Trier les embryons selon leur futur QI ?
Une enquête révèle qu’une start-up américaine, Heliospect Genomics, propose une méthode de « prédiction génomique » pour trier les embryons en fonction de leur futur quotient intellectuel (QI). Ce projet, nommé PolygenX, est révélé par Hope Not Hate, une organisation militante britannique qui a infiltré la société.
La start-up dit avoir développé sa méthode et ses outils de prédictions grâce aux données biomédicales britanniques de la UK Biobank, auxquelles elle a eu accès en juin 2023. Cette banque de données contient les informations génétiques, médicales et sociales de près de 500 000 personnes volontaires, ayant consenti à ce que leurs données personnelles, anonymes, entrent dans des programmes de recherches divers et variés. Heliospect utilise ces données pour associer des maladies ou des traits psychologiques à des caractéristiques génétiques, ce qu’elle appelle « notation polygénique ».
La start up ne propose pas de FIV, mais utilise des algorithmes pour analyser les données génétiques fournies par les parents qui ont recours à la procréation artificielle afin de prédire les caractéristiques spécifiques de leurs embryons individuels. La procréation artificielle implique une succession d’étapes standards : stimulation ovarienne, ponction ovarienne, fécondation in vitro, culture de l’embryon et diagnostic pré implantatoire de l’embryon.
Sur la base des résultats fournis par Heliospect, les parents sont invités à choisir quel embryon sera implanté dans l’utérus. Selon l’entreprise, ses méthodes peuvent produire un gain de plus de six points de QI. D’après Hope Not Hate, la start up a travaillé avec plus d’une douzaine de couples ayant eu recours à la fécondation in vitro. Le coût de ses services pourrait atteindre jusqu’à 50 000 dollars pour des clients qui pourraient tester jusqu’à 100 embryons. Un nombre astronomique et peu crédible au regard du nombre d’ovocytes à ponctionner que cela impliquerait.
Le PDG danois, Michael Christensen, ancien trader sur les marchés financiers, considère que « la sélection génétique est promise à un bel avenir », et envisage déjà des « améliorations futures ».
Pour Blanche Streb, directrice de la formation d’Alliance VITA et auteur de « Bébés sur mesure – Le monde des meilleurs » (Artège, 2018) on est là face à des promesses douteuses autour d’un vrai eugénisme. Et d’une forme de réductionnisme un peu consternant. Evidemment, trier les embryons en fonction de leurs options, comme on choisit une voiture, ne permet pas d’augmenter le QI. C’est juste un tri qui se fonde sur des données extrapolées entre des individus et leur génome.
S’en suit la décision d’implanter dans l’utérus l’embryon qui aurait, au stade de quelques cellules, la meilleure note. Mais l’être humain ne peut se résumer à son code génétique. L’intelligence humaine n’est pas simplement déterminée par le QI. De même que le QI n’est pas seulement déterminé par un ou deux gènes. L’intelligence est un phénomène complexe, multiforme, profondément humain et évolutif, qui dépend de tout ce qui fait la vie d’une personne : apprentissages, expériences, entourage, environnement, talents, aspirations, fragilités…
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Bébés sur mesure – Le monde des meilleurs. Blanche STREB (Artège, 2018)
La singularité de l’intelligence humaine, les enjeux autour de l’eugénisme et le génie de l’épigénétique seront au cœur de la prochaine Université de la vie d’Alliance VITA qui se déroulera en janvier 2025 et aura pour thème « Etre humain et le rester demain ». Les inscriptions ouvriront le 19 novembre prochain.
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