Adoption de la PPL « Bien vieillir », 1e étape avant une loi « Grand âge »

24/11/2023

Jeudi 23 novembre, l’Assemblée nationale a adopté à une large majorité la proposition de loi pour bâtir la société du bien vieillir. Considérablement enrichie pendant les débats, cette proposition de loi est une première étape, la Première ministre ayant annoncé une loi de programmation sur le grand âge pour 2024.

 

Après plusieurs reports, l’Assemblée nationale a repris cette semaine l’examen de la proposition de loi « Bien vieillir »  qui avait commencé en avril. Cette proposition de loi contient plusieurs mesures pour prévenir la perte d’autonomie, lutter contre la maltraitance des personnes âgées et leur garantir un hébergement de qualité.

Si cette proposition de loi a été fortement contestée lors des premiers débats en avril pour son manque d’ambition, l’annonce faite mercredi 22 novembre par la Première ministre d’une loi de programmation sur le grand âge qui sera présentée « d’ici l’été pour un examen et une adoption au second semestre 2024 » a rassuré les parlementaires.

Cette loi doit répondre à « quatre grandes questions : quels sont nos besoins ? Comment les financer ? Comment disposer des compétences et des personnels nécessaires ? »

A l’origine, cette loi de programmation avait été instaurée dans la proposition de loi (article 2 bis B) par un amendement adopté contre l’avis défavorable du gouvernement. Finalement, un amendement déposé par le gouvernement a permis une nouvelle délibération ce jeudi 23 novembre et a inscrit dans la proposition de loi que la loi de programmation sur le grand âge devait être adoptée avant le 31 décembre 2024.

Par ailleurs, l’examen de la proposition de loi « Bien vieillir » en séance publique a permis d’y ajouter plusieurs dispositions pour garantir les droits des personnes âgées et lutter contre la maltraitance en EHPAD :

  • Par un amendement des Républicains, le droit de visite dans les établissements sociaux et médico-sociaux a été renforcé.
  • Un autre amendement du groupe Les Républicains instaure de nouveaux indicateurs pour évaluer la qualité des EHPAD, comme le nombre de douches hebdomadaires ou la durée moyenne des repas.
  • Un amendement du groupe socialiste permet la prise en compte de « l’intégrité psychique » des résidents.
  • Un amendement défendu par le gouvernement oblige les EHPAD privés lucratifs à consacrer une fraction des bénéfices réalisés au financement d’actions en faveur de l’amélioration du bien-être des résidents.

 

Droit de visite dans les EHPAD

Parmi les avancées majeures du texte, l’instauration d’un droit de visite dans les EHPAD répond à la revendication du collectif Tenir ta main créé au moment de la crise du Covid-19. Mardi 14 novembre, Laurent Frémont, cofondateur du collectif, a remis un rapport au gouvernement. Ce rapport, intitulé « Liens entravés, adieux interdits », préconise d’instaurer « un droit absolu de recevoir » pour les résidents, sans limite horaire.

 

Suppression de l’obligation alimentaire pour les petits-enfants

Une disposition plus contestée du texte, à l’article 9, supprime l’obligation alimentaire pour les petits-enfants s’agissant de l’aide sociale à l’hébergement (ASH) : les petits-enfants ne seront plus tenus de financer l’hébergement d’un grand-parent dans un EHPAD, si celui-ci est bénéficiaire de l’ASH.

Comme l’ont souligné des députés Les Républicains, cette suppression entraîne une rupture de réciprocité « puisqu’aucune exonération n’est prévue pour les ascendants. Concrètement, les grands-parents seront donc toujours tenus d’aider leurs petits-enfants mais ces derniers n’auront plus d’obligations en retour. »

Par ailleurs, puisque cette disposition dispense d’obligation alimentaire uniquement les petits-enfants des personnes hébergées dans un établissement médical ou médico-social, elle introduit aussi une rupture d’égalité entre ces petits-enfants et ceux des personnes maintenues à domicile.

La nécessité d’une loi de programmation

Si les députés ont majoritairement voté pour cette proposition de loi « Bien vieillir », à l’exception des Républicains, qui se sont abstenus et des groupes LFI et GDR qui ont voté contre, ils ont à maintes reprises exprimé la nécessité d’aller plus loin.

Tous attendent la loi de programmation du grand âge, qui doit répondre aux besoins de financement immenses, alors que le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS), examiné juste avant, suscite bien des inquiétudes. En ligne de mire, la situation délicate des EHPAD, alors que le député GDR Yannick Monnet a rappelé que 85% d’entre eux étaient déficitaires fin 2022.

Ceux-ci doivent accueillir des personnes de plus en plus dépendantes : selon un rapport du Sénat de 2022, plus de la moitié des résidents est désormais très dépendante (GIR 1 ou 2). Face à ce cela, les EHPAD manquent aujourd’hui de personnel et la création de 6 000 postes dans le PLFSS en 2024 est bien insuffisante au regard d’un besoin estimé à 20 000 postes par an.

Le manque de personnel se fait également sentir dans les services d’aide à domicile où se pose également la question de l’attractivité et de la revalorisation des salaires, pour des emplois bien souvent précaires et à temps partiels.

Dans ce contexte, les professionnels du grand âge ont pour la plupart salué l’annonce d’une loi de programmation du grand âge. L’Association des Directeurs au service des Personnes Âgées (AD-PA) a néanmoins précisé dans un communiqué que « l’association a la mémoire longue et se souvient des promesses de nombreux Présidents et Premiers Ministres qui n’ont jamais abouti », en référence aux multiples annonces d’une loi grand âge et autonomie qui avait finalement été abandonnée.

L’association demande « à l’Etat de respecter ses engagements pour que cesse la maltraitance systémique des personnes âgées vulnérables et des professionnels qui les accompagnent. »

Stratégie « Bien Vieillir »

Les acteurs du grand âge ont également salué la présentation de la stratégie « Bien Vieillir » pour « préparer et adapter notre société à cette grande transition démographique » le 17 novembre. Cette feuille de route interministérielle propose un ensemble de mesures autour de quatre axes :

  • Prendre en compte de nouveaux besoins et reconnaître la place des seniors
  • Donner le choix de vieillir où l’on souhaite
  • Accompagner les solidarités entre générations
  • Garantir les droits et la participation des citoyens âgés

Si de nombreuses mesures de cette stratégie étaient déjà connues, plusieurs fédérations se sont réjouies de la volonté de concertation entre l’Etat et les fédérations employeurs pour faciliter les recrutements à travers un protocole pluriannuel.

En attendant l’examen de la proposition de loi « Bien Vieillir » au Sénat, la ministre des solidarités, Aurore Bergé, va pouvoir débuter son travail de concertation avec les parlementaires, les conseils départementaux et les professionnels du secteur afin d’écrire la loi de programmation sur le grand âge, comme l’en a chargé la Première ministre. Il reste à souhaiter que cette loi puisse répondre aux défis majeurs du financement et des personnels. Comme on le voit, les attentes sont immenses.

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