La fausse couche : un deuil périnatal trop souvent invisible
La journée mondiale de sensibilisation au deuil périnatal du 15 octobre est l’occasion de lever l’invisibilité qui entoure encore les fausses couches malgré les avancées dans l’accompagnement des couples qui subissent cette épreuve.
Des progrès ont été réalisés dans l’accompagnement du deuil périnatal mais ils n’ont concerné que les pertes de grossesse à compter de la quinzième semaine d’aménorrhée, c’est-à-dire les fausses couches tardives, les interruptions médicales de grossesse (IMG), les morts in utero et les enfants mort-nés… comme si la souffrance et le deuil n’existaient pas avant 14 semaines d’aménorrhée.
Très fréquentes, les fausses couches concernent environ 15% du total des grossesses et touchent une femme sur dix, au cours de sa vie. Environ 23 millions par an dans le monde se produisent, ce qui correspond à 44 fausses couches par minute, d’après une série de 3 études publiée par The Lancet en 2021. En France, cela concernerait environ 200 000 femmes chaque année. Malgré, ou à cause de sa fréquence, la fausse couche est souvent encore considérée comme un événement banal dont l’accompagnement reste en conséquence mal ajusté.
Or ce qu’on appelle aussi une interruption spontanée de grossesse peut laisser des traces physiques et psychologiques importantes. Les femmes qui en ont subi présentent un risque plus élevé d’anxiété, de dépression voire de stress post-traumatiques. Leurs conjoints peuvent également présenter des symptômes dépressifs.
C’est forte du double constat du traumatisme que peut générer une fausse couche et du manque de soutien approprié que la députée Sandrine Josso a initié et porté une loi votée à l’unanimité le 29 juin dernier et visant « à favoriser l’accompagnement des couples confrontés à une interruption spontanée de grossesse».
Concrètement cette loi prévoit un parcours d’accompagnement « pluridisciplinaire » sous la responsabilité des Agences régionales de Santé (ARS) pour accompagner les femmes et les couples. Ce parcours doit associer des professionnels médicaux et des psychologues hospitaliers et libéraux. Les sage-femmes pourront adresser les couples à un psychologue conventionné, dans le cadre du dispositif « MonParcoursPsy. Lancé en avril 2022, ce dispositif boycotté par une écrasante majorité de psychologues permet en théorie à toute personne angoissée, déprimée ou en souffrance psychique de bénéficier de huit séances remboursées par l’assurance maladie avec un psychologue conventionné.
Le texte instaure aussi un arrêt maladie sans jour de carence pour les femmes ayant subi une fausse couche, le différenciant d’un arrêt maladie classique.
Enfin la loi modifie le code du travail pour une meilleure protection des femmes : « Aucun employeur ne peut rompre le contrat de travail d’une salariée pendant les 10 semaines suivant une interruption spontanée de grossesse médicalement constatée ayant eu lieu entre la 14e et la 21e semaine d’aménorrhée incluses. »
Alliance VITA suivra avec vigilance la mise en place effective de ces mesures. En effet, nos services d’écoute accueillent nombre de femmes touchées par ce deuil souvent invisible dans la société ou les familles. La réalité de leurs souffrances témoigne aussi du lien avec cette vie commençante en leur sein. Comme le signalait une tribune sur ce sujet des fausses couches, « rien n’est faux parce que tout est vrai ».