Les annonces éclectiques supposées relancer la natalité

31/05/2024

Démographie : les annonces éclectiques supposées relancer la natalité

Le président de la République a tenté début mai de préciser son plan de relance de la natalité annoncé en janvier 2024 avec deux mesures phares dont les modalités sont fortement controversées : un plan de lutte contre l’infertilité et un nouveau congé de naissance. Analyse.

 

Une baisse de la natalité persistante depuis 10 ans

Le taux de fécondité c’est-à-dire le nombre d’enfants par femme est passé de 2,0 à 1,68 en l’espace de dix ans, sachant que le taux de renouvellement des générations se situe à 2,1. De 811 000 naissances en 2013, nous sommes passés à 678 000 en 2023.

La décroissance persistante de la natalité a fini par alerter les pouvoirs publics. Les raisons de cette baisse sont complexes. L’Institut national d’études démographiques (INED) ou des organismes tels que l’Union national des associations familiales (UNAF) conduisent régulièrement des études sur l’évolution de la démographie pour en déceler les causes. Ces éléments sont synthétisés dans une note expert publiée par Alliance VITA en décembre 2023 : Analyse des variations de la fécondité en France.

Les normes procréatives conduisent à avoir des enfants de plus en plus tard, la dégradation des conditions matérielles et de la politique familiale, avec notamment la question cruciale de la disponibilité des modes de garde sont également des défis cruciaux. S’ajoutent actuellement de nouveaux phénomènes sociaux comme l’éco anxiété, les difficultés d’engagement durable ou encore les évolutions sur les exigences et injonctions parentales…

 

La lutte contre l’infertilité en guise de « réarmement démographique » ?

Dans un élan de confusion des genres, le président Emmanuel Macron a semblé lier infertilité et baisse de la natalité avec deux propositions, critiquées par les experts :

  • La mise en place d’un bilan de fertilité autour de l’âge de 20 ans proposé à tous et remboursé par la sécurité sociale ».

Un non sens pour la présidente du collège national des gynécologues obstétriciens (CNGOF) : « Un bilan de réserve ovarienne sur la population générale qui n’a pas encore eu d’enfants n’a aucune valeur pronostique ». Au contraire cela peut être source d’angoisse et faire paniquer les jeunes pour rien.

  • L’ouverture  aux centres privés lucratifs de l’autoconservation ovocytaire ce qui va à l’encontre du principe fondamental en bioéthique de non marchandisation du corps humain.

La congélation des ovocytes sans raison médicale dans la visée hypothétique d’avoir des enfants plus tard a été source de fortes controverses lors de la dernière révision bioéthique. Autorisée pour les femmes entre 29 et 37 ans qui n’avait pas encore eu d’enfants, ce processus est loin d’être une assurance maternité (20% de succès) avec des risques secondaires dans certains cas.

Pour l’ancienne ministre de la Santé, Agnès Buzyn, interrogée par Le Figaro,  « la réponse à la baisse démographique ne peut pas être une médicalisation à outrance des couples ».

Le groupe de travail constitué à la suite de l’adoption de la loi bioéthique de 2021 pour élaborer un plan de lutte contre l’infertilité souligne dans son rapport publié en 2022 que la cause majeure des consultations liées à l’infertilité est en premier lieu sociale. Elle est liée au recul de l’âge de la maternité qui se situe en moyenne à 31 ans. Les auteurs alertent sur les limites de l’assistance médicale à la procréation ou PMA. ». Il faut rappeler que près de la moitié des couples qui ont recours aux techniques de procréation artificielle n’auront pas d’enfant à l’issue d’un parcours.

 Le rapport met en lumière les facteurs sociaux impliqués dans le recul de la maternité : allongement de la durée des études, progression de l’emploi féminin, diffusion de ²la contraception et de l’IVG, épineuse question du choix – métier, partenaire, environnement – conciliation travail et vie familiale, stabilité professionnelle et affective. « les femmes attendent de trouver celui (…)  avec qui concevoir un enfant, et doivent également attendre que leur compagnon soit prêt à s’engager ».

Les autres facteurs sont d’ordre environnemental et concernent les modes de vie : exposition aux perturbateurs endocriniens, tabac, drogue, obésité etc. D’autres raisons plus spécifiques et identifiées nécessitent de poursuivre des recherches (endométriose, azoospermie …)

 Autant dire que les « solutions » avancées par le président Macron sont décalées. Lors de la révision de la loi bioéthique, Alliance VITA a fait plusieurs propositions, notamment celle d’assurer une meilleure information sur la fertilité par des campagnes auprès des jeunes. D’autre part, plutôt que de proposer des artifices comme la conservation ovocytaire, il est nécessaire d’améliorer les conditions de vie et de travail pour que les couples puissent procréer à un âge plus jeune comme le recommandent le CCNE et le Comité d’orientation de l’Agence de biomédecine.

 

Un congé de naissance sur un temps plus réduit et mieux rémunéré est-il vraiment adapté ?

 

La proposition du gouvernement serait également de réduire la durée du congé parental à 6 mois (versus 3 ans actuellement) réparti en 3 mois pour chaque parent. Il serait mieux rémunéré que le congé parental actuel. La rémunération serait de 50% du salaire jusqu’au plafond de la sécurité sociale de 1 900 euros.

Actuellement les mères ont droit à un congé de maternité rémunéré de 16 semaines et de 26 semaines à partir du 3ème enfant et les pères de 28 jours également rémunérés. Le congé parental s’ajoute à ces congés comme le ferait le congé de naissance : il est rémunéré à hauteur de 448 euros et peut durer jusqu’à deux ans et demi pour l’un des parents et six mois pour l’autre.

L’Union nationale des associations familiales plaide pour la coexistence des deux systèmes. Car faute de pouvoir demeurer plus longtemps auprès de leurs enfants si elles le souhaitent, les mères devraient définitivement abandonner leur travail pour le faire au-delà de 3 mois.

 Dans ses urgences pour replacer l’humanité au centre des politiques publiques, Alliance VITA propose 10 axes pour favoriser un écosystème pour la famille durable dont certains visent à solidifier les conditions d’accueil des enfants. Renforcer la politique familiale par un soutien global aux couples devrait être une priorité politique pour soutenir la démographie.

 

Pour aller plus loin :

Les propositions d’Alliance VITA pour lutter contre l’infertilité

Les urgences pour favoriser un écosystème pour la famille durable

Note expert VITA : Analyse des variations de la fécondité en France

 

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