Exportation de gamètes et d’embryon, PMA post mortem  : la CEDH rend un arrêt

Exportation de gamètes et d’embryon, PMA post mortem : la CEDH rend un arrêt

Exportation de gamètes et d’embryon, PMA post mortem : la CEDH rend un arrêt

 

La CEDH (Cour Européenne des droits de l’homme) a rendu un arrêt sur le sujet sensible de la PMA post mortem et l’exportation de gamètes ou d’embryons.

Les faits

Deux femmes, récemment veuves, ont introduit un recours auprès de la CEDH concernant l’interdiction en France de la PMA post-mortem, et con corollaire : le refus d’exporter des gamètes ou des embryons congelés en France vers un pays qui pratique ce type de PMA.

La « PMA post-mortem » (après la mort)  signifie le fait de pratiquer une aide médicale à la procréation après le décès de l’un des membres du couple.

 

Dès la première loi de bioéthique, la PMA post mortem a été écartée par le législateur. Le code de santé publique prévoyait que ” l’homme et la femme formant le couple doivent être vivants, en âge de procréer et consentir préalablement au transfert des embryons ou à l’insémination“. Lors de la dernière loi de bioéthique, ce sujet avait été l’objet de nombreux débats. L’avis du gouvernement, maintenant l’interdiction, avait été suivi finalement, et l’interdiction est donc maintenue en France. Quelques rares pays, notamment des pays frontaliers comme la Belgique et l’Espagne l’autorisent.

 

Dans les deux requêtes examinées par la CEDH, une femme demandait le transfert de ses embryons congelés, conçus avec le sperme du père, décédé depuis, l’autre femme, voulait le transfert du sperme congelé de son conjoint, également décédé.

Dans les deux cas, les Centres conservateurs ont refusé l’exportation. Le code de Santé publique, article L2141-18 stipule que ” l’importation et l’exportation de gamètes ou de tissus germinaux issus du corps humain sont soumises à une autorisation délivrée par l’Agence de la biomédecine“.

Et par ailleurs, “ il est mis fin à la conservation des gamètes ou des tissus germinaux en cas de décès de la personne“. Les tribunaux, jusqu’au Conseil d’Etat, ont confirmé ce refus d’exportation que les requérantes contestaient, d’où leur recours auprès de la CEDH pour violation de l’article 8 de la Convention (droit au respect de la vie privée et familiale). Le Conseil d’Etat, dans ces deux affaires, a considéré entre autre que l’exportation demandée visait simplement à contourner l’interdiction française de la PMA post mortem, les deux femmes n’ayant aucun lien avec l’Espagne.

 

Les arguments dans le débat sur la PMA post mortem

Les derniers débats parlementaires sur la question ont reflété les arguments “pour” ou “contre” sur ce sujet.

Pour les partisans de l’autorisation, sur le principe, seule la femme peut et doit décider de ce qu’elle veut faire. Dans cette optique, la procréation est un droit individuel sans considération de la réalité biologique qui implique toujours un homme et une femme. Après l’autorisation donnée en 2021 de la PMA pour les femmes seules, il serait, selon ses partisans, contradictoire d’autoriser une femme veuve à faire une PMA avec du sperme de donneur anonyme tout en lui interdisant d’utiliser celui de son conjoint décédé.

Pour ceux qui restent opposés à la PMA post mortem, le décès du père biologique marque la fin de tout “projet parental” du couple. Par ailleurs, dans son rapport remis en 2018 au moment du projet de révision des lois de bioéthique, le Conseil d’Etat a signalé d’autres difficultés. Le fait d’être élevé par un parent seul est “une vulnérabilité en soi”. Le fait de “naître dans un contexte de deuil est une situation qui pourrait marquer le « récit identitaire » de l’enfant nécessairement impacté par le deuil de son père“.

Troisièmement, “dans un tel contexte, il peut également être difficile de créer les conditions d’une décision apaisée de la part de la mère, celle‐ci pouvant être à la fois influencée par des pressions familiales et par l’impact d’un deuil très récent“. Enfin, sur le plan juridique, autoriser la PMA post mortem nécessite “d’aménager le droit de la filiation et le droit des successions afin d’intégrer pleinement l’enfant à la lignée du défunt“. En effet, les embryons et des gamètes conservés ne sont pas “des sujets de droit“.

 

Décision de la CEDH

A l’unanimité, la Cour a “dit qu’il n’y a pas eu violation de l’article 8 de la Convention“. Dans son raisonnement, la Cour a estimé que l’ingérence dans la vie privée avait bien eu lieu et que cette ingérence était légitime. D’une part, l’interdiction de la PMA post mortem était prévue dans la loi, et donc connue des requérantes. D’autre part, cette ingérence répond “ aux buts légitimes de la « protection des droits et libertés d’autrui » et de « la protection de la morale », autrui dans ce cas étant l’intérêt de l’enfant à naître.

Par ailleurs, la CEDH “note que cette interdiction relève d’un choix politique remontant à la première loi bioéthique de 1994 et qui a été constamment réitéré à l’occasion des révisions périodiques de celle-ci et, récemment, en 2021, dans le cadre de débats législatifs approfondis. Elle constate que le processus législatif a abouti au maintien du statu quo, compte tenu des enjeux éthiques spécifiques liés à la procréation post mortem.

Elle rappelle que lorsque des questions de politique générale sont en jeu, sur lesquelles de profondes divergences peuvent raisonnablement exister dans un État démocratique, il y a lieu d’accorder une importance particulière au rôle du décideur national. Il en va d’autant plus ainsi lorsque, comme en l’espèce, il s’agit d’une question de société.”

Cependant, la CEDH a ajouté que “malgré l’ample marge d’appréciation dont bénéficient les États en matière de bioéthique, le cadre juridique mis en place par ces États doit être cohérent“. Implicitement, elle vient donc questionner la cohérence du dispositif actuel suite à la légalisation de la PMA pour femmes seules.

Un ajout critiqué par une des sept juges de l’affaire, qui estime ” quil outrepasse notre rôle de juges dans le cas d’espèce et que, de manière confuse et embrouillée il contribue à indiquer à l’État français quelque chose qui va au-delà de cette affaire, sans aucune nécessité pour la Cour de se substituer au législateur“.

 

Plus fondamentalement, les dispositifs techniques de la PMA ancrent davantage les gamètes et les embryons concernés dans un statut de marchandises, exportables ou non selon les législations ou la décision de juges.

Pour Alliance VITA, l’intérêt supérieur d’un enfant ne peut être d’être délibérément conçu déjà orphelin.

Ces demandes de PMA mortem illustrent que la norme “de droit à l’enfant” est enclenchée depuis des années, alimenté par une logique où « l’offre crée la demande ». Ce désir de PMA post mortem n’existe que parce que la technique le permet. Celle-ci vient nourrir une vision de toute-puissance, dont l’horizon est de supprimer le temps et la mort.

Journée mondiale de lutte contre la maladie d’Alzheimer

Journée mondiale de lutte contre la maladie d’Alzheimer

Journée mondiale de lutte contre la maladie d’Alzheimer​

 

La Journée Mondiale de lutte contre la maladie d’Alzheimer a lieu le 21 septembre. C’est l’occasion de se pencher sur le défi majeur posé par cette maladie pour le système de santé et la société dans son ensemble. Dans une société qui valorise la performance et l’utilité, quelle place pour les personnes atteintes d’Alzheimer ?

 

La maladie d’Alzheimer, un enjeu de santé publique 

La maladie d’Alzheimer est la forme la plus courante des maladies neurodégénératives en France, c’est-à-dire des « maladies chroniques progressives qui touchent le système nerveux central » (Santé publique France). Environ 1,2 million de personnes en sont atteintes en France et ce nombre pourrait aller jusqu’à 1,8 million en 2050. 15% des plus de 80 ans sont touchés par cette maladie identifiée par la Fondation de France comme la première cause de dépendance lourde de la personne âgée.

Si la maladie d’Alzheimer est souvent associée à la perte de mémoire, elle touche d’autres zones du cerveau au fil de son évolution, compliquant la capacité à communiquer, à réaliser plusieurs choses en même temps ou les actes de la vie quotidienne. C’est pourquoi la présence d’un aidant familial ou professionnel aux côtés de la personne malade est généralement nécessaire.

Le lancement, le 5 septembre, de concertations visant à une “stratégie Maladies neurodégénératives 2024-2028”, est salué par les structures et associations consacrées à la maladie d’Alzheimer. Toutefois, la responsable du suivi des politiques publiques à France Alzheimer s’inquiète de l’absence de financement qui ne répond pas à l’objectif affiché de considérer les maladies neurodégénératives comme un en jeu de service public.

Prévention, dépistages précoces, renforcement de formation et de la recherche, soutien aux aidants

Outre les recommandations relatives au dépistage précoce, ces associations plaident également pour développer la prévention, et en particulier celle liée à l’activité physique adaptée.  Une mission flash menée par deux députées militait quant à elle pour une meilleure formation des soignants et pour le renforcement de la recherche et listait une série de mesures pour soutenir les aidants.

L’essentiel de l’aide repose en effet sur les proches et les familles qui ont besoin d’être soutenus. Or on sait combien les interactions sont essentielles pour les personnes souffrant de cette maladie.

 

Changer de regard : Alzheimer, un enjeu majeur de solidarité

La maladie d’Alzheimer est une maladie qui stigmatise les personnes atteintes, voire leur entourage. L’image dominante des malades tend à les exclure en effet de la vie sociale : comme s’ils étaient déjà morts, ou seulement caractérisés par leur incompétence et par leur absence.

Selon France Alzheimer, lutter contre la maladie d’Alzheimer doit passer par le changement de regard de la société, en valorisant les actions des personnes malades. Elle met à l’honneur les témoignages de malades dont le diagnostic a été précoce et qui prennent la parole ainsi :

« J’ai des difficultés pour certaines choses. Il y aura des modifications dans nos relations et j’ai ou je vais avoir besoin de votre compréhension. Mais surtout, respectez-moi, ne me mettez pas de côté. Je suis toujours moi. Ne gâchons pas le présent. »

 

Interrogé par Alliance VITAle gériatre Victor Larger, auteur de « Est-ce que je nous perds quand je me perds ? Vivre avec Alzheimer » (Balland, 2020) confirme que :

« Les personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer expriment souvent, au moins au début, le sentiment de n’être plus bon à rien, de ne servir à rien.  Derrière cette question « à quoi je sers ? », est posée la question « quel sens ma vie a-t-elle ? » et, plus largement « quel sens cela a-t-il ? ». La question du sens des choses et des circonstances suscite chez le malade un mélange de perplexité et d’angoisse à l’origine des troubles du comportement qui, souvent, le submergent.

Le malade fait l’expérience de l’inutilité absolue, de l’insensé et de la vacuité. Lui, qui perd progressivement tout ce qui fait la superbe de l’homme, pousse à l’extrême la question du « quel sens ma vie a-telle ? » qui nous tient tous. C’est pourquoi on peut dire qu’il nous représente tous dans notre quête et ce d’une manière aiguë, exemplaire. Pour l’observateur deux attitudes sont possibles. La plus courante est celle qui nous fait souvent passer à côté de notre vie : croire que le malade est vide de cette richesse qu’est son intelligence. Qu’il n’a rien à voir avec nous.

Que nous n’avons rien en commun, peut-être même pas l’humanité. L’autre attitude est celle de l’interrogation : « où en suis-je, moi ? » Comment puis-je participer à la peine de cette personne, moi qui suis si souvent tenté de distraire mon esprit et mon cœur de cette quête fondamentale de l’existence. Finalement, à quoi je sers en face de celui-ci ? De cette interrogation ou non de l’observateur dépend le choix de son action.

Soit on abandonne le malade à lui-même, perdu dans son abime de solitude et d’angoisse. Soit on s’interroge soi-même sur le sens de sa position envers le patient et on le rejoint dans son expérience qui est aussi la nôtre. Ainsi deux attitudes sont possibles : l’indifférence voire le rejet conduisant à l’abandon du malade à lui-même ou l’attention portée à l’autre maintenant ainsi la relation. »

Ne pas enfermer la personne dans la maladie, cultiver les bons moments, intégrer un groupe de parole pour les aidants… Autant de facteurs qui contribuent à la lutte contre cette maladie.

Cette écologie relationnelle encore à construire pourrait bien être menacée par la légalisation d’une « aide active à mourir », quelle qu’en soit la forme, suicide assisté ou euthanasie. Comment en effet conjuguer la revendication de l’autonomie et l’accueil de la vulnérabilité et la solidarité envers les plus fragiles en particulier les personnes touchées par la maladie d’Alzheimer ?

 

Pour aller plus loin :

Grand témoin – Docteur Victor Larger – Université de la vie « Quelle dignité ? Mieux la comprendre, mieux la défendre ». 2021.

Journée Mondiale Alzheimer 2021 : Le lien social à l’honneur.

journée mondiale de lutte contre la maladie d'alzheimer
Allemagne : les médecins demandent plus de moyens pour la prévention du suicide

Allemagne : les médecins demandent plus de moyens pour la prévention du suicide

Allemagne : les médecins demandent plus de moyens pour la prévention du suicide

 

A l’occasion de la journée mondiale de prévention du suicide, l’Ordre des médecins allemands, le Bundesärtzkammer, a salué la résolution sur la prévention du suicide votée le 6 juillet à une grosse majorité par le Bundestag, après que les députés allemands ont rejeté deux textes pour encadrer le suicide assisté. L’Ordre des médecins demande que la politique de prévention du suicide soit dotée de moyens financiers suffisants.

 

Le 6 juillet dernier, deux propositions de loi transpartisanes étaient examinées au Bundestag pour donner un cadre légal au suicide assisté. En effet, depuis la décision de la Cour constitutionnelle du 26 février 2020 qui avait retoqué une loi de 2015 interdisant l’organisation commerciale du suicide assisté, celui-ci est pratiqué par des associations sans qu’il y ait de cadre légal. Selon les chiffres des principales associations qui fournissent aujourd’hui des services d’assistance au suicide assisté en Allemagne, elles auraient aidé près de 350 personnes à mourir en 2021. Les médecins utilisent des médicaments sédatifs tels que le midazolam, par exemple.

Les deux propositions de lois examinées le 6 juillet tentaient d’apporter un cadre légal à cette pratique en fixant des conditions. L’une des propositions de loi, émanant des députés Lars Castellucci, du parti social-démocrate (SPD), et de Ansgar Heveling, du parti chrétien-démocrate (CDU), prévoyait que l’assistance au suicide reste interdite mais que des exceptions soient créées pour des personnes majeures après deux entretiens obligatoires, avec un délai minimal de trois mois entre les deux entretiens.

L’autre proposition de loi, portée notamment par la députée libérale Katrin Helling-Plahr et la députée écologiste Renate Künast, moins restrictive, ouvrait un droit au suicide assisté pour des personnes majeures et autorisait les médecins à prescrire un médicament létal entre trois et douze semaines après un entretien obligatoire.

Les associations d’assistance au suicide étaient opposées à ces deux propositions de loi car elles ne souhaitent pas que l’assistance au suicide soit encadrée, arguant que le cadre légal actuel serait suffisamment « clair », et  rejettent l’idée d’un entretien obligatoire.

prevention du suicide​De leur côté, les acteurs engagés dans la prévention du suicide ont exprimé des réserves sur l’instauration de centres de conseil agréés pour recevoir les candidats au suicide en entretien. Selon eux, il faudrait plutôt financer durablement et fédérer les structures régionales déjà existantes, ainsi que les services d’écoute téléphoniques et en ligne. La seconde proposition de loi a été particulièrement critiquée par ces spécialistes de la prévention car le délai minimum de trois semaines envisagé est bien trop court pour surmonter une crise suicidaire en étant accompagné.

Ces deux propositions de lois ont finalement été rejetées. En revanche, les députés du Bundestag ont adopté à une écrasante majorité de 688 voix (une seule voix contre) une résolution pour renforcer la prévention du suicide. Cette résolution demande au gouvernement de présenter un projet de loi et une stratégie de prévention du suicide avant le 30 juin 2024. Une ligne téléphonique nationale unique devra être mise en place pour les personnes ayant des idées suicidaires et leurs proches.

Dans son récent communiqué, l’Ordre des médecins salue cette initiative. Il salue également l’annonce faite par le Ministère de la Santé d’avoir déjà commencé à travailler à une stratégie nationale. Maintenant, selon eux, il ne faudrait pas que la prévention du suicide reste un concept. « Les propositions expérimentées et les structures ne doivent pas être abandonnées pour des raisons financières et une agence nationale d’information et de coordination pour la prévention du suicide ne doit pas échouer à cause du financement ».

Selon le Dr Stefan Schumacher, responsable d’un service d’écoute téléphonique, les personnes qui vivent une crise suicidaire n’ont actuellement pas toujours suffisamment rapidement accès à un service d’écoute téléphonique ou en ligne, par manque de capacité. Il convient donc d’augmenter leur accessibilité par une coordination au niveau national. De son côté, Claudia Bausewein, présidente de la Société allemande de soins palliatifs, regrette les inégalités d’accès aux soins palliatifs et une information très variable selon les maladies. « Le pas vers le suicide assisté semble parfois plus petit » a-t-elle mis en garde.

Comme on le voit, les échecs des tentatives d’encadrement légal du suicide assisté en Allemagne illustrent bien l’impossibilité à concilier encadrement du suicide assisté et politique de prévention du suicide. Une politique cohérente de prévention du suicide ne souffre aucune exception.

Rappel à la loi au Québec face à la forte hausse des euthanasies

Rappel à la loi au Québec face à la forte hausse des euthanasies

Rappel à la loi au Québec face à la forte hausse des euthanasies

 

La Commission sur les soins fin de vie a enjoint les médecins du Québec pratiquant l’euthanasie dénommée « aide médicale à mourir » (AMM), à suivre la loi avec plus de rigueur.

En effet la croissance exponentielle des euthanasies dans cette province canadienne soulève de sérieuses questions. Le dernier rapport annuel sur l’AMM au Canada pour 2021 révèle un taux global de croissance du nombre d’euthanasies de 32,4 % pour atteindre le chiffre de 3,3 % des décès soit 10 064 cas. Pour le Québec qui a légalisé l’euthanasie dès 2015, cela représente 5,5 % des décès,  dépassant la Belgique et les Pays-Bas qui se sont dotés d’une loi depuis 21 ans. Cette proportion devrait atteindre 7% en 2023.

Cet avertissement intervient également dans le contexte d’évolutions de la loi au niveau fédéral et au Québec qui a un régime législatif particulier. En 2023, le Québec a voté une extension fortement controversée de la loi  : des personnes handicapées dont le pronostic vital n’est pas engagé sont désormais éligibles à l’euthanasie. D’autre part, dès le 7 décembre prochain, l’ensemble des maisons de soins palliatifs seront tenues de pratiquer des euthanasies à la demande.

Radio Canada souligne que la Commission relève plusieurs infractions à la loi : des pratiques d’euthanasies non conformes ou « administrées à la limite des conditions imposées », ou encore le manque de rigueur sur l’avis d’un second médecin et le « magasinage » autrement dit le fait de se retourner vers des médecins peu regardants. Elle rappelle également que le vieillissement n’est pas une maladie incurable et ne justifie pas l’AMM.

Un éditorialiste du Washington post soulignait le 13 septembre dernier que « Plus la pratique se développe, plus le risque d’erreurs ou d’abus augmente, dans un contexte où l’erreur ou la faute ont des conséquences irréversibles ».

Pour le réseau citoyen Vivre dans la Dignité « Il faut aussi savoir que ces rappels se déroulent alors que la situation est probablement plus grave que celle décrite par la Commission sur les soins de fin de vie qui refuse d’y voir pour l’instant des dérives. »

En effet une étude scientifique parue en août dernier intitulée Les réalités de l’aide médicale à mourir au Canada en août 2023, alerte sur les graves lacunes du dispositif d’euthanasie. Les auteurs concluent que « Le régime canadien d’aide médicale à mourir ne dispose pas des mesures de protection, de la collecte de données et de la surveillance nécessaires pour protéger les Canadiens contre les décès prématurés. »

Dans ces conditions, il est douteux qu’un simple rappel à la loi permette de stopper les infractions observées.

rappel à la loi au québec face à la forte hausse des euthanasies

Voir tous nos articles sur la fin de vie à l’étranger.

La baisse des naissances se poursuit en France

La baisse des naissances se poursuit en France

L’INSEE (Institut National de la Statistique et des Etudes Economiques) a précisé qu’il s’agit du treizième mois consécutif de baisse par rapport au même mois de l’année précédente. La moyenne mensuelle de naissances s’établit à 59100 et “en cumul sur les sept premiers mois de l’année, on compte près de 30 000 naissances de moins en 2023 qu’en 2022, soit une baisse de 7,0 %“. La chute en juillet marque par ailleurs une “première”.

Depuis 1994, le nombre de naissances par jour n’avait jamais été inférieur à 2000. En 2023 il est tombé à 1907. A l’exception de la Guyane, tous les autres départements affichent une baisse et l’Institut ne voit pas d’écart notable entre les régions.

La tendance pour les naissances depuis 2014 est clairement à la baisse : 816,000 naissances en 2014 contre 723,000 en 2022. Hormis un léger rebond en 2021, effet de rattrapage sur une chute plus nette en 2020 liée à la crise sanitaire, la baisse est continue chaque année. Conséquence arithmétique de cette chute : le solde naturel, à savoir l’écart entre le nombre de naissances et le nombre de décès se rapproche de zéro.

Quels facteurs pour expliquer cette baisse des naissances?

Selon des analystes, la baisse des naissances en 2023 est d’autant plus notable que le nombre de mariages a rebondi fortement en 2021 puis en 2022 après la chute de 2020 en raison de la pandémie. Les facteurs qui influencent le choix d’avoir un enfant sont multiples et tous les démographes ne s’accordent pas sur ce sujet. Ils peuvent citer la confiance dans l’avenir, la perte de pouvoir d’achat par l’inflation, l’existence ou non de structures d’accueil pour les très jeunes enfants afin que les parents puissent mener une carrière professionnelle.

La confiance dans l’Etat pour garantir un soutien efficace et pérenne pour leur vie familiale est également citée. Un sondage mené par l’IFOP en 2019 pour les AFC (Associations Familiales Catholiques) montrait que la dégradation de la politique familiale à partir de 2014 avait un impact. En effet, 33% des personnes âgées de moins de 50 ans déclaraient que cette dégradation les avait amenées à renoncer à avoir un enfant supplémentaire, et 29% les avait amenées à différer le projet d’avoir un enfant supplémentaire.

Le site “Vie publique”, rattaché aux services de la Première Ministre, souligne que la France reste dans le peloton de tête pour la fécondité en Europe, tout en étant en dessous du seuil de renouvellement des générations, fixé à 2.1. “La politique d’aide aux familles, par son caractère multiforme allant de la politique fiscale de quotient familial aux aides directes sous forme d’allocations familiales ou au financement de modes de garde, contribue dans son ensemble au maintien en France, depuis plusieurs années, d’un taux de fécondité certes en baisse mais parmi les plus forts des pays européens“.

La baisse de la fécondité est-elle durable ?

Cette multiplicité des facteurs ne facilite pas la compréhension fine de ce phénomène de baisse des naissances. Or l’évolution de cet indice est cruciale pour les projections démographiques, l’autre facteur naturel étant l’évolution du taux de mortalité. Une analyse des projections de l’ONU publiées en 2022 soulignait déjà l’impact des hypothèses sur le taux de fécondité. Une étude datant de 2020 et publiée dans la revue The Lancet donne quelques éléments pour apprécier cet impact.

Dans le modèle de l’ONU dont les projections de population mondiale sont largement relayées, le taux de fécondité est une variable dont la tendance revient vers 1.75 à long terme (l’horizon des projections est l’année 2100). Pourtant, des pays aussi divers que la Corée du Sud, la Grèce, la Thaïlande et le Canada ont un taux de fécondité très bas depuis de nombreuses années. Par exemple, en Grèce, l’indice de fécondité évolue entre 1.3 et 1.5 depuis le début du XXI° siècle. On a constaté également une absence de rebond de la natalité en Chine, malgré des incitations de politique publique initiées depuis 2021.

Dans l’étude citée plus haut, les auteurs modélisent ce taux par pays avec simplement deux facteurs explicatifs : l’accès au contrôle des naissances et la durée en année des études des femmes. Leur modèle prévoit un indice de fécondité tendant vers 1.66 à comparer au chiffre de 1.75 selon les prévisions de l’ONU. Cet écart semble minime. Cependant, un écart de 0.1 de l’indice modifie la projection de population mondiale de 500 millions à l’horizon 2100.

Par ailleurs, les auteurs notent que d’autres facteurs que ceux qu’ils ont choisis influent sur l’indice de fécondité : facteurs économiques et culturels, dont la place et l’accueil faits aux enfants dans la société.

Comme Alliance VITA le soulignait au moment des élections présidentielles, le désir d’enfant reste plus élevé en France (autour de 2.4 enfants par couple) que le niveau actuel de l’indice de fécondité (1.83) ne le suggère. La politique familiale est un élément de solidarité intergénérationnelle et les pouvoirs publics devraient s’en saisir compte tenu de la baisse continue des naissances en France.