifs et de la Fin de Vie (CNSPFV) et la Société Française d’Accompagnement et de soins Palliatifs (SFAP).

Alors que nous sortons à peine de trois années de débat approfondi sur les enjeux de la fin de vie entre 2012 à 2016, Alliance VITA voit dans cette offensive idéologique le risque d’occulter les vrais enjeux de la fin de vie. La priorité est d‘améliorer l’accompagnement des personnes en fin de vie, que ce soit à l’hôpital, en EHPAD ou à domicile, en particulier par la prise en charge de la douleur, les soins palliatifs, la solidarité intergénérationnelle. En effet, les graves dérives éthiques constatées dans les rares pays étrangers qui ont légalisé l’euthanasie incitent à la plus grande prudence.

Alliance VITA sera auditionnée lundi 29 janvier par le CESE. Elle reste très vigilante pour que les Etats généraux de la bioéthique ne servent pas de prétexte à remettre en cause l’interdit de tuer, qui demeure le fondement de la confiance entre soignants et soignés.

Mise à jour au 2 février 2018 :

La proposition de loi de Caroline Fiat, examinée lors de la séance du 1er février au soir, devait faire l’objet d’une motion de renvoi en commission, ce qui aurait eu comme conséquence de ne pas examiner le texte sur le fond. Le vote de cette motion n’a pas pu avoir lieu, compte tenu de l’heure tardive. La discussion sur ce texte pourrait éventuellement reprendre lors d’une prochaine « niche parlementaire » de La France Insoumise.

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Alliance VITA fondée en 1993, lors des premières lois de bioéthique, se mobilise depuis 25 ans, pour rappeler que l’utilisation des biotechnologies doit se faire au bénéfice de la protection des plus fragiles et de la dignité humaine en veillant spécialement aux étapes de la vie où les êtres humains sont les plus vulnérables (au stade embryonnaire, à la naissance, face à la maladie, au handicap, à la vieillesse ou encore la fin de vie).

Son service d’écoute et d’accompagnement SOS Fin de vie, créé en 2004, soutient les personnes en situation de grande dépendance ou en fin de vie, leurs soignants et leurs proches, ainsi que les personnes endeuillées.