Naissance et transgenre : quand les mots ne disent plus la réalité

Naissance et transgenre : quand les mots ne disent plus la réalité

Les médias français ont relayé abondamment comme une “première” la naissance d’un bébé à Bourges en février dernier. Et pourtant, cette “première” n’en est pas exactement une. La qualification de “première” revient à  pointer l’identité à l’état civil des parents. En effet, le couple en question est composé d’une femme, devenue homme à l’état civil et portant le prénom de Matéo, et d’un homme, devenu femme à l’état civil et portant le prénom de Victoire. Ils sont les deux parents de ce bébé.

Le vocabulaire employés dans certains médias a pu renforcer cette impression de première : “un couple transgenre a donné naissance à un enfant“, “un petit miracle“, “ « le premier bébé français d’un couple transgenre »…

Les faits

Selon les sources, le couple formé par les deux personnes n’a pas eu recours à une PMA (Procréation Médicale Assistée) pour attendre cet enfant. Matéo, née femme, a porté et accouché d’une petite fille, bébé conçu avec le sperme de Victoire, né homme.

Depuis 2016, la loi française a supprimé les conditions médicales requises auparavant pour obtenir une modification de la mention homme ou femme à l’état civil. Aucun traitement médical, par exemple hormonal, ou chirurgical n’est exigé. Les deux personnes qui ont donné naissance à la petite fille ont arrêté leurs traitements hormonaux pendant 3 ans. La personne née femme a “renoncé aux interventions chirurgicales destinées à achever sa transition“.

Du fait de la reconnaissance administrative de leur changement de genre, la femme, déclarée maintenant homme administrativement parlant, s’est vue accorder un congé paternité et non un congé maternité.

L’établissement de l’acte de naissance porte naturellement la mention de Matéo comme “mère”, puisqu’elle a porté et accouché le bébé. Elle a néanmoins entamé des démarches pour obtenir une modification. Elle a déclaré : “une annotation concernant le changement de sexe est portée sur son acte de naissance intégral, mais j’ai demandé qu’il soit bloqué et à ce que l’on ne puisse plus jamais le consulter. Je garde juste une copie pour le montrer à ma fille “. Son témoignage relève l’importance que conserve malgré tout l’information sur les conditions de naissance. Ces démarches soulignent également la dissociation introduite par la loi entre l’ensemble des faits biologiques, physiologiques, cliniques et le déclaratif administratif.

 

Peut-on parler de “grossesse transgenre” ?

Les grossesses sont possibles chez les femmes quand, notamment, l’utérus est fonctionnel.

Depuis peu de temps, dans des situations exceptionnelles, des greffes d’utérus sont pratiquées sur des femmes qui n’ont pas ou plus d’utérus. Dans le monde anglo-saxon, des critères éthiques dit “de Montréal” ont été publiés en 2012 pour guider les médecins et les chercheurs dans la réalisation des greffes d’utérus. Ces critères exigent que la receveuse soit une femme, née biologiquement telle, en raison de préoccupations en matière d’innocuité et d’efficacité.

Les enfants sont portés et mis au monde par les femmes. Cette réalité du corps que les techniques médicales n’effacent pas, est une donnée fondamentale.

Les discours qui entretiennent une dissociation entre « le corps » et « le genre » présentent la volonté ou le ressenti individuels comme supérieurs à la vérité biologique. L’humain ressemble dans cette approche à un logiciel intellectuel inséré dans une machine biologique modulable à souhait. L’expression « homme enceint » relève de cette approche. Derrière les mots, la réalité de la grossesse et de la maternité reste cependant intrinsèquement liée à la féminité.

 

[CP] Mission Falorni : aucune raison d’aller plus loin que la loi Claeys-Leonetti

[CP] Mission Falorni : aucune raison d’aller plus loin que la loi Claeys-Leonetti

ALERTE PRESSE –  29 mars 2023

Mission Falorni : aucune raison d’aller plus loin que la loi Claeys-Leonetti

La mission parlementaire d’évaluation de la loi de 2016 sur la fin de vie vient de rendre ses conclusions. Comme les députés, l’association déplore le manque de données et demande que soit établi un état des lieux exhaustif de la manière dont on meurt en France. En revanche, rien dans ce rapport ne permet de justifier l’évolution de la loi vers l’ouverture d’une aide active à mourir.

 

Pour Tugdual Derville, porte-parole d’Alliance VITA et auteur de « Docteur, ai-je le droit de vivre encore un peu ? » (Salvator, 2023) : « Ce rapport nous confirme qu’il n’y a aucune raison médicale ni éthique d’aller plus loin que la loi Claeys-Leonetti. Il montre d’ailleurs que la sédation profonde et continue jusqu’au décès reste une pratique exceptionnelle qui n’a de sens qu’en dernier recours. D’où la priorité à la sédation réversible, tant qu’elle est efficace. Cette sédation « proportionnée » permet en effet de sauvegarder la liberté d’expression du patient et sa capacité de communication. La Haute autorité de la santé (HAS) a par ailleurs édicté en 2018 des recommandations de bonnes pratiques qui précisent les critères de cette sédation profonde et continue jusqu’au décès. La HAS la distingue clairement de l’euthanasie puisqu’elle exclut l’intention d’administrer la mort. Toute préconisation qui remettrait en cause cette distinction fragiliserait la confiance entre soignants et soignés en faisant porter la suspicion sur la sédation : c’est la dérive observée en Belgique où l’intention létale de certaines sédations s’est développée dans la plus grande confusion, au détriment des soins palliatifs. »

Au Sénat, audition fin de vie d’Alliance VITA

Au Sénat, audition fin de vie d’Alliance VITA

A la demande de la Mission d’information sur la fin de vie du Sénat, Tugdual Derville porte-parole d’Alliance VITA et le docteur Paul Régnier-Vigouroux ont été auditionnés le mercredi 22 mars 2023 au Palais du Luxembourg.

 

L’audition d’une heure trente était animée par les trois rapporteures de la mission : Christine Bonfanti-Dossat (LR, Lot-et-Garonne) et Michelle Meunier (PS, Loire-Atlantique) sur place et Corinne Imbert (LR, Charente-Maritime) en visioconférence. Les sénatrices avaient choisi d’interroger en même temps que les représentants d’Alliance VITA ceux de la Fondation Jérôme Lejeune.

 

Les représentants d’Alliance VITA ont exprimé leur point de vue à partir :

  • des convictions de fond portées par l’association : respect de la vie et de la dignité de toute personne,
  • de son expérience de l’aide aux personnes confrontées aux situations de fin de vie délicates, au travers de son service SOS fin de vie.
  • de la compétence spécifique du Docteur Régnier-Vigouroux, membre engagé dans Alliance VITA, médecin formé en gériatrie, spécialiste de la lutte contre la douleur et, depuis vingt ans praticien en soins palliatifs, à domicile et en établissements.

 

A partir de plusieurs situations de fin de vie sensibles qu’il a pu accompagner jusqu’au bout (maladie de Charcot, cancer en phase ultime), le docteur Régnier Vigouroux a notamment explicité sa pratique de la sédation raisonnée, celle qui permet d’abord  – tant que cela est possible – de soulager correctement sans interdire toute relation, quitte à poser une sédation profonde en toute fin de vie, qui respecte le temps de la mort naturelle.

Il a explicité la différence de nature et non de degré entre ce type de sédation et le suicide assisté ou l’euthanasie, selon les justes recommandations de la Haute autorité de santé (HAS). Légaliser une « aide active à mourir » – terminologie à ses yeux très contestable – pour des personnes dont le pronostic vital est engagé à moyen terme conduirait à priver ces patients et leurs proches – tous devant bénéficier des soins palliatifs – d’un accompagnement réconfortant et d’une mort paisible. Entre la mort administrée et la mort naturelle bien accompagnée, l’impact sur le patient, ses proches et les soignants est en effet radicalement différent.

Le médecin a logiquement plaidé pour le maintien du principe hippocratique doublement millénaire : l’interdit de tuer est la condition première de la confiance entre un patient vulnérable et ses soignants, qui doivent se garder de la toute-puissance.

 

De son côté, Tugdual Derville, récent auteur de l’essai Docteur, ai-je le droit de vivre encore un peu ? – Euthanasie et suicide assisté démasqués (Salvator) a défendu la prévention de tout suicide, sans exception, et donc le soutien aux personnes les plus dépendantes, désespérées et isolées. Au nom de la démocratie, il a contesté l’idée que certaines catégories de patients – du fait de leur handicap évolutif – puissent être privés de cette prévention. Ce serait une discrimination.

Il a rappelé l’avis de Robert Badinter : pour contester toute forme d’euthanasie même « d’exception » l’artisan de l’abolition de la peine de mort affirmait : « En démocratie, on ne tue pas ». Tugdual Derville a par ailleurs dénoncé l’indécence d’une promotion des soins palliatifs conçue pour compenser la légalisation du suicide assisté ou de l’euthanasie. Les deux pratiques sont incompatibles : l’une est expéditive et récuse la valeur de certaines vies ; l’autre considère toute vie fragile comme digne et respecte le temps de la mort naturelle.

Rappelant la liste des dérives observées à l’étranger, le porte-parole d’Alliance VITA a mis en garde contre l’illusion d’une légalisation « encadrée » de l’administration de la mort. Pointant l’irruption de l’argument économique dans le débat, il a enfin souligné l’impact douloureux des deuils par mort brutale.

 

Les représentants d’Alliance VITA ont en conclusion demandé au Sénat de plaider pour une politique de santé globale qui ne se contente pas de dire non au suicide assisté et à l’euthanasie en suggérant :

 

  1. Une enquête en profondeur sur la réalité du « mal mourir » qu’on continue de mettre en avant sans données précises, sérieuses et fiables ;
  2. Une loi Grand âge et autonomie qui prenne en compte l’accélération du vieillissement, s’appuie sur les options intergénérationnelles et lutte contre la « mort sociale » de beaucoup de personnes âgées isolées ;
  3. La mise en œuvre concrète du droit de tous, en cas de besoin, à accéder à des soins palliatifs de qualité ;
  4. Le renforcement d’une politique de prévention du suicide n’excluant surtout pas nos concitoyens les plus vulnérables, dépendants ou âgés.
Implants dans le cerveau : où en est-on ?

Implants dans le cerveau : où en est-on ?

Implants dans le cerveau : où en est-on ?

 

Où en est la recherche sur les implants dans le cerveau ?

Neuralink est une société fondée en 2016 et détenue par Elon Musk. Son nom vient de neuron et link (respectivement neurone et lien, en anglais).  Elle développe un projet d’implants dans le cerveau qui n’a pas encore reçu d’autorisation de la FDA (Federal Drug Administration), l’autorité sanitaire américaine. Selon plusieurs sources de presse, la FDA aurait même rejeté une demande d’autorisation d’essai sur des humains en 2022, alors qu’Elon Musk prétend que cet objectif de test est proche d’aboutir.

Le projet de Neuralink

Neuralink est une société non cotée dont l’objectif affiché sur son site web est décrit ainsi :

Nous visons à concevoir une interface cerveau-ordinateur entièrement implantable et cosmétiquement invisible pour vous permettre de contrôler un ordinateur ou un appareil mobile où que vous alliez“. Plus concrètement : “Des fils à l’échelle du micron seraient insérés dans les zones du cerveau qui contrôlent le mouvement. Chaque fil contient de nombreuses électrodes et les relie à un implant appelé « Link ».”

Compte tenu de la taille microscopique, l’implantation se ferait par un système robotique dirigé par un neurochirurgien. Selon la société, cet implant différerait de projets concurrents par son ambition : les fils contiendraient au total 1024 électrodes pour capter les signaux électriques à l’intérieur du cerveau.

Le site met en avant deux qualités de l’application Neuralink : “être en contrôle”, et “être autonome”, des mots que la cuture ambiante valorise fortement.

L’objectif de Neuralink est double

D’une part il s’inscrit dans la lignée de travaux de recherche pour soigner et améliorer la qualité de vie de patients atteints de paralysie ou de maladies neurodégénératives. D’autre part, le fondateur n’a pas fait mystère de sa volonté d’aboutir à « augmenter l’être humain face aux défis de l’IA (Intelligence artificielle).

Du côté des avancées médicales, le cas d’un jeune homme tétraplégique retrouvant l’usage de son bras grâce à un implant, ou d’un homme paralysé pouvant bouger son bras et sa main, illustrent les bénéfices de ces recherches sur des implants cérébraux. Plus récemment, des chercheurs suisses ont permis à trois personnes paralysées suite à des lésions de la moëlle épinière, de retrouver des mouvements des jambes. Lors d’une conférence de presse fin novembre 2022, Elon Musk avait utilisé une formule aux “accents bibliques”, affirmant que Neuralink pourrait “aider les aveugles à voir et les paralytiques à marcher”, témoignant ainsi d’une vision qu’on peut qualifier de démiurgique.

Le site de l’INSERM fournit des informations sur le fonctionnement des implants cérébraux :

Les implants cérébraux sont développés pour assurer une liaison directe entre le cerveau et un ordinateur, afin que les individus puissent effectuer des tâches sans passer par l’action des nerfs périphériques et des musclesConcrètement, ces patients pourraient imaginer effectuer un mouvement, générant ainsi une activité cérébrale caractéristique et mesurable à l’aide ces implants. Ces signaux pourraient ensuite être transmis à un ordinateur afin de les analyser et de les transformer en commande pour une machine ayant une utilité pour le patient (par exemple une prothèse ou un exosquelette, mais également un implant rétinien ou encore un logiciel de voix artificielle…) ».

L’INSERM souligne que dans ce domaine des implants cérébraux, les chercheurs poursuivent habituellement deux types de stratégie :

Une procédure invasive : avec l’insertion d’implants dans le cortex, qui “permettent d’enregistrer les signaux d’une population de neurones avec une très grande précision spatiale. Ils sont toutefois associés au risque de complications et à une perte de signal à long terme”. L’enjeu majeur de cette technique est la bonne implantation dans le cerveau et la biocompatibilité de l’implant avec le cerveau (risque de lésion, d’inflammation et défi de capter le fonctionnement complexe du cerveau).

Une procédure non invasive : avec des implants placés à la surface du crâne grâce à des électrodes ou juste sous la boite crânienne. Cependant “ils ne permettent pas encore de mesurer avec précision l’activité cérébrale et de rendre compte de la complexité de l’architecture du cerveau“.

Or, Neuralink prétend pouvoir éviter ces deux écueils. Les ambitions d’Elon Musk vont aussi bien plus loin que le seul domaine curatif. A la conférence de presse citée plus haut, Elon Musk s’est interrogé sur la concurrence de l’IA face à l’humain : “Que faisons-nous de l’IA, de l’intelligence artificielle générale ? Si nous avons une superintelligence numérique, beaucoup plus intelligente que n’importe quel humain, comment pouvons-nous atténuer ce risque au niveau de l’espèce ? Même dans un scénario bénin où l’IA est très bienveillante, comment pouvons-nous même faire le tour? Comment participons-nous?“.

Champion du futurisme, le milliardaire a développé sa vision d’une symbiose du cerveau humain avec l’intelligence artificielle, pour que nous ne “restions pas derrière“. L’humain, un être inachevé et déficient, menacé par l’évolution qui va plus vite que lui : cette rhétorique anxiogène est un ressort classique des courants transhumanistes.

Récentes réalisations

L’autorisation par les autorités sanitaires américaines de tester cliniquement l’interface sur des humains aurait donc été refusée en 2022. L’administration aurait citée plusieurs risques:  la migration des fils implantés, plus fins que des cheveux, dans le cerveau, la question de la recharge des électrodes, et la capacité à retirer les fils sans entraîner des dommages pour le cerveau.

En parallèle, Neuralink s’est trouvée confrontée à des polémiques et des enquêtes officielles pour de la maltraitance animale.

Synchron, un concurrent de Neuralink, a en revanche obtenu une autorisation en juillet 2021 pour des tests sur six patients. Son site relate en vidéo le premier test humain. En 2020, une étude sur une première implantation de leur interface cerveau-machine, pour un patient en Australie, avait été publiée. Le patient était capable de reprendre des tâches quotidiennes, “y compris envoyer des SMS, envoyer des courriels… par la pensée directe“.

Les prouesses médicales et technologiques sont à saluer, tant elles révèlent le génie humain et démentent en elles-mêmes la vision pessimiste d’un humain structurellement déficient. Mais les promesses associées à ces prouesses doivent faire l’objet d’examens, de questionnements éthiques approfondis, de limitations claires quant à leurs usages. L’INSERM rappelle la nécessaire “prudence quant à de possibles dérives éthiques“, et le besoin de tenir “toujours compte de la complexité du cerveau, qui ne peut se résumer à une circuiterie électronique dopée par l’intelligence artificielle”.

Il se joue ici d’importants enjeux autour des principes de protection du corps humain, des balances bénéfices-risques, de la protection des données liées à l’intimité de la pensée, du droit de la recherche portant sur l’être humain… En France, la dernière loi bioéthique a ajouté aux compétences de l’Agence de la biomédecine l’information permanente du Parlement et du gouvernement sur le développement des connaissances et des techniques dans le domaine des neurosciences. Son rapport annuel doit désormais également les exposer.

implants dans le cerveau : où en est-on ?

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Convention citoyenne, session 8 : des votes confus sur les conditions de l’aide active à mourir

Convention citoyenne, session 8 : des votes confus sur les conditions de l’aide active à mourir

Lors de son avant-dernière session avant la remise de son document final, la Convention citoyenne a procédé, dans la matinée du dimanche 19 mars, à de très nombreux votes sur les modalités et les conditions de l’aide active à mourir. Si une majorité se dégage en faveur de son autorisation, ces votes ne montrent en revanche aucune tendance claire de la Convention sur les modalités d’application et les critères d’accès. On voit ainsi les difficultés qui surgiraient pour encadrer ces pratiques, une fois levé l’interdit de tuer.

 

Les citoyens de la Convention citoyenne majoritairement favorables à l’euthanasie

Après les votes de la session 7 pour améliorer « le cadre actuel d’accompagnement de la fin de vie », les participants de la Convention citoyenne sur la fin de vie étaient rassemblés en plénière lors de la matinée conclusive de la session 8 pour définir leur position sur l’ouverture éventuelle de l’aide active à mourir, ses modalités, les parcours et évaluer des « modèles de fin de vie » alternatifs.

A la question « L’accès à l’aide active à mourir devrait-il être ouvert ? », 75,6 % ont répondu oui, 23,2% ont répondu non, et 1,2% se sont abstenus. Les proportions ont peu évolué par rapport aux votes qui s’étaient tenus un mois plus tôt. Quelques voix de l’abstention ont basculé vers l’opposition.

Les citoyens sont majoritairement favorables à une aide active à mourir sous conditions (70,6%). Néanmoins, quand on les interroge sur les différentes modalités d’aide active à mourir, ils sont beaucoup plus partagés, puisqu’aucune majorité absolue ne se dégage : 9,8% sont favorables au suicide assisté seul, 3,1% à l’euthanasie seule, 28,2% au suicide assisté avec exception d’euthanasie, et 39,9% pour le suicide assisté ou l’euthanasie au choix.

Impossible consensus sur l’encadrement d’une “aide active à mourir”

Une centaine de votes a ensuite eu lieu pour définir tous les détails du parcours de l’aide active à mourir, que ce soit le suicide assisté ou l’euthanasie : expression de la demande, accompagnement médical et psychologique, évaluation du discernement, validation de la demande, réalisation de l’acte, encadrement et contrôle. L’ensemble des propositions qui ont été adoptées peut être consulté sur le site du CESE. Certaines propositions laissent songeur, comme celle sur le suicide assisté pour des personnes…inconscientes ou incapables de s’exprimer qui a recueilli 57,8% de votes favorables.

La dernière étape des votes concernait les critères d’accès à l’euthanasie et au suicide assisté : majorité légale, maladie physique ou psychique, incurabilité, pronostic vital engagé à court ou moyen terme, discernement…Plutôt que de soumettre au vote chacun de ces critères, les organisateurs de la Convention avaient choisi de demander aux participants d’attribuer une note de 1 à 5 à 19 modèles concurrents proposant chacun une combinaison de critères qui rendraient accessible l’aide active à mourir.

Au terme de tous ces votes, il est bien difficile de saisir quel serait le modèle privilégié par la Convention. Serait-ce celui réunissant le plus de notes 5 ou celui affichant la meilleure moyenne ? La question ne semble pas encore tranchée. Surtout, aucun modèle ne semble vraiment faire consensus. Les modèles obtenant les meilleures notes moyennes sont ceux qui prévoient l’ouverture du suicide assisté pour les personnes majeures, avec une exception d’euthanasie accessible aussi aux mineurs. Néanmoins, ils diffèrent sur les conditions d’accès : combien de critères doivent être pris en compte ? Les souffrances psychiques pourraient-elle donner droit à l’aide active à mourir ? Le pronostic vital doit-il être engagé à court ou moyen terme ? Faut-il même être atteint d’une pathologie ou bien une « situation grave, irréversible et vécue comme insupportable » pourrait-elle constituer à elle-seule une condition suffisante  ? On voit bien l’impossibilité d’un consensus sur ces critères, et comment tout encadrement d’une « aide active à mourir » pourrait facilement être remis en cause.

 

Les citoyens opposés à l’ouverture d’une aide active à mourir ont pu se sentir marginalisés par ces votes, en particulier sur les modèles où certains ont eu le sentiment que leur vote ne servait à rien. Ils n’avaient en effet pour seule option à chaque fois que de voter « 6 » pour signifier leur opposition.

Finalement, du fait d’une erreur technique, les votes sur les modèles ont été annulés et devront avoir lieu de nouveau lors de la prochaine et dernière session les 31 mars, 1er et 2 avril. C’est lors de cette session que sera adopté solennellement le document final. On reste néanmoins dubitatif sur la capacité de la Convention à dégager des orientations claires pour le Gouvernement.