DPI-A : honteux lancement d’un essai clinique pour contourner la loi

21/06/2024

DPI-A : honteux lancement d’un essai clinique pour contourner la loi

 

L’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) a autorisé de manière illégale l’expérimentation d’une technique de sélection embryonnaire : le DPI-A. Cet essai clinique a démarré en mars 2021 alors même que le DPI-A était interdit par la loi bioéthique, interdiction réaffirmée par la loi d’août 2021, y compris au stade de la recherche. C’est ce qu’a révélé cette semaine la Fondation Jerôme Lejeune dans un communiqué intitulé « victoire contre la pente glissante de l’enfant parfait ». Au regard de son illégalité manifeste, l’association avait en effet demandé au juge d’annuler cet essai. Le tribunal administratif de Montreuil vient de donner raison à la Fondation.

 

Le DPI et surtout le DPI-A, c’est quoi ?

Le diagnostic pré implantatoire (DPI) est une technique de sélection des embryons conçus in vitro. En France, cette technique réglementée ne concerne que les couples qui présentent une forte probabilité de transmettre une maladie héréditaire et de donner naissance à un enfant atteint d’une maladie génétique d’une particulière gravité reconnue comme incurable au moment du diagnostic. Elle ne concerne pas les couples qui ont recours aux fécondation in vitro (FIV) pour des raisons d’infertilité.

Depuis plusieurs années, et en particulier au moment de la dernière révision de la loi bioéthique, on a pu constater un fort lobbying pour l’élargissement et la libéralisation de l’accès au DPI-A : diagnostic préimplantatoire des aneuploïdies (anomalies du nombre de chromosomes). Le DPI-A vise principalement à détecter in vitro les embryons porteurs de trisomies, en particulier la plus répandue : la trisomie 21.

 

Quels enjeux éthiques ?

La particularité de la trisomie est qu’elle est de survenue aléatoire, imprévisible. Elle n’est pas héréditaire, c’est une sorte d’ « accident » qui se produit au moment de la fécondation. Si bien que, pour faire simple, autoriser le DPI-A reviendrait à faire passer un contrôle qualité de principe à tous les embryons conçus in vitro, et donc à le généraliser.

Il concernerait non seulement les embryons conçus dans le cadre d’un DPI classique mais aussi ceux de tous les couples ayant recours à la PMA, en l’absence de toute indication médicale. Il s’agit donc d’un changement de paradigme qui envisagerait une forme de « contrôle qualité » des embryons à priori, en l’absence de tout risque identifié, avec en principale ligne de mire l’élimination de ceux porteurs de trisomie.

Cela induirait un glissement vers un DPI pour tout et pour tous, derrière ce mythe grandissant de la quête du « bébé parfait », un glissement déjà largement amorcé et contenu dans le principe même de la technique du DPI. « Le pas suivant sera d’aller chercher d’autres maladies rares et très sévères » et « pourquoi pas de le proposer un jour à tous les couples qui le souhaiteraient d’avoir quelque part ce mythe de l’enfant sain », avait résumé Agnès Buzyn, ministre de la santé en 2021 quand des amendements pour ouvrir le DPI-A étaient débattus à l’Assemblée nationale.

Elle s’y était fortement opposée en pointant ce risque évident d’eugénisme.

 

Pourquoi observe-t-on une offensive pour autoriser le DPI-A ?

La logique inhérente aux techniques de diagnostics préimplantatoires est de procéder à la sélection embryonnaire, or la technique n’est jamais neutre. Lorsqu’on se place dans une perspective d’amélioration de l’efficacité des résultats en PMA ou d’amélioration de la sélection en fonction de la « qualité » des embryons, la surenchère est inévitable. D’abord, on autorise ces tests que pour traquer des maladies très graves. Puis des moins graves. Puis, de simples prédispositions….  On traque une maladie, puis ensuite d’autres en même temps… on veut éliminer tel risque, puis tel autre….  On le propose aux personnes considérées comme « à risque », puis par souci d’ « égalité » et de « performance » des techniques, on en vient à le généraliser à tous…

L’objectif revendiqué par les promoteurs de cette technique est d’optimiser les chances de grossesse après une FIV. En effet, pour certains biologistes de la reproduction et gynécologues obstétriciens, l’aneuploïdie serait une cause fréquente d’échecs d’implantation de l’embryon dans l’utérus ou de fausses couche. Par ailleurs, les promoteurs du DPI-A partent du principe que la détection chez un fœtus de la présence d’une trisomie conduit systématiquement à une décision d’avortement. Et les chiffres de recours à l’avortement en cas de suspicion de trisomie plaident en ce sens.

Bref, l’objectif affiché est d’éviter d’implanter des embryons porteurs de trisomie 21 pour éviter le traumatisme de l’avortement et d’améliorer le rendement des cycles de PMA, attendu que les aneuploïdies pourraient conduire à des fausses couches.

 

L’efficacité du DPI-A décriée pour « éviter » les fausses couches

Pour Stéphane Viville, spécialiste de biologie de la reproduction et de génétique à Strasbourg et fondateur du premier centre de DPI en France : «la majorité des fausses couches ne sont pas dues à des anomalies chromosomiques mais à 40.000 autres raisons. Cela peut être intrinsèque à l’embryon, à l’utérus de la femme, au dialogue entre les deux, etc. En outre, en FIV, il existe beaucoup d’embryons « mosaïques », c’est-à-dire composés à la fois de cellules normales et de cellules avec un nombre anormal de chromosomes. Or, « ces embryons mosaïques sont capables de se restaurer ». Les éliminer à priori par un diagnostic pré implantatoire n’a aucun sens. Par ailleurs, les erreurs de diagnostics sont aussi possibles avec ce type d’examen.

 

Quel essai clinique illégal s’est mis en place ?

Malgré l’interdiction du DPI-A, l’ANSM a donc autorisé un essai clinique impliquant des couples en parcours de PMA. L’objectif étant de vérifier ou non l’hypothèse défendue par les promoteurs du DPI-A, à savoir qu’il serait un moyen pour diminuer le taux de fausses couches après une FIV et augmenter le nombre de naissances vivantes dans les parcours de PMA.

L’essai clinique visait à comparer le taux de naissances vivantes chez 700 couples en parcours de PMA, dont un groupe verrait ses embryons conçus in vitro passés au crible du DPI-A avant implantation dans l’utérus et l’autre (groupe témoin) non.

La décision de justice a mis en suspens cet essai. L’ANSM a fait appel. Dans cette affaire sans précédent, plusieurs personnes porteuses de trisomie 21 s’étaient portées tierce partie pour faire valoir les conséquences que cette technique aurait sur leurs vies, comme Madeleine Maillet, qui a témoigné aux côtés de son avocat dans une vidéo accordée au Figaro, sur les raisons qui l’ont poussée à combattre cet essai.

 

Pour Alliance VITA, ces techniques qui concernent les embryons in vitro sont très préoccupantes car elles nous entraînent vers un risque d’eugénisme consensuel, technologique et à grande échelle. La menace de l’acclimatation de notre pays à ces pratiques eugéniques est réelle. Ce qui se joue là est fondamental. C’est celle d’un projet de société derrière lequel reposent ces questions fondamentales : qu’est-ce qu’une vie humaine et quelle humanité voulons-nous pour demain ?

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