Quel regard sur les personnes âgées en France ?

01/10/2024

Quel regard sur les personnes âgées en France ?

 

 

Quel regard est porté par la société sur les personnes âgées, et quelle est leur situation ? La journée mondiale des personnes âgées est célébrée le 01 octobre de chaque année. Notre société vieillit et cette tendance va se poursuivre dans les prochaines années. La situation et la perception des personnes âgées dans la société sont donc des enjeux importants.

 

Situation des personnes âgées en France : la longue tendance à l’amélioration de leur situation économique est-elle en train de se retourner ?

Dans un rapport détaillé présenté à l’occasion de cette journée, les Petits Frères des Pauvres apportent de nombreuses informations sur les situations de pauvreté qui touchent les personnes âgées.

Sur une perspective historique longue, la situation des personnes âgées s’est beaucoup améliorée sur les dernières décennies. Un élément notable et fondateur est la création, au sortir de la seconde guerre mondiale, de la Sécurité sociale et du régime des retraites. En 1956, le premier minimum social est créé au profit des personnes âgées. L’idée est d’attribuer une allocation à un assuré sans que celle-ci ne dépende des cotisations versées.

De nombreux facteurs ont contribué à améliorer la situation financière des personnes âgées : plein emploi dans les années après-guerre, plus forte participation des femmes au marché du travail, création des régimes de retraite complémentaire rendus obligatoires en 1972. Le rapport constate que “si on analyse la pauvreté des personnes âgées par l’approche monétaire du taux de pauvreté, le nombre de personnes de 65 ans et plus sous le seuil de pauvreté a été divisé par 3,5 entre 1970 et 2006, avec un taux de pauvreté qui a chuté de 35 % en 1970 à 10 % en 2006“. Selon l’INSEE, “En 2022, le taux de pauvreté des 65 ans et plus est de 11,1 % vs 14,4 % pour l’ensemble de la population“.

Le revenu médian mensuel, c’est-à-dire le revenu qui sépare en deux la population (50% de la population gagne plus, 50% gagne moins que ce niveau médian) est supérieur d’environ 5% pour les retraités, comparé à l’ensemble de la population.

Ces statistiques globales ne doivent cependant pas masquer les disparités de situation au sein de la population âgée. On dénombre par exemple 1.4 million de personnes de plus de 65 ans sous le seuil de pauvreté, défini comme 60% du revenu médian de toute la population (soit un revenu disponible de 1158 euros pour une personne seule). Les auteurs notent que le taux de pauvreté reste plus important pour les femmes que pour les hommes.

Ainsi, ce taux touche 6.6% des hommes et 10.1% des femmes âgés de plus de 75 ans (chiffres de 2018). D’autres facteurs que le genre sont recensés pour décrire les inégalités : le fait de vivre seul plutôt qu’en couple, et le lieu d’habitation. Les auteurs rappellent que “les pensions versées aux retraités résidant dans les départements d’Île-de-France sont très supérieures à la moyenne nationale, de 40 % à Paris, 36 % dans les Yvelines et les Hauts-de-Seine et 23 % dans l’Essonne. À l’inverse, les départements du nord, du nord-est de la France ainsi que du Massif central présentent des niveaux de pensions inférieurs à la moyenne nationale“.

Avec les travaux menés depuis 2017 dans leur baromètre sur la solitude et l’isolement, les Petits Frères des pauvres “alertent sur les liens entre isolement des ainés et pauvreté“. Un chiffre, parmi d’autres, illustre ce propos. 5% des personnes âgées au revenu inférieur à 1000 euros est en situation de mort sociale. C’est 1% pour les personnes âgées au revenu supérieur à 4500 euros.

Ces chiffres dessinent une situation, et sont à compléter par les tendances. La perspective, selon le rapport, n’est pas bonne. “Même si leur taux de pauvreté reste toujours inférieur à celui du reste de la population, il est passé de 5,9 % en 2016 à 10,6 % en 2022 pour les 65-74 ans et de 8,2 % à 11,4 % pour les 75 ans et plus” (source INSEE).

Reprenant une image parlante, le rapport parle de “trappe à la pauvreté” pour les personnes âgées vivant seule : “le taux de pauvreté des personnes âgées vivant seules est en hausse constante depuis 2016 (+ 7,8 points) et depuis 2019, il est supérieur au taux de pauvreté de l’ensemble de la population avec un écart de plus en plus important d’année en année: + 1,3 % en 2019, + 2,7 % en 2020, + 3,4 % en 2021, + 4,4 % en 2022“.

Ces chiffres rejoignent le constat d’acteurs de terrain. Dans un rapport publié en 2023, le Secours catholique “constate que parmi les Français rencontrés par l’association, la part des plus de 60 ans est passée de 6 % à 13 % en dix ans“.

 

Quelle est la perception du grand âge par la population ?

A l’occasion de cette semaine bleue, le Conseil de l’âge (HCFEA Haut Conseil de la Famille, de l’Enfance et de l’Age) a lancé une enquête “afin de disposer de la perception d’un échantillon représentatif de la population de la vieillesse, du vieillissement de la population, des personnes de 65 ans et plus, ainsi que des comportements âgistes“.

Il ressort du sondage que pour la majorité des français, l’entrée dans la vieillesse débute à 65 ans. Sans surprise, les tranches les plus jeunes de la population portent un regard différent que la moyenne. Ainsi, 49% des moins de 35 ans estiment que l’on est “vieux” à 55 ans. Cet différence d’appréciation se retrouve dans le vocabulaire employé. Si les termes de “retraités”, les “séniors” et “les papis et mamies” sont les termes les plus employés pour désigner les personnes de plus de 65 ans, là encore, la population plus jeune emploie d’autres termes. Les 18-24 ans utilisent en priorité “personnes âgées”, “anciens” et “vieux”.

Interrogé sur ce qu’apportent les personnes âgées à la société, l’ensemble de la population toutes tranches d’âge confondues appuie fortement l’idée que “les personnes de 65 ans et plus peuvent apporter beaucoup de choses aux autres” et qu’ “il est tout aussi agréable de fréquenter des personnes de 65 ans et plus que des jeunes“. Mais dans les tranches 18-49 ans, ils sont un peu plus d’un tiers à estimer que “les personnes de 65 ans et plus sont lentes et font perdre du temps aux autres“.

Cette opinion est intériorisée par certaines personnes âgées : 16% des 70 ans et plus l’affirment également. Reflet des débats sur le partage de la croissance entre génération, 64% des 35-49 ans et 51% des 18-24 ans affirment que “les personnes de 65 ans et plus ont bénéficié de conditions privilégiées par rapport aux jeunes générations“.

L’enquête a cherché aussi à mesurer la discrimination sur la personne âgée, ou “âgisme”. En synthèse, les auteurs écrivent que : “non négligeables, les phénomènes d’âgisme restent relativement peu fréquents au sein de la population et se manifestent en premier lieu par des moqueries ou des paroles déplacées“.

Le vieillissement de la société étant une réalité qui va durer, travailler sur la perception de l’âge et des personnes âgés est un enjeu important pour les années à venir. Si les politiques publiques sont nécessaires, elles ne peuvent remplacer le comportement de chacun et le regard porté sur les personnes âgées. Alliance VITA propose quelques pistes dans son dépliant “changeons nos regards“. Publié en janvier 2022, il garde une actualité certaine.

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