La « capsule à suicide » ou comment « glamouriser » le passage à l’acte
Alors qu’en France, la dissolution de l’Assemblée nationale a stoppé net le projet de loi fin de vie et avec lui l’éventuelle légalisation du suicide assisté et de l’euthanasie, des « capsules à suicide » devaient être inaugurées en Suisse dans le courant du mois de juillet. Un concept qui en dit long…
Qu’est-ce qu’une « capsule à suicide » ?
Dispositif au look futuriste, baptisé « Sarco », pour « sarcophage », la capsule ovale en plastique violet a la taille d’un corps humain. Son rôle : provoquer la mort sur commande… Sa structure est inclinée, un peu comme une chaise longue. Pour les personnes valides, de l’azote y est libéré sur pression d’un simple bouton. Et pour les personnes paralysées, c’est le clignement des yeux qui active la machine.
La mort dans la capsule « Sarco » est présentée comme “sans douleur” ce qui est loin d’être avéré : le directeur du Death Penalty Information Center, Robert Dunham, indiquait dans une interview au journal Le Temps en 2018 qu’ « Il n’y a pas de preuves scientifiques permettant d’assurer que le recours à l’azote pour exécuter des prisonniers sera rapide et indolore. ». Pour son coté « écolo », les matériaux qui la composent étant biodégradables, « Sarco » peut aussi servir de cercueil. Ses concepteurs ont pensé à tout…
Derrière cette invention macabre : Philip Nitschke, médecin australien fondateur de l’association Exit International, organisation militant pour la légalisation de l’euthanasie et du suicide assisté. En 2002, pour protester contre les lois australiennes qui assimilaient l’aide au suicide à un crime, les militants d’Exit Australia avaient organisé une distribution de « sacs de suicide » pour permettre à des malades en phase terminale de s’étouffer eux-mêmes. Selon Philip Nitschke, « Tous les adultes responsables de leurs actes devraient, selon lui, avoir le droit de se choisir une fin paisible, même s’ils sont encore en bonne santé. »
Celui qui se définit lui-même comme un pionnier humaniste militant pour la libéralisation du suicide assisté, fut le premier praticien au monde à procéder à des injections létales sur des patients en phase terminale. A son actif, des inventions donc le sac de suicide et aussi un livre publié en en 2019, sorte de guide pratique pour réussir son suicide grâce à des conseils sur les poisons et les gaz. Dernière lubie de ce militant plus que controversé du « libre choix », la capsule « Sarco » pourrait même, à terme, être fabriquée par les personnes voulant en finir grâce à une imprimante 3D.
Pourquoi choisir la Suisse ?
En Suisse, le suicide assisté est permis depuis 1937, avec comme seule limite imposée par l’article 115 du Code pénal, que celui qui porte assistance à l’acte ne soit pas motivé par un mobile égoïste. Le suicide assisté n’étant pas considéré comme un soin, ce sont des associations qui en gèrent la logistique et le médecin n’intervient que dans la prescription du produit létal.
La pratique de l’assistance au suicide y est encadrée selon des critères fixés par l’Académie Suisse des Sciences Médicales (ASSM) : être majeur, disposer de sa capacité de discernement, pouvoir s’administrer soi-même la dose létale, et être atteint soit d’une maladie incurable, soit de souffrances intolérables, soit de polypathologies invalidantes liées à l’âge.
L’annonce par The Last Resort, organisation créée il y a quelques mois, de l’installation imminente de ces capsules a suscité la controverse et l’opposition des associations d’aide au suicide. Pour le coprésident de l’association Exit, Jean-Jacques Bise, dans une interview au journal Le Temps : « Affirmer qu’il s’agit du moyen le plus humain de s’en aller est complètement fou. Aucune association d’aide à mourir n’utilisera cette machine, la question ne se pose même pas.»
De son côté, Philip Nitschke l’assure : il a fait faire une expertise, et il est, selon lui, dans les clous. “Puisque son appareil n’est pas médical, il n’a pas besoin d’autorisation pour être utilisé en Suisse”.
Alors qu’un homme avait prévu de mettre fin à ses jours avec « Sarco » la semaine du 15 juillet, les autorités du canton du Valais ont interdit le dispositif sur le territoire. Cédric Dessimoz, médecin cantonal adjoint en Valais a expliqué « actuellement, avec les informations que nous avons eues, […] nous ne savons pas comment cette organisation procéderait pour un éventuel suicide assisté en Suisse ou en Valais ». Il a également rappelé le rôle nécessaire du médecin en Suisse, « notamment pour évaluer la capacité de discernement » alors que le dispositif « Sarco » veut démédicaliser le processus.
Un projet qui valide une culture de la toute-puissance
Le buzz médiatique autour de cet objet aussi appelé « Tesla du suicide » révèle que tout cadre visant à limiter le recours au suicide assisté et de l’euthanasie dès lors qu‘ils sont légalisés, est vain.
À travers cette volonté de démédicaliser le suicide, l’Australien cherche en réalité à ouvrir le suicide aux personnes qui estiment avoir suffisamment vécu et balaye les critères de pronostic vital ou de maladie en phase terminale. Ils sont pourtant utilisés par les promoteurs de la légalisation pour donner des gages et rassurer ceux qui s’inquiéteraient de dérives éventuelles.
Cette installation pose plus encore la question de la prévention du suicide. Qu’il s’agisse de son design, de la simplicité d’utilisation, de la promesse de ne pas souffrir, tout est fait pour rendre le suicide attractif. Si les autorités suisses finissaient par l’autoriser, le risque serait grand de voir augmenter le nombre de passages à l’acte suicidaire.
Cette capsule isole totalement la personne qui souhaite en finir et l’enferme dans une bulle : cette image à elle seule est parlante.
Derrière le sensationnalisme de façade et le militantisme pro euthanasie émerge une vision de l’homme et de la société où comme le dit Philip Nitschke, « Chacun doit être le seul maître de son destin ». Seule compte l’autonomie de la personne qui confine à la toute-puissance, au mépris de la vulnérabilité et de la solidarité.
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