Bonnemaison en cour d’assises ?

Bonnemaison en cour d’assises ?

Le Parquet de Bayonne a remis début août 2013 son réquisitoire définitif et demande le renvoi en cour d’assises du docteur Bonnemaison, ce médecin urgentiste accusé de 8 cas d’empoisonnement de personnes âgées à l’hôpital de Bayonne en 2011. 

Les deux juges d’instruction chargés de l’affaire devraient rendre leur ordonnance de règlement fin août-début septembre, et suivre en partie ou totalement ces réquisitions du procureur de la République. Un éventuel procès en assises pourrait se tenir à Pau au second trimestre 2014.

Le médecin urgentiste, 52 ans, fils d’un chirurgien chef de clinique du Pays basque, aurait utilisé des médicaments d’anesthésie (Norcuron et Hypnovel) stockés dans une armoire à pharmacie de la réanimation et des urgences. Il a été suspendu de l’Ordre des médecins en novembre 2011, puis radié de l’Ordre en janvier 2013 (une procédure d’appel est en cours).

Nicolas Bonnemaison n’a pas nié les faits, déclarant avoir “pleine conscience de la gravité des actes” reprochés. Il a toujours assuré avoir agi seul et ne pas agir en militant. Pourtant, ses avocats viennent d’expliquer que “Nicolas Bonnemaison est prêt à se défendre devant un jury populaire s’il le faut, de façon à poser les vraies questions de l’euthanasie sans hypocrisie”.

Le ministre des personnes âgées, Michèle Delaunay, a également pris position hieren se disant “convaincue que les intentions du Dr Bonnemaison n’étaient pas celles d’un meurtrier ou d’un empoisonneur mais celles d’un médecin qui a pris des responsabilités qu’il conviendra de juger”.

Le procès du docteur Bonnemaison risque donc d’être utilisé comme un cas symbolique dans le débat public sur la fin de vie qui va être organisé en France à partir de l’automne 2013. Ce débat national serai suivi d’un projet de loi “pour compléter la loi Leonetti”, selon les annonces du président Hollande à la suite du rapport du CCNE le 1er juillet dernier.

iPS : essais cliniques au Japon

Première mondiale : le ministre japonais de la Santé a autorisé le 19 juillet 2013 des essais cliniques sur l’homme à partir de cellules reprogrammées iPS.
La demande remonte au 28 février 2013 et a été déposée par le Ricken, l’un des plus grands instituts de recherche scientifique japonais. Elle concerne une étude sur une maladie de dégénérescence de la vue (DMLA) qui sera conduite sur 6 patients qui ne réagissent pas aux traitements classiques. Elle consiste à générer des cellules iPS à partir de chaque patient, qui seront ensuite dérivées en cellules d’épithélium pigmentaire (rétine) pour régénérer des vaisseaux sanguins abimés. Ce processus devrait durer 8 à 10 mois avant de pouvoir procéder à l’opération chez chaque patient.
C’est une avancée très prometteuse scientifiquement mais aussi éthiquement puisque l’utilisation des cellules iPS « ne pose pas de problème éthique fondamental, au contraire des cellules souches prélevées sur des embryons humains » comme le souligne l’AFP.
Le Japon investit d’importants moyens financiers dans les recherches sur les cellules iPS qui sont devenues une priorité. Cette nouvelle avancée intervient alors que la France vient de lever le principe d’interdiction de recherche sur l’embryon, celle-ci n’ayant pourtant donné aucun résultat probant à ce jour (cf CP Alliance VITA).
Pour en savoir plus sur l’aspect scientifique de ces essais cliniques, voir le site bulletins-electroniques.com.

Décodeur n°33 : loi autorisant la recherche sur l’embryon

Décodeur n°33 : loi autorisant la recherche sur l’embryon

Le décryptage d’Alliance VITA sur l’actualité de la proposition de loi : « Autorisation de la recherche sur l’embryon »

 

L’EVENEMENT

 

Mercredi 10 et jeudi 11 juillet 2013, l’Assemblée nationale a terminé l’examen de la proposition de loi visant à autoriser la recherche sur l’embryon humain. Le vote solennel de la loi aura lieu mardi 16 juillet 2013. La loi sera alors définitive, puisque votée par les deux chambres dans les mêmes termes, puis deviendra applicable sauf recours devant le Conseil constitutionnel.

Le texte modifie la loi bioéthique du 7 juillet 2011 pour que la recherche sur l’embryon, actuellement interdite avec des dérogations, soit désormais autorisée dans son principe et avec des conditions encore moins contraignantes. Il serait désormais « normal », puisque « légal », de détruire un être humain pour une utilisation à visée scientifique.

Cette proposition de loi, initialement déposée par des sénateurs Radicaux de gauche en juin 2012, a été votée le 4 décembre dernier au Sénat, puis mise en échec à l’Assemblée nationale le 28 mars 2013 grâce à la détermination de députés de l’opposition. Le Gouvernement l’a alors reprise à son compte, l’a inscrite à l’ordre du jour de la session extraordinaire de juillet, puis a limité au maximum les débats en recourant au vote bloqué.

 

LE CHIFFRE

 

 

Sur les 171 417 embryons surnuméraires congelés, 29 779 feraient l’objet d’un « abandon du projet parental » (Rapport de l’Agence de la biomédecine, page 66, statistiques au 31/12/2010). Pour près de 15 000 d’entre eux, le principe d’un don à la recherche serait accepté par les parents, selon l’INSERM citée par la ministre Mme Fioraso pendant les débats.

En réalité, les informations sur le nombre d’embryons utilisés pour la recherche restent très peu transparentes. Avec des autorisations certainement plus nombreuses à l’avenir, il serait indispensable d’obtenir des données fiables, en distinguant  les centres de recherche publics et les laboratoires privés.

 

LE RÉSUME DU DEBAT

 

a)    Le débat refusé

La proposition de loi, qui ne concerne qu’un seul article du Code de la santé publique (l’article L.2151-5), a fait l’objet :

–       d’une motion de rejet préalable défendue par Jean Leonetti, député des Alpes-Maritimes, et d’une motion de renvoi en commission défendue par Philippe Gosselin, député de la Manche. Ces deux motions ont été rejetées.

–       de près de 300 amendements déposés par les députés de l’opposition, pour tenter de refuser ou limiter les dérives qui résulteront du nouveau texte de loi. Très vite après l’examen des premiers amendements, le Gouvernement a mis en œuvre l’article 44-3 de la Constitution : il a supprimé ainsi  les votes sur chacun des amendements, et tout renvoyé à un seul vote sur l’ensemble du texte mardi prochain (procédure du « vote bloqué », voir plus loin notre Coup de gueule).

Sur le fond, les principaux changements par rapport à la loi bioéthique du 7 juillet  2011  sont les suivants (voir l’analyse contenue dans le Décodeur n°21 du 22 mars 2013) :

b)    La suppression du principe d’interdiction

Le principe d’interdiction de la recherche sur l’embryon, même assorti de dérogations, est fixé depuis les premières lois bioéthiques de 1994. Il reste un symbole extrêmement fort de la reconnaissance de l’embryon comme être humain à part entière : le fait qu’il soit à son tout premier stade ne lui retire pas sa qualité d’être humain.

Cette référence éthique fondamentale est basée sur l’article 16 du Code civil, qui dispose : « La loi assure la primauté de la personne, interdit toute atteinte à la dignité de celle-ci et garantit le respect de l’être humain dès le commencement de sa vie ».

Inverser le principe et fixer la règle que la recherche est autorisée sous certaines conditions, c’est accomplir un virage à 180° sur le plan symbolique et philosophique (à titre d’exemple, comme si le principe que tout citoyen « est présumé innocent » devienne « est présumé coupable »).

c)    L’assouplissement des quatre conditions pour autoriser une recherche

Les quatre conditions sont détaillées en annexe. Deux points essentiels sont à souligner :

–       Il ne serait plus nécessaire de viser des « progrès médicaux majeurs » (cf condition n°2), mais simplement « une finalité médicale », terme flou qui en fait une condition très facile à atteindre.

–       D’autre part, la volonté de privilégier les « recherches alternatives », c’est-à-dire celles qui ne détruisent pas l’embryon, disparaît complètement (cf condition n°3 et dernière phrase supprimée). La modification de la condition n° 3 avait été demandée au Sénat par la ministre de la Recherche elle-même, avec la justification suivante : « Cet alinéa est très restrictif pour les chercheurs (…). Les recherches liées au screening à visée pharmaceutique ou à la modélisation des pathologies pourraient se heurter à cet alinéa. D’où la nouvelle rédaction que je suggère. »

d)     La suppression de la motivation obligatoire des autorisations données

La loi du 7 juillet 2011 obligeait l’Agence de la Biomédecine (ABM) à motiver ses décisions, ce qui n’était pas le cas auparavant. Il en est de même pour son Conseil d’orientation, qui donne un avis scientifique sur tout projet de recherche.

La motivation des autorisations données constitue un élément essentiel pour comprendre la pertinence de la recherche en cause, et au besoin pouvoir contester la validité  de cette décision.

En supprimant la motivation des actes, alors que dans le même temps  les conditions d’acceptation des dossiers deviennent beaucoup plus souples et vagues, les promoteurs du texte prennent un risque considérable de dérives scientifiques et éthiques.

e)    Autres modifications importantes

–       Suppression de l’obligation d’informer les parents de la nature des recherches effectuées sur les embryons surnuméraires qu’ils ont consenti à donner.

–       Diminution importante du pouvoir des deux ministres concernés (Santé et Recherche) pour s’opposer à un programme qui ne semblerait pas répondre aux conditions fixées dans la loi.

–       Suppression de l’accord préalable de l’ABM pour conduire des études sur les embryons (les « études » doivent être distinguées des « recherches »,  en ce sens qu’elles ne portent pas atteinte à l’embryon).

Au total, le texte voté par le Parlement apporte un changement majeur de notre législation, tant sur le plan des principes que sur les modalités de vérification du bien-fondé des recherches sur l’embryon.

 

NOTRE COUP DE COEUR

 

 

Le happening du 11 juillet organisé par le Collectif « Un de nous » près de l’Assemblée nationale, au moment de l’examen de la loi autorisant la recherche sur l’embryon en France.

Un de nous  est une Initiative citoyenne européenne animée en France par Alliance VITA, la Fondation Jérôme Lejeune, les Associations Familiales Catholiques (AFC) et le Comité Protestant évangélique pour la Dignité Humaine (CPDH). A ce jour, plus de 66 000 signatures ont déjà été recueillies en France, pour un objectif de 100 000 d’ici la fin de l’été. Pour l’ensemble des 28 pays européens, 752 000 signatures sont recensées, pour un objectif d’un million.

 

 

 

NOTRE COUP DE GUEULE

 

Le passage en force du Gouvernement, par le recours à la procédure du « vote bloqué » prévu à l’article 44-3 de la Constitution : « Si le Gouvernement le demande, l’assemblée saisie se prononce par un seul vote sur tout ou partie du texte en discussion, en ne retenant que les amendements proposés ou acceptés par le Gouvernement

Cette procédure assez exceptionnelle est utilisée par le Gouvernement quand il se trouve mis en difficulté, soit pour contraindre sa majorité à accepter un texte sans le déformer, soit pour éviter tout risque que l’opposition parvienne à faire voter un amendement au cours du débat. En l’occurrence, ce second cas de figure aurait pu se produire jeudi en milieu de journée, compte tenu de l’insuffisance de députés de la majorité présents dans l’hémicycle.

Ce dernier acte est à l’image du débat confisqué tout au long de la procédure : initiative parlementaire  lancée en catimini, pas d’états généraux comme prévu par la loi quand on aborde des questions de bioéthique, examen confidentiel au Sénat au cours d’une nuit de décembre, démarches politiciennes du Gouvernement pour satisfaire un parti allié, et finalement manœuvre d’obstruction à l’Assemblée nationale pour éviter tout vote risquant d’obliger à une seconde lecture.

 

 

POUR ALLER PLUS LOIN : 

 

1)    Communiqué de presse du Collectif Un de nous le 11 juillet 2013.

2)    Tableau comparatif de la loi actuelle et du texte proposé (article L.2151-5 du Code de la santé publique) :

 

Loi Bioéthique 7 juillet 2011

 

Texte de la Proposition de loi,

tel que voté au Sénat le 4/12/2012

I.- La recherche sur l’embryon humain, les cellules souches embryonnaires et les lignées de cellules souches est interdite. I.- Aucune recherche sur l’embryon humain ni sur les cellules souches embryonnaires ne peut être entreprise sans autorisation.
II.- Par dérogation au I, la recherche est autorisée si les conditions suivantes sont réunies : Un protocole de recherche conduit sur un embryon humain ou sur des cellules souches embryonnaires issues d’un embryon humain ne peut être autorisé que si :
1° La pertinence scientifique du projet de recherche est établie ; 1° La pertinence scientifique de la recherche est établie ;
2° la recherche est susceptible de permettre des progrès médicaux majeurs ; 2° La recherche, fondamentale ou appliquée, s’inscrit dans une finalité médicale ;
3° Il est expressément établi qu’il est impossible de parvenir au résultat escompté par le biais d’une recherche ne recourant pas à des embryons humains, des cellules souches embryonnaires ou des lignées de cellules souches ; En l’état des connaissances scientifiques, cette recherche ne peut être menée sans recourir à ces embryons  ou ces cellules souches embryonnaires ;
4° Le projet et les conditions de mise en œuvre du protocole respectent les principes éthiques relatifs à la recherche sur l’embryon et les cellules souches embryonnaires. 4° Le projet et les conditions de mise en œuvre du protocole respectent les principes éthiques relatifs à la recherche sur l’embryon et les cellules souches embryonnaires.
Les recherches alternatives à celles sur l’embryon humain et conformes à l’éthique doivent être favorisées.  « Phrase supprimée »

 

[CP] Après le passage en force français, le recours européen s’impose

COMMUNIQUE DE PRESSE : Paris, le 16 juillet 2013

Quatre associations* françaises, réunies sous le label européen Un de nous, dénoncent la manière dont le destin des embryons humains congelés vient d’être scellé à l’issue d’un vote bloqué à l’Assemblée nationale, en catimini et sans débat. Un de nous a rassemblé en quelques semaines plus de 765 000 signatures de citoyens européens, dont 67 000 en France, pour protéger l’embryon humain. Face à la levée de l’interdiction de la recherche sur l’embryon humain en France, cette initiative citoyenne est aujourd’hui le recours urgent pour stopper les financements européens de ces recherches.

Loin d’être un sujet purement scientifique et technique, la recherche sur l’embryon humain est avant tout un sujet éthique et éminemment politique. Cette loi bouleverse un principe fondamental de notre société qui protège l’embryon humain au nom de l’intégrité et de la non-marchandisation du corps humain. De plus elle est scientifiquement injustifiable : des avancées majeures confirment l’inutilité de la recherche sur l’embryon. Au-delà des cellules souches adultes et de sang de cordon qui permettent déjà de soigner, les cellules reprogrammées dites iPS** sont très prometteuses. En particulier, après l’annonce du gouvernement japonais au printemps dernier d’un investissement massif sur les cellules reprogrammées, des essais cliniques seront autorisés mi-juillet. Alors que la communauté scientifique internationale concentre aujourd’hui ses efforts humains et financiers sur ces nouvelles techniques éthiques et efficaces, comment comprendre que la France persiste dans une voie qui va non seulement à l’encontre de l’éthique et du bien commun, mais également à contresens des évolutions scientifiques ?

« Non à la vivisection des embryons humains » – « Embryons disséqués, humanité défigurée » : par une scénographie spectaculaire, le collectif Un de nous a manifesté le 11 juillet 2013, au moment même de l’examen de la proposition de loi aux abords immédiats de l’Assemblée nationale contre l’injustice subie par les embryons livrés à des processus d’expérimentation qui conduisent à leur destruction. Les quatre associations du Collectif Un de nous se sont engagées à rassembler le maximum de signatures, dans le cadre de l’initiative européenne citoyenne contestant le financement par l’Union Européenne de la recherche sur l’embryon humain (Objectif pour l’Union Européenne : 1 million de signatures dûment enregistrées en octobre 2013). A l’automne, le seuil de signatures franchi, la Commission européenne examinera l’initiative. Le niveau européen est aujourd’hui le recours à saisir d’urgence.

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*Alliance VITA, la Fondation Jérôme Lejeune, la Confédération Nationale des Associations Familiales Catholiques et le Comité Protestant évangélique pour la Dignité Humaine. **Induced Pluripotent Stem Cells : cellules découvertes par le Pr Yamanaka ce qui lui a valu le Prix Nobel de Médecine 2012.