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Maîtriser la mort ?
La Tournée 2011 de l’Alliance pour les Droits de la Vie du 23 mai au 9 juin 2011
Eclairer, rassurer, mobiliser
Cinq mois après que le Sénat ait rejeté de justesse une proposition de loi visant à légaliser l’euthanasie, l’Alliance pour les Droits de la Vie lance sa Tournée 2011 et ose un débat de société majeur : la fin de vie. A cette occasion, l’Alliance lance le Guide 10 idées solidaires pour les personnes en fin de vie.
« Maîtriser la mort ?». La question n’est pas seulement celle du débat politique- même si elle s’annonce cruciale en cette année pré électorale- c’est d’abord, pour chacun, une question intime.
Le débat sur la fin de vie mérite d’être ouvert plus largement en France, et approfondi. De nombreuses réalités liées à la fin de vie doivent encore être éclairées, parmi elles : le sens des mots (euthanasie, acharnement thérapeutique, soins palliatifs), les enjeux médicaux, familiaux, la dépendance, la solidarité, l’accompagnement de la fin de vie et des familles, mais aussi les rites de deuils… D’un point de vue pratique, que se passe-t-il dans nos hôpitaux ? Dans les pays étrangers ayant légalisé l’euthanasie ? Dans l’ensemble de la société enfin, comment mettre la mort à sa juste place ?
Le cancérologue Xavier Mirabel et Tugdual Derville sont deux personnalités qui sont à la fois témoins et experts de la fin de vie.
La Tournée 2011 de l’Alliance se déroule en partenariat avec l’Institut Européen de bioéthique, Convergence Soignants Soignés, SOS fin de vie, le CPDH.
Sept villes étapes : Amiens le 23 mai, Caen le 25 mai, Metz le 30 mai, Montpellier le 6 juin, Perpignan le 7 juin, Paris le 8 juin, Bruxelles le 9 juin 2011.
Deux grands témoins, qui sont également deux experts ayant produit de nombreuses contributions écrites sur ce sujet, dialogueront en profondeur au cours de la soirée-débat :
• Tugdual DERVILLE a travaillé dans une association humanitaire d’aide aux personnes âgées, avant de devenir Délégué général de l’Alliance pour les Droits de la Vie. Il est à l’origine du site SOS fin de vie qu’il anime. SOS fin de vie écoute et accompagne des personnes confrontées à des fins de vie ou à des deuils difficiles. Il est l’auteur du Bonheur blessé (CLD Editions)
• Xavier MIRABEL est cancérologue. Président de l’Alliance pour les Droits de la Vie et coordonateur médical du site SOS fin de vie, il a été auditionné à trois reprises sur la fin de vie à l’Assemblée nationale et au Sénat. Il a participé à l’ouvrage collectif Euthanasie – Les enjeux du débat, Presses de la Renaissance (Dir. Etienne Montero).
Lancement du Guide “10 idées solidaires auprès des personnes en fin de vie”
Le 23 mai 2011 à Amiens
Alors que la question de la fin de vie revient régulièrement dans le débat de société, qu’il a pris une acuité nouvelle lorsque le Sénat l’a débattu pour la première en janvier 2011, et que l’échéance présidentielle de 2012 ravive encore ce sujet, ainsi que celle de la dépendance, l’Alliance pour les Droits de la Vie choisit de dédier sa Tournée 2011 à ce sujet, et de publier à cette occasion le guide « 10 idées solidaires pour s’engager auprès des personnes en fin de vie ».
Se dire favorable au respect des personnes gravement malades ou dépendantes et en fin de vie, c’est avant tout s’intéresser à leur besoin de rester au cœur de la vie. Ces « dix idées pour s’engager auprès de ceux qui en ont besoin » concrétisent personnellement cet engagement. Chaque peut les appliquer selon sa disponibilité et ses compétences. Chacune de ces dix idées s’accompagne d’un conseil pratique pour les mettre en œuvre.
Les dix idées pour s’engager auprès de ceux qui en ont besoin
1 – Donner et prendre des nouvelles
2 – Visiter les personnes malades
3 – Ecouter, écouter et écouter
4 – Ne pas cacher la vérité
5 – Ne jamais cesser de considérer chaque personne comme vivante
6 – Oser le mélange des générations
7– Vivre les rites de deuil
8 – Evoquer les disparus
9 – Soutenir les aidants
10 – Devenir volontaire en soins palliatifs
La Tournée 2011 en 10 questions à Tugdual Derville et au Docteur Xavier Mirabel
Cinq mois après que le Sénat français ait failli voter une loi légalisant l’euthanasie, l’Alliance pour les Droits de la Vie organise entre le 23 mai et le 9 juin 2011 une Tournée « Maîtriser la mort ? », dans six villes de France et à Bruxelles. Objectif : sensibiliser les personnes sur un sujet de société à la fois médical et social, personnel et familial, mais aussi, à l’approche des élections présidentielles, de plus en plus politique.
1. Pourquoi avoir choisi ce mot difficile de « mort » alors que votre nom et votre objet social sont orientés vers la vie ?
Pour regarder les choses en face. La mort est une réalité étrange : d’un côté, elle est commune, puisqu’avec la conception, elle est le second élément certain d’une vie humaine. Mais, d’un autre côté, elle n’a rien d’anodin, car c’est une expérience unique, intime, éprouvante et, surtout, sans retour. L’attitude face à la mort est emblématique d’une civilisation. L’homme se définit même largement par les rites de deuil, qui manifestent son questionnement sur l’au-delà. C’est pourquoi édulcorer la mort, la confiner dans la main de spécialistes, l’arracher à la vie quotidienne, escamoter les rites de deuils etc. tout cela contribue paradoxalement à déshumaniser nos sociétés, jusqu’à perdre le sens de la vie. Nous le constatons régulièrement en répondant aux questions et témoignages confiés à notre service SOS fin de vie. Avoir la mort comme ligne d’horizon est l’un des éléments qui nous pousse à chercher et donner un sens à la vie.
2. Est-ce la raison de votre récente participation au Salon de la mort ?
Derrière le titre un peu provocateur ou racoleur de ce salon, nous avons découvert que ses organisateurs (ainsi que la plupart des exposants) partageaient ce souci de donner à la mort sa juste place, au cœur de la vie sociale. Mais l’approche de l’Alliance, au-delà de la dimension humanitaire de nos services d’aide, est plus globale : elle s’inscrit dans un projet de société. La « culture de la vulnérabilité » que nous prônons est particulièrement nécessaire pour affronter les défis du vieillissement, de la dépendance et de la fin de vie, et ne pas sombrer dans une violence utilitariste.
3. Comment cette culture de la vulnérabilité peut-elle aider à approcher une personne en fin de vie ?
Contrairement à une culture de toute-puissance (ou de maîtrise) la culture de la vulnérabilité reconnaît en tout être humain, quel que soit son âge et son état de santé, une personne précieuse, digne d’être aimée et soignée. Ce regard est aussi une exigence, il appelle une présence, une écoute, un engagement… La grande dépendance et la vulnérabilité extrême en fin de vie nécessitent la mobilisation de multiples compétences, et du temps de qualité. C’est ainsi qu’on rend hommage à l’humanité de celui qui va mourir. Cette humanité rayonne tout autant dans l’indigence que dans la performance. En réalité, chacun est concerné par cette culture. Car, au plus profond de son for intérieur, chacun se sait fragile, vulnérable, mortel. Voir que la société prend soin des personnes les plus fragiles est pour chacun de nous consolateur. Quand je serai devenu incontinent, grabataire, dépendant, il restera donc des visages pour me sourire et prendre soin de moi !
4. Pourtant l’euthanasie est présentée comme un geste de compassion, respectueux de la dignité, et même comme l’ultime liberté
« Ultime injustice » souligne à juste titre Robert Holcman dans son récent livre. L’euthanasie est l’exemple type de l’aboutissement cruel de la culture de la maîtrise absolue. Cette mort qui me fait peur, voilà que je suis tenté de la faire advenir comme si c’était une façon de la déjouer. C’est se jeter dans la gueule du loup. C’est ignorer que rien ni personne ne peut m’enlever ma dignité. Mais beaucoup de bien portants qui redoutent (à juste titre) le temps de la dépendance, s’imaginent à tort incapables de la vivre, de la traverser. Ils ignorent surtout – c’est encore un paradoxe – qu’il y a souvent à cueillir des instants précieux, des expériences incomparables au cœur de la vulnérabilité. Comme si seule la vulnérabilité pouvait les autoriser…
5. De quoi voulez-vous parler ? »
Je ne suis pas en train de nier la souffrance. Et, avec notre président, Xavier Mirabel, qui est aussi cancérologue, nous nous battons pour que la lutte antidouleur et l’accompagnement des personnes en fin de vie se développent. Mais faire advenir la mort au prétexte de la souffrance morale ou physique, c’est tout bonnement du vol (pour ne pas parler de meurtre…) : c’est le vol de possibilités extraordinaires, en terme relationnel. Celui qui s’en va « à son heure » – bien des soignants vous le diront – meurt rarement par hasard. Il a souvent « lâché prise » après avoir attendu. Il a réglé un contentieux, dans le sens du pardon. Il a revu un proche. Il a célébré une fête de sa religion à une date jusqu’à laquelle il a « tenu »… Quelque chose du « tout est accompli » s’est joué… Même dans certaines morts accidentelles, les proches savent parfois lire ce type de « signe » consolateur. Car, même si la peine reste entière, c’est une source de paix de découvrir que la mort est l’aboutissement d’un chemin, qui gardera son mystère, mais peut révéler, dans le même temps, sa cohérence. Au contraire, l’administration délibérée de la mort est d’une grande violence, et laisse souvent aux proches, un sentiment de culpabilité, d’inachevé.
6. La culture des soins palliatifs, n’est-elle pas finalement la réponse absolue à celle de l’euthanasie ? »
Oui et non. Oui, c’est une « culture » c’est-à-dire, bien au delà des services d’hospitalisation ou « mobiles », c’est un état d’esprit qui doit se répandre dans toute la médecine. Nous y travaillons. C’est d’ailleurs la technicisation de la pratique médicale qui a fait émerger le concept de « soins palliatifs » alors qu’il y a quelques dizaines d’années, l’essentiel de la médecine était palliative. Les magnifiques progrès médicaux ont en effet eu des dégâts collatéraux : une certaine deshumanisation des pratiques et aussi une culture du protocole et de la performance, jusqu’à « l’acharnement thérapeutique » (on fait tout et n’importe quoi comme si le corps était une machine) puis l’euthanasie (on jette la machine à la casse quand on pense ne plus pouvoir réparer). Le docteur Mirabel le souligne souvent : contrairement aux idées reçues, acharnement thérapeutique et euthanasie ne sont pas alternatifs mais cumulatifs. Ce sont deux faces d’une culture de toute puissance. A ce titre, effectivement, les soins palliatifs apparaissent en recours pour humaniser la fin de vie selon l’adage : il y a tant à faire quand il n’y a plus rien à faire… Cela concerne les soignants mais aussi les proches de la personne et les bénévoles qui sont indispensables si nous voulons que cette culture se répande concrètement.
7. Mais vous aviez dit « Oui et non » ! »
J’ai dit aussi non car nous constatons qu’il ne faut pas ériger les soins palliatifs en idéologie. Il y aurait à nos yeux une façon toute puissante de proposer la « bonne mort » comme si on garantissait un résultat. L’homme reste libre de se révolter, de refuser de l’aide, et les soignants peuvent se retrouver en échec. Nous avons noté que quelques praticiens de soins palliatifs avaient émis l’hypothèse que, finalement, on pouvait intégrer l’euthanasie comme issue des accompagnements ayant échoué. C’est à nos yeux gravissime, car c’est exactement par cette brèche que tentent de s’engouffrer ceux qui promeuve la légalisation de l’euthanasie, notamment l’Association pour le droit de mourir dans la dignité, dont le nom est à lui seul un syllogisme.
8. Que leur répondez-vous ?
Ce que dit la Société française d’accompagnement et de soins palliatifs (SFAP) : euthanasie et soins palliatifs sont incompatibles. On le voit dans les pays qui ont légalisé l’administration de la mort. « La mauvaise monnaie chasse la bonne » : il est plus facile prescrire un cocktail létal que réaliser une consultation poussée antidouleur. Il est plus facile de former à l’euthanasie qu’aux soins palliatifs. Donner la mort est rapide et peu couteux (si on excepte son terrible impact sur les consciences). Et l’on a même vu qu’il était plus facile dans les pays où l’euthanasie est légalisée de réaliser des euthanasies clandestines que de remplir les dossiers administratifs prévus pour les euthanasies légales. Alors qu’on prétendait que la loi « assainirait » la situation, ce sont les transgressions clandestines qu’elle semble avoir encouragées en parallèle ! Comme si l’abandon d’un interdit symbolique autorisait tout… Et on parle d’euthanasier des enfants, des personnes désorientées etc. Du droit au devoir de mourir, il n’y a qu’un pas… En fait d’ultime liberté, c’est le totalitarisme qui pointe.
9. Pensez-vous que c’est un risque pour la France, après 2012 ?
Plus encore qu’en 2007, l’euthanasie va s’inviter dans la campagne. Ce sera peut-être un point clivant. Les contraintes économiques poussent à l’euthanasie (Jacques Attali l’appelait à ce titre de ses vœux). Les sondages d’opinion poussent aussi les responsables politiques à sa surenchère sur cette question… Mais quand on regarde les choses de plus près, on se rend compte que ce n’est pas ce qui préoccupe d’abord les Français. Ils considèrent même comme prioritaire le développement des soins palliatifs. Et ils ont déjà peur de la rupture de confiance entre soignants et soignés qu’entrainerait l’octroi aux premiers d’un « permis de tuer » … Nous comptons le rappeler aux candidats.
10. Comment va se passer votre Tournée 2011, en comparaison des deux dernières, qui ont été un grand succès ?
Comme nous l’avons vu, le thème de la mort nous concerne plus universellement encore que celui de la bioéthique, abordé les deux années précédentes et qui peut paraître spécialisé. Cette année, nous avons choisi d’intervenir à deux voix, Xavier Mirabel et moi-même, chacun avec sa fibre : lui comme médecin, et moi avec mon expérience de SOS fin de vie. Et c’est donc Ségolène du Closel qui animera, de façon originale, et non plus moi. Il y aura aussi des séquences vidéo très fortes.
En abordant la question sous des angles complémentaires, nous voulons que les personnes repartent avec des réponses à leurs questions tant personnelles que sur les perspectives législatives. Nous leur laisserons aussi des documents de qualité, utiles pour leur propre vie, notamment la carte Vigilance fin de vie, et le guide « 10 idées solidaires pour accompagner les personnes en fin de vie ».
En venant nombreuses les personnes montreront aussi qu’il y a une solide mobilisation en faveur d’une autre solution que celle que promeut de plus en plus le lobby de l’euthanasie.
Dans la vaste salle du Casino de Paris, la soirée parisienne sera exceptionnelle (et sans aucun point commun avec les soirées 2009 porte Maillot ou 2010 à la Mutualité). Nous prévoyons le 8 juin une « surprise », en plus des cinq personnalités qui vont nous rejoindre : le docteur Chantal Habert qui dirige une équipe mobile de soins palliatifs, Anne-Marie Trébulle, directrice des soins de la maison Médicale Jeanne Garnier, Christian de Cacqueray, du service diocésain des funérailles, Marie-Thérèse Hermange, sénateur et membre du Comité consultatif national d’éthique et le philosophe Fabrice Hadjadj. Ce devrait être un véritable évènement qui lancera l’action de l’Alliance sur ce sujet pendant l’année « présidentielle ».
Le lendemain nous serons à Bruxelles, avec notre partenaire l’Institut européen de bioéthique. Achever la tournée dans un pays voisin et ami où l’euthanasie se pratique légalement, ce n’est pas neutre.
La Tournée 2011 de l’Alliance pour les Droits de la Vie du 23 mai au 9 juin 2011
Eclairer, rassurer, mobiliser
Cinq mois après que le Sénat ait rejeté de justesse une proposition de loi visant à légaliser l’euthanasie, l’Alliance pour les Droits de la Vie lance sa Tournée 2011 et ose un débat de société majeur : la fin de vie. A cette occasion, l’Alliance lance le Guide 10 idées solidaires pour les personnes en fin de vie.
« Maîtriser la mort ?». La question n’est pas seulement celle du débat politique- même si elle s’annonce cruciale en cette année pré électorale- c’est d’abord, pour chacun, une question intime.
Le débat sur la fin de vie mérite d’être ouvert plus largement en France, et approfondi. De nombreuses réalités liées à la fin de vie doivent encore être éclairées, parmi elles : le sens des mots (euthanasie, acharnement thérapeutique, soins palliatifs), les enjeux médicaux, familiaux, la dépendance, la solidarité, l’accompagnement de la fin de vie et des familles, mais aussi les rites de deuils… D’un point de vue pratique, que se passe-t-il dans nos hôpitaux ? Dans les pays étrangers ayant légalisé l’euthanasie ? Dans l’ensemble de la société enfin, comment mettre la mort à sa juste place ?
Le cancérologue Xavier Mirabel et Tugdual Derville sont deux personnalités qui sont à la fois témoins et experts de la fin de vie.
La Tournée 2011 de l’Alliance se déroule en partenariat avec l’Institut Européen de bioéthique, Convergence Soignants Soignés, SOS fin de vie, le CPDH.
Sept villes étapes : Amiens le 23 mai, Caen le 25 mai, Metz le 30 mai, Montpellier le 6 juin, Perpignan le 7 juin, Paris le 8 juin, Bruxelles le 9 juin 2011.
Deux grands témoins, qui sont également deux experts ayant produit de nombreuses contributions écrites sur ce sujet, dialogueront en profondeur au cours de la soirée-débat :
• Tugdual DERVILLE a travaillé dans une association humanitaire d’aide aux personnes âgées, avant de devenir Délégué général de l’Alliance pour les Droits de la Vie. Il est à l’origine du site SOS fin de vie qu’il anime. SOS fin de vie écoute et accompagne des personnes confrontées à des fins de vie ou à des deuils difficiles. Il est l’auteur du Bonheur blessé (CLD Editions)
• Xavier MIRABEL est cancérologue. Président de l’Alliance pour les Droits de la Vie et coordonateur médical du site SOS fin de vie, il a été auditionné à trois reprises sur la fin de vie à l’Assemblée nationale et au Sénat. Il a participé à l’ouvrage collectif Euthanasie – Les enjeux du débat, Presses de la Renaissance (Dir. Etienne Montero).
Lancement du Guide “10 idées solidaires auprès des personnes en fin de vie”
Le 23 mai 2011 à Amiens
Alors que la question de la fin de vie revient régulièrement dans le débat de société, qu’il a pris une acuité nouvelle lorsque le Sénat l’a débattu pour la première en janvier 2011, et que l’échéance présidentielle de 2012 ravive encore ce sujet, ainsi que celle de la dépendance, l’Alliance pour les Droits de la Vie choisit de dédier sa Tournée 2011 à ce sujet, et de publier à cette occasion le guide « 10 idées solidaires pour s’engager auprès des personnes en fin de vie ».
Se dire favorable au respect des personnes gravement malades ou dépendantes et en fin de vie, c’est avant tout s’intéresser à leur besoin de rester au cœur de la vie. Ces « dix idées pour s’engager auprès de ceux qui en ont besoin » concrétisent personnellement cet engagement. Chaque peut les appliquer selon sa disponibilité et ses compétences. Chacune de ces dix idées s’accompagne d’un conseil pratique pour les mettre en œuvre.
Les dix idées pour s’engager auprès de ceux qui en ont besoin
1 – Donner et prendre des nouvelles
2 – Visiter les personnes malades
3 – Ecouter, écouter et écouter
4 – Ne pas cacher la vérité
5 – Ne jamais cesser de considérer chaque personne comme vivante
6 – Oser le mélange des générations
7– Vivre les rites de deuil
8 – Evoquer les disparus
9 – Soutenir les aidants
10 – Devenir volontaire en soins palliatifs
La Tournée 2011 en 10 questions à Tugdual Derville et au Docteur Xavier Mirabel
Cinq mois après que le Sénat français ait failli voter une loi légalisant l’euthanasie, l’Alliance pour les Droits de la Vie organise entre le 23 mai et le 9 juin 2011 une Tournée « Maîtriser la mort ? », dans six villes de France et à Bruxelles. Objectif : sensibiliser les personnes sur un sujet de société à la fois médical et social, personnel et familial, mais aussi, à l’approche des élections présidentielles, de plus en plus politique.
1. Pourquoi avoir choisi ce mot difficile de « mort » alors que votre nom et votre objet social sont orientés vers la vie ?
Pour regarder les choses en face. La mort est une réalité étrange : d’un côté, elle est commune, puisqu’avec la conception, elle est le second élément certain d’une vie humaine. Mais, d’un autre côté, elle n’a rien d’anodin, car c’est une expérience unique, intime, éprouvante et, surtout, sans retour. L’attitude face à la mort est emblématique d’une civilisation. L’homme se définit même largement par les rites de deuil, qui manifestent son questionnement sur l’au-delà. C’est pourquoi édulcorer la mort, la confiner dans la main de spécialistes, l’arracher à la vie quotidienne, escamoter les rites de deuils etc. tout cela contribue paradoxalement à déshumaniser nos sociétés, jusqu’à perdre le sens de la vie. Nous le constatons régulièrement en répondant aux questions et témoignages confiés à notre service SOS fin de vie. Avoir la mort comme ligne d’horizon est l’un des éléments qui nous pousse à chercher et donner un sens à la vie.
2. Est-ce la raison de votre récente participation au Salon de la mort ?
Derrière le titre un peu provocateur ou racoleur de ce salon, nous avons découvert que ses organisateurs (ainsi que la plupart des exposants) partageaient ce souci de donner à la mort sa juste place, au cœur de la vie sociale. Mais l’approche de l’Alliance, au-delà de la dimension humanitaire de nos services d’aide, est plus globale : elle s’inscrit dans un projet de société. La « culture de la vulnérabilité » que nous prônons est particulièrement nécessaire pour affronter les défis du vieillissement, de la dépendance et de la fin de vie, et ne pas sombrer dans une violence utilitariste.
3. Comment cette culture de la vulnérabilité peut-elle aider à approcher une personne en fin de vie ?
Contrairement à une culture de toute-puissance (ou de maîtrise) la culture de la vulnérabilité reconnaît en tout être humain, quel que soit son âge et son état de santé, une personne précieuse, digne d’être aimée et soignée. Ce regard est aussi une exigence, il appelle une présence, une écoute, un engagement… La grande dépendance et la vulnérabilité extrême en fin de vie nécessitent la mobilisation de multiples compétences, et du temps de qualité. C’est ainsi qu’on rend hommage à l’humanité de celui qui va mourir. Cette humanité rayonne tout autant dans l’indigence que dans la performance. En réalité, chacun est concerné par cette culture. Car, au plus profond de son for intérieur, chacun se sait fragile, vulnérable, mortel. Voir que la société prend soin des personnes les plus fragiles est pour chacun de nous consolateur. Quand je serai devenu incontinent, grabataire, dépendant, il restera donc des visages pour me sourire et prendre soin de moi !
4. Pourtant l’euthanasie est présentée comme un geste de compassion, respectueux de la dignité, et même comme l’ultime liberté
« Ultime injustice » souligne à juste titre Robert Holcman dans son récent livre. L’euthanasie est l’exemple type de l’aboutissement cruel de la culture de la maîtrise absolue. Cette mort qui me fait peur, voilà que je suis tenté de la faire advenir comme si c’était une façon de la déjouer. C’est se jeter dans la gueule du loup. C’est ignorer que rien ni personne ne peut m’enlever ma dignité. Mais beaucoup de bien portants qui redoutent (à juste titre) le temps de la dépendance, s’imaginent à tort incapables de la vivre, de la traverser. Ils ignorent surtout – c’est encore un paradoxe – qu’il y a souvent à cueillir des instants précieux, des expériences incomparables au cœur de la vulnérabilité. Comme si seule la vulnérabilité pouvait les autoriser…
5. De quoi voulez-vous parler ? »
Je ne suis pas en train de nier la souffrance. Et, avec notre président, Xavier Mirabel, qui est aussi cancérologue, nous nous battons pour que la lutte antidouleur et l’accompagnement des personnes en fin de vie se développent. Mais faire advenir la mort au prétexte de la souffrance morale ou physique, c’est tout bonnement du vol (pour ne pas parler de meurtre…) : c’est le vol de possibilités extraordinaires, en terme relationnel. Celui qui s’en va « à son heure » – bien des soignants vous le diront – meurt rarement par hasard. Il a souvent « lâché prise » après avoir attendu. Il a réglé un contentieux, dans le sens du pardon. Il a revu un proche. Il a célébré une fête de sa religion à une date jusqu’à laquelle il a « tenu »… Quelque chose du « tout est accompli » s’est joué… Même dans certaines morts accidentelles, les proches savent parfois lire ce type de « signe » consolateur. Car, même si la peine reste entière, c’est une source de paix de découvrir que la mort est l’aboutissement d’un chemin, qui gardera son mystère, mais peut révéler, dans le même temps, sa cohérence. Au contraire, l’administration délibérée de la mort est d’une grande violence, et laisse souvent aux proches, un sentiment de culpabilité, d’inachevé.
6. La culture des soins palliatifs, n’est-elle pas finalement la réponse absolue à celle de l’euthanasie ? »
Oui et non. Oui, c’est une « culture » c’est-à-dire, bien au delà des services d’hospitalisation ou « mobiles », c’est un état d’esprit qui doit se répandre dans toute la médecine. Nous y travaillons. C’est d’ailleurs la technicisation de la pratique médicale qui a fait émerger le concept de « soins palliatifs » alors qu’il y a quelques dizaines d’années, l’essentiel de la médecine était palliative. Les magnifiques progrès médicaux ont en effet eu des dégâts collatéraux : une certaine deshumanisation des pratiques et aussi une culture du protocole et de la performance, jusqu’à « l’acharnement thérapeutique » (on fait tout et n’importe quoi comme si le corps était une machine) puis l’euthanasie (on jette la machine à la casse quand on pense ne plus pouvoir réparer). Le docteur Mirabel le souligne souvent : contrairement aux idées reçues, acharnement thérapeutique et euthanasie ne sont pas alternatifs mais cumulatifs. Ce sont deux faces d’une culture de toute puissance. A ce titre, effectivement, les soins palliatifs apparaissent en recours pour humaniser la fin de vie selon l’adage : il y a tant à faire quand il n’y a plus rien à faire… Cela concerne les soignants mais aussi les proches de la personne et les bénévoles qui sont indispensables si nous voulons que cette culture se répande concrètement.
7. Mais vous aviez dit « Oui et non » ! »
J’ai dit aussi non car nous constatons qu’il ne faut pas ériger les soins palliatifs en idéologie. Il y aurait à nos yeux une façon toute puissante de proposer la « bonne mort » comme si on garantissait un résultat. L’homme reste libre de se révolter, de refuser de l’aide, et les soignants peuvent se retrouver en échec. Nous avons noté que quelques praticiens de soins palliatifs avaient émis l’hypothèse que, finalement, on pouvait intégrer l’euthanasie comme issue des accompagnements ayant échoué. C’est à nos yeux gravissime, car c’est exactement par cette brèche que tentent de s’engouffrer ceux qui promeuve la légalisation de l’euthanasie, notamment l’Association pour le droit de mourir dans la dignité, dont le nom est à lui seul un syllogisme.
8. Que leur répondez-vous ?
Ce que dit la Société française d’accompagnement et de soins palliatifs (SFAP) : euthanasie et soins palliatifs sont incompatibles. On le voit dans les pays qui ont légalisé l’administration de la mort. « La mauvaise monnaie chasse la bonne » : il est plus facile prescrire un cocktail létal que réaliser une consultation poussée antidouleur. Il est plus facile de former à l’euthanasie qu’aux soins palliatifs. Donner la mort est rapide et peu couteux (si on excepte son terrible impact sur les consciences). Et l’on a même vu qu’il était plus facile dans les pays où l’euthanasie est légalisée de réaliser des euthanasies clandestines que de remplir les dossiers administratifs prévus pour les euthanasies légales. Alors qu’on prétendait que la loi « assainirait » la situation, ce sont les transgressions clandestines qu’elle semble avoir encouragées en parallèle ! Comme si l’abandon d’un interdit symbolique autorisait tout… Et on parle d’euthanasier des enfants, des personnes désorientées etc. Du droit au devoir de mourir, il n’y a qu’un pas… En fait d’ultime liberté, c’est le totalitarisme qui pointe.
9. Pensez-vous que c’est un risque pour la France, après 2012 ?
Plus encore qu’en 2007, l’euthanasie va s’inviter dans la campagne. Ce sera peut-être un point clivant. Les contraintes économiques poussent à l’euthanasie (Jacques Attali l’appelait à ce titre de ses vœux). Les sondages d’opinion poussent aussi les responsables politiques à sa surenchère sur cette question… Mais quand on regarde les choses de plus près, on se rend compte que ce n’est pas ce qui préoccupe d’abord les Français. Ils considèrent même comme prioritaire le développement des soins palliatifs. Et ils ont déjà peur de la rupture de confiance entre soignants et soignés qu’entrainerait l’octroi aux premiers d’un « permis de tuer » … Nous comptons le rappeler aux candidats.
10. Comment va se passer votre Tournée 2011, en comparaison des deux dernières, qui ont été un grand succès ?
Comme nous l’avons vu, le thème de la mort nous concerne plus universellement encore que celui de la bioéthique, abordé les deux années précédentes et qui peut paraître spécialisé. Cette année, nous avons choisi d’intervenir à deux voix, Xavier Mirabel et moi-même, chacun avec sa fibre : lui comme médecin, et moi avec mon expérience de SOS fin de vie. Et c’est donc Ségolène du Closel qui animera, de façon originale, et non plus moi. Il y aura aussi des séquences vidéo très fortes.
En abordant la question sous des angles complémentaires, nous voulons que les personnes repartent avec des réponses à leurs questions tant personnelles que sur les perspectives législatives. Nous leur laisserons aussi des documents de qualité, utiles pour leur propre vie, notamment la carte Vigilance fin de vie, et le guide « 10 idées solidaires pour accompagner les personnes en fin de vie ».
En venant nombreuses les personnes montreront aussi qu’il y a une solide mobilisation en faveur d’une autre solution que celle que promeut de plus en plus le lobby de l’euthanasie.
Dans la vaste salle du Casino de Paris, la soirée parisienne sera exceptionnelle (et sans aucun point commun avec les soirées 2009 porte Maillot ou 2010 à la Mutualité). Nous prévoyons le 8 juin une « surprise », en plus des cinq personnalités qui vont nous rejoindre : le docteur Chantal Habert qui dirige une équipe mobile de soins palliatifs, Anne-Marie Trébulle, directrice des soins de la maison Médicale Jeanne Garnier, Christian de Cacqueray, du service diocésain des funérailles, Marie-Thérèse Hermange, sénateur et membre du Comité consultatif national d’éthique et le philosophe Fabrice Hadjadj. Ce devrait être un véritable évènement qui lancera l’action de l’Alliance sur ce sujet pendant l’année « présidentielle ».
Le lendemain nous serons à Bruxelles, avec notre partenaire l’Institut européen de bioéthique. Achever la tournée dans un pays voisin et ami où l’euthanasie se pratique légalement, ce n’est pas neutre.