Atlas de la démographie médicale : situation en 2023
Le Conseil National de l’Ordre des Médecins vient de publier son atlas de la démographie médicale. Il s’agit d’une photographie de la situation au début de l’année 2023; avec quelques coups de projecteurs : sur les médecins retraités actifs, les remplaçants et les premiers recours. Le rapport comporte 137 pages de chiffres et d’analyses.
Dans son éditorial, le rapport attire l’attention sur ce qui semble paradoxal : la France n’a jamais compté autant de médecins en activité et le système de santé de notre pays traverse une crise profonde. Deux facteurs pèsent pour expliquer ce hiatus : d’une part l’augmentation générale de la population, et plus encore le vieillissement de cette population.
Plus de médecins mais une répartition géographique inégale
Dans les grandes lignes, les chiffres publiés indiquent que 322 973 médecins sont inscrits au tableau de l’Ordre, dont 234 028 sont en activité totale selon les termes du rapport. C’est plus qu’en 2010 : +8.5%. La répartition géographique laisse apparaitre des disparités. Beaucoup de régions ont une proportion identique entre population globale et population de médecins, mais certaines régions affichent un “surplus” : l’Ile de France, la Provence Alpes Côte d’Azur. Inversement, les Hauts de France, le Grand Est, le Centre Val de Loire et la Normandie souffrent d’un déficit.
Une démographie médicale en nette évolution
Entre 2010 et 2023, le rapport note la baisse des médecins généralistes : ils représentaient 48% des médecins en activité en 2010, contre 43.3% en 2023. Par ailleurs, le poids des “actifs réguliers” tend à baisser. Ils étaient 93% des médecins en 2010, et 84% cette année. Le poids des médecins retraités actifs a beaucoup monté : +260% sur la période. Le taux de féminisation est passé de 40 à presque 49% en 13 ans.
Par ailleurs, cette tendance va se poursuivre car le taux de féminisation est corrélé négativement avec l’âge moyen des médecins. Sans surprise, les chiffres retrouvent la “diagonale du vide” : du nord-est au massif central et à l’intérieur du sud-ouest de la France, l’âge moyen des médecins est plus élevé. Le rapport donne quelques exemples parlants :
“certains départements ont quasiment un médecin sénior sur deux: le sort des départements du Lot (51%), la Lozère (48.3%) et l’Yonne (47.9%) de médecins séniors, interroge fortement sur leur avenir à court terme à répondre à l’accès aux soins en l’absence d’un vigoureux rebond de la démographie médicale. Le Lot et la Lozère ont ainsi 3 médecins séniors pour 1 jeune médecin, l’Yonne un ratio de près de 4 pour 1, une véritable bombe de la démographie médicale à brève échéance“.
Autre fait notable : l’exercice salarié est devenu majoritaire. Les médecins salariés représentent 45.5% des médecins actifs, ceux exerçant en libéral 43.6%, et ceux en situation “mixte” 10.5%. Seuls les médecins généralistes restent majoritairement en mode libéral (56.9% de “libéraux exclusifs”).
L’examen de la densité de l’offre de soins produit le même constat : la région parisienne, le littoral français et les Alpes attirent les médecins et les territoires du Nord Est au Centre se vident. Le rapport qualifie ces disparités de “fractures installées”.
Le nombre de médecins étrangers a également fortement augmenté : +90% depuis 2010. Ils sont maintenant un peu plus de 29 000 à exercer en France. 56% sont diplômés hors de l’Union Européenne, et 44% au sein de l’UE.
Dans l’offre de soins, le rapport note également l’importance croissante des retraités actifs : “alors que les médecins en cumul emploi/retraite représentaient 2,6% des médecins en activité en 2010, ils en représentent désormais 8,6%, soit une augmentation de 6 points en 13 ans“.
Le système de santé a devant lui de nombreux défis à affronter: le vieillissement général de la population, l’irruption de la télé-médecine, les évolutions de la démographie médicale, et même l’impact des changements environnementaux. Récemment la DREES publiait deux études aux titres éloquents :
Les deux tiers des généralistes déclarent être amené à refuser de nouveaux patients comme médecins traitants.
A l’hôpital, une prévalence accrue de la dépression et de l’anxiété due notamment aux conditions de travail.
Le CNOM vient de publier un communiqué de presse s’élevant contre l’initiative d’un groupe de santé privé proposant un service de téléconsultations contre abonnement mensuel. Selon le Conseil « Ce type d’abonnement fait de la médecine un commerce et déconsidère la profession ».
Une politique ambitieuse de la Santé parait toujours aussi urgente.
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