Une proposition de loi pour faciliter le changement de nom de famille
Une proposition de loi pour « faciliter » le changement de nom de famille est actuellement examinée au Parlement, en procédure accélérée. Elle soulève d’importants enjeux et suscite des désaccords entre Sénat et Assemblée. Intitulée « proposition de loi relative au choix du nom issu de la filiation », elle est portée par le député LREM Patrick Vignal et bénéficie du soutien du Garde des Sceaux. Si les sénateurs et les députés ne parviennent pas à trouver de compromis en commission mixte paritaire, l’Assemblée nationale aura le dernier mot le 24 février.
La demande de changement de nom était déjà possible dans certains cas particuliers, par décret, si la personne qui entame cette procédure justifie d’un intérêt légitime. Par exemple, celui d’éviter le préjudice véhiculé par son nom (ridicule, péjoratif ou homonyme d’une personnalité criminelle, par exemple) ou par volonté de la transmission d’un nom qui risque de s’éteindre. Les demandes concernant la suppression du nom d’un parent existent déjà et sont en constante hausse.
Ce texte se fonde sur des préoccupations réelles comme les difficultés rencontrées lorsque les parents se séparent, ou la souffrance ressentie par certaines personnes lorsque le nom qu’elles portent incarne, par exemple, un parent abusif ou violent. Il aurait été possible de modifier la loi pour faciliter le changement de nom dans ces situations particulières. Pourtant, le texte adopté par les députés va beaucoup plus loin puisqu’il aurait une portée générale.
Il ouvre en effet la possibilité pour toute personne majeure de demander, une fois dans sa vie, à changer de nom. Soit pour prendre, soit pour ajouter, le nom de son autre parent. Le nom du père, plus fréquemment donné, pourrait ainsi être remplacé par celui de la mère, à tout moment, par cette future loi. Il suffira de remplir un formulaire à déposer devant l’officier d’état-civil de sa mairie.
Par ailleurs, la proposition de loi envisage également de pouvoir accoler le nom de la mère à celui du père six mois après la déclaration de naissance. En cas de divorce, la personne dont le nom n’a pas été transmis à l’enfant peut obtenir qu’il soit accolé à celui de l’autre parent. Le texte permet aussi d’inverser l’ordre des deux noms portés par l’enfant. Pour rappel, depuis 2002, il est possible pour un enfant de porter le nom du père, de la mère ou les deux noms, cela étant laissé au libre choix des parents au moment de la naissance.
Cette réforme serait un basculement du fonctionnement de l’état civil puisque la possibilité de changer de nom par simple formalité administrative serait laissée à la volonté de chacun. Ainsi, le principe d’indisponibilité de l’état civil (le fait qu’il ne soit pas à la libre disposition de chacun) serait remis en cause. Or, puisqu’il s’agit d’une proposition de loi, les conséquences de ce texte n’ont pas été évaluées puisqu’il n’a fait l’objet d’aucune étude préalable.
Les questions sont nombreuses : fragilisation de l’identification des personnes, notamment par la police, possibilité d’avoir des frères et sœurs issus des deux mêmes parents ne portant plus le même nom, effacement du nom du père, rupture dans la généalogie. Pourquoi un changement unique, et pas au grès des disputes avec son entourage ?
Un sondage IFOP montre que 22% des Français expriment leur volonté de changer de nom de famille si cela était rendu possible par les pouvoirs publics. Dans le cas de ce changement de nom, près d’un Français sur deux (47%) préfère prendre les deux noms de familles (de leur père et de leur mère). Enfin, parmi les femmes mariées, 80% déclarent porter le nom de leur mari. « Signe sans doute des transformations sociétales engagées par les revendications féministes récentes, les 18-34 ans ne portent plus qu’à 60% le patronyme de leur mari et 13% leurs deux noms », analyse l’IFOP.
Les demandes de changement d’état civil sont en constante hausse, et la majorité des demandes sont le fait de personnes en conflit avec le parent dont ils portent le nom, souvent le père. « La hausse de ces demandes est un indice supplémentaire du déclin de l’institution du mariage et de la transmission patrilinéaire», analyse Jérôme Fourquet dans Le Figaro.
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