Midazolam et fin de vie à domicile : sortir de la confusion

Midazolam et fin de vie à domicile : sortir de la confusion

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Midazolam et fin de vie à domicile : sortir de la confusion

 

L’annonce de la disponibilité prochaine du Midazolam dans les pharmacies de ville en même temps que la publication par la Haute autorité de santé (HAS) d’une mise à jour de la pratique de la sédation profonde et continue jusqu’au décès induit une grave confusion sur les indications de ce produit et sur l’accompagnement des personnes en fin de vie à domicile.

La démarche de la HAS

Elle s’inscrit dans la continuité du travail entrepris à la suite du vote de la loi Claeys Leonetti de 2016, pour préciser l’encadrement des stratégies de prise en charge de la douleur, dont la pratique exceptionnelle de la sédation profonde et continue jusqu’au décès. Ce travail a abouti à la publication en 2018 du guide parcours de soins « Comment mettre en œuvre une sédation profonde et continue maintenue jusqu’au décès ? », proposant des outils pour aider à la décision et à la mise en œuvre de cette sédation.

Le texte vient d’être mis à jour pour préciser les modalités d’utilisation des médicaments, y compris hors AMM*, pour accompagner les patients en fin de vie par une sédation, et « qu’elle soit proportionnée, profonde, transitoire ou maintenue jusqu’au décès”

En réalité la HAS décrit donc les médicaments de la sédation et leurs modalités d’utilisation et élabore des recommandations sur l’« antalgie des douleurs rebelles et [les] pratiques sédatives chez l’adulte : prise en charge médicamenteuse en situations palliatives jusqu’en fin de vie » du fait qu’aucune molécule n’a actuellement d’AMM dans ces indications de pratiques sédatives.

Le Midazolam, actuellement disponible uniquement en milieu hospitalier, est le médicament recommandé en première intention pour la sédation.

Dans son communiqué du 10 février 2020, la HAS demande aux pouvoirs publics, sur la base de ces recommandations, de permettre la dispensation effective de ces médicaments aux médecins généralistes libéraux qui prennent en charge des patients en fin de vie à leur domicile.

*L’AMM (Autorisation de mise sur le marché) concerne les caractéristiques attribuées à un médicament et à son utilisation. Elle est accompagnée : du Résumé des Caractéristiques du Produit  (RCP) et de la notice pour le patient.

Qu’est-ce que le Midazolam ?

Le Midazolam, plus connu sous l’ancien nom commercial d’Hypnovel® est la seule benzodiazépine actuellement sur le marché avec un temps d’action extrêmement court. Les benzodiazépines sont des molécules utilisées en psychiatrie, contre l’anxiété essentiellement, en neurologie pour le traitement des épilepsies, en anesthésie-réanimation pour la sédation, en addictologie pour aider au sevrage de l’alcool…

Dans cette classe des benzodiazépines, les molécules comme le Lexomil®, Xanax®, Valium®, Rivotril®… sont bien connues.  Une des problématiques de ces molécules est leur durée d’élimination avec des demi-vies qui peuvent aller jusqu’à presque 7 voire 10 jours. L’intérêt du midazolam est d’être éliminé rapidement avec une demi-vie de l’ordre de deux heures, ce qui évite des risque d’accumulation et est un atout essentiel dans l’équilibre des traitements, particulièrement chez les sujets âgés, ou chez tout sujet présentant des décompensations organiques (cardiaques, respiratoires, hépathiques, rhénales…) que l’on peut voir en fin de vie. Il est donc pertinent d’utiliser le Midazolam.

Cela a même pu être recommandé, en fin de vie ou non, dans le cadre de réalisation de soins anxiogènes ou simplement pour lutter contre une anxiété souvent présente. Sur un plan pharmacologique, il est donc nécessaire de donner aux médecins généralistes l’accès au Midazolam. Cette molécule existait d’ailleurs en vente en officine sous la forme du Versed® jusqu’au 30 avril 2013.

L’ANSM (Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé)  recommande le Midazolam hors AMM en cas de réalisation de soins douloureux en complément d’un traitement antalgique, en raison de l’anxiolyse qu’il entraîne et de son effet amnésiant (accord professionnel).

Actuellement ce produit a reçu une AMM dans un contexte d’anesthésie. Le ministère de la santé a annoncé modifier l’AMM du Midazolam pour intégrer la sédation, ce qui provoque un amalgame entre ce produit et la sédation profonde et continue jusqu’au décès.

La sédation profonde et continue jusqu’au décès, une pratique exceptionnelle

La « sédation profonde et continue maintenue jusqu’au décès » est un traitement très exceptionnel qui était pratiqué par les professionnels, avant le vote de la loi fin de vie de 2016, en cas de souffrances réfractaires intolérables ne pouvant être soulagées par aucun autre moyen et lorsque le pronostic vital était engagé à court terme. Dans son principe, la sédation conduit à altérer la conscience du patient et le coupe de toute relation.

Les doses de sédatifs peuvent être proportionnelles à l’intensité des symptômes et réversibles. Les professionnels privilégient au maximum l’utilisation d’analgésiques permettant aux patients de garder leur conscience. A l’inverse, endormir un patient dont on sait qu’il ne se réveillera pas est difficile à vivre pour les proches comme pour les soignants. Le texte de la HAS, le précise très justement et prévoit un accompagnement spécifique des différents acteurs pour que ces situations, qui doivent demeurer exceptionnelles, ne soient pas banalisées.

La loi a prévu que le patient puisse avoir l’initiative de la demande de sédation. Couplée à l’arrêt ou la limitation de traitements ou de soins, dont la nutrition et l’hydratation, cette pratique comporte des risques de dérives euthanasiques dans son application. Alliance VITA les a dénoncées lors des débats sur la révision de la loi avec le mouvement Soulager mais pas tuer dont elle fait partie et qui rassemble également des professionnels de santé. Si les recommandations de la HAS tentent de lever les ambiguïtés, certaines persistent.

Ce que dit la loi

A la suite des recommandations de la mission d’évaluation de la loi du 22 avril 2005 diligentée après l’affaire Chantal Sébire (2008), qui avait amené à une mission d’évaluation de la loi du 22 avril 2005, le code de déontologie avait été modifié et préconisait dans le §III de son article 37 : « (…), le médecin, même si la souffrance du patient ne peut pas être évaluée du fait de son état cérébral, met en œuvre les traitements, notamment antalgiques et sédatifs, permettant d’accompagner la personne (…). Il veille également à ce que l’entourage du patient soit informé de la situation et reçoive le soutien nécessaire. »

Le principe du maintien d’une sédation et cet article du Code de déontologie n’étaient pas explicitement repris dans la loi du 22 avril 2005.

La loi du 2 février 2016 a introduit la notion de  sédation profonde continue et maintenue jusqu’au décès dans des conditions très précises : à la demande du patient d’éviter toute souffrance et de ne pas subir d’obstination déraisonnable. 

L’obstination déraisonnable est définie par la loi : elle correspond à des actes de prévention, d’investigation ou de traitements et de soins qui ne doivent pas être mis en œuvre ou poursuivis lorsqu’ils apparaissent inutiles, disproportionnés ou lorsqu’ils n’ont d’autre effet que le seul maintien artificiel de la vie. Deux ans après la promulgation de la loi, la HAS a publié en février 2018 un texte définissant les modalités de la sédation profonde continue maintenue jusqu’au décès.

Le temps nécessaire à la rédaction des recommandations de la HAS témoigne des difficultés d’appréciation des modalités concrètes d’une mise en oeuvre qui doit rester exceptionnelle et ne peut être banalisée.

 D’où vient la confusion ?

1/ Dans sa lettre au Syndicat des Médecins Libéraux, la ministre de la Santé, Agnès Buzyn assimile le Midazolam à la sédation profonde et continue. Cela risque d’occulter sa réelle utilité pour l’orienter vers une pratique « banalisée », alors que ce type de sédation doit rester exceptionnel. 

Donner l’accès aujourd’hui au Midazolam après avoir voté la loi Claeys-Leonetti en février 2016 augmente le risque d’un glissement vers davantage d’euthanasies masquées.

2/ Par ailleurs, un médecin généraliste de Seine-Maritime a été accusé en décembre dernier par la justice d’avoir involontairement causé la mort de cinq personnes âgées en leur prescrivant du Midazolam, présenté comme un puissant sédatif réservé à un usage hospitalier.

Il s’était procuré illicitement ce produit auprès de sa femme, anesthésiste. La procédure étant en cours, il est difficile de se prononcer. Ce médecin a expliqué avoir utilisé ce produit anxiolytique pour soulager ses patients, pas pour les faire mourir : « En utilisant ce médicament, il ne s’agissait ni d’accélérer la mort, ni de prolonger inutilement le patient. Il s’agissait vraiment, au sens strict, d’un accompagnement qui permet au patient de rester chez lui et aussi à sa famille de pouvoir vivre le plus paisiblement possible ces moments qui sont toujours difficiles. »

La mise à disposition pour les médecins généralistes libéraux du Midazolam peut-elle entraîner une augmentation du nombre d’euthanasies masquées ?

Il ne devrait pas y avoir de relation de cause à effet. Sauf à réduire l’accompagnement de fin de vie à pratiquer une sédation jusqu’au décès. Grâce à la bonne utilisation de cette molécule, la qualité du soin devrait être améliorée. En l’occurrence, dans les cas de douleurs amplifiées par une anxiété majeure, l’emploi approprié du Midazolam peut permettre de réduire ce type de demandes « d’en finir », au demeurant très rares, souvent en lien avec une insuffisance de soins.

Le défi est davantage celui de la formation des médecins à l’utilisation de ce produit, des conditions d’une réelle collégialité en cas de son utilisation sédative. C’est le contexte de la loi Claeys-Leonetti qui entretient une certaine confusion.

 

 

Bioéthique : principales modifications adoptées par le Sénat en 1ère lecture

Bioéthique : principales modifications adoptées par le Sénat en 1ère lecture

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Le Sénat a adopté la loi bioéthique à quelques voix près (153 voix pour, 143 contre) le 4 février 2020.

Entre tentatives d’améliorations qui peuvent être saluées et aggravations, l’économie du texte ne change pas fondamentalement.

Les sénateurs ont multiplié les votes contradictoires. A l’arrivée, ce texte demeure inacceptable, en raison des graves injustices qu’il fait peser sur les générations à venir en cédant à l’individualisme et au scientisme. Jamais un texte bioéthique n’a été aussi éloigné de l’éthique, qui se doit d’être garante des droits humains, de la protection de la vie, de son intégrité et de la dignité humaine.

Toutes ces nouvelles dispositions pourront être remises en cause par les députés en seconde lecture. Le texte modifié a été transmis à l’Assemblée nationale : la date de l’examen en seconde lecture n’est pas encore connue, sans doute courant avril 2020.

Maintien de la “PMA sans père”, sans remboursement

L’article 1 qui étend l’assistance médicale à la procréation (aussi couramment dénommée PMA) avec donneur aux femmes seules ou à deux, sans partenaire masculin, a été l’objet d’une longue discussion pour être finalement adopté avec des modifications notables déjà votées en commission spéciale pour certaines : le critère d’infertilité médicale a, en effet, été réintroduit en commission spéciale pour les couples composés d’un homme et d’une femme, assorti de la prise en charge par l’assurance maladie. En revanche, les sénateurs ont supprimé le remboursement de la PMA avec donneur pour les femmes seules ou en couple. La mention « nul n’a le droit à l’enfant » ajoutée à juste titre en amont de ce même article perd de son effectivité, avec l’adoption de la « PMA sans père ».

Dans ce contexte évolutif de la pratique de la PMA, des sénateurs ont plaidé en vain pour qu’une clause de conscience soit instaurée pour les médecins et personnels de santé qui ne souhaitent pas participer à sa pratique, quelles qu’en soient les raisons d’y recourir. De plus, la commission spéciale a supprimé la mesure d’instauration d’un plan national infertilité, introduite par les députés pour favoriser les recherches sur les causes de l’infertilité et leur prévention, au prétexte que cela ne relevait pas de la loi. L’infertilité étant un enjeu sanitaire majeur, cette focalisation sur les seules techniques de procréation artificielle, contraignantes physiquement et psychologiquement, pour la femme et le couple ne peut qu’interroger, alors que la moitié des couples qui y ont recours n’auront pas d’enfants.

Les sénateurs sont, par contre, revenus en séance sur le double-don de gamètes pour l’interdire. De même, les sénateurs ont adopté un amendement du gouvernement, pour que seuls les centres à but non lucratif soient autorisés à accueillir, stocker et congeler les embryons. Cette mention avait été supprimée en commission spéciale, porte ouverte à la mise en place progressive du marché de la procréation.

Suppression de l’autoconservation des gamètes

L’article 2 ouvrant l’autoconservation des ovocytes pour les femmes, sans raison médicale, pour procréer plus tard par fécondation in vitro a été rejeté.

Remise en cause de la levée de l’anonymat des donneurs de gamètes

La levée de l’anonymat du don de gamètes, autre mesure phare de ce texte, a, par contre, été fortement remise en cause par le Sénat. Le texte de loi initial, voté en 1ere lecture par l’Assemblée nationale, prévoyait que le donneur devait consentir à lever son identité à la majorité de l’enfant s’il en fait la demande. Les sénateurs ont modifié cet article pour faire primer la volonté du donneur qui pourrait décider ou non de divulguer son identité au moment où l’enfant en ferait la demande. Cette modification majeure vide en partie l’effectivité de cette levée. Cela constitue une véritable bombe à retardement au détriment des enfants et une terrible hypocrisie.

Suppression de deux filiations maternelles

Concernant les règles d’établissement de la filiation dans le cadre de PMA réalisées par des couples de femmes, le texte de loi a été également largement modifié. Les sénateurs ont réécrit presque intégralement l’article. Le texte prévoyait originellement l’établissement d’une filiation par reconnaissance anticipée de deux « femmes ». Désormais, l’établissement de deux filiations maternelles ou paternelles à l’égard du même enfant est rendu impossible. Une distinction est opérée entre la femme qui accouche (automatiquement considérée comme mère de l’enfant) et l’autre femme (qui doit adopter l’enfant). Par ailleurs, les couples pacsés ou en concubinage peuvent désormais adopter, et la procédure d’adoption pour le deuxième conjoint serait facilitée.

Interdiction de retranscription à l’état civil – Gestation par Autrui (GPA)

La question de la Gestation par Autrui (GPA), qui avait été introduite en Commission spéciale, a été de nouveau évoquée. Si l’interdiction de la retranscription à l’état civil français des enfants nés de GPA à l’étranger a bien été maintenue (après avoir été adoptée par la Commission), un amendement de la rapporteur, Muriel Jourda, autorise en revanche la retranscription des jugements d’adoption, sans mention de l’injustice que constitue cette pratique. Pour rappel, une jurisprudence de la Cour de cassation avait récemment autorisé la retranscription automatique de ces actes de naissance, alors que la GPA constitue une fraude à la loi.

Les articles 5, 6 et 7, portant respectivement sur la greffe, le don de cellules souches hématopoïétiques et le consentement des personnes sous mesure de protection, ont été adoptés.

Principe de précaution bioéthique rejeté

En début de discussion, un amendement demandant d’inscrire un principe de précaution dans la loi a été rejeté. L’argumentation de la garde des Sceaux, Nicole Belloubet, est révélatrice « le principe de précaution est à la fois un système d’évaluation et la mise en place de mesures proportionnées et provisoires en cas d’atteinte grave et irréversible. Or en matière de bioéthique je pense que nous nous interrogerions à l’infini sur ce qui est une atteinte grave et irréversible, nous aurions ici une difficulté. » C’est justement ce qui mobilise tous ceux qui alertent sur ce texte et c’est aussi ce qui justifie notre opposition.

Suppression des tests génétiques « récréatifs » et de dépistage pré-conceptionnel

Le Sénat a également voté la suppression des articles 10bis et 10ter, qui avaient été adoptés en Commission spéciale. L’article 10bis, à l’initiative du sénateur et rapporteur Olivier Henno (Groupe Union Centriste) ouvrait la possibilité d’avoir recours à des tests génétiques récréatifs. Le même sénateur avait déposé un amendement créant un article 10ter, pour permettre à des couples d’avoir recours à un dépistage préconceptionnel « à titre expérimental », c’est-à-dire une analyse des caractéristiques génétiques des deux membres d’un couple, sans raisons médicales préalables, afin de savoir s’ils sont « compatibles » ou s’il y a un risque potentiel de transmission d’une maladie génétique connue à leurs futurs enfants. Dans la loi actuelle, le dépistage préconceptionnel est très rarement pratiqué, seulement lorsqu’il existe des maladies génétiques héréditaires dans la famille. Défendant la suppression de cet article, la ministre de la Santé, Agnès Buzyn, a déclaré : « Tout le monde se sentira obligé un jour de faire ce genre de test. […] cela donne l’image d’une société où le génome contrôle tout, où l’humain contrôle sa descendance, le mythe de générations futures indemnes. »

Suppression de création d’embryons transgéniques et chimères

Moins évoquée dans les médias, la recherche sur les embryons humains est pourtant un enjeu de taille du projet de loi. Les sénateurs ont finalement voté la suppression de l’article 17, qui autorisait la création d’embryons chimères et transgéniques. Alliance VITA a été lanceur d’alerte pour dénoncer la création de chimères, dans l’ignorance générale, alors que leurs promoteurs tentaient de dissimuler ce basculement derrière des changements de vocabulaire, tels que : l’introduction de cellules embryonnaires humaines ou de cellules souches pluripotentes induites (IPS) dans des embryons d’animaux..

D’autre part, le projet de loi entend autoriser la recherche sur les gamètes artificiels. Au Sénat, un amendement est venu préciser que les gamètes artificiels (créés à partir de cellules humaines reprogrammées, dites IPS, ou à partir de cellules souches embryonnaires humaines) ne peuvent pas être fécondés pour constituer un embryon.

Allongement du délai à 21 jours pour la recherche sur l’embryon

En revanche, toutes les demandes pour que soient limitées et davantage encadrées les recherches sur les cellules souches embryonnaires ou les embryons humains ont été rejetées. La recherche sur les cellules souches embryonnaires ne sera plus soumise qu’à déclaration, et non pas à demande d’autorisation préalable, comme si la provenance de ces cellules, un être humain au commencement de sa vie, n’avait plus d’importance. Quant aux pré-requis pour obtenir une autorisation de recherche sur l’embryon, ils n’ont de cesse d’être fragilisés à chaque révision de la loi. Le Sénat propose que ce qui « vise à améliorer la connaissance de la biologie humaine » devienne une raison suffisante ; nous sommes loin de l’exigence des progrès thérapeutiques majeurs exigés lors des premières autorisations accordées par la loi de 2004. Le Sénat propose que la recherche sur l’embryon humain soit autorisée jusqu’au 21ème jour, un stade de développement très avancé, d’un point de vue de la mise en place du système nerveux notamment. Les députés avaient voté 14 jours. La pratique actuelle est de 7 jours maximum, date symbolique majeure où l’embryon est implanté dans l’utérus maternel dans les conditions naturelles.

Rejet de l’extension du Diagnostic préimplantatoire (DPI)

Le DPI-HLA (aussi appelé « bébé médicament »), qui avait été réintroduit en commission spéciale après avoir été supprimé par l’Assemblée nationale, a été confirmé par les sénateurs, qui ont refusé la demande de suppression. Cette pratique hautement controversée éthiquement n’est plus pratiquée depuis 2014. Elle consiste à effectuer une double sélection d’embryons obtenus par fécondation in vitro : d’une part pour sélectionner les embryons indemnes de la maladie d’un membre d’une fratrie et d’autre part choisir parmi ceux-ci les embryons génétiquement compatibles avec lui, afin de greffer les cellules souches de cordon ombilical prélevées sur le nouveau-né à son ainé malade. La constitution de stock de cellules de sang de cordon, offrant une grande variété de typage, décidée lors de la dernière loi de bioéthique avait comme objectif notamment d’éviter cette pratique.

Par contre, le Sénat a voté la suppression de l’article 19ter, introduit par la Commission spéciale, qui rendait possible le DPI-A (le diagnostic préimplantatoire pour la recherche d’aneuploïdies, c’est-à-dire la recherches d’anomalies chromosomiques sur des embryons issus de Fécondation in vitro, dont la trisomie). Cette question est centrale, puisque cela aboutirait à multiplier le recours à cette pratique (moins de 200 enfants naissent chaque année après DPI) et à accroire l’eugénisme : la sélection d’embryons s’élargirait à des critères non héréditaires, et donc imprévisibles.

Clause de conscience revue, pour les médecins en cas d’Interruption médicale de grossesse (IMG)

Le Sénat en commission spéciale a supprimé la clause de conscience spécifique à l’IMG des personnels de santé dans la mesure où elle est assurée pour tout type d’interruption de grossesse (art. par l’art L2212-8 du code de la santé publique : « Aucune sage-femme, aucun infirmier ou infirmière, aucun auxiliaire médical, quel qu’il soit, n’est tenu de concourir à une interruption de grossesse pour motif médical. »). Concernant les médecins, la commission a retenu cependant la mesure contenue dans le texte du gouvernement, c’est à dire l’alignement sur la clause de conscience concernant l’IVG qui oblige à référer la patiente à un autre praticien. « Un médecin n’est jamais tenu de pratiquer une interruption de grossesse pour motif médical mais il doit informer, sans délai, l’intéressée de son refus et lui communiquer immédiatement le nom de praticiens susceptibles de réaliser cette intervention. ». Les sénateurs ont confirmé également la suppression de l’autorisation parentale pour les mineures et la suppression de la proposition d’un délai d’une semaine de réflexion, mesures contenues dans le projet de loi initial présenté par le gouvernement.

Supprimer la proposition d’un délai de réflexion d’une semaine pour avoir recours à une IMG, et ne plus exiger le consentement des parents pour les mineures, conduit à banaliser davantage un acte qui a de lourdes conséquences humaines et psychologiques, au détriment des alternatives que constituent l’accueil et la prise en charge des nouveau-nés malades ou handicapés et de leurs familles.

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Pour aller plus loin :

Réaction d’Alliance VITA au vote du PJL en 1ère lecture au Sénat

 

Décryptage du PJL voté en 1ère lecture à l’Assemblée nationale

 

Marchons Enfants ! : discours de Caroline Roux le 19 Janvier

Marchons Enfants ! : discours de Caroline Roux le 19 Janvier

Caroline Roux, déléguée générale adjointe d’Alliance VITA, sur le podium de la mobilisation “Marchons Enfants !” contre le projet de loi bioéthique.

Si nous sommes là aujourd’hui, bravant le froid, venant de loin pour certains, ce n’est pas pour
défendre un pré carré.

Nous sommes aujourd’hui ici pour défendre les plus fragiles et un monde qui accueille la biodiversité humaine comme une chance.

Cette loi nous concerne tous et impacte fortement les générations à venir : alors que nous prenons conscience des dégâts infligés à la nature et à l’environnement, cette loi vient percuter l’écologie première qui est celle à garantir aux humains.

Les parlementaires discutent de progrès, de maternité, de paternité, de handicap et de vie humaine. Il est essentiel de distinguer ce qui relève du progrès de ce qui provoque discrimination et injustice.

Est-ce un progrès d’effacer la paternité derrière les techniques de procréation ?

Est-ce un progrès de résumer la place de l’homme à ses gamètes et de le supprimer délibérément de la filiation d’un enfant ?

Est-ce un progrès d’artificialiser la maternité, d’imposer aux femmes des traitements hormonaux, sans raison médicale, pour congeler leurs ovocytes derrière la promesse illusoire d’une maternité par PMA, impossible à garantir plus tard ?

Est-ce un progrès de fermer les yeux sur la fraude à la loi que constitue la marchandisation des corps de femmes étrangères, réduites à être des mères porteuses ?

Est-ce un progrès de « traquer » les anomalies et de supprimer les êtres fragiles plutôt que de les accueillir et de tenter de les guérir ?

Certains veulent interdire que l’on s’exprime.

Ce n’est pas un climat de débat mais bien d’intimidation. C’est inacceptable. Et nous ne nous tairons pas.

La société progressera si on respecte la paternité et les hommes dans toutes leurs dimensions, la maternité et les femmes dans toutes leurs richesses, et la différence en accueillant la vulnérabilité.

La société progressera si chaque être humain est pris en considération et pas sélectionné, ou source de profit. Si les enfants ne sont pas fabriqués en kit, hors sol, sans racine. Les humains ne sont pas des machines, ni des objets qui se marchandent ou qui se jettent.

Est-ce un progrès enfin d’utiliser l’embryon humain, celui que nous avons tous été, comme un matériau de laboratoire, de le modifier génétiquement, de créer des chimères qui associent ses cellules avec des cellules animales ou encore de fabriquer des gamètes artificiels ?

Est-ce un progrès de ne plus respecter l’intégrité de l’espèce humaine et de s’autoriser des expériences d’apprenti-sorciers ?

Nous demandons que le principe de précaution qui concerne à juste titre l’environnement s’applique aussi prioritairement à l’espèce humaine.
En tant que lanceurs d’alerte, en posant ces questions cruciales, nous sommes des précurseurs.
Précurseurs d’un monde qui saura protéger les êtres humains en même temps que leur environnement.

Ne nous y trompons pas, si nous sommes partis de la Place de la Résistance, ce n’est pas pour revenir en arrière. C’est pour aller de l’avant.

Le gouvernement doit arrêter ce processus qui va à l’encontre de la dignité et des droits humains.

Nous demandons aux parlementaires d’avoir le courage de s’opposer à cette loi qui, en l’état, ne mérite pas de s’appeler bioéthique.

Leur responsabilité est immense, dès maintenant, et pour les générations à venir. Et la nôtre aussi.

Votre présence est une immense chance ainsi que celle de ceux qui nous suivent de loin.

Quoi qu’il arrive, rappelez-vous que nous sommes les acteurs de la société. Nous ne baisserons pas les bras pour combattre les injustices et les discriminations.

Le progrès, c’est d’insuffler à la bioéthique une écologie qui soit véritablement humaine.

Bioéthique : principales modifications adoptées par le Sénat en 1ère lecture

[CP] PJL bioéthique : Alliance VITA partage de nouveau ses inquiétudes

 PJL bioéthique : Alliance VITA partage de nouveau ses inquiétudes

 

Derrière la question emblématique de la “PMA sans père” se cachent bien d’autres enjeux bioéthiques, tout aussi graves 

 

Ce projet de loi induit une triple aggravation des transgressions éthiques :

Dans le domaine de la procréation artificielle, l’abandon du critère médical d’infertilité pour accéder à la PMA ouvre la porte à un « droit à l’enfant » sans père, voire à des « bébés hors sol ». Même si la GPA reste proscrite, la France glisse vers un marché de gamètes et de la procréation, aggravé par la promesse de l’autoconservation ovocytaire, véritable leurre pour les femmes ;

  • En ce qui concerne l’embryon humain, sa recherche est dérégulée jusqu’à 14 jours ; les embryons transgéniques et embryons chimères sont légalisés. De même les gamètes artificiels ;
  • L’eugénisme s’accroît aussi, avec l’abandon d’une proposition d’une semaine de réflexion avant l’IMG, la multiplication des tests prénataux et le refus d’encadrer plus strictement DPN et DPI.

Au cours de ses multiples auditions, notamment devant la commission spéciale de l’Assemblée nationale, Alliance VITA a dénoncé l’absence de prise en compte de deux priorités :

 

  •  La lutte contre l’infertilité qui concerne un couple sur dix ; sa véritable prévention et la restauration de la fertilité sont les parents pauvres des politiques de santé publique.
  • La lutte contre l’eugénisme anténatal dont notre pays détient déjà le triste record mondial du fait de la performance de son système de santé et de l’État providence.

« Alors que de plus en plus de Français sont concernés par l’infertilité (1 couple sur 10 consulte) et que trop d’enfants souffrent déjà de l’absence d’un père, cette loi qui oriente les fonds publics et la médecine vers la PMA sans père pour des femmes qui n’ont pas de problème d’infertilité est un véritable scandale de santé publique.

Les réserves de l’Académie de médecine qui nous met en garde contre une « rupture anthropologique majeure » devraient avoir un autre écho que le mépris. Nous avons besoin d’une politique de restauration de la fertilité qui ne cède pas à la surenchère techniciste de la procréation artificielle. Nous demandons aussi qu’on s’engage contre l’eugénisme qui, en France, trie comme jamais, et plus que partout ailleurs, les êtres humains.

Quel paradoxe de constater que la qualité de notre système de santé doublé de la générosité unique de notre Etat providence conduit à l’exclusion du plus fragile (la personne handicapée) et à la loi du plus fort (le droit de l’adulte au détriment de l’intérêt de l’enfant) ! Nous manifesterons le 6 octobre pour que cela change. »

Alliance VITA appelle à la marche inter-associative du 6 octobre à Paris.

 

Retrouvez tous nos communiqués de presse.

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CP – Une campagne inédite pour expliquer les directives anticipées.

CP – Une campagne inédite pour expliquer les directives anticipées.

A l’occasion du 2 novembre 2018, Alliance VITA lance une campagne digitale et une vidéo inédite pour informer et sensibiliser les Français à la préparation de leur fin de vie au travers de la rédaction de leurs directives anticipées, en conformité avec la dernière loi fin de vie du 2 février 2016.

Par son expérience d’écoute, Alliance VITA a constaté combien la confiance et le dialogue entre les soignants, les soignés et leurs proches sont déterminants pour optimiser l’accompagnement des personnes dans des situations toujours délicates et souvent éprouvantes.

C’est dans cet esprit qu’Alliance VITA a lancé son guide des Directives anticipées, pour informer les personnes sur les nouveaux dispositifs prévus dans la dernière loi fin de vie et en faciliter l’appropriation par les Français.

Pour Tugdual Derville, délégué général d’Alliance VITA : « Nous observons que les questions liées à la fin de vie et au deuil relèvent trop souvent du tabou ; elles sont passées sous silence ou escamotées, par peur ou ignorance. Les directives anticipées sont négligées pour les mêmes raisons.

Nous encourageons les Français à rédiger leurs directives anticipées, non pas pour « protocoliser » des parcours de fin de vie toujours imprévisibles, mais pour favoriser un meilleur dialogue entre soignants et personnes soignées.

Cela nécessite de se poser à temps les bonnes questions : à propos des traitements que l’on veut refuser ou des dons d’organes par exemple.

Pour nous, les directives anticipées ne sont en rien une solution miracle face à la complexité des enjeux à la fin de la vie ; elles sont utiles pour faciliter le dialogue, et ajuster les réponses à la situation d’une personne et à l’évolution de son état. »