Journée mondiale de lutte contre la maladie d’Alzheimer
La Journée Mondiale de lutte contre la maladie d’Alzheimer a lieu le 21 septembre. C’est l’occasion de se pencher sur le défi majeur posé par cette maladie pour le système de santé et la société dans son ensemble. Dans une société qui valorise la performance et l’utilité, quelle place pour les personnes atteintes d’Alzheimer ?
La maladie d’Alzheimer, un enjeu de santé publique
La maladie d’Alzheimer est la forme la plus courante des maladies neurodégénératives en France, c’est-à-dire des « maladies chroniques progressives qui touchent le système nerveux central » (Santé publique France). Environ 1,2 million de personnes en sont atteintes en France et ce nombre pourrait aller jusqu’à 1,8 million en 2050. 15% des plus de 80 ans sont touchés par cette maladie identifiée par la Fondation de France comme la première cause de dépendance lourde de la personne âgée.
Si la maladie d’Alzheimer est souvent associée à la perte de mémoire, elle touche d’autres zones du cerveau au fil de son évolution, compliquant la capacité à communiquer, à réaliser plusieurs choses en même temps ou les actes de la vie quotidienne. C’est pourquoi la présence d’un aidant familial ou professionnel aux côtés de la personne malade est généralement nécessaire.
Le lancement, le 5 septembre, de concertations visant à une « stratégie Maladies neurodégénératives 2024-2028 », est salué par les structures et associations consacrées à la maladie d’Alzheimer. Toutefois, la responsable du suivi des politiques publiques à France Alzheimer s’inquiète de l’absence de financement qui ne répond pas à l’objectif affiché de considérer les maladies neurodégénératives comme un en jeu de service public.
Prévention, dépistages précoces, renforcement de formation et de la recherche, soutien aux aidants
Outre les recommandations relatives au dépistage précoce, ces associations plaident également pour développer la prévention, et en particulier celle liée à l’activité physique adaptée. Une mission flash menée par deux députées militait quant à elle pour une meilleure formation des soignants et pour le renforcement de la recherche et listait une série de mesures pour soutenir les aidants.
L’essentiel de l’aide repose en effet sur les proches et les familles qui ont besoin d’être soutenus. Or on sait combien les interactions sont essentielles pour les personnes souffrant de cette maladie.
Changer de regard : Alzheimer, un enjeu majeur de solidarité
La maladie d’Alzheimer est une maladie qui stigmatise les personnes atteintes, voire leur entourage. L’image dominante des malades tend à les exclure en effet de la vie sociale : comme s’ils étaient déjà morts, ou seulement caractérisés par leur incompétence et par leur absence.
Selon France Alzheimer, lutter contre la maladie d’Alzheimer doit passer par le changement de regard de la société, en valorisant les actions des personnes malades. Elle met à l’honneur les témoignages de malades dont le diagnostic a été précoce et qui prennent la parole ainsi :
« J’ai des difficultés pour certaines choses. Il y aura des modifications dans nos relations et j’ai ou je vais avoir besoin de votre compréhension. Mais surtout, respectez-moi, ne me mettez pas de côté. Je suis toujours moi. Ne gâchons pas le présent. »
Interrogé par Alliance VITA, le gériatre Victor Larger, auteur de « Est-ce que je nous perds quand je me perds ? Vivre avec Alzheimer » (Balland, 2020) confirme que :
« Les personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer expriment souvent, au moins au début, le sentiment de n’être plus bon à rien, de ne servir à rien. Derrière cette question « à quoi je sers ? », est posée la question « quel sens ma vie a-t-elle ? » et, plus largement « quel sens cela a-t-il ? ». La question du sens des choses et des circonstances suscite chez le malade un mélange de perplexité et d’angoisse à l’origine des troubles du comportement qui, souvent, le submergent.
Le malade fait l’expérience de l’inutilité absolue, de l’insensé et de la vacuité. Lui, qui perd progressivement tout ce qui fait la superbe de l’homme, pousse à l’extrême la question du « quel sens ma vie a-telle ? » qui nous tient tous. C’est pourquoi on peut dire qu’il nous représente tous dans notre quête et ce d’une manière aiguë, exemplaire. Pour l’observateur deux attitudes sont possibles. La plus courante est celle qui nous fait souvent passer à côté de notre vie : croire que le malade est vide de cette richesse qu’est son intelligence. Qu’il n’a rien à voir avec nous.
Que nous n’avons rien en commun, peut-être même pas l’humanité. L’autre attitude est celle de l’interrogation : « où en suis-je, moi ? » Comment puis-je participer à la peine de cette personne, moi qui suis si souvent tenté de distraire mon esprit et mon cœur de cette quête fondamentale de l’existence. Finalement, à quoi je sers en face de celui-ci ? De cette interrogation ou non de l’observateur dépend le choix de son action.
Soit on abandonne le malade à lui-même, perdu dans son abime de solitude et d’angoisse. Soit on s’interroge soi-même sur le sens de sa position envers le patient et on le rejoint dans son expérience qui est aussi la nôtre. Ainsi deux attitudes sont possibles : l’indifférence voire le rejet conduisant à l’abandon du malade à lui-même ou l’attention portée à l’autre maintenant ainsi la relation. »
Ne pas enfermer la personne dans la maladie, cultiver les bons moments, intégrer un groupe de parole pour les aidants… Autant de facteurs qui contribuent à la lutte contre cette maladie.
Cette écologie relationnelle encore à construire pourrait bien être menacée par la légalisation d’une « aide active à mourir », quelle qu’en soit la forme, suicide assisté ou euthanasie. Comment en effet conjuguer la revendication de l’autonomie et l’accueil de la vulnérabilité et la solidarité envers les plus fragiles en particulier les personnes touchées par la maladie d’Alzheimer ?
Pour aller plus loin :
Journée Mondiale Alzheimer 2021 : Le lien social à l’honneur.