DPI en Suisse : votation prévue en juin

Une votation (référendum) aura lieu en Suisse le 14 juin 2015 proposant de modifier la Constitution, étape du processus législatif démarré en 2013 pour autoriser le diagnostic préimplantatoire (DPI).

Le DPI, controversé éthiquement, vise à diagnostiquer des embryons dans le cadre de fécondations in vitro et à sélectionner ceux qui seront implantés dans l’utérus de la mère, indemnes de maladies héréditaires. Les embryons porteurs de la maladie recherchée sont détruits.  Cette pratique nécessite de produire plus d’embryons que ceux qui seraient réimplantés.

En Suisse, la loi sur la procréation médicalement assistée (LPMA), entrée en vigueur en 2001, s’est accompagnée de plusieurs dispositions introduites dans la Constitution à l’article 119 : « L’être humain doit être protégé contre les abus en matière de procréation médicalement assistée et de génie génétique ». Cet article précise qu’il n’est pas autorisé de « développer hors du corps de la femme » plus d’embryons que ceux qui peuvent être immédiatement réimplantés.

En 2013, le Conseil fédéral (équivalent du gouvernement) a transmis au Parlement un projet de loi visant à autoriser le DPI dans le cas de maladies héréditaires. Ce texte a  finalement été approuvé le 12 décembre 2014 avec des dispositions dépassant le cadre initial. En effet la loi proposée par le gouvernement interdisait le dépistage d’autres maladies que celle qui aurait motivé l’autorisation du DPI pour un couple particulier. Lors des discussions parlementaires, la loi a été amendée et a autorisé le dépistage de maladies chromosomiques, dont la trisomie 21, pour toutes les fécondations in vitro.

La votation du 14 juin concerne uniquement la levée d’un verrou constitutionnel qui interdit la production de plus de 3 embryons à la fois, ce qui constitue un obstacle à une pratique du DPI. Le vote majoritaire en faveur du « oui » nécessite une double majorité, à la fois du peuple et des cantons, puisqu’il s’agit d’une modification constitutionnelle. En l’état, la loi autorisant explicitement le DPI qui a déjà été votée au Parlement pourrait entrer en vigueur. Cependant celle-ci peut être contestée par un nouveau référendum, entrainant une deuxième votation sur la loi spécifique qui autoriserait le DPI. Si lors de cette deuxième votation la loi est acceptée, il s’agit alors d’une loi fédérale qui s’appliquerait à l’ensemble de la Confédération.

Depuis deux ans, ce projet  a suscité un débat très controversé de la part de personnalités politiques, d’associations et d’autorités religieuses de plusieurs confessions, dont la conférence des évêques de Suisse (CES). Dans un  communiqué du 11 mai 2015, la CES souligne que  « La situation de départ est tragique : c’est la souffrance d’un couple qui est susceptible de transmettre une maladie génétique grave. La méthode du DPI est présentée comme solution à ce problème. Or, cette méthode pose plusieurs problèmes graves : par le DPI on ne soigne pas une maladie, mais on l’évite en supprimant le porteur de la maladie, ce qui est injustifiable ! En outre, le DPI nécessite la production volontaire d’embryons afin de faire une sélection, ce que l’on appelle de l’« eugénisme libéral ». De plus, le DPI est une technique de sélection où l’on s’octroie le droit de décider qui mérite de vivre, et qui ne le mérite pas. »

Procap, la plus grande association de personnes avec handicap en Suisse, qui ne s’opposait pas formellement au DPI  en cas de transmission démontrable de maladies héréditaires, s’oppose à « tous les autres examens de sélection, tels que les tests chromosomiques ». Il demande « des conditions-cadres claires vis-à-vis de l’utilisation du DPI » et s’oppose « à toute forme d’agissement eugénique ».  Procap demande de plus que des limites claires soient définies « pour empêcher qu’il soit un jour acceptable d’établir une distinction entre les êtres qui méritent de vivre et les autres ».

Comment mettre des limites claires à partir du moment où l’on accepte le principe  de sélectionner des êtres humains ? Sans sous-estimer la souffrance des familles confrontées au handicap, nos sociétés sont face à un double enjeu : celui de reconnaître la valeur inconditionnelle de chaque être humain, quel qu’il soit, et celui de la mission de la médecine. Eliminer les malades au lieu de rechercher à les soigner et les accompagner constitue une grave régression scientifique et une atteinte aux droits humains fondamentaux.

Des quadruplés à 65 ans : Déraisonnable PMA !

Des quadruplés à 65 ans : Déraisonnable PMA !

Déjà mère de 13 enfants et grand-mère de 7 petits-enfants, une Allemande de 65 ans a accouché de quadruplés à Berlin le 23 mai 2015.

La fécondation in vitro n’a pas eu lieu en Allemagne, où elle est interdite pour une femme de cet âge-là. La retraitée allemande a donc procédé à de multiples tentatives de fécondation in vitro (FIV) en Ukraine, avec un donneur de sperme et une donneuse d’ovocytes anonymes.

A 55 ans, elle avait déjà mis au monde une petite fille. C’est d’ailleurs « pour répondre à son souhait d’avoir un petit frère ou une petite sœur qu’elle a décidé de retenter ». Nés de 5 pères différents, les autres enfants ont déjà tous quitté le domicile maternel.

La grossesse n’a pu continuer au-delà de 26 semaines. Les bébés – trois garçons et une fille – sont donc nés très grands prématurés avec 15 semaines d’avance.

Neeta (655 g, 30 cm), Dries (960 g, 35 cm), Bence (680 g, 32 cm) et Fjonn (745 g, 32,5 cm) sont en réanimation néonatale. « Ce sont des enfants qui peuvent mourir, qui peuvent contracter des maladies lourdes ou avoir des séquelles », a expliqué le professeur Christoph Bührer de l’hôpital Charité de Berlin où sont nés les quadruplés.

Une grossesse à très haut risque, aboutissant à une quasi inévitable très grande prématurité qui leur font courir de grands risques pour leur santé, une filiation brouillée où ses enfants ne connaitront ni leur père ni leur mère biologique, une mère qui aura 70 ans lors de leur entrée à l’école, on se demande à quel moment l’intérêt de l’enfant a été pris en compte avant d’avoir procédé à ces actes de procréation assistée déraisonnables.

Une campagne radio pour le don de gamètes

Du 1er au 15 juin 2015, l’Agence de la Biomédecine (ABM) va lancer sa première campagne sur les radios nationales pour inciter aux dons de sperme et d’ovocytes.

Trois spots mettant en scène des dialogues entre un donneur ou une donneuse et son entourage seront diffusés chaque jour, en précisant les principales conditions du don. Cette publicité, qui cible particulièrement les jeunes parents, est conçue pour inciter l’auditeur à engager une réflexion et à se rendre sur les sites dondovocytes.fr et dondespermatozoides.fr.

Le Pr Dominique Royère, responsable des dons à l’Agence de la Biomédecine, estime que cette année, il faudrait 900 donneuses et 300 donneurs pour répondre aux 3.000 couples infertiles qui sont actuellement en attente.

En 2013, 1.500 couples seraient devenus parents par les gamètes de 456 donneuses d’ovules et 268 donneurs de spermatozoïdes. Les dons de gamètes en France sont libres, anonymes et gratuits.

Les bénéficiaires des dons d’ovocytes ou de sperme en France doivent être en âge de procréer, mais infertiles ou bien risquant de transmettre une maladie génétique grave à leur enfant naturel.

Lors de la journée des 10 ans de l’Agence de biomédecine du 28 et 29 mai 2015, la ministre de la Santé Marisol Touraine a précisé que le décret d’application de la loi de bioéthique de 2011, élargissant le don de gamètes aux nullipares, c’est-à-dire aux jeunes filles et aux femmes n’ayant pas encore d’enfant, sera soumis « prochainement » au Conseil d’État.

Cette campagne de banalisation du don de gamètes suscite quelques questionnements éthiques, notamment parce que les enfants nés de dons de gamètes n’ont pas accès à leurs origines biologiques. L’association Procréation Médicalement Anonyme (PMA), fondée en 2004 par le Dr Pauline TIBERGHIEN médecin de la reproduction, a pour but de sensibiliser les professionnels de santé, le législateur et le grand public sur les conséquences délétères de l’anonymat total des donneurs de gamètes, dont le principe a été inscrit dans la loi française en 1994.

Bien que décrit dans cette campagne comme un « geste solidaire de ces donneurs de bonheur », ce don ne peut être comparé à d’autres, comme celui de sang, car il engage le donneur à être potentiellement père ou mère biologique d’un ou plusieurs enfants.

GPA : en Italie, une affaire est réexaminée par la CEDH ?

Le 1er juin 2015, la Cour européenne des Droits de l’Homme (CEDH) va examiner la demande du Gouvernement italien de renvoyer en appel devant la Grande Chambre de la Cour l’affaire Paradiso et Campanelli dont l’arrêt avait été rendu le 27 janvier dernier. Si cette demande d’appel est acceptée, l’affaire sera réexaminée et deviendrait le premier cas de GPA jugé par la Grande Chambre, dont les arrêts définissent la doctrine de la Cour et s’imposent dans l’ensemble des 47 États membres du Conseil de l’Europe. Moins de 10% des demandes de renvoi devant la Grande Chambre sont acceptées par le collège.

Dans cette affaire, un couple italien avait acheté pour 49 000 euros un enfant conçu par fécondation in vitro avec des gamètes issus de donneurs et porté par une mère porteuse dans le cadre d’une gestation pour autrui (GPA) en Russie. Aucun des deux membres du couple âgés de 44 et 56 ans n’avait donc de lien biologique avec cet enfant. Lors d’une demande transcription à l’Etat civil, la justice italienne avait constaté la fraude, la violation de l’ordre public et l’enfant leur avait été retiré. Le couple avait alors saisi la CEDH. Celle-ci avait conclu qu’il s’agissait d’une atteinte à la vie privée, donné raison au couple requérant au motif qu’il devait pouvoir bénéficier de la protection accordée à la vie familiale et même condamné l’Italie a leur verser des dommages et intérêts.

Cette inquiétante décision « entérinait » en quelque sorte une « vente d’enfant » et avait suscité une indignation, y compris chez 2 juges de la CEDH, Guido Raimondi et Robert Spano qui avaient déclaré «S’il suffit de créer illégalement un lien avec l’enfant à l’étranger pour que les autorités nationales soient obligées de reconnaître l’existence d’une « vie familiale », il est évident que la liberté des États de ne pas reconnaître d’effet juridique à la gestation pour autrui, liberté pourtant reconnue par la jurisprudence de la Cour (…), est réduite à néant. »

L’association No Maternity Traffic¹ dont Alliance VITA est partenaire appelle à un rassemblement lundi matin 1er juin à 8h15² contre la GPA et pour le droit des femmes et des enfants.

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1. No Maternity Traffic regroupe des associations internationales agissant pour l’abolition universelle de la gestation par autrui (www.nomaternitytraffic.eu) : le collectif s’oppose à l’exploitation des femmes et au trafic d’enfants, contraires à la convention européenne des droits de l’homme comme aux conventions internationales, en particulier celles sur les droits de l’enfant. Qu’elle soit gratuite ou payante, au profit d’individus ou de couples, la gestation pour autrui est une atteinte à la dignité humaine. Une pétition à signer est en ligne.

2. Lieu du rassemblement : devant la CEDH à Strasbourg, Allée des droits de l’homme, arrêt de Tram B “Droits de l’homme”.

Fin de vie : le Sénat clarifie des mesures controversées

La proposition de loi des députés Claeys et Leonetti sur la fin de vie a été examinée par la Commission des affaires sociales du Sénat le 27 mai. Les deux rapporteurs, Michel Amiel et Gérard Dériot, ont fait voter douze amendements qui visent à lever des ambiguïtés contenues dans le texte voté en première lecture par l’Assemblée nationale le 17 mars dernier.

Les amendements principaux tendent à préciser ou clarifier les dispositions concernant  d’une part la sédation profonde et continue jusqu’au décès, et d’autre part les directives anticipées. Pour la sédation, certaines expressions ambiguës, en particulier à l’article 3 « éviter toute souffrance et ne pas prolonger inutilement la vie », ont été retirées.

Dans le deuxième cas prévu à l’origine (personne qui n’est pas en fin de vie mais souhaitant arrêter ses traitements, ce qui la met volontairement en fin de vie), la sédation ne serait mise en œuvre qu’en cas de souffrance réfractaire, ce qui serait censé atténuer les risques de dérive euthanasique. La nutrition et l’hydratation artificielles ne sont plus définies comme des traitements.

Pour les directives anticipées, elles s’imposent toujours au médecin, sauf urgence vitale ou « lorsque la situation médicale ne correspond pas aux circonstances visées par les directives » (formulation qui remplace la notion de directives « manifestement inappropriées », mais qu’il faudra sans doute mieux expliciter). La procédure collégiale est mieux définie, en référence à celle prévue dans le Code de déontologie médicale. La rédaction de ces directives sera plus souple, elle n’est plus enfermée dans le modèle unique qu’avait prévu la proposition de loi initiale. Le rôle de la personne de confiance est enfin mieux exprimé, en tant que « mandataire » plus que témoin.

D’autres dispositions votées suppriment des obligations nouvelles crées par l’Assemblée nationale, comme par exemple un rapport annuel à la charge de chaque Agence Régionale de Santé, un autre prévu pour le Parlement, et le registre des cas de sédation à l’hôpital. Les autres amendements présentés par des membres de la Commission ont été rejetés, y compris plusieurs qui avaient pour but d’introduire des dispositifs d’euthanasie ou de suicide assisté.

Pour Alliance VITA, qui dénonce les ambiguïtés de la proposition de loi et les dérives possibles vers des euthanasies masquées, les évolutions apportées par les sénateurs en commission vont dans le bon sens, même si le texte nécessite encore des améliorations. Une grande vigilance reste nécessaire, notamment pour que les sénateurs confirment ces orientations par leur vote en séance publique les 16 et 17 juin prochain. Alliance VITA dénonce également l’inconséquence du gouvernement qui, malgré ses multiples promesses, n’a pris aucune mesure depuis 2012 pour développer les soins palliatifs. Plutôt que de multiplier les lois, l’urgence est aux mesures concrètes pour améliorer au quotidien l’accompagnement médical et social des personnes en fin de vie.