L’Agence de la biomédecine a publié, le 13 février, son rapport sur l’application de la loi de bioéthique, suite au lancement officiel des Etats généraux de la bioéthique le 18 janvier.
Le rapport passe en revue quatre grandes thématiques pour lesquelles elle est compétente : les dons d’organes, l’assistance médicale à la procréation, le diagnostic prénatal et la recherche sur l’embryon. D’après le rapport, la loi de bioéthique de 2011 a, en règle générale, répondu à ses attentes. L’agence s’interroge également sur les problématiques liées à l’évolution très rapide de la science et des techniques.
Parmi les conclusions et pistes de travail préconisées figurent plusieurs risques d’aggravation de la loi de bioéthique posant des questions éthiques majeures.
En ce qui concerne la recherche sur l’embryon et les cellules souches embryonnaires, l’Agence remet en question la condition d’autorisation de recherche, sous réserve qu’il n’y ait pas d’autre alternative. Paradoxalement, si le rapport remet en question l’utilisation des cellules reprogrammées (iPS) comme alternative fiable aux cellules souches embryonnaires, les auteurs proposent que l’on débatte des gamètes artificiels produits à partir d’iPS avec la possibilité de les tester en créant des embryons pour la recherche, ce qui est actuellement interdit. Le rapport s’appuyant sur les préconisations de l’INSERM et de l’Académie de médecine de pouvoir conduire des recherches sur la modification du génome au niveau de l’embryon et des gamètes, envisage que la question d’autoriser ces recherches soit posée.
L’ABM ne se prononce pas sur l’accès à la PMA hors indication médicale (pour les femmes seules ou en couple de même sexe), ni sur l’autoconservation des ovocytes pour raisons non médicales, ni sur l’anonymat du don de gamètes, trois questions qui relèvent des débats au sein des Etats généraux de la bioéthique. En revanche, l’Agence préconise de remettre en cause l’interdiction de l’insémination post-mortem, de fixer un âge limite pour avoir recours à l’AMP et d’autoriser le double don de gamètes, aujourd’hui interdit, l’un des membres du couple devant être au moins relié génétiquement à l’enfant à naître.
Signe des pressions grandissantes pour obtenir des gamètes, l’ABM préconise de lever l’obligation du consentement du conjoint d’un donneur ou d’une donneuse pour faire un don et va jusqu’à préconiser de passer l’activité du don d’ovocyte au secteur privé lucratif. Est-ce une manière de contourner le principe de gratuité ? Le rapport propose également d’alléger les procédures pour le don d’embryons qui nécessitent, pour le couple donneur comme pour le couple receveur, l’autorisation du président du tribunal de grande instance, compte tenu de la responsabilité de céder son propre embryon à un autre couple.
L’ABM ne juge pas opportun de revenir sur le consentement présumé du don d’organes mais trouve qu’il serait bon d’établir un lien avec les directives anticipées. L’agence suggère d’étendre l’ouverture des dons croisés (donneurs vivants) à l’international. En outre, l’ABM propose des mesures d’harmonisation sur le prélèvement et le don de cellules souches hématopoïétiques (sang de cordon, don de moëlle…).
Les progrès scientifiques, comme par exemple le séquençage du génome, posent de plus en plus de questions éthiques. L’ABM, sans établir de conclusions, propose une série d’interrogations : quelles pourraient, par exemple, être les conséquences du séquençage du génome entier sur le dépistage prénatal ?