Infertilité masculine et exposition aux insecticides : une étude confirme un lien
Exposition aux insecticides et infertilité masculine
une étude confirme un lien.
La chute de la fertilité masculine est largement documentée par des travaux scientifiques. Une méta-analyse publiée en 2017 faisait état d’un déclin de plus de 50 % de la concentration moyenne de spermatozoïdes chez les hommes des pays occidentaux en quarante ans (entre 1973 et 2011). Si ce déclin dans la concentration de spermatozoïdes est associé évidemment à une moindre fertilité, il a également des implications plus larges sur la santé masculine et même la mortalité, selon cette étude et d’autres recherches.
Que dit l’étude ?
Les chercheurs ont travaillé sur un ensemble d’études déjà publiées, soit sur des sites gouvernementaux américains, soit sur des sites non gouvernementaux. A partir d’un échantillon de 325 études, ils ont sélectionné par des tris statistiques 20 études sur différentes populations à travers le monde. L’objet des études se concentre sur le lien entre deux classes de pesticides largement utilisés, les organophosphates (OP) et les carbamates de N-méthyle (NMC), et la concentration de spermatozoïdes. L’effet nocif de ces substances sur la santé humaine est largement documenté. Le site Manuel MSD pour les professionnels de la santé dans sa page “intoxication” par ces substances relève que :
“À long terme, des séquelles persistantes de l’intoxication par les organophosphorés peuvent comprendre des déficits cognitifs ou un syndrome parkinsonien“.
Les organophosphorés (OPs) constituent la classe d’insecticides la plus répandue à travers le monde et représentent 30 % du marché mondial.
L’étude conclut qu’il y a des
“preuves suffisantes qu’une exposition plus élevée des hommes adultes aux insecticides OP et NMC est associée à une concentration plus faible de spermatozoïdes“.
En toute rigueur scientifique, l’association n’implique pas la preuve de la causalité. Cependant, selon l’auteur principal de l’étude, la Dr Melissa Perry, de l’Université G. Mason aux Etats Unis :
“Cette revue est la preuve la plus complète de plus de 25 ans de recherche sur la fertilité masculine et la santé reproductive. D’après les données disponibles, nous devons prendre des mesures réglementaires pour réduire l’exposition aux insecticides“.
Les implications pour la santé masculine
Les anomalies de la spermatogénèse, c’est-à-dire de la production de spermatozoïdes, sont de loin les causes les plus fréquentes d’infertilité masculine. Sont en cause un nombre importants de facteurs incluant le mode de vie (sédentarité, alcool, tabagisme, cannabis…), la génétique, un historique de certaines infections, l’exposition in utero à des produits toxiques et la pollution. Selon un rapport de l’Association Française d’Urologie (AFU) datant de 2021, “environ 15 % des couples sont confrontés à une infécondité (soit environ 60 000 nouveaux cas/an en France), dont 20 % d’origine masculine stricte et 40 % mixtes, dans lesquelles on retrouve un facteur masculin“.
Outre l’impact de cette baisse de concentration sur la fertilité, des études ont établi un lien avec d’autres problèmes de santé. Une étude danoise publiée en 2017 concluait que “nous avons constaté que la qualité du sperme est un puissant biomarqueur universel de la santé. Nous avons pu montrer que les hommes ayant une faible qualité de sperme nécessitaient plus souvent une hospitalisation, en particulier pour le diabète sucré et les maladies cardiovasculaires.”
Le mouvement “movember“, lancé en Australie en 2003, appelé en français “novembre bleu” qui suit “octobre rose”, avait pour but de sensibiliser l’opinion sur des problèmes de santé masculins, et récolter des dons pour aider la recherche médicale. L’étude sur le lien pesticide et infertilité masculine, confirmant d’autres études, apporte sa contribution à cette recherche. Compte tenu de l’utilisation extensive des pesticides dans les pays industrialisés, les solutions à apporter pour inverser la tendance relèvent du défi politique de grande ampleur.