Rapport annuel : toujours plus d’euthanasies au Canada
Santé Canada vient de publier son 5ème rapport sur l’euthanasie révélant une hausse de 15,8% pour 2023 ce qui représente 15 543 personnes euthanasiées, soit 4,7% des décès.
Désignée sous l’euphémisme « Aide médicale à mourir ou AMM », la pratique de l’euthanasie s’est généralisée tandis que moins de 5 cas de suicides assistés ont été répertoriés. 19 660 demandes ont été en réalité déclarées, mais 2906 personnes sont mortes avant l’acte, 915 demandes ont été jugées inéligibles et 496 personnes ont retiré leur demande.
Le Québec, record canadien de « l’AMM »
Trois provinces représentent 85% des euthanasies pratiquées : le Québec (36,5%), l’Ontario (30,3%) et la Colombie Britannique (18%).
Le rapport indique que « Une sensibilisation accrue à l’aide médicale à mourir dans le cadre du continuum de soins, le vieillissement de la population et les schémas de maladie associés, les croyances, l’acceptation sociétale, ainsi que la disponibilité des praticiens qui fournissent l’aide médicale à mourir sont autant de facteurs qui peuvent influencer le nombre de cas ».
Le Québec détient le triste record : en tout, 5717 Québécois ont reçu « l’aide médicale à mourir » en 2023-2024, ce qui représente 7,3 % des décès dans la province.
Des euthanasies sans que la mort soit « raisonnablement prévisible » en augmentation
La loi canadienne a été modifiée plusieurs fois en moins de 10 ans depuis la première légalisation en 2016.
En 2021 l’euthanasie a été étendue à des personnes handicapées dont la mort naturelle n’est pas « raisonnablement prévisible » ce qui correspond dans le rapport à la dénomination Voie2*, soit 4,1% des cas (622 personnes), en augmentation de 34% par rapport à l’année précédente. Parmi ces personnes, les problèmes de santé les plus fréquents sont pour moitié des troubles neurologiques et pour l’autre moitié ce qui est classé dans « autres ».
Les problèmes de santé désignés dans cette seconde catégorie recouvrent le diabète, la fragilité, les maladies auto-immunes, les douleurs chroniques et les troubles mentaux. Mais comme le souligne le rapport « les praticiens ont parfois énuméré d’autres problèmes de santé comme les problèmes articulaires et musculaires, les problèmes auditifs et visuels et diverses maladies internes dans les domaines de déclaration. »
Près de la moitié des personnes ont invoqué la souffrance d’être une charge pour les proches
Parmi les 96% personnes dont la mort était « raisonnablement prévisible » dénommée Voie 1*,le cancer est la maladie la plus mentionnée suivie de la catégorie « autres ». Une catégorie spéciale intitulée « fragilités » a été invoquée pour 1319 personnes.
Elle peut comprendre « la perte de masse musculaire et de force musculaire, une déficience cognitive, la fatigue ou l’épuisement, la faiblesse et une tolérance réduite aux interventions médicales, ce qui entraîne de mauvais résultats pour la santé ». Il est cependant signalé par les rapporteurs que des médecins éprouvent des difficultés dans « les évaluations de l’AMM » pour les personnes fragiles, « compte tenu de la nature dynamique de la fragilité et des ambiguïtés dans l’interprétation des critères d’admissibilité en ce qui a trait à la fragilité ». On découvre également que 81 personnes ont été euthanasiées pour démence, ce qui comprend la maladie d’Alzheimer.
Le rapport évalue également la nature des souffrances déclarées. Près de la moitié des demandeurs d’euthanasie invoquent le fait d’être une charge pour la famille ou l’entourage (Voie 1 et voie 2). Chiffre très alarmant, 47% des personnes dont la mort n’est pas raisonnablement prévisible invoquent l’isolement ou la solitude.
Les soins palliatifs en souffrance
Le rapport rappelle que la demande d’euthanasie ne devrait pas se faire en raison d’un manque d‘options en matière de soins de fin de vie ou de services de soutien aux personnes handicapées. Cependant 23 % des personnes euthanasiées (Voie 1) n’ont pas reçu de soins palliatifs : le chiffre monte à 70 % pour les personnes dont la mort n’était pas « raisonnablement prévisible ».
22% des euthanasies ont lieu dans des centres de soins palliatifs. Comme en a témoigné Dr Leonie Herx, ex présidente de la société canadienne des médecins de soins palliatifs lors de la rencontre internationale sur la fin de vie en février 2024 : « Légaliser l’euthanasie et le suicide assisté a totalement changé la médecine et la pratique des soins palliatifs au Canada. Pas un jour ne passe désormais sans que l’euthanasie n’occupe mon temps, et il devient de plus en plus difficile d’arriver à fournir notre expertise unique pour soulager la souffrance. De nombreux cliniciens en soins palliatifs sont épuisés et démoralisés et quittent ou changent de travail. » Elle dénonçait le manque de moyens donnés aux véritables soins palliatifs.
L’augmentation continue de l’euthanasie au Canada montre combien les systèmes de contrôles sont illusoires. A l’heure où les pressions s’intensifient pour une légalisation en France, ces chiffres et ces situations devraient alerter et inciter à la plus grande prudence. Une fois levé l’interdit de tuer, aucun cadre ne tient.
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