Belgique : croissance du nombre des euthanasies et extension des cas

21/02/2025

Belgique : croissance du nombre des euthanasies et extension des cas

La commission fédérale de contrôle et d’évaluation de l’euthanasie a rendu fin janvier 2025 son rapport sur le détail des euthanasies effectuées en 2022-2023. Ce 11ème rapport prévu dans la loi belge sur l’euthanasie rend compte, au-delà des statistiques, des évolutions des cas de demande d’euthanasie.
Les statistiques brutes pour 2023 ont déjà été publiées en février 2024. Le nombre d’euthanasies a plus que décuplé en vingt ans. 3 423 déclarations d’euthanasies ont été reçues en 2023, en progression de 15% par rapport à 2022, ce qui représente 3,3% des décès.

Extension des cas d’euthanasie

Parmi les évolutions les plus notables, on constate qu’après les cas de cancer qui représentent 57,5% des affections, la part des « polypathologies » liées à l’âge ne cesse d’augmenter pour atteindre 23% des cas en 2023. Dans son communiqué, la commission indique que ce pourcentage devrait augmenter car « la polypathologie est associée au processus de vieillissement que subissent les patients ». Cette réflexion pose question : peut-on associer comme une évidence que les personnes âgées devraient se tourner vers l’euthanasie du fait du cumul normal de leurs pathologies ?

Les cas d’affections psychiatriques et de troubles cognitifs en hausse de 78%

Les euthanasies en cas d’affections psychiatriques (dépressions récurrentes) et troubles cognitifs (comme les maladies d’Alzheimer) représentent 2,5% des cas, soit 161 personnes euthanasiées, qui pour la plupart n’avaient pas de pronostic engagé à brève échéance. Il s’agit d’une forte progression par rapport à la période 2020-2021 où 91 cas avaient été répertoriés.
Ont ainsi été euthanasiées : 36 personnes souffrant de troubles d’humeur (dépression, bipolarité…) ; 83 personnes atteintes de troubles cognitifs (démence, Alzheimer…) ; 10 personnes souffrant de troubles de la personnalité et du comportement ; 9 personnes souffrant de trouble de stress post-traumatique, de trouble dissociatif et de trouble anxieux ; 6 personnes souffrant de schizophrénie et troubles schizo-affectif et de troubles délirants ; 3 personnes souffrant de troubles mentaux organiques comme l’autisme ; 1 personne souffrant de syndrome post-commotionnel ; 3 personnes atteintes de syndromes comportementaux comme l’anorexie.
Dans leurs commentaires, les auteurs soulignent que les affections psychiatriques concernent un groupe limité de patients, et une tranche d’âge qui peut être plus jeune mais que « l’euthanasie chez les personnes atteintes de troubles psychiatriques suscite encore beaucoup de controverses, non seulement dans les médias, mais aussi au sein de la profession psychiatrique. De nombreuses questions sont soulevées concernant l’évaluation de la capacité de ces patients à exprimer leur volonté, la définition du caractère sans issue de leur situation, ainsi que la détermination de leur état comme étant incurable ou résistant aux traitements. » Pour autant ils ne les remettent pas en question.
Dans 40% des cas, les patients avaient fait des tentatives de suicide et 22% des personnes avaient eu des antécédents d’abus sexuels et/ou de violence durant l’enfance.

Sur la période 2022-2023, 19% des euthanasies (1126) ont été pratiquées sur des personnes dont le pronostic vital n’était pas engagé à brève échéance. D’autre part, parmi les médecins consultés pour la demande d’euthanasie pour des décès évalués à « brève échéance », seuls 4,9 % sont formés en soins palliatifs. Un tiers des médecins (33%) consultés, ont reçu une formation spécialisée en « soins fin de vie » LEIF-EOLE, en collaboration avec l’Association pour le Droit de mourir dans la dignité (ADMD), militante de l’euthanasie.

Comme on l’a constaté déjà les années précédentes, au fil des rapports de cette commission, un glissement s’opère vers l’acceptation de cas d’euthanasie pour des pathologies mentales ou des polypathologies avec une interprétation de plus en plus large de l’incurabilité et de la notion de souffrance qui ne pourrait être soulagée. Des psychiatres alertent sur cette tendance qui percute les politiques de prévention du suicide. Face à la croissance du nombre de dossiers d’euthanasie, la Commission de contrôle demande une augmentation des effectifs et des rétributions des membres, comme si l’augmentation des euthanasies était une fatalité.

Pour aller plus loin :
Analyse détaillée du 11e rapport par l’Institut européen de bioéthique
Bilan de l’euthanasie en Belgique de 2002 à 2023 par Alliance VITA.

 

 

 

 

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