Démographie en Chine, quelle réalité pour le soutien à la natalité ?
Le soutien à la natalité, y compris pour un troisième enfant, annoncé en 2021 par le Politburo chinois, ne produit pas encore d’effet dans la réalité démographique.
Le Bureau National des Statistiques a annoncé une baisse de la population, une première depuis 60 ans. A l’époque, une terrible famine, ayant démarré en 1959, avait fait 36 millions de morts, selon le livre du journaliste et historien Yang Jisheng.
La baisse annoncée est de 850000 habitants. Les projections indiquent que l’Inde deviendra le pays le plus peuplé du monde dès cette année.
L’ONU, dans ses projections de 2019 voyait le pic de natalité pour la Chine vers 2031. Mais le taux de fécondité a poursuivi sa baisse et s’établit à 1.15 en 2021. Le scénario d’hiver démographique pour ce pays semble se confirmer. Les impacts économiques et sociaux s’annoncent profonds : équilibre population active et retraités, pression sur la prise en charge des personnes âgées, baisse de la productivité économique, poids de la Chine au niveau géopolitique…
Certains médias qualifient cette baisse de « baisse paradoxale ». L’assouplissement puis la fin officielle de la politique brutale de l’enfant unique date de plusieurs années. Cependant les facteurs cités pour expliquer le bas taux de fécondité sont à la fois culturels, sociaux et économiques, et ne peuvent se résumer à la simple incitation des autorités publiques.
Hausse du coût de la vie, logements insuffisants, habitudes des petites familles, grossesses repoussées plus tard, niveau d’études supérieures plus élevé pour les femmes, mais aussi moindre envie d’élever des enfants selon des enquêtes auprès de jeunes chinois.
Un démographe chinois, He Yafu, note dans un article du Monde « la baisse du nombre de femmes en âge de procréer, qui a diminué de 5 millions par an entre 2016 et 2021« . Le vieillissement de la population est un phénomène qui s’auto-entretient.
La natalité en France
En France, où les débats actuels sur le système de retraite ont une composante démographique, le ministre du Budget a affirmé récemment dans la presse que « soutenir la natalité n’était « pas du tout « un tabou pour le gouvernement.
Mais davantage qu’une politique de natalité, l’enjeu est une culture où l’accueil de l’enfant, dès l’annonce d’une grossesse, est soutenu et valorisé. Un enjeu dans de très nombreux pays, au-delà du cas chinois.
La politique de l’enfant unique en Chine et ses conséquences
La politique de l’enfant unique, instaurée par Deng Xiaoping en 1980, avait été assouplie en 2013, sans entraîner cependant une hausse des naissances : sur 11 millions de couples potentiellement concernés par cette réforme, 620 000 avaient demandé cette autorisation. En 2015, le plenum du Comité Central avait annoncé que tous les couples seraient autorisés à avoir deux enfants à partir du 1er janvier 2016.
L’approche chinoise restait donc très administrative et coercitive. Le ministère de la santé chinois avait dressé un bilan de décennies de contrôle, estimant le nombre d’avortements à 281 millions entre 1980 et 2010. Une politique de stérilisation forcée était également menée.
L’impact de cette politique démographique a eu de profondes répercussions. L’annonce officielle souligne l’angle économique. En 2010, deux adultes actifs se partageaient la charge d’une personne économiquement dépendante (enfant ou personne âgée). Les projections actuelles montrent qu’en 2050, la Chine comptera 250 millions d’actifs en moins et chaque actif devra assumer la charge de près d’une personne économiquement dépendante. Dans un livre publié en 2017, une chercheuse de l’INED, Isabelle Attane, soulignait déjà pour la Chine le risque « d’être vieille avant d’être riche ».
Mais la politique de limitation des naissances a eu également des effets sociaux nombreux, comme le déséquilibre Homme/Femme avec un ratio de 107 hommes pour 100 femmes en 2015, quand la France en compte 92. Ce déséquilibre a lui-même des conséquences néfastes comme le trafic de femmes.
Les premières réactions dans les médias et sur les réseaux sociaux semblent indiquer que cette nouvelle directive volontariste des dirigeants chinois ne sera pas forcément suivie d’effets. De nombreux facteurs sont cités : absence de soutien aux mères, prix du logement et de l’éducation, difficulté à mener de front une vie familiale et professionnelle pour les femmes, baisse des mariages, mentalité éduquée par des décennies de politique freinant la natalité…
Un article du New York Times mentionnait les résultats d’un sondage en ligne de l’agence Xinhua intitulé « Etes-vous prêts pour la politique 3 enfants ? ». Sur environ 22 000 réponses, 20 000 avaient choisi la réponse « Je ne l’envisage pas ». Il ne paraît pas aisé de parier sur un nouveau « baby boom » dans ce contexte.
On doit surtout s’étonner de la quasi absence de critique internationale de la politique chinoise coercitive et hautement liberticide. L’Etat intervient abusivement depuis des décennies dans la vie intime et privée des chinois, sans aucune action des instances internationales chargées des droits de l’Homme.
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