“Transition de genre” pour les mineurs : le Sénat a pris une position
“Transition de genre” pour les mineurs : le Sénat a pris une position
Le Sénat a pris position sur le sujet très discuté des traitements pour les mineurs qui se questionnent sur leur genre. Une proposition de loi, déposée par la sénatrice Jacqueline Eustache-Brinio (LR), a été débattue et adoptée le 28 mai dernier, par 180 voix sur 316 votes exprimés. Intitulée “proposition de loi visant à encadrer les pratiques médicales mises en œuvre dans la prise en charge des mineurs en questionnement de genre”, le texte voté a été envoyé à l’Assemblée nationale.
Adoptée contre l’avis du gouvernement, cette proposition de loi a pour le moment peu de chance de poursuivre son parcours législatif. Elle fait suite à un rapport du groupe LR au Sénat, publié en mars dernier. Une synthèse est disponible sur le site du groupe Les Républicains au Sénat. 67 experts français et étrangers ont été auditionnés.
Que dit la proposition de loi votée ?
Le texte voté comporte 4 articles.
- L’article 1 porte sur les traitements médicamenteux et chirurgicaux, ainsi que le parcours de soins.
- L’article 2 inscrit des peines dans le code pénal et le code de santé publique pour des praticiens impliqués dans la prise en charge des mineurs, si ces praticiens ne respectent pas le cadre posé à l’article 1.
- L’article 3 instaure l’obligation pour le ministère de la Santé d’élaborer une stratégie nationale de pédopsychiatrie.
- L’article 4 prévoit un nouvel examen des dispositions au bout de 5 ans.
Le cœur du dispositif, à l’article 1, interdit la prescription aux mineurs de traitements hormonaux, la chirurgie de “réassignation de genre” et impose que les mineurs présentant une dysphorie de genre soient accueillis dans des centres de référence spécialisés. Pour la prescription initiale de bloqueurs de puberté, le texte impose un délai d’au moins 2 ans entre la première visite dans le centre de référence et la prescription. Par ailleurs, il impose une pluridisciplinarité de décision incluant un pédopsychiatre et un endocrinologue pédiatrique.
Les travaux du Sénat sur cette proposition de loi
Le rapport fait par la Commission des affaires sociales rappelle que “La prise en charge de la dysphorie de genre chez les mineurs fait l’objet de controverses médicales et de débats éthiques”. Le rapport précise que dans sa onzième révision de la classification internationale des maladies, l’OMS a reclassifié “l’incongruence de genre des troubles mentaux, de la personnalité et du comportement pour l’intégrer aux affections liées à la santé sexuelle”.
Quelques chiffres sont présentés, soulignant “une forte croissance du nombre de personnes prises en charge depuis le début des années 2010 – le nombre de personnes en affection de longue durée (ALD) pour « transidentité » a été multiplié par près de dix entre 2013 et 2020, pour s’établir à 8 952 personnes“. Sur ce total, la part des mineurs dans les personnes prises en charge médicalement est très faible : 3.3% des ALD. Mais elle est en forte augmentation. On est passé de 8 mineurs en 2013 à 294 en 2020.
La Commission distingue la prise en charge médicale, la transition sociale (“le fait de vivre, au sein de son environnement familial, amical, affectif ou scolaire, dans un genre différent du genre de naissance”), et la transition administrative (“les modifications de prénom et/ou du sexe à l’état civil”). Elle rappelle que la loi de modernisation de la justice en 2016 a simplifié les démarches en permettant les changements de prénom sur simple demande à l’officier d’état civil. La loi permet également ” à toute personne majeure ou mineure émancipée de démontrer au tribunal judiciaire la nécessité d’un changement de sexe à l’état civil, sans que l’absence de traitement médical de réassignation ne puisse y faire obstacle”.
La prise en charge médicale peut s’effectuer dans un des 9 (chiffre de 2018) services spécialisés hospitaliers, ou en ville auprès de praticiens libéraux, de centres de planning familiaux ou des maisons d’adolescents. On distingue 4 éléments principaux de prise en charge médicale :
- La soutien psycho-social
- Les bloqueurs de puberté
- Les traitements hormonaux
- Les actes chirurgicaux dits “de réassignation”.
Au terme de ces débats, la Commission a adopté le texte prévoyant l’interdiction des traitements hormonaux. Le rapport souligne que : “Observant que des cas de « détransition » et de regrets sont désormais documentés, elle a jugé indispensable de laisser ainsi le temps aux mineurs de réfléchir à l’opportunité de traitements longs, lourds et difficilement réversibles. Cet encadrement sera sans incidence sur la faculté pour un mineur d’entreprendre une transition administrative.
Il ne doit pas, par ailleurs, empêcher la mise en place d’un suivi psycho-social, souvent nécessaire compte tenu des souffrances ressenties, ni celle d’un accompagnement du mineur dans son parcours de transition sociale”.
Les débats en séance ont montré des positions très antagonistes et c’est sur un vote majoritaire à 57% que la proposition a été adoptée et transmise à l’Assemblée nationale. Celle-ci étant dissoute, aucun calendrier pour une date d’examen n’est possible à ce jour.
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