Journée nationale des aidants : l’enquête « La Voix des Parents »

Journée nationale des aidants : l’enquête « La Voix des Parents »

Journée des aidants : l’enquête « La Voix des Parents »

 

Depuis quelques années, le 6 octobre est consacré comme « journée nationale des aidants » et le mois d’octobre est appelé « mois des aidants ». On nomme aidant toute personne – dans le cadre familial ou amical (parents, enfants, frères et sœurs, amis…) – qui intervient dans les actes de la vie quotidienne d’une personne de son entourage proche qui en a besoin.

On estime aujourd’hui en France qu’il y a entre 8 à 11 millions de personnes qui accompagnent et protègent au quotidien un proche malade, en perte d’autonomie ou en situation de handicap. Dans une enquête sur la situation des aidants de 2020, l’IPSOS concluait que la moyenne d’âge des aidants se situe à 49 ans et que près d’un quart intervient seul, 76% des aidants forment un relai, le plus souvent avec des professionnels (dans 53% des cas) ou avec d’autres proches (38% des cas). Ainsi, la personne aidée fait le plus souvent partie du cercle familial proche (un parent pour 44%) et elle vit chez elle pour 72% des situations.

 

Une enquête menée par l’Unapei

 

L’Unapei est un mouvement associatif qui rassemble 900 000 personnes : parents, amis, personnes handicapées, bénévoles, professionnels. Il est le premier réseau français d’associations de représentation et de défense des intérêts des personnes avec trouble du neuro-développement, polyhandicap et handicap psychique ainsi que de leurs familles. C’est à l’occasion de cette journée des aidants qu’il publie une enquête menée avec Planète Publique, auprès de 3 940 parents et intitulée « la Voix des Parents »

Cette enquête visait à écouter les parents d’enfant ayant des troubles du neurodéveloppement (trouble du spectre de l’autisme ; trouble du développement intellectuel ; etc.), polyhandicap ou handicap psychique, quel que soit leur âge. Elle a dressé un constat jugé objectif et alarmant, en particulier sur l’état de santé, physique et moral, de ces parents aidants à vie. Pour l’Unapei, la situation des familles se détériore d’année en année du fait du manque d’accompagnement et de la pénurie de services de soutien. Le Comité européen des droits sociaux (CEDS), une instance du Conseil de l’Europe, avait en effet rendu publique en avril 2023 une décision concernant le non-respect par la France des droits fondamentaux des personnes handicapées.

Les constats alarmants

 

57% des parents se sentent seuls face à ce qu’ils vivent.

41% des actifs sont à temps partiel

74% des parents ont le sentiment de ne pas être libre de choisir comment vivre leur vie, sentiment renforcé par les conséquences de l’inflation actuelle

95% d’entre eux appréhendent l’avenir de leur enfant lorsqu’ils ne seront plus là. Et pour cause : 40 000 personnes handicapées de plus de 50 ans sont accueillies…. en Ephad (selon le dernier rapport de la cour des comptes).

 

Des aidants aussi très aimants :

 

Cette enquête a aussi montré à quel point les parents aidants sont investis et heureux du chemin parcouru.

43% de ces parents se sentent heureux, contre 68% dans la population générale

84% des parents sont fiers du chemin parcouru avec leur enfant.

91% des parents font de l’assurance d’un accompagnement pour leur enfant la priorité de leur vie.

 

Des revendications concrètes

 

L’enquête a permis de dresser des revendications concrètes. Le principal besoin des parents, ce sont des accompagnements de qualité pour répondre aux besoins et attentes de leur proche en situation de handicap, et des solutions de relais pour eux-mêmes. les revendications principales sont :

Favoriser des accompagnements adaptés. 

Notamment par le développement des offres d’accompagnement médico-social et les services de proximité, la montée en compétences des services dits de droit commun, la valorisation des rémunérations des professionnels, le soutien à la formation aux spécificités des handicaps.

Soutenir concrètement les parents. 

Notamment en proposant un accompagnement systématique pour réaliser les démarches d’ouverture et de maintien des droits. En créant des services d’accompagnement « après parents » pour anticiper toutes les démarches liées à leur disparition et garantir un accompagnement pérenne et de qualité à leur proche, lorsqu’ils ne seront plus là. En développant les possibilités de temps partiels.

Créer des solutions de relais. 

Comme des accueils temporaires et aides à domicile

Soutenir financièrement les familles

En permettant aux aidants d’avoir une compensation suffisante et adaptée. En augmentant le montant de l’aide financière versée par les services du département (PCH). En allongeant la durée de l’indemnisation du congé de proche aidant et en valorisant leur retraite.

 

Pour Luc Gateau, Président de l’Unapei. « Accompagner une personne avec des troubles du neurodéveloppement, polyhandicap ou handicap psychique, se décline tout au long d’une vie. Les parents demandent avant tout des accompagnements pour leur proche. Ils avancent également des propositions que chacun de nous se doit d’écouter  garantir des compensations, une simplification des démarches administratives, un meilleur accès à la santé, des possibilités de souffler…En somme, ces parents veulent juste pouvoir disposer d’une vie, d’avoir le droit d’être « juste parents » comme tout citoyen. L’Unapei, en tant que porte-voix des parents, réclame que les pouvoirs publics écoutent enfin leur épuisement et leur exaspération. Il n’est plus possible de les laisser s’isoler et construire des murs de colère et de détresse »

En juillet 2023, inspirée par des interpellations d’aidants à bout de souffle, une « mission flash sur les maladies neurodégénératives » avait alerté sur la situation des aidants qui connaissent parfois de grandes difficultés pour accompagner leur proche malade. Dans ses conclusions  présentées à la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale, elle dressait une série de recommandations pour mieux soutenir les nombreuses personnes atteintes de ces maladies.

 

Face à cette situation, le gouvernement a présenté ce jour un plan de soutien aux aidants, dont l’une des mesures phares est la création de 6 000 places supplémentaires de répit pour les personnes âgées et handicapées. Ces mesures, ainsi que celles présentées dans le projet de financement de la sécurité sociale pour 2024 en faveur de l’aide à domicile, manifestent une prise de conscience politique sur la situation difficile des aidants et l’urgence de développer des solutions de soutien.

journée des aidants
Fin de vie : quand l’audiovisuel public fait la promotion de l’euthanasie

Fin de vie : quand l’audiovisuel public fait la promotion de l’euthanasie

Fin de vie : quand l’audiovisuel public fait la promotion de l’euthanasie

 

Documentaire de Marina Carrère d’Encausse intitulé Fin de vie : pour que tu aies le choix sur France 5

Le 26 septembre, France 5 diffusait en première partie de soirée le documentaire de Marina Carrère d’Encausse intitulé Fin de vie : pour que tu aies le choix. Annoncé à grand renfort de promotion entamée le 5 septembre sur la matinale de France Inter et poursuivie dans un très grand nombre de médias, le documentaire était précédé quelques heures avant de l’interview du médecin militant de l’euthanasie Denis Labayle sur la même chaîne.

Quelques jours plus tard, l’éditorialiste politique de France Inter, Yael Goosz s’irritait des tergiversations présidentielles et en appelait à Line Renaud : « Faudra-t-il que Line Renaud lève encore la voix pour accélérer le tempo présidentiel et qu’elle redise que « si la souffrance arrive, [elle] contournera la loi actuelle ? » tonnait-il ainsi dans la matinale la plus écoutée de France.

Ce matraquage médiatique s’est intensifié depuis qu’Agnès Firmin Le Bodo a remis son pré-projet de loi au président de la République. S’étant dit favorable au modèle belge lors de la campagne présidentielle de 2022, ce dernier semble désormais hésiter sur les conditions d’accès de « l’aide active à mourir » – suicide assisté seul ou assorti d’une exception d’euthanasie – repoussant ainsi le débat au parlement à l’année prochaine.

Fébriles, les promoteurs de l’euthanasie multiplient les appels à concrétiser le vote de la Convention citoyenne et sont relayés par nombre d’éditorialistes qui pressent le président de décider et de réinscrire ce sujet à l’agenda. On entend donc qu’il faudrait aller vite tant les Français n’en peuvent plus d’attendre mais qu’un projet de loi autorisant uniquement le suicide assisté serait aussi nettement insuffisant.

Un documentaire en forme de plaidoyer pour le modèle belge

Présenté comme une exploration des questionnements qui traversent la société sur la fin de vie et des options existant dans différents pays, le documentaire, passé l’introduction, s’ouvre sur la problématique assénée ainsi par Marina Carrère d’Encausse :

“En France aucun médecin n’a le droit d’aider un patient à abréger ses souffrances, même à sa demande. Faut-il enfin lever cet interdit ?”

La journaliste et médecin pose tour à tour sa caméra en Belgique, en France dans une unité de soins palliatifs, en Suisse et au Canada.

De la Belgique, on retient que l’euthanasie y est dépénalisée depuis plus de 20 ans et que pour en bénéficier il faut affronter une situation médicale sans issue et ressentir une souffrance physique et psychique insupportable qui ne peut être apaisée par les traitements. On s’arrête sur le témoignage de Françoise, Française qui a choisi la Belgique parce que « l’euthanasie au moins c’est clair c’est médical » et qui se réjouit : « Vous vous rendez compte de la chance que j’ai : je meurs en pleine conscience. J’appelle ça une belle mort ».

En fait de pleine conscience, le médecin chargé de l’euthanasier, décrit ainsi ce qui va se passer « Vous vous endormez rapidement sans vous en rendre compte ». Pour Marina Carrère d’Encausse, Françoise aura mené sa vie jusqu’au bout comme elle l’a toujours voulu et de conclure la séquence belge sur le constat que 50 Français environ s’exilent chaque année pour accéder à l’euthanasie.

L’équipe s’arrête ensuite à Narbonne, au cœur d’une unité de soins palliatifs lesquels sont présentés d’emblée comme « la seule porte de sortie en France quand les souffrances deviennent insupportables » et ensuite ainsi : « S’endormir pour oublier la mort qui approche, c’est la solution offerte par les soins palliatifs ». La sédation profonde et continue jusqu’au décès prévue par la loi Claeys-Leonetti de 2016, ne satisfait par Marina qui s’interroge : « pourquoi imposer la vie jusqu’au bout dans ces conditions ? N’y a -t-il pas là une forme d’acharnement ? Et puis tous les Français n’ont pas accès à ces soins palliatifs ».

La voie française, ni acharnement thérapeutique ni euthanasie mais soulagement de la douleur et soins palliatifs est jugée hypocrite, avec une confusion habilement entretenue entre sédation et euthanasie, et soumise à la toute-puissance des soignants. La séquence s’achève sur ces mots très durs : « Combien de patients sont-ils ainsi soumis au bon vouloir des médecins en France ».

Des mots auxquels Claire Fourcade, médecin dans ce pôle de soins palliatifs et présidente de la SFAP (Société française d’Accompagnement et de Soins Palliatifs) a répondu ainsi : « Une petite phrase qui rend si peu justice à ce que sont les soins palliatifs en général et ce que nous vivons : un lent et patient travail d’élaboration d’une relation respectueuse à l’autre, patient, famille, soignant ». « Peut-être aussi cette équipe [les réalisateurs du documentaire, NDLR] avait-elle davantage le projet de conforter son point de vue que de le remettre en question ».

 

En Suisse, l’équipe suit le parcours de Louis, qui ne souffre d’aucune maladie incurable mais dont les nombreux problèmes de santé depuis son AVC suffisent pour obtenir une aide au suicide. Marina Carrère d’Encausse rappelle qu’en Suisse depuis 2014, on peut recourir au suicide assisté en raison de polypathologies invalidantes liées à l’âge. Troublée par le témoignage de Louis, elle se questionne : « Devrait-on nous aussi aider les personnes âgées à mourir sans maladie incurable ? Cela n’inciterait-il pas les plus vulnérables à s’exclure d’eux-mêmes ? » Pire encore, les personnes en incapacité de mettre fin elles-mêmes à leurs jours sont contraintes de se tourner vers la sédation comme en France.

Décidément ce modèle ne convient pas, tant il lui apparaît incohérent : « Alors que des malades condamnés ne peuvent être aidés à mettre fin à leurs jours, des personnes âgées sans pronostic vital engagé obtiennent cette aide. » Pourtant en Belgique les deux sont possibles, sans que la journaliste ne le remette en cause, puisqu’en 2022 les polypathologies comptaient pour 20% de l’ensemble des euthanasies et pour près de la moitié des euthanasies de patients qui ne sont pas en fin de vie.

L’enquête se termine au Canada, désigné comme le pays où l’on meurt le plus par euthanasie. La caméra se pose d’abord dans un funérarium qui délivre un service tout en un. Si l’un des médecins interrogés indique que l’ouverture de l’aide médicale à mourir (AMM), c’est-à-dire l’euthanasie, a permis à la société de « gagner en humanité », il pointe également des « dangers de dérapage » et ajoute : « ça c’est sûr qu’il faut être très prudent pour éviter ces dérapages-là. »

Alors qu’en Belgique, l’équipe aura soigneusement évité de mentionner la moindre dérive, comme s’il n’en existait pas, elle pointe l’ouverture de l’AMM aux personnes handicapées en donnant la parole à une ancienne combattante de l’armée. Ayant perdu l’usage de ses jambes à la suite d’un accident à l’entraînement, Christine Gauthier s’est vu proposer l’euthanasie par un agent du ministère des anciens combattants alors qu’elle ne demandait que le soutien et les services auxquels elle avait droit.

L’élargissement à venir de l’euthanasie aux personnes atteintes de maladies mentales comme la dépression et la schizophrénie, ou de maladies neurocognitives comme Alzheimer, fait l’objet de questionnements sur les limites des médecins qui seraient amenés à pratiquer des euthanasies dans ce contexte. Au record mondial de morts par euthanasie observé au Québec, Marina Carrère d’Encausse oppose que dans les autres pays ayant légiféré sur le sujet on n’a pas assisté à une explosion des demandes.

Mieux, en Belgique, au Luxembourg et aux Pays-Bas, les euthanasies pour cause de maladie mentale représentent 1 à 3% du nombre total d’euthanasies, ce qui par contraste semble satisfaire notre enquêtrice qui n’interroge jamais les dérives qu’en termes de nombres. Ouvrir l’euthanasie à des personnes atteintes de maladie mentale ne semble pas lui poser de problème éthique en soi.

Pour elle, une même loi n’a pas le même impact d’un pays à l’autre. Peut-être aurait-elle pu consulter Theo Boer. Ce professeur d’éthique de la Santé, ardent défenseur de la loi néerlandaise de 2002 et membre de la commission de contrôle de l’euthanasie des Pays-Bas jusqu’en 2014, a mis les Français en garde contre la pente glissante et l’illusion d’encadrer les pratiques euthanasiques.

« Toute législation autorisant l’aide à mourir sera considérée par certains comme une injustice et sera contestée devant les tribunaux… Ce qui est perçu comme une occasion bienvenue par ceux qui sont attachés à leur autodétermination devient rapidement une incitation au désespoir pour les autres… Si le système le plus encadré et le mieux contrôlé au monde ne peut garantir que l’aide à mourir reste un dernier recours, pourquoi la France y arriverait-elle mieux ? » 

 

 

 
 
fin de vie : l'audiovisuel france 5 fait la promotion de l'euthanasie documentaire pour que tu aies le choix de marina carrère d'encausse
Porno-criminalité : le Haut Conseil à l’Egalité publie un rapport accablant

Porno-criminalité : le Haut Conseil à l’Egalité publie un rapport accablant

Porno-criminalité : le Haut Conseil à l’Egalité publie un rapport accablant

 

Le HCE (Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes) a publié très récemment un rapport sur la porno-criminalité avec un sous-titre explicite : “Mettons fin à l’impunité de l’industrie pornographique“.

 

Epais de 216 pages, le rapport comporte à la fois des constats et des recommandations. Le rapport du Sénat “L’enfer du décor”, dont Alliance VITA a fait une analyse ici, est cité comme “excellent”. Selon le HCE, la pornographie est la représentation de l’esclavage sexuel. Selon la définition du Conseil d’Etat dans un arrêt de décembre 2017, la pornographie désigne des contenus ” comportant des scènes de sexe ou de grande violence de nature, en particulier par leur accumulation, à troubler gravement la sensibilité des mineurs, à présenter la violence sous un jour favorable ou à la banaliser sans aucun parti pris esthétique ou procédé narratif “.

Dans son rapport, le HCE a décidé de se concentrer sur l’industrie pornographique. Il rappelle deux repères chronologiques:  l’explosion dans les années soixante de la production de contenus, sous un couvert “glamour”, et la mutation profonde à partir de 2006 avec les vidéos en streaming sur internet en accès libre.

Le rapport comporte 4 parties :

  • L’examen des violences physiques et symboliques véhiculées par l’ensemble des contenus,
  • L’exploitation sexuelle au niveau mondial,
  • Les obligations de l’Etat à agir contre ces violences
  • Les recommandations pour “sortir de l’impasse aussi bien concernant la production, la diffusion que la prévention et l’éducation”.
  • Les auteurs concluent  leur introduction en rappelant que “le corps des femmes n’est pas à vendre”.

 

Un contenu systématiquement violent, qui impacte les relations entre les femmes et les hommes

Les auteurs soulignent la présence quasi systématique de violences, physiques et verbales, contre les femmes dans des contenus accessibles en un seul clic. La violence peut s’exprimer jusqu’à la torture et aux traitements dégradants et inhumains. L’association de la souffrance et du plaisir tient d’une dimension sadique “incontestable” selon le rapport. La Procureure de la République de Paris, interrogée par le Sénat, avait d’ailleurs confirmé le caractère manifestement illégal d’une bonne partie des contenus : viols aggravés, actes de torture, traite des êtres humains, proxénétisme. Selon elle, ces qualifications pénales “permettraient de lutter contre 90% de l’activité de l’industrie pornographique”.

Le modèle économique de beaucoup de plateformes, la “course aux clics” incite par ailleurs à une surenchère de cette violence. Le rapport cite à l’appui plusieurs journalistes ayant enquêté en République Tchèque et en Hongrie, deux pays hospitaliers pour l’industrie pornographique.

Analysant nombre de contenus ainsi que les commentaires laissés par les consommateurs de vidéo, le rapport montre combien les femmes sont déshumanisées, traitées en objet. Le racisme, l’antisémitisme, la haine de l’autre, l’inceste sont présents dans nombre de vidéos largement accessibles.

La consommation est massive, et masculine à 75%. L’Arcom a publié une étude en mai 2023 sur la consommation par les mineurs. Celle-ci a rejoint désormais la consommation des adultes : 51% des garçons de 12 ans, 65% des garçons de 16 ans se rendent sur un site pornographique chaque mois, contre 55% des hommes majeurs.

L’impact psychologique est souligné par des psychologues. Le clivage “fantasme” contre “vie réelle” peut finir par s’estomper : “ les représentations produites par l’industrie pornographiques finissent effectivement par s’immiscer dans la vie intime“.

Les auteurs consacrent un chapitre à une approche en neurosciences. Des études d’imagerie cérébrale ont mis en évidence le phénomène d’addiction à la pornographie  et les difficultés à en sortir. Une intervenante à un colloque a relaté ce témoignage d’un jeune : “j’ai un stock d’images sales dans ma tête que je n’arrive pas à enlever“. L’activation des neurones miroirs lors de la consommation, visualisée dans des IRM, va “altérer la capacité empathique de la personne et influencer les comportements qui seront reproduits par imitation“.

L’argument souvent entendu que les images consommées n’ont pas d’impact dans la vie réelle est battu en brèche, entre autres, par une analyse publiée en 2015 qui concluait que : “La consommation était associée à l’agression sexuelle aux États-Unis et à l’échelle internationale, chez les hommes et les femmes, et dans les études transversales et longitudinales. Les associations étaient plus fortes pour l’agression sexuelle verbale que physique, bien que les deux soient significatives. La tendance générale des résultats suggère que le contenu violent peut être un facteur aggravant“.

 

La pornographie : un système mondial d’exploitation

L’énormité de la production de contenus ne se ferait pas sans la mise en place d’un véritable système de production. Un chiffre peut résumer la masse produite : les nouveaux contenus mis en ligne chaque jour sont équivalents à tout le contenu présent sur Netflix (15 térabytes de nouveaux contenus quotidiens). Les profits des plateformes liés aux revenus publicitaires sont colossaux, et alimentés par un système de proxénétisme exploitant les fragilités, économiques et aussi psychiques des femmes.

Le rapport dénonce fortement les opérations de communication de l’industrie pornographique française, avec des chartes et du lobby institutionnel. Il dénonce aussi le phénomène prégnant de proxénétisme et de traite humaine, y compris quand les vidéos se parent de l’appellation “porno amateur”. Une plaignante dans une procédure judiciaire contre des sociétés a résumé l’enjeu : “le porno éthique il n’existera jamais. Donc aujourd’hui il faut juste supprimer et interdire le porno“.

L’extension du réseau pornographique à la pédocriminalité est exposée par le HCE. Le NCMEC (National Center for Missing and Exploited Children), leader mondial sur les alertes à la circulation de fichiers à contenus pédopornographiques, a reçu des signalements sur 6.5 millions de fichiers en 2015. En 2019,  l’organisation en a recueilli 69.2 millions.

Le système décrit dans le rapport est également mondialisé, avec l’exploitation de femmes pauvres dans la pornographie en “livestreaming”. Les auteurs consacrent aussi un passage à la porosité entre la pornographie en ligne et la prostitution. En effet, les vidéos en ligne peuvent devenir un “lieu de repérage pour les réseaux de proxénètes“.

Enfin, les tendances lourdes de la société s’observent dans l’industrie pornographique et la prostitution. Les services d’enquête français ont constaté en 2022 que la prostitution logée concernait 85% des cas, contre 9% pour des “activités” sur la voie publique.

Le rapport parle d’uberisation de la prostitution. Le recrutement des victimes, la rencontre entre “l’offre et la demande”, la location du lieu, se font massivement en ligne, avec un “complément” de contenus consommables en ligne. Selon le Commissaire Général Christophe Molmy, cité, “l’hypersexualisation de la société et l’industrie de la pornographie poussent de nombreuses gamines à se porter volontaires et à tomber dans le piège“.

 

Comment ce système a-t-il pu s’étendre ?

Le document décrit selon ses propres termes ” la banalisation d’une pornographie violente et misogyne sous couvert de libération sexuelle“. Les auteurs s’attaquent aux pratiques “d’euphémisation linguistique”, destinées à neutraliser les garde-fous légaux et politiques, ainsi qu’à la défense par l’industrie d’une “bonne” pornographie dont il ne s’agirait que d’écarter des dérives actuelles. Aux Etats-Unis, la Cour suprême a restreint l’interdiction de la pornographie dans un arrêt de 1973 au nom de la liberté d’expression. Le rapport note les liens mafieux de la production d’images, attestés par des femmes victimes.

Les notions de consentement, de liberté d’expression et d’entreprise, de liberté de disposer de son corps, sont régulièrement invoqués par les partisans de la prostitution et de le pornographie. Prenant le contrepied de ces arguments, le HCE a auditionné plusieurs juristes sur ces thématiques. Des notions fondamentales dans le droit français ressortent de ces auditions, par exemple :

  • La notion de dignité humaine est objective, et supplante dans notre droit celle du consentement qui, elle, est subjective et donc sujette à manipulation.
  • Chacun a droit au respect de son corps. Le corps humain est inviolable.
  • Pour valider un contrat, le consentement n’est pas suffisant. Il faut aussi que le contenu soit licite, ce qui n’est pas le cas des vidéos pornographiques, produites par des violences et l’exploitation de femmes.
 

Le rapport note en particulier que défendre une liberté totale sur internet, au titre de la liberté d’expression ou d’un droit absolu à la vie privée, est un abus de droit qui consacre la loi du plus fort. Le rapport déplore le manque d’actions des pouvoirs publics pour juguler ce fléau alors que l’arsenal juridique, national et international existe.

Le HCE détaille un ensemble de 34 recommandations afin de rendre plus contraignante la lutte contre les violences porno-criminelles et l’exploitation sexuelle.

On notera par exemple la recommandation 14 de “donner le pouvoir à l’Arcom de bloquer les sites pornographiques ne mettant pas en place un contrôle effectif de l’âge” ou la recommandation 33 de “bannir le terme de travail du sexe de toute communication publique, Etat ou collectivité”.

 

Dans ce rapport, le HCE s’inscrit fortement dans une approche abolitionniste sur la pornographie, cohérente avec la législation actuelle sur la prostitution. Cette approche s’appuie implicitement sur la notion que certains actes, par leur violence, et même s’ils sont inter médiés dans des images, sont contraires à la dignité humaine. En particulier, l’interdiction de la marchandisation du corps fait obstacle à la légalisation de pratiques, qu’elles soient ou non réclamées par des particuliers, consommateurs ou producteurs. L’éthique est non seulement une question de limites acceptées socialement, mais de limites tout court.

porno-criminalité haut conseil de l'égalité homme femme publie un rapport accablant sur la pornographie

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[CP] IVG : l’urgence est à la prévention pas à la constitutionnalisation

[CP] IVG : l’urgence est à la prévention pas à la constitutionnalisation

COMMUNIQUE DE PRESSE – 4 octobre 2023

IVG : l’urgence est à la prévention pas à la constitutionnalisation

 

Le président de la République a réaffirmé aujourd’hui le souhait que l’IVG soit inscrite dans la Constitution « dès que possible ». Cette déclaration fait l’impasse sur les chiffres préoccupants publiés la semaine dernière par la DREES : en 2022, 234 300 avortements ont été pratiqués en France, le taux de recours à l’avortement atteignant son plus haut niveau depuis 1990, soit 16,9 IVG pour 1000 femmes en âge de procréer.

Autant dire que la constitutionalisation de l’IVG, dont l’accès n’est nullement menacé, est en total décalage avec la réalité de terrain. Avant de prendre toute mesure concernant un acte qui est loin d’être anodin et qui met des vies en jeu, la priorité politique doit être de conduire une étude impartiale qui analyse les causes, les conditions et les conséquences de l’avortement en France.

La Drees révélait en 2020 que les femmes aux revenus les plus faibles ont davantage recours à l’IVG que les plus aisées. Dans un contexte économique marqué par une inflation persistante érodant le pouvoir d’achat des Français, peut-on se satisfaire que l’avortement devienne un marqueur d’inégalité sociale ?

Pour Alliance VITA qui accompagne depuis plus de 20 ans des femmes et des couples confrontés à des grossesses inattendues, la question délicate de l’avortement mérite mieux que son instrumentalisation à des fins politiciennes. Nous constatons également que des femmes enceintes confrontées à une grossesse imprévue se tournent vers l’IVG à contrecœur, sous la pression sociale ou émanant de leur entourage.

Plutôt qu’une inscription dans la constitution, il est urgent de mettre en place une véritable politique de prévention de l’avortement qui permettrait d’éviter un grand nombre de drames personnels en présentant aux femmes d’autres perspectives.

 

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Contact presse

Claire-Anne Brulé

+ 33(0)6 67 77 14 80 – contactpresse@alliancevita.org

Belgique : euthanasie économique ?

Belgique : euthanasie économique ?

Belgique : euthanasie économique ?

 

L’histoire d’une jeune femme belge demandant l’euthanasie en raison d’un système social défaillant alerte sur les discriminations économiques subies par des patients.

Dans son témoignage relayé par SudInfo et livré au média flamand Nieuwsblad, Shanna, 38 ans, révèle souffrir du syndrome d’Ehlers Danloss qui entraine des douleurs extrêmes.  Elle explique ne pas avoir les moyens financiers nécessaires pour payer les frais médicaux et être aidée. Si la maladie reste incurable, des traitements visant à améliorer le confort des patients existent. Alors qu’elle devrait bénéficier d’une aide de l’état de 20 000 euros par an la jeune femme est sur une liste d’attente depuis 2017. Or elle dit avoir reçu cette allocation uniquement en 2023 et seulement la moitié.

C’est ainsi qu’elle déclare: « J’aimais beaucoup vivre, mais lorsque vous devez vous battre pour survivre chaque jour, il arrive un moment où cela s’arrête. », espèrant que son appel servira à faire bouger le système belge.

D’autant que ce système a déjà fait une autre victime, Joke Mariman, atteinte du même syndrome que Shanna,  qui a été euthanasiée par manque de soutien. Cette femme de 43 ans avait dénoncé en vain l’insuffisance des ressources financières du gouvernement flamand. Elle n’a jamais reçu de budget de santé supplémentaire, même lors d’une nouvelle procédure d’urgence.

« En racontant mon histoire, je veux montrer au gouvernement que nous ne sommes pas des chiffres, mais que nous avons aussi un visage. J’espère qu’ils comprendront alors que quelque chose de fondamental doit changer. Pour que cela cesse enfin. » a expliqué Shanna.

 

Dave Ceule, directeur de Independent Living asbl, qui soutient les personnes souffrant de handicaps physiques et mentaux, explique recevoir des témoignages similaires chaque semaine de personnes handicapées qui ne peuvent pas faire face financièrement alors qu’ils auraient droit à l’allocation.

 

En Belgique, il existe plusieurs types de groupes prioritaires qui peuvent recevoir une allocation de budget de soins. 17 000 personnes n’auraient pas encore reçu tout ou partie de leur budget de soins. La ministre flamande du Bien-être, de la Santé publique et de la Famille a réagi en promettant une procédure d’urgence pour les personnes dont l’état se détériore rapidement. 

Cette situation n’est pas sans rappeler plusieurs situations observées au Canada de patients qui demandent l’euthanasie par manque de moyens financiers et d’aide adaptée.

Autant de signaux qui doivent nous mobiliser contre toute tentative d’introduire l’euthanasie et le suicide assisté en France comme le laisse entendre le gouvernement avec son nouveau projet de loi sur la fin de vie.

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