Suicide assisté en Grande-Bretagne : une proposition controversée

15/11/2024

Suicide assisté en Grande-Bretagne : une proposition controversée

 

Le parlement britannique examinera une proposition de loi sur le suicide assisté le 29 novembre prochain.

Présentée par la députée travailliste Kim Leadbeater le 16 octobre 2024, cette proposition de loi sera proposée pour un premier vote à la Chambre des communes, équivalente à l’Assemblée nationale française.

Il s’agit de la première étape d’un processus qui devrait prendre un temps relativement long. Les propositions de loi comme en France sont examinées sur un temps plus contraint que s’il s’agissait d’un projet de loi présenté par le gouvernement. Elles arrivent rarement au bout du processus législatif pour devenir des lois.

Cependant selon le procédé britannique de tirage au sort (ballot bill), ce texte pourrait avoir le temps d’aboutir s’il n’est pas bloqué dès la deuxième lecture. En effet, il figure parmi les 10 premières propositions de députés qui seront examinées durant la nouvelle session du parlement britannique. Après un premier vote le 29 novembre confirmant ou pas la poursuite de l’examen de la proposition, les députés pourraient ensuite présenter des amendements et adopter un texte qui serait ensuite envoyé à la Chambre des Lords.

 

Quel est le contenu de cette proposition ?

Sous le titre « Terminally ill adults (End of Life ) Bill », la loi pour les malades adultes en phase terminale (fin de vie) dispose que toute personne souhaitant mettre fin à ses jours doit :

  • avoir plus de 18 ans, résider en Angleterre ou au Pays de Galles et être inscrite auprès d’un médecin traitant depuis au moins 12 mois ;
  • avoir la capacité mentale de faire un choix et être réputée avoir exprimé une volonté claire, sans contrainte ni pression ;
  • être atteinte d’une maladie, d’une affection ou d’un problème de santé inévitablement évolutif qui ne peut être guéri par traitement avec un décès prévisible à 6 mois ;
  • faire deux déclarations distinctes, attestées et signées, concernant son souhait de mourir ;
  • obtenir deux évaluations médicales par deux médecins avec au moins sept jours entre chaque évaluation.

Cette proposition retient la pratique du suicide assisté : la personne s’auto-administrerait le produit létal fourni par un médecin.

La décision finale de l’éligibilité au suicide assisté reviendrait à un juge de la Haute Cour après avoir entendu au moins un des médecins. Il pourrait interroger la personne demandeuse ou toute autre personne jugée pertinente.

Le suicide assisté ne pourrait ensuite être exécuté qu’après 14 jours minimum suivant la décision du juge.

Le texte précise qu’une personne ne peut être considérée comme malade en phase en terminale si elle souffre d’une maladie mentale ou si elle est handicapée. Les médecins ainsi que l’ensemble des professionnels de santé y compris les pharmaciens pourraient exercer leur clause de conscience pour refuser leur participation à un tel acte. Faire pression ou contraindre quelqu’un à déclarer qu’il veut mettre fin à ses jours, serait passible d’une peine de 14 ans de prison.

Actuellement, la loi applicable en Angleterre et au Pays de Galles est le Suicide Act 1961, qui interdit d’encourager le suicide et aussi de l’assister. En 2015, une proposition visant à autoriser le suicide assisté en Angleterre, au Pays de Galles et en Irlande du Nord, avait été largement rejetée, par 300 votes contre 118.

Un débat vif outre-Manche

Le nouveau Premier ministre travailliste Sir Keir Starmer s’est dit favorable à cette proposition tout en assurant la liberté de vote sur ce texte. Parmi les promoteurs de cette loi, l’ancienne présentatrice Esther Rantzen, très populaire en Grande-Bretagne se présente comme une influenceuse de poids. Elle-même atteinte d’un cancer des poumons, elle a déclaré avoir adhéré à Dignitas en Suisse pour obtenir un suicide en Suisse si son traitement échouait.

Parmi les opposants, on retrouve des associations de la société civile, notamment regroupant des personnes handicapées ou encore de nombreux soignants. Pour le directeur de Care Not Killing, Gordon MacDonald, cette proposition de loi est précipitée et indécente à un moment où le système de santé britannique, spécialement l’accès aux soins palliatifs est défaillant. La priorité est de les renforcer alors qu’un Britannique sur quatre n’y a pas accès.

D’autre part le 23 octobre dernier, le parlement gallois a voté contre une motion appelant à une nouvelle loi autorisant l’aide médicale à mourir au Pays de Galles et en Angleterre. Ce vote demeure symbolique et ne bloque pas le processus en cours pour l’examen de la proposition de loi à la Chambre des communes, dans la mesure où une loi sur le suicide assisté ne relève pas de la compétence de cette assemblée.

Concernant les autres nations du Royaume-Uni, l’Irlande du Nord n’est pas pour le moment concernée et demeure sous le régime du Suicide Act 1961. Une proposition de loi a été présentée au parlement écossais. Compte tenu des graves implications du texte juridiquement et médicalement, le gouvernement écossais estime que cela excède sa compétence et plaide pour qu’un bouleversement de cette nature soit discuté au niveau du parlement britannique.

Enfin les îles de Man et Jersey, dépendances autonomes de la couronne britannique, examinent actuellement des propositions de loi similaires.

 

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