La GPA et la jurisprudence de la Cour de Cassation

La Cour de cassation s’est penchée vendredi 19 juin sur des pourvois concernant deux enfants nés par Gestation Pour Autrui (GPA) en Russie, de pères français. Ces actes ont été accomplis à l’étranger pour contourner l’interdiction de la loi française.

La Cour d’appel de Rennes avait refusé l’inscription à l’état civil pour le premier enfant le 15 avril 2014, mais l’avait acceptée pour le second le 16 décembre 2014. La Cour de cassation, la plus haute juridiction judiciaire française, a toujours rejeté jusqu’à présent les pourvois relatifs à la transcription sur les registres de l’état civil d’enfants nés de mères porteuses à l’étranger (voir ci-dessous, notre rappel historique).

Dans son arrêt du 26 juin 2014 sur les affaires Mennesson et Labassée, la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH) a condamné la France pour violation de la vie privée des enfants. Elle a estimé qu’ « en faisant ainsi obstacle tant à la reconnaissance qu’à l’établissement de leur lien de filiation à l’égard de leur père biologique, l’Etat français est allé au-delà de ce que lui permettait sa marge d’appréciation ». La Cour conclut que le droit des enfants au respect de leur vie privée a été méconnu, en violation de l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme. Les motifs invoqués sont la « troublante incertitude quant à la possibilité de se voir reconnaître la nationalité française », et pouvoir hériter des « parents commanditaires ».

Concernant la nationalité, les enfants issus de GPA en ont toujours une, en principe celle du pays dans lequel ils sont nés ; puis, lorsqu’ils sont installés en France, la nationalité française pouvait déjà être demandée et obtenue : avant 2013, c’était en vertu de leur résidence sur le territoire au bout de 5 ans ; depuis janvier 2013, c’est en application de la circulaire Taubira, au nom de la nationalité française des commanditaires de la GPA.

Concernant l’héritage, le problème a été réglé par une lettre adressée le 13 avril 2015 au président du Conseil supérieur du notariat par la Direction des affaires civiles et du Sceau (DACS) reconnaissant les enfants nés par GPA comme héritiers. Ce courrier envoyé aux notaires explique que le « seul recours à une convention de gestation pour autrui ne peut d’emblée conduire le notaire à écarter ces enfants de leur qualité d’héritier de la succession de leurs parents, dès lors que le lien de filiation avec ces derniers résulte de leur acte de naissance étranger quand bien même il ne serait pas procédé à la transcription de ces actes sur les registres français de l’état civil».

Si cet arrêt de la CEDH pèse inévitablement dans le débat, rappelons que les hauts magistrats de la Cour de cassation bénéficient d’une pleine liberté : ils ne sont pas contraints d’abandonner leur jurisprudence au profit de l’appréciation de la CEDH, si elles sont contradictoires.

L’audience plénière du 19 juin a montré que la Cour de cassation pourrait changer de position. Le procureur général Jean-Claude Marin, le plus haut magistrat du parquet, a en effet conclu qu’il recommandait d’inscrire « partiellement »  à l’état civil ces enfants, sous la condition d’un test de filiation (test de paternité, ADN). Mais il refuse la reconnaissance d’un « parent d’intention » en raison du principe de l’indisponibilité du corps humain, et car « valider la retranscription automatique de l’acte de naissance étranger sur l’acte civil français reviendrait à une reconnaissance automatique de la gestation pour autrui. » Par ailleurs, Maître Spinosi, qui représentait le Défenseur des droits Jacques Toubon (intervenu spontanément dans l’instance), a demandé l’inscription de la filiation sur l’état civil des enfants.

La décision sera rendue le 3 juillet. Si elle conclut à la transcription des actes de naissance, cela reviendrait à cautionner la pratique de la GPA, et mettrait la France dans une grave contradiction. Cela bouleverserait profondément notre droit en validant de facto que des personnes (femmes et enfants) peuvent être objet de contrat.

À aucun moment durant l’audience, la situation des femmes n’a été évoquée, sauf par l’avocat du Défenseur des droits qui est allé jusqu’à les nier, déclarant qu’il n’y a aucun lien maternel entre l’enfant et la femme qui l’a porté…

Pour rappel, la GPA n’est pas autorisée en France et elle est « frappée de nullité d’ordre public » : cela signifie qu’une GPA ne peut produire aucun effet juridique. (Code civil, article 16-7). Le Code pénal, cependant, ne la punit que de manière indirecte, en sanctionnant l’entremise par des intermédiaires (Code pénal, article 227-12) ou la simulation de maternité (Code pénal, article 227-13).

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Historique des principaux arrêts de la Cour de Cassation sur les cas de Gestation Pour Autrui

En 1991 : La Cour de cassation a condamné, avant même l’intervention législative, la pratique de la GPA, contraire aux principes d’indisponibilité du corps humain et de l’état des personnes, dans le célèbre arrêt d’Assemblée plénière du 31 mai (Cass. Ass. plén., 31 mai 1991, no 90-20.105).

Comme il ne servirait à rien de condamner la pratique tout en validant ses conséquences, elle a dans la même décision refusé l’adoption de l’enfant par l’épouse du père, en raison du détournement d’institution que cela représenterait

En  1994, les lois de bioéthique aboutissent à créer l’article 16-7 du code civil, qui dispose que « toute convention portant sur la procréation ou la gestation pour le compte d’autrui est nulle ».

En 2011, la Cour de cassation approuve tant le refus de transcription de ces actes sur les registres français d’état civil que le refus d’établissement de cette filiation par possession d’état (Cass. 1re civ., 6 avr. 2011, n° 09-66.486, 10-19.053 et 09-17.130). Car « il est contraire au principe de l’indisponibilité de l’état des personnes, principe essentiel du droit français, de faire produire effet à une convention portant sur la gestation pour le compte d’autrui, nulle d’une nullité d’ordre public aux termes des articles 16-7 et 16-9 du code civil ». Cela aurait pour conséquence de désigner en droit français comme mère une femme qui n’a pas mis l’enfant au monde. Or, le seul moyen d’attribuer la maternité d’un enfant à une femme qui ne l’a pas porté est l’adoption judiciairement prononcée et, précisément, une telle adoption n’est pas envisageable car elle constituerait un détournement d’institution.

En 2013, la Cour de cassation s’est ensuite opposée à l’établissement de la filiation de ces enfants à l’égard du père biologique en raison de la fraude à la loi commise par celui-ci. (Cass 1re Civ., 13 sept 2013, pourvoi n° 12-18.315, Bull. 2013, I, n° 176 et n° 12-30.138, Bull. 2013, I, n° 176).

En 2014, la Cour de cassation confirme à nouveau, malgré la circulaire Taubira du 25 janvier 2013, le refus de transcrire sur les registres d’état-civil français les actes de naissance de deux enfants nés de mères porteuses en Inde.

En route vers les premiers cyborgs ?

En route vers les premiers cyborgs ?

 

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Le 13 juin 2015 a eu lieu à Paris la première “Implant Party”  dans le cadre du festival du numérique Futur en Seine.

Au cours de cette soirée, organisée par l’association suédoise Bionyfiken, chacun pouvait se faire implanter, par un spécialiste, entre le pouce et l’index, une puce grosse comme un grain de riz, sous anesthésie locale et dans des conditions d’hygiène très strictes. La personne “augmentée” (qu’on pourrait également appeler “cyborg”) qui vient de subir cette intervention peut interagir avec tous les équipements qui l’entourent : par exemple, déverrouiller son smartphone, ouvrir une porte, allumer un ordinateur ou bien payer un petit achat d’un simple geste de la main…

C’est Hannes Sjoblad, transhumaniste suédois et porte-parole de l’Université de la Singularité dans son pays, qui est à l’origine de la découverte de ce nouveau type de puce sous-cutanée fonctionnant avec la technologie NFC*. Il avait dit à une journaliste: « Mon objectif, c’est de remplacer tout ce que vous avez dans votre poche par quelque chose que vous ne perdrez plus jamais”. En six mois, ce jeune suédois a organisé une vingtaine de soirées dans le monde au cours desquelles environ 300 personnes ont pu recevoir des implants. On compte actuellement environ 5.000 personnes dans le monde qui ont ce type de puce.

La Suède est pionnière dans ce domaine puisque déjà, en janvier 2015, l’entreprise suédoise Epicenter avait proposé à ses salariés de se faire implanter des puces NFC pour passer les portillons de sécurité, utiliser les photocopieurs et même payer leurs consommations à la cafeteria.

Cette technique, susceptible de devenir une nouvelle mode, pose des questions éthiques : dans quelle mesure ces puces ne serviront-elles pas à surveiller et contrôler les faits et gestes de tout un chacun, ou encore à encourager les piratages de tous ordres ?

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* La technologie NFC (Near Field Communication) est une technologie permettant d’échanger des données à une portée de 10 cm entre 2 appareils équipés de ce dispositif. Le NFC est intégré à la plupart de nos terminaux mobiles sous forme de puce, ainsi que sur certaines cartes de transport ou de paiement.

GPA : une Audience à haute portée à la Cour de Cassation

Le 19 juin 2015 prochain, l’Assemblée plénière de la Cour de cassation tiendra une audience qui aura pour objet la transcription des actes d’état civil d’enfants nés par gestation pour autrui (GPA) à l’étranger. C’est-à-dire, transcrire l’acte de naissance produit à l’étranger par un acte de naissance français. Cela intervient dans le cadre de deux pourvois relatifs à des enfants nés par GPA en Russie de pères français. Saisie des deux affaires, la cour d’appel de Rennes avait refusé l’inscription dans le premier cas, le 15 avril 2014, mais l’avait accepté dans le second, le 16 décembre.

Fait tout à fait inhabituel, le Procureur Général a d’ores et déjà communiqué à la presse son intention de recommander la transcription à l’état civil du père biologique, sous réserve d’une expertise judiciaire pour prouver l’existence d’un lien biologique, mais non de la mère «d’intention » (celle ayant pu contribuer à la commande de l’enfant).

Pour rappel, la pratique des mères porteuses en France est frappée de nullité d’ordre public : c’est-à-dire qu’une GPA ne produit aucun effet juridique (Code civil). Donc, transcrire ces actes de naissance, même partiellement, revient à fermer les yeux sur une violation de la loi française et de ses principes fondamentaux sur la dignité humaine et la non marchandisation des corps humains. En droit français, la mère est celle qui accouche : établir la filiation avec une « mère d’intention » est interdit. Mais faut-il reconnaître la parenté paternelle, d’autant plus si elle est biologique ? La même Cour de cassation avait en 2013 considéré que la fraude à la loi dont s’était rendu coupable le père justifiait le refus de transcription.

Refuser de transcrire la filiation ne sanctionne pas l’enfant dans la mesure où il a un état-civil établi à l’étranger. Ce qui est visé,  c’est la pratique de la GPA elle-même, privée de l’effet juridique immédiat qui est celui d’établir un lien de filiation entre les adultes commanditaires et l’enfant.

Après cette audience les juges prendront ultérieurement une décision de principe qui peut être lourde de conséquences : reconnaître la transcription reviendrait à cautionner la pratique de la GPA.

Rappelons que les hauts magistrats bénéficient d’une pleine liberté :  ils ne sont pas contraints d’abandonner leur jurisprudence au profit de l’appréciation de la Cour Européenne des Droits de l’Homme (CEDH) même si elles sont contradictoires.

La Manif pour tous appelle à une manifestation citoyenne pour s’opposer à la GPA le jeudi 18 juin à 19h30 devant la palais de Justice de Paris (Metro Cité).

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Addendum du 19 juin : la décision finale sera rendue le 3 juillet

Articles et vidéos d’actualité sur Vincent Lambert, du 4 au 11 juin 2015

1) La portée de l’arrêt de la Cour Européenne des Droits de l’Homme (CEDH) du 5 juin

 

2) Les analyses et réactions éclairantes de diverses personnalités

  • Tugdual Derville, délégué général d’Alliance VITA. KTO, 9 juin 2015.
  • Pr Xavier Ducrocq, neurologue au CHU de Nancy et conseiller médical des parents de Vincent Lambert. Généthique, 8 juin 2015.
  • Me Jean Paillot, avocat des parents de Vincent Lambert. Généthique, 8 juin 2015.
  • Emmanuel Hirsch, professeur d’éthique médicale à l’université de Paris-Sud. Le Figaro, 4 juin 2015.
  • Bruno Saintôt, s.j., Responsable du département Ethique biomédicale du Centre Sèvres, Paris. CEF, 5 juin 2015.
  • Mgr Philippe Barbarin, archevêque le Lyon. Interview RTL, 7 juin 2015 (vers minute 10).
  • Dr Emmanuel Chevrillon, Médecin spécialiste en rééducation et membre de l’association « France Traumatisme crânien ». KTO, 9 juin 2015.
  • Jean Yves Nau, journaliste et docteur en médecine. Slate, 11 juin 2015.

 

3) La vidéo de Vincent Lambert diffusée le 10 juin 2015

Pour une politique ambitieuse de soins palliatifs en France

Pour une politique ambitieuse de soins palliatifs en France

Pour une politique ambitieuse de soins palliatifs en France

 

Dans le cadre de l’examen par le Parlement, au cours du premier semestre 2015, de la proposition de loi Claeys-Leonetti concernant la fin de vie, de nombreuses voix s’élèvent pour dénoncer l’insuffisance des soins palliatifs en France. Quel est le bilan aujourd’hui de la politique des soins palliatifs mise en œuvre dans notre pays, et quelles mesures concrètes peut-on proposer afin de rendre les soins palliatifs plus performants et accessibles à tous ?

 

I – Le bilan actuel sur les soins palliatifs : la France peut mieux faire

 

Le verdict de la Cour des Comptes est clair : la France peut mieux faire. Dans son rapport annuel 2015 (chapitre « Les soins palliatifs, une prise en charge toujours très incomplète») présenté le 11 février dernier, la Cour des Comptes dénonce des retards et de fortes disparités dans la mise en œuvre du programme national de développement des soins palliatifs 2008-2012. Le texte propose des pistes pour mieux répondre aux attentes très fortes des Français en la matière. Voir Infographie.

Le rapport souligne d’abord l’accès encore globalement insuffisant aux soins palliatifs, même si des progrès notables ont été réalisés. « A l’hôpital, seul un tiers des 238 000 patients décédés en 2009 lors d’une hospitalisation en court séjour et susceptibles de nécessiter des soins palliatifs peuvent être identifiés comme en ayant effectivement bénéficié, soit environ 78000 patients ». Ce chiffre passe à 135000 en 2013.

Le rapport insiste sur un « défaut de données actualisées, fiables et complètes qui traduit la difficulté persistante à faire de la démarche palliative une réelle priorité de santé publique. »

La mise en œuvre du programme 2008-2012 a été prioritairement centrée sur l’hôpital. On constate des progrès importants en cinq ans, notamment une forte progression des unités spécialisées (USP, passées de 90 à 122 soit +35 %, gérant 1301 lits), de lits identifiés (LISP, passés de 3060 à 5057, soit +65 %) et d’équipes mobiles (passées de 337 à 418, soit +24 %) entre 2007 et 2012. Toutefois, le rapport relève des inégalités dans les modalités de financement, qui privilégient le court séjour. A l’échelle du territoire, le rapport constate de très fortes disparités régionales. Le taux d’équipement pour 100 000 habitants varie ainsi de zéro en Guyane à 5,45 lits pour le Nord-Pas-de-Calais.

Enfin, dans sa dernière partie, le rapport s’intéresse aux prises en charge hors de l’hôpital, pour lesquels les progrès apparaissent beaucoup plus limités. Les objectifs concernant le développement des réseaux de soins palliatifs (98 entités recensées en 2011) ont été abandonnés, et les crédits spécifiques gérés par les ARS ont été fondus depuis 2012 dans les enveloppes qui financent les équipes mobiles au sein des hôpitaux. L’hospitalisation à domicile (qui touchait en 2011 près de 100 000 personnes pour 3,7 millions de journées, dont 28% au titre des soins palliatifs) a augmenté d’environ 70% entre 2007 et 2011, mais est loin d’être encore assez développée sur l’ensemble du territoire.

Le rapport déplore également l’absence de prise en considération du développement des soins palliatifs dans les négociations conventionnelles entre l’assurance maladie et les professionnels libéraux de santé. Par ailleurs, il reste d’importantes actions à mener pour développer l’accès aux soins palliatifs dans les établissements médico-sociaux (en priorité dans les EHPAD) et le soutien à l’entourage des malades, afin de prévenir les situations d’épuisement.

En conclusion, la Cour recommande notamment de maintenir une politique clairement identifiée de développement des soins palliatifs, et de donner la priorité à la diffusion des prises en charge palliatives à domicile et dans les EHPAD. Il s’agit ainsi de mieux répondre aux attentes des Français.

 

II – Les promesses, non tenues depuis 2012, d’un nouveau plan de développement des soins palliatifs en France

 

Le 17 juillet 2012, le Président François Hollande a annoncé un nouveau plan de développement des soins palliatifs en visitant la maison médicale Notre-Dame­-du-Lac à Rueil-Malmaison (92) :«Je souhaite donc, et j’en prends l’engagement, que nous développions la diversité de l’offre de soins palliatifs. Telle est l’idée que je me fais du rôle de l’Etat et de la solidarité nationale, travailler au service des Français, en particulier des plus fragiles et des plus faibles. Veiller à l’autonomie, permettre qu’il y ait sur le plan financier des réponses qui soient apportées à la dépendance. Ce sera une réforme qui sera engagée dans les prochains mois. »

Le 12 décembre 2014, le Président de la République a rappelé cet engagement à l’occasion de la remise du rapport Claeys-Leonetti.

Le 10 mars 2015, dans le cadre des débats sur la proposition de loi Fin de vie à l’Assemblée nationale, la ministre de la Santé Marisol Touraine a annoncé qu’un nouveau plan triennal de développement des soins palliatifs serait « lancé dans les prochaines semaines ». A ce jour, rien n’est encore fait.

Il est regrettable que près de trois années aient été ainsi perdues, faisant prendre à la France du retard et alimentant les critiques sur la persistance de situations de « mal mourir » inacceptables.

 

III – Des propositions concrètes pour les soins palliatifs en France

 

De nombreuses recommandations ont été présentées ces dernières années par l’Observatoire National de la Fin de vie, par la Cour des Comptes, ou encore par divers organismes ou personnalités compétentes. D’une façon générale, il faut des objectifs bien définis, des outils d’évaluation et des moyens financiers pour que les mesures choisies trouvent une réelle application concrète sur le terrain. Les orientations qui suivent rejoignent les préoccupations profondes des Français qui sont tous concernés, à un moment ou à un autre, par leur propre fin de vie ou celle de leurs proches.

 

  • Développer l’offre de soins palliatifs en France

Les suggestions suivantes sont particulièrement importantes :

– Considérer l’accès aux soins palliatifs comme un véritable droit opposable pour toute personne en fin de vie.

– Inscrire dans la loi le principe d’un plan pluriannuel de développement des soins palliatifs, expression de la priorité nationale consacrée à cette question.

– Améliorer l’accueil et la prise en charge des personnes âgées en fin de vie aux urgences (15 000 personnes sont mortes aux urgences en 2010. Seules 7,5 % ont bénéficié de soins palliatifs alors que les 2/3 en auraient eu besoin).

– Rendre obligatoire la mise en place d’une infirmière de nuit dans les EHPAD (par présence physique, mutualisation ou astreinte, selon la taille des établissements), comme le préconise l’Observatoire National de la Fin de Vie, d’autant que lorsqu’un établissement dispose d’un tel poste, le taux d’hospitalisation aux urgences est estimé baisser de 37 %.

– Pour les équipes mobiles de soins palliatifs, faciliter les interventions dans les EHPAD.

– Renforcer considérablement la formation aux soins palliatifs des professionnels de santé (en priorité des médecins, infirmières, aides-soignants), que ce soit en formation initiale, où très peu d’heures sont actuellement délivrées, ou en formation continue. La création de chaires d’enseignement en médecine palliative doit faire partie de ces objectifs.

– Intégrer un module « accompagnement de la fin de vie » dans le diplôme de médecin coordonnateur d’EHPAD, et donner à ce dernier le droit de prescrire.

– Mettre en œuvre de nouveaux moyens pour atténuer la solitude des personnes en fin de vie, par la présence plus nombreuse de bénévoles en soins palliatifs, d’accompagnants spirituels, d’associations assurant des animations ou loisirs, d’initiatives solidaires intergénérationnelles.

– Développer les techniques innovantes permettant de mieux prendre en charge la douleur : cryothérapie, kinésithérapie, psychothérapie, hypnothérapie, acupuncture, musicothérapie…

– Charger l’Observatoire National de la Fin de Vie de rédiger un rapport annuel sur la mise en œuvre de ce plan, rapport qui sera transmis au Parlement dans le cadre de son travail d’évaluation des politiques publiques.

 

  • Favoriser le « mourir à domicile» pour ceux qui le souhaitent

Selon un sondage IFOP de 2010, 81 % des Français souhaitent mourir chez eux. Les chiffres de l’Insee nous apprennent qu’en 2013, en France, 57 % des morts sont survenues à l’hôpital, 25 % à domicile et 12 % en maison de retraite. Il conviendrait donc de :

– Favoriser le remboursement des soins palliatifs à domicile par l’Assurance maladie et les mutuelles. L’adoption d’un accord interprofessionnel favorisant la coordination des soins de premier recours et le développement de l’HAD sont également nécessaires.

– S’inspirer du modèle anglo-saxon pour développer les compétences des personnels infirmiers intervenant à domicile (cf Rapport de la Cour des Comptes, p.226).

 

  • Soutenir les familles et les proches des personnes en fin de vie

Le congé de solidarité familiale, créé par la loi du 9 juin 1999 pour permettre aux personnes salariées d’assister un proche « dont la pathologie met en jeu le pronostic vital ou qui est en phase avancée ou terminale d’une affection grave ou incurable», n’a fait l’objet de textes d’application que 9 ans plus tard, en 2008. La création de l’allocation journalière d’accompagnement des personnes en fin de vie, demandée dès le rapport Leonetti de 2005, n’est intervenue qu’en 2010. Ces atermoiements n’ont pas facilité la montée en charge de ce dispositif, dont le nombre de bénéficiaires est resté très limité (1 283 personnes entre avril 2012 et mai 2014).

Il faut donc mieux faire connaître ce dispositif qui permet de soulager l’entourage souvent très sollicité, isolé et parfois en situation d’épuisement. Il faut pouvoir vivre ces moments difficiles, mais qui sont souvent des « instants précieux », dans les meilleures conditions.

 

 

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soins palliatifs en france