Quel regard sur les personnes âgées en France ?

Quel regard sur les personnes âgées en France ?

Quel regard sur les personnes âgées en France ?

 

 

Quel regard est porté par la société sur les personnes âgées, et quelle est leur situation ? La journée mondiale des personnes âgées est célébrée le 01 octobre de chaque année. Notre société vieillit et cette tendance va se poursuivre dans les prochaines années. La situation et la perception des personnes âgées dans la société sont donc des enjeux importants.

 

Situation des personnes âgées en France : la longue tendance à l’amélioration de leur situation économique est-elle en train de se retourner ?

Dans un rapport détaillé présenté à l’occasion de cette journée, les Petits Frères des Pauvres apportent de nombreuses informations sur les situations de pauvreté qui touchent les personnes âgées.

Sur une perspective historique longue, la situation des personnes âgées s’est beaucoup améliorée sur les dernières décennies. Un élément notable et fondateur est la création, au sortir de la seconde guerre mondiale, de la Sécurité sociale et du régime des retraites. En 1956, le premier minimum social est créé au profit des personnes âgées. L’idée est d’attribuer une allocation à un assuré sans que celle-ci ne dépende des cotisations versées.

De nombreux facteurs ont contribué à améliorer la situation financière des personnes âgées : plein emploi dans les années après-guerre, plus forte participation des femmes au marché du travail, création des régimes de retraite complémentaire rendus obligatoires en 1972. Le rapport constate que “si on analyse la pauvreté des personnes âgées par l’approche monétaire du taux de pauvreté, le nombre de personnes de 65 ans et plus sous le seuil de pauvreté a été divisé par 3,5 entre 1970 et 2006, avec un taux de pauvreté qui a chuté de 35 % en 1970 à 10 % en 2006“. Selon l’INSEE, “En 2022, le taux de pauvreté des 65 ans et plus est de 11,1 % vs 14,4 % pour l’ensemble de la population“.

Le revenu médian mensuel, c’est-à-dire le revenu qui sépare en deux la population (50% de la population gagne plus, 50% gagne moins que ce niveau médian) est supérieur d’environ 5% pour les retraités, comparé à l’ensemble de la population.

Ces statistiques globales ne doivent cependant pas masquer les disparités de situation au sein de la population âgée. On dénombre par exemple 1.4 million de personnes de plus de 65 ans sous le seuil de pauvreté, défini comme 60% du revenu médian de toute la population (soit un revenu disponible de 1158 euros pour une personne seule). Les auteurs notent que le taux de pauvreté reste plus important pour les femmes que pour les hommes.

Ainsi, ce taux touche 6.6% des hommes et 10.1% des femmes âgés de plus de 75 ans (chiffres de 2018). D’autres facteurs que le genre sont recensés pour décrire les inégalités : le fait de vivre seul plutôt qu’en couple, et le lieu d’habitation. Les auteurs rappellent que “les pensions versées aux retraités résidant dans les départements d’Île-de-France sont très supérieures à la moyenne nationale, de 40 % à Paris, 36 % dans les Yvelines et les Hauts-de-Seine et 23 % dans l’Essonne. À l’inverse, les départements du nord, du nord-est de la France ainsi que du Massif central présentent des niveaux de pensions inférieurs à la moyenne nationale“.

Avec les travaux menés depuis 2017 dans leur baromètre sur la solitude et l’isolement, les Petits Frères des pauvres “alertent sur les liens entre isolement des ainés et pauvreté“. Un chiffre, parmi d’autres, illustre ce propos. 5% des personnes âgées au revenu inférieur à 1000 euros est en situation de mort sociale. C’est 1% pour les personnes âgées au revenu supérieur à 4500 euros.

Ces chiffres dessinent une situation, et sont à compléter par les tendances. La perspective, selon le rapport, n’est pas bonne. “Même si leur taux de pauvreté reste toujours inférieur à celui du reste de la population, il est passé de 5,9 % en 2016 à 10,6 % en 2022 pour les 65-74 ans et de 8,2 % à 11,4 % pour les 75 ans et plus” (source INSEE).

Reprenant une image parlante, le rapport parle de “trappe à la pauvreté” pour les personnes âgées vivant seule : “le taux de pauvreté des personnes âgées vivant seules est en hausse constante depuis 2016 (+ 7,8 points) et depuis 2019, il est supérieur au taux de pauvreté de l’ensemble de la population avec un écart de plus en plus important d’année en année: + 1,3 % en 2019, + 2,7 % en 2020, + 3,4 % en 2021, + 4,4 % en 2022“.

Ces chiffres rejoignent le constat d’acteurs de terrain. Dans un rapport publié en 2023, le Secours catholique “constate que parmi les Français rencontrés par l’association, la part des plus de 60 ans est passée de 6 % à 13 % en dix ans“.

 

Quelle est la perception du grand âge par la population ?

A l’occasion de cette semaine bleue, le Conseil de l’âge (HCFEA Haut Conseil de la Famille, de l’Enfance et de l’Age) a lancé une enquête “afin de disposer de la perception d’un échantillon représentatif de la population de la vieillesse, du vieillissement de la population, des personnes de 65 ans et plus, ainsi que des comportements âgistes“.

Il ressort du sondage que pour la majorité des français, l’entrée dans la vieillesse débute à 65 ans. Sans surprise, les tranches les plus jeunes de la population portent un regard différent que la moyenne. Ainsi, 49% des moins de 35 ans estiment que l’on est “vieux” à 55 ans. Cet différence d’appréciation se retrouve dans le vocabulaire employé. Si les termes de “retraités”, les “séniors” et “les papis et mamies” sont les termes les plus employés pour désigner les personnes de plus de 65 ans, là encore, la population plus jeune emploie d’autres termes. Les 18-24 ans utilisent en priorité “personnes âgées”, “anciens” et “vieux”.

Interrogé sur ce qu’apportent les personnes âgées à la société, l’ensemble de la population toutes tranches d’âge confondues appuie fortement l’idée que “les personnes de 65 ans et plus peuvent apporter beaucoup de choses aux autres” et qu’ “il est tout aussi agréable de fréquenter des personnes de 65 ans et plus que des jeunes“. Mais dans les tranches 18-49 ans, ils sont un peu plus d’un tiers à estimer que “les personnes de 65 ans et plus sont lentes et font perdre du temps aux autres“.

Cette opinion est intériorisée par certaines personnes âgées : 16% des 70 ans et plus l’affirment également. Reflet des débats sur le partage de la croissance entre génération, 64% des 35-49 ans et 51% des 18-24 ans affirment que “les personnes de 65 ans et plus ont bénéficié de conditions privilégiées par rapport aux jeunes générations“.

L’enquête a cherché aussi à mesurer la discrimination sur la personne âgée, ou “âgisme”. En synthèse, les auteurs écrivent que : “non négligeables, les phénomènes d’âgisme restent relativement peu fréquents au sein de la population et se manifestent en premier lieu par des moqueries ou des paroles déplacées“.

Le vieillissement de la société étant une réalité qui va durer, travailler sur la perception de l’âge et des personnes âgés est un enjeu important pour les années à venir. Si les politiques publiques sont nécessaires, elles ne peuvent remplacer le comportement de chacun et le regard porté sur les personnes âgées. Alliance VITA propose quelques pistes dans son dépliant “changeons nos regards“. Publié en janvier 2022, il garde une actualité certaine.

les personnes âgées en france sous le regard de la société

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Promotion du don de gamètes, les jeunes pris pour cible

Promotion du don de gamètes, les jeunes pris pour cible

Promotion du don de gamètes, les jeunes pris pour cible

 

Un tour de France et force publicité pour trouver de nouveaux donneurs de sperme ou d’ovocyte ? C’est le nouveau concept lancé par l’Agence de la biomédecine. Ce Tour #FaitesDesParents qui se déroule du 18 septembre au 11 octobre 2024 s’inscrit dans la continuité de leur campagne #FaitesDesParents lancée en octobre 2023.

Le concept ? Un bus itinérant se rend dans dix villes dotées d’un Cecos (Centre d’étude et de conservation du sperme). De Caen à Clermont-Ferrand, de Bondy à Lille, des soignants expliquent le processus de don aux personnes qu’elles rencontrent.

L’objectif annoncé est simple : « Faire connaître le don de gamètes et encourager les personnes à s’inscrire pour faire un don, afin de réduire le temps d’attente des milliers de personnes qui en ont besoin pour connaître le bonheur de devenir parent ».

L’idée est rien de moins que de prendre les gens par la main et les emmener jusqu’à un centre de don, explique la directrice générale de l’ABM, Marine Jeantet, qui n’hésite pas à citer le public qu’elle vise en priorité : “Nous irons chercher les jeunes dans les endroits où ils sont, dans les facs, dans les quartiers sympas de centre-ville”

Les slogans et la communication visent en effet en particulier les jeunes : « Lorsque l’on est étudiant·e, on n‘a pas forcément envie – du moins dans l’immédiat – d’avoir des enfants. Mais en donnant vos spermatozoïdes, vous offrez à d’autres le bonheur d’être parents. Vous ne voulez pas faire d’enfants ? #FaitesDesParents».

La philosophie portée par cette campagne s’inscrit dans la mouvance « childfree » constatée ces dernières années. il s’agit d’un courant de pensée valorisant le refus de devenir parent pour des raisons de confort personnel et d’hédonisme, raisons qu’avait notamment relevé une enquête Ifop pour Elle en 2022. 

Parmi leurs outils, on note en effet la présence de vidéos de promotion du don de gamètes portant ce genre de messages : continuer à “profiter de tous ses vendredis soirs“, à “être le meilleur aux jeux vidéo” ou encore continuer de “profiter de toutes ses grasses matinées“, c’est possible en devenant donneur et en faisant des parents – au lieu de faire des enfants ».

Si l’Agence de la biomédecine ne ménage ni son énergie ni les fonds publics pour tenter de recruter rapidement et massivement de nouveaux donneurs et donneuses de gamètes, c’est bien en raison de l’évolution de la loi de bioéthique de 2021, responsable, comme l’annonce l’ABM, de ce qu’on constate aujourd’hui et qui était évidemment prévisible : « les besoins en dons de gamètes ont explosé ! […] de 2000 demandes par an avant 2021 à 13000 en 2023 ». Or en 2022, on recensait 714 candidats au don de spermatozoïdes et 943 donneuses d’ovocytes.

Concernant les coûts, le dernier rapport de la Cour des comptes de janvier 2024 révèle que le budget alloué par le ministère de la Santé à cette campagne de promotion a été multiplié par cinq par rapport aux autres années pour atteindre la somme de 3,5 millions d’euros en 2023.

 

Cette campagne est axée sur l’injonction faite à tous de donner ses gamètes, et cela dès 18 ans. Il y une forme de culpabilisation implicite : si vous ne donnez pas, certains n’auront pas d’enfant. On lit sur le site de l’ABM « Avec la nouvelle loi, de plus en plus de personnes pourront faire appel à la PMA. Aujourd’hui, plus que jamais, elles comptent sur vous ».

Ces slogans viennent également appuyer sur des ressorts d’altruisme : « en donnant vos spermatozoïdes, vous offrez à d’autres le bonheur d’être parents ». Le pathos, l’émotion, viennent tirer de bonnes ficelles du cœur humain : notre sensibilité et notre disposition à la générosité. Mais ces ficelles peuvent aussi brouiller notre discernement. D’autant qu’elles sont particulièrement efficaces car elles laissent peu de place à la critique ou au débat.

Tout cela provoque une immense confusion, avec le don de sang par exemple. Alors même que cela n’a rien à voir. Avec le don de gamètes, on n’est pas dans le soin mais dans la réponse à un désir. Les gamètes sont des cellules porteuses de vie, c’est en cela qu’elles sont si particulières. Mais elles ne sont pas vitales. Si les banques de gamètes, les Cecos, sont à sec, personne ne va mourir.

 

Malgré ses campagnes annuelles, l’ABM peine à faire augmenter le nombre de donneurs. N’y a-t-il pas là à se questionner ? Si les dons sont rares, cela démontre que “ce n’est pas rien”, de donner ses gamètes. Cela est et demeure la possibilité d’être mère ou père biologique d’un voire de plusieurs enfants. Il faut savoir que les dons d’un même donneur de sperme peuvent aboutir à la naissance de 10 enfants, selon les règles en vigueur.

Par ailleurs, depuis le 1er septembre 2022, tout donneur doit obligatoirement accepter que son identité ainsi que des données dites “non-identifiantes” (notamment son âge, son état général, les motivations de son don…) le concernant puissent être révélées aux enfants nés de son don, si ces enfants en font la demande, à leur majorité.

 

Pour Alliance VITA, il est grave et irresponsable de cibler particulièrement les jeunes. Comment présumer par avance que leur consentement puisse être pleinement libre ? Qui peut prévoir la manière dont ils pourront réagir si 18 ans plus tard, un enfant toque à la porte de leur vie parce qu’il veut avoir accès à leur identité ?

 

Pour aller plus loin : 

PMA : enjeux de la “pénurie” du don de sperme – juillet 2024

promotion du don de gamètes, les jeunes pris pour cible

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Journée mondiale de la contraception : quelles tendances en France ?

Journée mondiale de la contraception : quelles tendances en France ?

Journée mondiale de la contraception : quelles tendances en France ?

 

La journée mondiale de la contraception, le 26 septembre, est l’occasion d’observer des tendances en France sur cette question. Cette journée, la 17ème, est une plateforme, soutenue par le Fonds des Nations Unies pour la Population (UNFPA) pour promouvoir l’information et l’utilisation de méthodes contraceptives.

Quelles tendances pour l’utilisation des différentes méthodes contraceptives ?

Les enquêtes des instituts publics comme l’INSERM et l’INED ont relevé depuis plusieurs années une baisse de l’utilisation de la contraception hormonale féminine (pilule contraceptive). Selon un article publié dans The Conversation qui s’appuie sur ces études, en 2019, 26% des femmes âgées de 15 à 49 ans y ont recours. Elles étaient 47% en 2005. Une tendance à la baisse s’était alors déjà amorcée et ce chiffre est passé à 36% en 2010.

Différents événements, comme par exemple le scandale de la pilule de 3° et 4° génération, alertant sur des effets secondaires néfastes peuvent avoir contribué à une désaffection pour les méthodes hormonales. Plusieurs études scientifiques ont également pointé les risques supplémentaires dans plusieurs domaines : cancer du sein, santé mentale, gestion du stress (voir notre article sur ce sujet ici).

Plus récemment, un nouveau scandale sanitaire lié à un médicament progestatif et prescrit, entre autres, comme moyen de contraception met en lumière la question des effets secondaires et de l’intégralité de l’information données aux patientes. Des témoignages poignants, comme celui paru dans Ouest France cet été, souligne le manque d’informations fiables données aux patientes. Selon la présidente de l’association Amavéa qui vient en aide aux femmes victimes de méningiomes liés à la prise de ces progestatifs : “Dans 90 % des cas, les femmes sont en colère. Elles se demandent pourquoi elles n’ont pas été informées avant. Et au moins la moitié d’entre elles ont été en errance thérapeutique

Aujourd’hui, de nombreux articles ou émission sur le sujet utilisent l’expression de “charge mentale contraceptive” pour décrire la dysmétrie introduite par les dispositifs de contraception hormonale à destination des femmes (pilule, stérilet…). Des témoignages publiés par des femmes illustrent ces aspects négatifs : absence de dialogue régulier dans le couple, manque de prise en compte par les hommes des contraintes et des effets secondaires de la pilule pour les femmes, souhait d’une approche plus écologique.

En lien avec cette remise en cause du modèle de contraception géré par les femmes, la pratique de la vasectomie est en hausse en France. En 2024, l’Assurance Maladie a publié des chiffres. Ils montrent que “le nombre de vasectomies a fortement augmenté depuis 2010 en France, avec un taux annuel multiplié par 15 en 12 ans (de 1 940 en 2010 à 30 288 vasectomies en 2022)“. En pourcentage de la population masculine, ce chiffre reste très bas comparé à d’autres pays. Selon une étude internationale publiée en 2021, la vasectomie est pratiquée par 20% des hommes au Royaume Uni et 15% au Canada.

Des signes contradictoires existent cependant sur cette tendance d’utilisation de méthode de contraception masculine. Ainsi, l’OMS a publié l’été dernier une étude montrant que l’utilisation du préservatif était en baisse dans les populations jeunes. Cette étude portait sur un vaste échantillon (242 000 jeunes, 42 pays). L’âge des participants (15 ans) est néanmoins une limite importante pour extrapoler une tendance plus générale sur la population.

Les limites de l’approche dissociant sexualité et procréation

Des informations scientifiques sont disponibles pour souligner l’impossibilité de dissocier complétement procréation et sexualité. Les experts distinguent souvent l’efficacité théorique et l’efficacité pratique, qui tient compte des imperfections d’utilisation dans la vie réelle. L’OMS a publié un tableau proposant une mesure d’efficacité : le taux de grossesse pour 100 femmes faisant appel à la méthode considérée. Un point ressort clairement : dans la colonne “efficacité pratique” (“as commonly used” dans la version anglaise du tableau), aucune méthode n’atteint une efficacité à 100%.

Même pour les méthodes dites de contraception définitive comme la vasectomie, il reste une faible (0.15%) probabilité de grossesse. Un témoignage paru cet été dans le magazine Marie-France illustre concrètement cette probabilité.

Ce fait devrait inciter les pouvoirs publics et les acteurs de l’éducation à présenter les méthodes contraceptives de façon intégrale. L’expression “paradoxe contraceptif” décrit le fait que beaucoup de femmes qui avortent utilisaient une méthode contraceptive (chiffre de 72% dans un rapport de l’IGAS publié en 2010).

Le discours de dissociation est donc pris en défaut sur le terrain de la vie réelle. Les chiffres de l’avortement publiés cette semaine, avec un record de 243 623 IVG, illustrent l’urgence d’une approche globale sur ce sujet. La communication autour du thème de la contraception pourrait utilement en rendre compte à l’occasion de cette journée.

journée mondiale de la contraception : quelles tendances en france ?

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[CP] – Record d’IVG faute de prévention

[CP] – Record d’IVG faute de prévention

COMMUNIQUE DE PRESSE – 25 septembre 2024

Record d’IVG faute de prévention

C’est un défi que le nouveau gouvernement doit prendre en compte dans un contexte démographique qui ne cesse de se dégrader.

 

 

Contact presse

Claire-Anne Brulé

+ 33(0)6 67 77 14 80 – contactpresse@alliancevita.org

Tous nos articles sur Avortement – IVG.

record d’ivg faute de prévention

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Pour une transformation de l’offre de soins périnatals

Pour une transformation de l’offre de soins périnatals

Pour une transformation de l’offre de soins périnatals

 

La Mission d’information sur l’avenir de la santé périnatale et son organisation territoriale, portée par un groupe de sénatrices a rendu son rapport le 11 septembre dernier. Dans un contexte de baisse de la natalité et de manque de soignants, cette mission répondait au double constat de la dégradation de la santé des mères et des nourrissons, et de la fragilisation du réseau de maternités en France.

I. Santé périnatale en France : quels enjeux ?

Etat des lieux de la mortinatalité et de la mortalité infantile

La France, longtemps bien classée en termes de santé des nouveau-nés, est aujourd’hui en mauvaise posture : depuis une dizaine d’années, la dégradation des indicateurs la place respectivement en 21 et 22e place au niveau européen en matière de mortinatalité et de mortalité infantile.
 
La mortinatalité désigne les enfants nés sans vie après 6 mois de grossesse, que le décès soit spontané ou consécutif à une interruption médicale de grossesse (IMG). Entre 2015 et 2019, le taux de mortinatalité spontané (hors IMG) était en France de 3,8 pour mille (alors que ce même chiffre est compris entre 1,2 et 2,7 pour mille en Finlande par exemple).
La mortalité infantile désigne la proportion d’enfants qui décèdent avant l’âge d’un an, sur le total des enfants nés vivants. Elle est exprimée pour 1000 naissances. En 2022 et en 2023, ce taux est de 4 pour mille en France (contre 1,4 à 1,9 pour mille en Norvège par exemple).
 
Le taux moyen de mortalité infantile sur la période 2020-2022 illustre par ailleurs des inégalités territoriales : les chiffres sont notamment deux fois plus élevés dans les départements et régions d’outre-mer (jusqu’à 9,5 pour mille) et atteignent plus de 6 pour mille dans certains départements de métropole.
Un autre indicateur à observer est celui de la prématurité, qui fragilise la santé des nouveau-nés. En France, 55 000 enfants naissent prématurément (avant 37 semaines d’aménorrhée) chaque année. Ces bébés prématurés représentent 75% de la mortalité infantile pour seulement 7% des naissances.
Concernant les mères, si les décès sont aujourd’hui rares (90 par an), les complications liées au post-partum sont encore fréquentes et nécessitent une meilleure prise en charge.

Une dégradation de la santé des bébés et des mères mal expliquée

 
Dans un contexte de baisse de la natalité, comment expliquer que ces différents indicateurs (mortinatalité, mortalité infantile, prise en charge des prématurés, complications post-partum) aient quant à eux augmenté ?
 
Les causes de la dégradation de ces différents indicateurs sont multiples, et encore mal connues, mais aussi peu rationnalisées au niveau national.
On peut noter entre autres l’augmentation de l’âge moyen des femmes enceintes, un état de santé qui n’aurait normalement pas permis une grossesse (hors intervention de la médecine procréative), l’obésité ou le diabète gestationnel des mères ou encore la précarité ou la vulnérabilité sociale qui conduisent à des parcours de soin inadéquats.
Mais l’état du système de santé n’est pas étranger à l’augmentation de la mortinatalité et de la mortalité infantile : ainsi l’offre de soins en réanimation néonatale est insuffisante, quand le manque de personnel conduit à une mauvaise organisation des soins et à des soins sous-optimaux.

La fragilisation du réseau de maternités

 
Devant la diminution du nombre d’accouchements, et en raison de contraintes financières et de difficultés liées aux ressources humaines (déficit de professionnels de santé), la fermeture de maternités a entraîné une diminution drastique de leur nombre sur le territoire : – 40% en trente ans (- 20% entre 2010 et 2023, voire -30% dans les départements ruraux !). Le « dogme » réaffirmé en 2023 par l’Académie de médecine plaçait un seuil d’activité minimal à 1000 naissances par an pour le maintien en exercice d’une maternité. Certaines structures ont donc fermé leurs portes en raison de ce quota.
 
Par ailleurs, si les naissances sont moins nombreuses, on constate un souhait croissant des femmes de se réapproprier la naissance, se tournant parfois vers des accouchements moins médicalisés et attendant des soignants une prise en charge plus personnalisée.
Des efforts ont bien sûr été faits du côté de l’Etat pour réduire la mortalité néonatale. Les décrets Périnatalité du 9 octobre 1998 par exemple, visaient à garantir une meilleure adéquation entre le niveau de risque de la patiente et du nouveau-né et le type de la maternité d’accueil, en définissant une gradation dans les capacités des maternités :
 
  • Maternité de type 1 = service d’obstétrique
  • Maternité de type 2a = service d’obstétrique et service de néonatologie
  • Maternité de type 2b = service d’obstétrique, service de néonatologie et service de soins intensifs néonatals
  • Maternité de type 3 = service d’obstétrique, service de néonatologie, service de soins intensifs néonatals et service de réanimation néonatale
Toutefois, les sénatrices déplorent qu’une majorité de femmes enceintes ou ayant récemment accouché soit mal informée sur cette diversité de services : 62% d’entre elles « n’ont pas entendu parler des différents types de maternité (1, 2a/b, 3) ou ne voient pas vraiment de quoi il s’agit ». On constate par ailleurs une inégalité dans le niveau de connaissance : les femmes les mieux informées mettent parfois en place une stratégie d’évitement de certaines maternités, creusant des inégalités sociales et territoriales en termes de santé.

II Préconisations pour une transformation de l’offre de soins périnatals dans les territoires

Des données regroupées pour une meilleure analyse

La première préconisation est d’adopter une stratégie nationale de santé périnatale et de rétablir les commissions nationales et régionales des naissances, avec la création d’un registre national des naissances et de la mortalité néonatale ainsi que le rapprochement des bases de données afin de pouvoir analyser les effets induits par l’organisation du système de soins et les pratiques des professionnels sur la santé des bébés et des mères.
 

Réfléchir en termes de « services » dans les territoires

 
Il est par ailleurs nécessaire, selon les sénatrices, de sortir du « dogme » des 1000 naissances par an, et de repenser le réseau de maternités pour répondre aux besoins des bébés et des mères. Le rapport propose ainsi de réfléchir en termes de « services » dans les territoires, par une « transformation de l’offre de soins » qui distingue et répartit les différents actes réalisés en maternité, pour lesquels les priorités ne sont pas les mêmes. Sans réfléchir en seuil de naissance mais plutôt en besoins sur un bassin de naissances, il est par exemple préconisé d’assurer un lit de réanimation néonatale pour 1000 naissances.
 
Ainsi pour le suivi pré et post natal, la proximité devrait être le critère majeur, auquel peut répondre une maternité sur un territoire isolé. Mais pour l’acte d’accouchement, c’est la sécurité qui doit primer, et donc l’envoi éventuel vers une maternité plus lointaine du domicile, mais mieux équipée et plus sécurisée. Bien sûr, il s’agit aussi de garantir des effectifs suffisants en formant davantage de praticiens (gynécologues-obstétriciens, pédiatres, anesthésistes-réanimateurs et sage-femmes).

Une meilleure communication envers les jeunes parents

 
La communication des informations aux parturientes mais aussi aux accouchées dans les premiers mois de vie de leur nourrisson est également essentielle. Une femme sur cinq déclare ne pas être satisfaite des informations communiquées sur cette période périnatale ; il est donc proposé un meilleur accompagnement des parents avant et après la naissance. Quant aux services de protection maternelle et infantile (PMI), ils doivent être mieux financés et insérés dans le maillage territorial pour jouer un rôle pivot dans ce suivi périnatal et plus largement dans l’accompagnement à la parentalité.
 
Les soignants quant à eux seraient davantage impliqués dans le repérage des vulnérabilités chez la jeune mère mais aussi chez le père, afin de prévenir la dégradation de la santé mentale et pas seulement physique. C’est en effet une mère sur cinq, mais aussi un père sur dix, qui souffre de dépression post partum. On dénombre tout de même 15 suicides de mères par an liés au post-partum. Les sénatrices proposent donc de généraliser un questionnement systématique pour mieux répondre à ces enjeux.
On peut espérer que les politiques publiques se saisissent de cette question majeure de santé publique afin d’assurer un véritable accompagnement de toutes les femmes enceintes et de tous les jeunes parents dans ce bouleversement qu’est la naissance d’un enfant.
pour une transformation de l’offre de soins périnatals

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