Gender à l’Ecole : éjection des parents

« Gender » à l’Ecole : éjection des parents

 

Devenir père, c’est tout simple. Il n’y a ni examen de passage, ni autorisation administrative. Zéro sélection. C’est possible, à deux, en quelques minutes. Avouons que c’est vertigineux. Car, si ça marche, on en prend pour la vie.

Or, reconnaissons qu’être père, c’est compliqué. Une sacré responsabilité. Pas étonnant que nombre d’hommes fuient la paternité.

Je voudrais parler aujourd’hui pour ceux qui tentent de l’assumer. Heureux pères, même maladroits et imparfaits. Heureux parents, car je crois entendre des auditrices murmurer « Et nous ? »

J’en viens au fait : l’Etat ne nous facilite pas la tâche. Vous me direz que la paternité ne fut jamais un long fleuve tranquille, ni pour Adam, ni pour Abraham, ni pour Jacob ? Chacun eut fort à faire avec sa progéniture. La Bible rend compte de bricolages procréatifs et des jalousies fratricides, jusqu’au meurtre… Mais, au moins, pour ces pères-là, c’était des affaires familiales internes.

Aujourd’hui, c’est l’Etat nous met des bâtons dans les roues. On semble s’escrimer à détruire ce que nous construisons.

Les nouveaux manuels scolaires de SVT de 1ère pour la rentrée 2011 viennent de franchir une étape : ils sont truffés des préceptes de l’idéologie du genre. Pour décrocher leur bac, mes enfants devront faire profession de foi dans un être humain à la sexualité indéterminée, prétendre (comparaisons animalières fallacieuses à l’appui) que sexualité et procréation sont strictement à distinguer. (Une façon – soit-dit en passant – de nier l’évidence de leur propre histoire biologique). Ils apprendront que si l’homosexualité ne s’étend pas davantage, c’est à cause de l’homophobie et devront vanter la masturbation générale, éreintant au passage leur religion jugée passéiste.

Faudrait-il apprendre à nos enfants à réciter le faux pour avoir bien ? A tricher avec la vérité pour réussir ? A moins d’y renoncer ? A se méfier de plus en plus des écoles, des programmes et des professeurs… ?

Mais que pèse un pauvre père devant le monstre intrusif éducation nationale qui n’hésite plus à distribuer aux adolescentes des produits contraceptifs, anonymes et gratuits. Et quand l’accident de contraception se sera traduit par une grossesse, c’est encore dans notre dos qu’il va conduire nos filles vers l’évidence de l’avortement. Nous n’en saurons strictement rien. A moins de percevoir des larmes, bien difficile à consoler. Car, pour assumer les conséquences, l’Etat comptera encore… sur les parents.

Pass contraception : le revirement irresponsable du ministre de l’Education nationale

Alliance VITA, le nouveau nom de l’Alliance pour les Droits de la Vie

En lançant le Pass contraception en Ile de France avec la bienveillance du ministre de l’Education nationale, le Conseil régional d’Ile de France ne rend service ni aux jeunes, ni à leurs parents. En effet, la logique qui préside au lancement du Pass contraception est celle de l’exclusion des parents. Or, comment demander aux parents de renforcer leur responsabilité éducative, notamment sur des questions d’absentéisme ou de primo délinquance, et en même temps tout organiser pour qu’ils soient totalement mis à l’écart d’un sujet qui concerne l’intimité et la responsabilité de leur enfant ?

Si l’Etat entendait remplacer les parents par l’intermédiaire de l’Education nationale, il n’agirait pas autrement. Mais alors, il lui faut assumer jusqu’au bout cette situation et venir en aide aux adolescents qu’une sexualité ou l’avortement précoces auront fragilisés sans que leurs parents en connaissent la raison. Fournir aux élèves de classe de Seconde une contraception anonyme, c’est entrer dans cette fuite en avant. Certains veulent proposer « ce service » dès les classes de 3ème voire de 4ème ! (Voir les déclarations du Pr Israël Nisand).

L’Alliance pour les Droits de la Vie rappelle que le harcèlement contraceptif, qui sous-tend de trop nombreux programmes scolaires, s’est accompagné d’un effet inverse de celui escompté : la très forte croissance de l’IVG chez les mineures. Les Pass contraception, et les autres méthodes supposées sécuriser la sexualité précoce, produisent à terme une sorte d’injonction aux lycéens et lycéennes de faire d’une sexualité précoce un rite initiatique. Or, celui-ci est trop souvent corrélé à des formes de souffrances sociales, affectives et personnelles qu’il faudrait avoir le courage de reconnaître.

Pour l’Alliance pour les Droits de la Vie, le monde des adultes serait plus responsable s’il osait intégrer à l’éducation sexuelle une éducation affective et une formation à la responsabilité personnelle, montrant que la relation sexuelle mérite de s’inscrire dans la construction de la vie selon le développement durable de la personne.

Rappel :

Sondage Les femmes et l’IVG IFOP 2010 : 51% des femmes pensent que les relations sexuelles trop précoces sont l’une des causes majeures de la croissance de l’IVG chez les mineures (+30% entre 2001 et 2007).

Deux scientifiques se battent pour la recherche sur l’embryon

Axel Kahn et Marc Peschanski se sont battus pour l’autorisation de la recherche sur l’embryon, avec des postures complémentaires, oscillant entre cathophobie et malhonnêteté intellectuelle. Efficace, à en juger par le récent vote du Sénat.

 

Derrière l’adoption par le Sénat d’une nouvelle version de la loi bioéthique qui autorise explicitement la recherche sur l’embryon, émergent les figures des deux scientifiques qui ont le plus pesé dans le sens de ce vote. L’un, Axel Kahn avait été auditionné une nouvelle fois par les sénateurs, et l’autre, Marc Peschanski avait lancé une annonce par conférence de presse à la veille des débats, en forme d’appel à lever l’interdiction. Aussi déterminés l’un que l’autre, très médiatisés, les deux chercheurs visent régulièrement l’Église. Mais ils n’ont pas adopté la même tactique. Catholique devenu agnostique, Axel Kahn fait assaut d’amabilités et se dit « attaché aux valeurs chrétiennes » tandis que son collègue, qui n’a rien renié de son trotskisme, fulmine.

 

Marc Peschanski, biologiste, pionnier français des recherches sur l’embryon, est un jusqu’au-boutiste. Il fut en première ligne dans la controverse sur l’usage des fonds du Téléthon qui l’oppose à l’Église catholique à partir de 2006  : son équipe est hébergée depuis 2005 au Génopole d’Évry par l’Association française de lutte contre les myopathies (AFM). Son désir de trouver a rencontré là les attentes éperdues des familles éprouvées par ces graves maladies génétiques. Leurs souffrances constituent le paravent de ses pratiques. S’y opposer, c’est vite paraître inhumain. Il le sait et en joue. Avec l’embryon, Marc Peschanski n’a rien trouvé de réellement thérapeutique à ce jour, même s’il a saisi l’occasion du passage de la loi au Sénat pour annoncer une « première mondiale », dans l’explication d’une maladie. Des collègues chercheurs comme Alain Privat, Monique Adolphe ou Alexandra Henrion ont commencé de le contester publiquement car il existe à leurs yeux l’alternative des cellules IPS «reprogrammables» qui ne pose pas de problème éthique. Cette extraordinaire découverte de Yamanaka, en 2007 a même détourné Ian Wilmut, « père » de la brebis Dolly, du clonage… Mais Peschanski est-il libre de faire machine arrière après tant de promesses, tant d’espoirs mis sur son nom, et aussi tant d’investissements financiers de l’AFM  ? Il persévère et attaque. Une vidéo argumentaire qui circule actuellement sur Internet laisse entendre que son équipe est bridée, alors qu’elle pourrait trouver des solutions à des maux aussi emblématiques que les maladies de Parkinson ou d’Alzheimer. Selon lui, « la loi de bioéthique a été, depuis l’origine, faite sous la pression d’une religion, qui est la religion catholique avec sa hiérarchie, qui a pesé de tout son poids pour qu’un certain nombre de préceptes de cette Église soient préservés ». La charge se précise dans une tribune du Monde (6 avril 2011). Pour Peschanski, les catholiques seraient coupables d’ « agression anti-scientifique » et de mensonge. Le biologiste leur reproche d’être « opposés à toute atteinte à ce qu’ils considèrent comme un être humain dès la fécondation ».

 

Que la vie commence à la conception, voilà donc le « précepte » honni. Sur Le Monde.fr, Mgr Jérôme Beau et le père Brice de Malherbes du collège des Bernardins ont répliqué  : « Le fait que l’embryon humain soit un être humain dès la fécondation n’est pas une opinion mais une réalité anthropologique appuyée par les données de la science. » Marc Peschanski exploite sans vergogne une idée reçue utile à son lobbying  : les catholiques seraient dogmatiques et les scientifiques rationnels. Il semble qu’il lui est plus facile d’attaquer l’Église que de répondre aux pairs qui le contestent. Pourtant l’argumentation de l’Église se fonde sur les données vérifiables qui ne cessent de confirmer l’humanité de l’embryon, alors que les chercheurs transgressifs recourent à des thèses obscurantistes comme lorsqu’ils taxent les embryons convoités d’ « amas de cellules », ou décrètent leur « utilité » sans jamais démontrer leur indignité. Car il faudrait logiquement prouver que l’embryon n’est pas un être humain digne de respect avant de revendiquer son utilisation comme matériel de recherche. Mais Marc Peschanski sait récuser en bloc les garde-fous éthiques. Il déclarait en 2003  : « La science est l’activité sociale d’une communauté mondiale et, en ce sens, elle ne peut être freinée par l’expression de positions philosophiques, politiques, religieuses ou autres, que l’on regroupe sous le terme d’éthique. » Il ajoutait  : « La recherche scientifique est, en elle-même, une valeur éthique. » C’est avec de tels préceptes qu’on a bien failli remettre en France le titre d’« Homme de l’année 2005 » au professeur sud-coréen Hwang. C’était aux Victoires de la médecine, juste avant qu’on ne découvre en Hwang un faussaire manipulateur, qui prétendait avoir réalisé le premier clonage humain. Tout fut précipitamment annulé. De la cérémonie, qui devait se tenir aux Folies Bergère, à la conférence de presse du jeudi 24 novembre 2005. On devait y entendre, côté à côte, les professeurs Hwang et… Peschanski plaider en faveur du clonage humain thérapeutique.

 

Le Sud-Coréen est désormais banni de la communauté scientifique et le clonage a du plomb dans l’aile. Mais le professeur Peschanski l’a longtemps revendiqué et toujours au nom d’une « communauté scientifique internationale » qu’il voudrait « plus unie ». C’est ce qu’il expliquait dans le cadre de l’émission « Science-friction » au cours d’un débat avec Axel Kahn, en 2004. Jean-Yves Nau a relevé ces échanges, diffusés sur France Culture, pour la revue Médecine et Hygiène en septembre et octobre de la même année. Aux yeux de Peschanski, l’interdiction du clonage « pose évidemment problème puisqu’il y a rupture du contrat qui lie le monde scientifique et la société » alors que « la création d’embryons par clonage permettrait d’obtenir du matériel biologique » plus riche que celui que laissent les seuls embryons surnuméraires. Il évoque notamment ceux qui sont issus du DPI (diagnostic préimplantatoire) qui ne permettent que d’étudier un nombre limité de maladies.

 

Face à ces positions radicales, mais argumentées, comment réagit Axel Kahn dans la même émission  ? S’il est encore défavorable au clonage, il n’en revendique pas moins sa forte influence en faveur de la recherche sur l’embryon  : « Depuis dix ans, je me suis, de toutes mes forces, battu pour la levée de l’interdit qui prévalait dans ce domaine. Je crois être un de ceux qui ont contribué à l’avancée des idées, notamment de l’actuelle majorité qui était très bloquée pour des raisons religieuses, vous le savez, sur cette interdiction. »

 

Les « raisons religieuses », c’est le masque obscurantiste qu’il pose volontiers, lui aussi, comme argument de principe décrédibilisant. Car, quoique apparemment moins impliqué que son collègue biologiste, le généticien Axel Kahn est tout autant actif dans le lobbying. Mais son approche est plus sinueuse, certains diront plus pernicieuse. À première vue, il se présente comme un sage épris de dialogue qui respecte les catholiques  : « L’Église a sa place dans ce débat. Elle fait partie de l’opinion publique, représente une classe importante de citoyens et peut faire valoir son analyse » affirmait-il, le 18 février 2008, au Figaro. Le quotidien précise que le professeur Kahn venait, la veille, d’« exposer aux évêques de France les dernières avancées en matière de génétique ».

 

Or, voilà qu’après cette invitation, qui était intervenue alors qu’un arrêt de la Cour de cassation conférait un statut aux fœtus issus de fausses couches tardives, Axel Kahn se posait déjà en analyste des positions épiscopales et des sensibilités chrétiennes sur l’avortement  : « Cette question n’est pas au centre du discours de l’Église, contrairement aux évangélistes américains qui en ont fait leur cheval de bataille. Même si les décisions de la Cour de cassation pouvaient donner aux autorités catholiques des arguments pour reprendre leur combat contre la loi Veil, je ne pense pas que ce soit leur volonté. »

 

Dans le même temps, Axel Kahn prenait résolument position contre la possibilité de reconnaître aux parents endeuillés par la perte d’un enfant mort-né le droit de le déclarer à l’état civil et de l’inhumer dignement. Mgr André Vingt-Trois se réjouissait au contraire de cette évolution du droit en notant  : « Quand la Cour de cassation décide de légitimer l’inscription d’un fœtus comme membre de la famille, cela signifie bien que ce fœtus a un statut. La position de l’Église est que l’on doit agir comme si l’embryon était une personne. » Axel Kahn soutenait le contraire, dans les colonnes de L’Humanité. Son argument  ? « Il faut maintenir la fiction juridique selon laquelle on n’a pas existé avant d’être né. » Et le généticien de classer comme fondamentalistes les chrétiens défendant la vie avant la naissance. Prétendre qu’il y a une césure interne à l’Église entre les ultra-infréquentables et leurs bergers assagis, c’est une posture cruelle pour les deux parties artificiellement séparées. Même approche sociopolitique, le 8 février 2011 dans Libération pour critiquer « l’absurdité» du système d’interdiction assorti de dérogation maintenu dans le projet de loi de révision des lois de bioéthique  : « On peut très bien comprendre que Jean-François Mattei, catholique fervent mais aussi biologiste sachant l’importance de la recherche sur l’embryon, ait trouvé cette habileté sémantique pour résoudre un dilemme. » À en croire Axel Kahn, la césure serait ici interne à la conscience du professeur Mattei, et les chrétiens enclins à l’hypocrisie. L’attribution du brevet de fervent catholicisme à l’ancien ministre de la Santé, auteur des premières lois de bioéthique qui ont avalisé de graves transgressions peut surprendre. N’y a-t-il pas de quoi situer Axel Kahn davantage comme un bio-politicien que comme bio-éthicien  ?

 

Et que dire de la stabilité de ses propres arguments  ? Tantôt l’homme affiche ses doutes, tantôt il déroule des raisonnements faussés que peu osent contrer. Au cours des toutes premières auditions de l’Assemblée nationale qui préparaient les débats actuels, il tentait de convaincre les députés de « transformer ce moratoire en loi positive » en argumentant contre l’hypocrisie  : « la loi ne gagne rien à être dans le faux-semblant ». Il affirmait alors que l’embryon « mérite d’être reconnu dans sa singularité » car « s’il se développe, l’embryon deviendra un être humain » en ajoutant  : « Le début d’un processus admirable n’est jamais banal » (cf. La Croix du 10 novembre 2008).

 

Vingt-huit mois plus tard, les raisons ont changé  : « Même si je considère que l’embryon est une personne, ce n’est pas un argument pour ne pas faire de la recherche, vu que l’on en fait à tous les âges de la personne humaine » (La Croix du 1er avril 2011). Quelle découverte scientifique ou anthropologique conduit désormais Axel Kahn à décréter que l’embryon, qui n’était même pas à ses yeux un véritable être humain en 2004, est devenu une personne sept ans plus tard, ce que même l’Église n’affirme pas  ? Et comment peut-on comparer la recherche sur l’embryon, qui détruit ce dernier, et les recherches médicales sur les personnes, à un autre stade de la vie, dont l’encadrement éthique se fonde évidemment sur le respect de leur intégrité et sur leur consentement éclairé  ? Mais les propos du professeur Kahn sont empreints d’un flou artistique… incontestable ! Il parle avec élégance et poésie mais son argumentation, truffée de syllogismes, est rarement contrée avec précision.

Un partage des rôles s’est donc établi, prenant l’Église en étau dans le domaine bioéthique, alors qu’elle est le premier rempart contre l’instrumentalisation de la vie commençante.

 

Le processus des états-généraux de la bioéthique, en 2009, a montré que les arguments de l’Église rejoignaient souvent le bon sens commun. La mobilisation des chrétiens fut remarquée dans le monde politique et, par leur pertinence, les publications successives de Mgr d’Ornellas ont pu contrebalancer la pression des chercheurs transgressifs. Ces derniers préfèrent riposter, sur la forme, sans dialoguer honnêtement sur le fond. Objectif : marginaliser l’apport de l’Église.

Marc Peschanski fait donc figure de bulldozer avec ses attaques anticatholiques frontales. Il tente de décrédibiliser l’institution en bloc. Il l’a désignée comme bouc émissaire de ses frustrations. Axel Kahn parvient, plus finement, peut-être inconsciemment, à affaiblir la voix catholique en la divisant. Il instille le doute chez nombre de fidèles déboussolés par ses passages médiatiques tandis que ses analyses sur l’influence de la religion sur les consciences visent les décideurs. Quoique résolument ancré à gauche, il soigne son image de sage, au-dessus de la mêlée et des partis, comme invité de marque du Parvis des gentils et de cercles chrétiens qui apprécient sa rondeur d’expression.

 

Mais les deux chercheurs, chacun dans son style, stigmatisent volontiers le «conservatisme» ecclésial. Ils restent proches comme l’avouait Axel Kahn dans leur débat de 2004 évoqué plus haut  : « Nous sommes dans une situation extrêmement singulière. Nous avons, Marc et moi, beaucoup de points communs. Nous aimons l’un et l’autre la science, nous sommes, je crois, des scientifiques qui sont considérés et nous sommes très attachés à la liberté de la recherche. » Avec un bel esprit de caste et, pour la religion, une bonne dose de condescendance.

"les dérapages du Sénat" – Décryptage de Tugdual Derville

Si le texte de la loi bioéthique devait rester en l’état, après son passage au Sénat, on pourra parler de bérézina éthique avec l’autorisation explicite de la recherche sur l’embryon, la systématisation du diagnostic prénatal et – cerise sur le gâteau – un droit à l’assistance médicale à la procréation pour les personnes homosexuelles.

 

Ne plus exiger que l’accès à l’assistance médicale à la procréation (AMP) soit réservé aux couples composés d’un homme et d’une femme  : la proposition est venue de gauche. Dans un hémicycle clairsemé, les sénateurs l’ont votée. En France, cela reviendrait à cautionner la conception d’enfants sans père. Car, pour le moment, du fait du maintien de l’interdiction de la gestation pour autrui, ce sont les femmes et elles seules qui obtiendraient la capacité de «  procréer toutes seules  », via l’insémination artificielle avec un donneur de gamètes, anonyme.

 

Après un vif débat, le Sénat, a en effet tenu à maintenir l’anonymat de ce don, contrairement à l’avis de sa commission des affaires sociales. Pour des personnes ainsi privées du droit d’accéder à leurs origines biologiques, c’est une injustice supplémentaire. Elles se disent discriminées, et d’autant plus choquées qu’elles ont entendu des arguments étranges, à l’image de ceux de François Rebsamen. Le sénateur de Côte-d’Or estime que «  la levée de cet anonymat freinerait considérablement le don et aurait des conséquences désastreuses pour la recherche  ». C’est la confirmation que des souffrances liées à l’infertilité ou au handicap sont mises en paravent de revendications scientistes, sans rapport avec la justice…

 

Au petit jeu des transgressions, les dérives s’enchaînent logiquement  : ainsi, ce sont les hommes homosexuels qui pourraient crier à la discrimination si ce «  droit à l’AMP  » que le Sénat tente de reconnaître aux femmes homosexuelles était confirmé. Ils sont incapables d’engendrer sans gestation pour autrui, en attendant l’utérus artificiel. Ce dernier appartient encore à la science-fiction, mais il est prédit par le professeur Henri Atlan dans son livre éponyme.

 

Pour le moment, tout laisse à penser que la portée transgressive du texte voté au Sénat sera atténuée par l’Assemblée nationale. Et c’est d’ailleurs ce qu’a promis le gouvernement qui entend surtout maintenir le principe d’interdiction de la recherche sur l’embryon et réserver aux infertilités médicalement avérées l’accès à l’assistance médicale à la procréation pour en exclure les «  infertilités sociales  ». L’expression désigne la stérilité attachée à la relation homosexuelle  ; elle tend à remplacer celle d’ «  AMP de convenance  » jugée péjorative.

 

L’AMP homosexuelle constitue donc le point de basculement majeur du nouveau texte. Sur ce sujet, le texte voté au Sénat et l’ensemble des débats donnent une idée des ruptures supplémentaires que pourrait entraîner une majorité parlementaire de gauche, dès 2012.

 

Sur l’autre point, celui de la re­cherche sur l’embryon, l’Assemblée nationale avait fait du principe d’interdiction un symbole sans grande portée pratique, un «  anesthésiant pour catho  » même selon le député Marc Le Fur puisqu’il était assorti de dérogations élargies. L’enjeu n’est pas de même nature, à partir du moment où l’embryon humain est déjà livré à la recherche, depuis 2004.

 

Comment expliquer que les sénateurs aient déjà pu détricoter avec tant d’entrain le texte voté en première lecture à l’Assemblée nationale fin janvier  ?

 

Vis-à-vis de l’exécutif, le temps est à l’émancipation. Plus encore au Sénat, quelques semaines après les dernières élections cantonales qui préfigurent un vraisemblable basculement à gauche de la Chambre haute. Elle est devenue la caisse de résonance parlementaire de la dérive libérale-libertaire, on l’a vu avec le récent débat sur l’euthanasie. D’autant que quelques sénateurs centristes ou UMP ont eu à cœur de montrer leur «  humanisme de progrès  », à l’image du rapporteur UMP du texte Alain Milon ou de la centriste Muguette Dini, présidente de la commission des Affaires sociales. À droite comme à gauche, serait-il plus tentant de montrer qu’on est le premier à épouser son époque, en suivant ses mœurs, que de s’attacher aux casse-tête que constituent la dette publique ou le défi environnemental  ?

 

Il faut aussi compter avec le lobby homosexuel, de plus en plus revendicatif, comme on a pu le mesurer par l’intensité des débats sur le don de sang. Le PS a bataillé pour que les personnes homosexuelles ne puissent plus être «  exclues  » de ce don, en raison de la prévalence du VIH, une exclusion jugée discriminatoire pour les uns et, au contraire, conforme à la santé publique pour le gouvernement. À ses yeux, ménager la susceptibilité d’un groupe de citoyens ne légitime pas qu’on mette en danger la vie des transfusés.

 

Le Sénat s’est également montré sensible à quelques coups médiatiques. Celui des époux Mennesson a échoué. L’histoire de leurs jumelles obtenues en Californie d’une mère porteuse et dont ils réclament la régularisation en France est marquée par trois femmes  : la génitrice («  une amie  ») qui a donné ses ovocytes, l’Américaine «  gestatrice  » qui a porté et enfanté les jumelles contre un dédommagement de 12 000 dollars, et Madame Mennesson qui les élève avec son mari après les avoir amenées en France. Monsieur Mennesson en est, lui, le géniteur. Désavouant le ministère public, la cour de Cassation a débouté le couple le 6 avril, en jugeant que les enfants nés de mères porteuses à l’étranger ne devaient pas être inscrits à l’état civil français. Au Sénat, le sénateur Milon qui a bataillé pour la gestation pour autrui, a été contredit à son tour par ses collègues. Un coup d’arrêt conforme à la tradition française de non-marchandisation du corps. Le Conseil d’État, dans un rapport préparatoire à l’actuelle révision, avait, sur ce point, incité la France à ne pas à s’aligner sur le «  moins-disant éthique  ».

 

De même, le Sénat est revenu sur l’autorisation des dons de gamètes par des personnes n’ayant pas procréé. Une autre avancée éthique, très légère, doit être notée, avec l’ajout au dispositif du bébé-médicament de la mention «  sous réserve d’avoir épuisé toutes les possibilités offertes  ».

 

Est-ce par le succès des recherches alternatives que certaines transgressions pourraient finir par tomber en désuétude  ? On ne parle pratiquement plus du clonage depuis la découverte des cellules IPS qu’on peut reprogrammer, et vers lesquelles le «  père  » de Dolly, premier mammifère cloné, s’est réorienté. Malgré la nouvelle annonce du professeur Peschanski, sur les perspectives de la recherche sur l’embryon humain, lancée à l’ouverture des débats au Sénat pour, de son propre aveu, influer sur la loi bioéthique, certains de ses collègues commencent à réagir. Deux chercheurs, Alexandra Henrion et Alain Privat, ont publié dans Le Figaro du 9 avril une tribune intitulée «  Alerte à la conscience scientifique  ». Ils y notent que «  les cellules souches embryonnaires humaines (ES) ne constituent pas un outil unique et irremplaçable  » et ajoutent que «  la libéralisation de leur utilisation signifie de facto la création d’organismes ‘chimériques’ ». Cette dérive, Marie-Thérèse Hermange a réussi à la contrer en faisant adopter un amendement interdisant clairement l’hybridation homme-animal. Très en pointe dans ce débat, la sénatrice de Paris s’est battue jusqu’au bout pour le respect de la dignité de l’embryon humain. Louée par ses collègues pour sa «  cohérence  », elle a même été soutenue sur un point  : son amendement réinstaurant la révision périodique de la loi de bioéthique a été voté. Pourquoi déléguerait-on ce thème crucial à des instances spécialisées, vulnérables aux conflits d’intérêts  ?

 

Il est finalement probable que l’Assemblée nationale — qui aura le dernier mot — redonnera son économie générale au texte.

 

Sauf, peut-être, sur un point  : le main­tien d’une liberté de prescription des médecins, en matière de dépistage du handicap, et spécialement de la trisomie 21. À l’Assemblée nationale, le rapporteur Jean Leonetti avait fait ajouter au nouveau texte de loi la mention «  lorsque les conditions médicales le nécessitent  ». Elle exonérait les médecins de l’obligation de systématiser la proposition des examens prénataux, en les laissant juges de cette opportunité. Le Sénat a effacé cette mention. Entre-temps, les dirigeants du syndicat des gynécologues-obstétriciens s’étaient mobilisés, prenant à contre-pied une partie de leur base, réunie au sein du Collectif pour sauver la médecine prénatale. Soucieux de ne pas participer à un eugénisme d’État, ce collectif s’alarme de l’abandon de la liberté de prescription qui est attachée au statut du médecin. Si le texte reste en l’état, ils seront tenus de proposer à «  toutes les femmes enceintes  », les examens de dépistage, spécialement ceux de la trisomie 21. Que fera l’Assemblée sur ce point sensible  ? Jean Leonetti semble prêt à hésiter.

Les dérapages du Sénat

Si le texte de la loi bioéthique devait rester en l’état, après son passage au Sénat, on pourra parler de bérézina éthique avec l’autorisation explicite de la recherche sur l’embryon, la systématisation du diagnostic prénatal et – cerise sur le gâteau – un droit à l’assistance médicale à la procréation pour les personnes homosexuelles.

 

Ne plus exiger que l’accès à l’assistance médicale à la procréation (AMP) soit réservé aux couples composés d’un homme et d’une femme  : la proposition est venue de gauche. Dans un hémicycle clairsemé, les sénateurs l’ont votée. En France, cela reviendrait à cautionner la conception d’enfants sans père. Car, pour le moment, du fait du maintien de l’interdiction de la gestation pour autrui, ce sont les femmes et elles seules qui obtiendraient la capacité de «  procréer toutes seules  », via l’insémination artificielle avec un donneur de gamètes, anonyme.

 

Après un vif débat, le Sénat, a en effet tenu à maintenir l’anonymat de ce don, contrairement à l’avis de sa commission des affaires sociales. Pour des personnes ainsi privées du droit d’accéder à leurs origines biologiques, c’est une injustice supplémentaire. Elles se disent discriminées, et d’autant plus choquées qu’elles ont entendu des arguments étranges, à l’image de ceux de François Rebsamen. Le sénateur de Côte-d’Or estime que «  la levée de cet anonymat freinerait considérablement le don et aurait des conséquences désastreuses pour la recherche  ». C’est la confirmation que des souffrances liées à l’infertilité ou au handicap sont mises en paravent de revendications scientistes, sans rapport avec la justice…

 

Au petit jeu des transgressions, les dérives s’enchaînent logiquement  : ainsi, ce sont les hommes homosexuels qui pourraient crier à la discrimination si ce «  droit à l’AMP  » que le Sénat tente de reconnaître aux femmes homosexuelles était confirmé. Ils sont incapables d’engendrer sans gestation pour autrui, en attendant l’utérus artificiel. Ce dernier appartient encore à la science-fiction, mais il est prédit par le professeur Henri Atlan dans son livre éponyme.

 

Pour le moment, tout laisse à penser que la portée transgressive du texte voté au Sénat sera atténuée par l’Assemblée nationale. Et c’est d’ailleurs ce qu’a promis le gouvernement qui entend surtout maintenir le principe d’interdiction de la recherche sur l’embryon et réserver aux infertilités médicalement avérées l’accès à l’assistance médicale à la procréation pour en exclure les «  infertilités sociales  ». L’expression désigne la stérilité attachée à la relation homosexuelle  ; elle tend à remplacer celle d’ «  AMP de convenance  » jugée péjorative.

 

L’AMP homosexuelle constitue donc le point de basculement majeur du nouveau texte. Sur ce sujet, le texte voté au Sénat et l’ensemble des débats donnent une idée des ruptures supplémentaires que pourrait entraîner une majorité parlementaire de gauche, dès 2012.

 

Sur l’autre point, celui de la re­cherche sur l’embryon, l’Assemblée nationale avait fait du principe d’interdiction un symbole sans grande portée pratique, un «  anesthésiant pour catho  » même selon le député Marc Le Fur puisqu’il était assorti de dérogations élargies. L’enjeu n’est pas de même nature, à partir du moment où l’embryon humain est déjà livré à la recherche, depuis 2004.

 

Comment expliquer que les sénateurs aient déjà pu détricoter avec tant d’entrain le texte voté en première lecture à l’Assemblée nationale fin janvier  ?

 

Vis-à-vis de l’exécutif, le temps est à l’émancipation. Plus encore au Sénat, quelques semaines après les dernières élections cantonales qui préfigurent un vraisemblable basculement à gauche de la Chambre haute. Elle est devenue la caisse de résonance parlementaire de la dérive libérale-libertaire, on l’a vu avec le récent débat sur l’euthanasie. D’autant que quelques sénateurs centristes ou UMP ont eu à cœur de montrer leur «  humanisme de progrès  », à l’image du rapporteur UMP du texte Alain Milon ou de la centriste Muguette Dini, présidente de la commission des Affaires sociales. À droite comme à gauche, serait-il plus tentant de montrer qu’on est le premier à épouser son époque, en suivant ses mœurs, que de s’attacher aux casse-tête que constituent la dette publique ou le défi environnemental  ?

 

Il faut aussi compter avec le lobby homosexuel, de plus en plus revendicatif, comme on a pu le mesurer par l’intensité des débats sur le don de sang. Le PS a bataillé pour que les personnes homosexuelles ne puissent plus être «  exclues  » de ce don, en raison de la prévalence du VIH, une exclusion jugée discriminatoire pour les uns et, au contraire, conforme à la santé publique pour le gouvernement. À ses yeux, ménager la susceptibilité d’un groupe de citoyens ne légitime pas qu’on mette en danger la vie des transfusés.

 

Le Sénat s’est également montré sensible à quelques coups médiatiques. Celui des époux Mennesson a échoué. L’histoire de leurs jumelles obtenues en Californie d’une mère porteuse et dont ils réclament la régularisation en France est marquée par trois femmes  : la génitrice («  une amie  ») qui a donné ses ovocytes, l’Américaine «  gestatrice  » qui a porté et enfanté les jumelles contre un dédommagement de 12 000 dollars, et Madame Mennesson qui les élève avec son mari après les avoir amenées en France. Monsieur Mennesson en est, lui, le géniteur. Désavouant le ministère public, la cour de Cassation a débouté le couple le 6 avril, en jugeant que les enfants nés de mères porteuses à l’étranger ne devaient pas être inscrits à l’état civil français. Au Sénat, le sénateur Milon qui a bataillé pour la gestation pour autrui, a été contredit à son tour par ses collègues. Un coup d’arrêt conforme à la tradition française de non-marchandisation du corps. Le Conseil d’État, dans un rapport préparatoire à l’actuelle révision, avait, sur ce point, incité la France à ne pas à s’aligner sur le «  moins-disant éthique  ».

 

De même, le Sénat est revenu sur l’autorisation des dons de gamètes par des personnes n’ayant pas procréé. Une autre avancée éthique, très légère, doit être notée, avec l’ajout au dispositif du bébé-médicament de la mention «  sous réserve d’avoir épuisé toutes les possibilités offertes  ».

 

Est-ce par le succès des recherches alternatives que certaines transgressions pourraient finir par tomber en désuétude  ? On ne parle pratiquement plus du clonage depuis la découverte des cellules IPS qu’on peut reprogrammer, et vers lesquelles le «  père  » de Dolly, premier mammifère cloné, s’est réorienté. Malgré la nouvelle annonce du professeur Peschanski, sur les perspectives de la recherche sur l’embryon humain, lancée à l’ouverture des débats au Sénat pour, de son propre aveu, influer sur la loi bioéthique, certains de ses collègues commencent à réagir. Deux chercheurs, Alexandra Henrion et Alain Privat, ont publié dans Le Figaro du 9 avril une tribune intitulée «  Alerte à la conscience scientifique  ». Ils y notent que «  les cellules souches embryonnaires humaines (ES) ne constituent pas un outil unique et irremplaçable  » et ajoutent que «  la libéralisation de leur utilisation signifie de facto la création d’organismes ‘chimériques’ ». Cette dérive, Marie-Thérèse Hermange a réussi à la contrer en faisant adopter un amendement interdisant clairement l’hybridation homme-animal. Très en pointe dans ce débat, la sénatrice de Paris s’est battue jusqu’au bout pour le respect de la dignité de l’embryon humain. Louée par ses collègues pour sa «  cohérence  », elle a même été soutenue sur un point  : son amendement réinstaurant la révision périodique de la loi de bioéthique a été voté. Pourquoi déléguerait-on ce thème crucial à des instances spécialisées, vulnérables aux conflits d’intérêts  ?

 

Il est finalement probable que l’Assemblée nationale — qui aura le dernier mot — redonnera son économie générale au texte.

 

Sauf, peut-être, sur un point  : le main­tien d’une liberté de prescription des médecins, en matière de dépistage du handicap, et spécialement de la trisomie 21. À l’Assemblée nationale, le rapporteur Jean Leonetti avait fait ajouter au nouveau texte de loi la mention «  lorsque les conditions médicales le nécessitent  ». Elle exonérait les médecins de l’obligation de systématiser la proposition des examens prénataux, en les laissant juges de cette opportunité. Le Sénat a effacé cette mention. Entre-temps, les dirigeants du syndicat des gynécologues-obstétriciens s’étaient mobilisés, prenant à contre-pied une partie de leur base, réunie au sein du Collectif pour sauver la médecine prénatale. Soucieux de ne pas participer à un eugénisme d’État, ce collectif s’alarme de l’abandon de la liberté de prescription qui est attachée au statut du médecin. Si le texte reste en l’état, ils seront tenus de proposer à «  toutes les femmes enceintes  », les examens de dépistage, spécialement ceux de la trisomie 21. Que fera l’Assemblée sur ce point sensible  ? Jean Leonetti semble prêt à hésiter.