PPL Droit de visite : Adoption à l’unanimité par le Sénat

15/10/2021

PPL Droit de visite : Adoption à l’unanimité par le Sénat

 

Mardi 12 octobre, le Sénat a adopté à l’unanimité en première lecture une proposition de loi créant un droit de visite pour les personnes malades, âgées ou handicapées en établissements. Portée par le chef de file des Républicains au Sénat, Bruno Retailleau, cette loi entend répondre aux drames humains qui se sont produits pendant la pandémie en de nombreux endroits, où des personnes sont mortes sans pouvoir revoir leurs proches, du fait de l’interdiction des visites pendant cette période.

Lors de son allocution, le sénateur LR Bruno Retailleau a dénoncé un défaut d’humanité mis au jour par la crise sanitaire :

« Dans nos établissements de santé et médico-sociaux, des personnes fragiles se sont retrouvées privées de tout contact avec leurs proches. Derrière ces portes closes se sont noués des drames terribles, en particulier pour les personnes en fin de vie, laissées seules face à la mort – malgré le dévouement de personnels soignants débordés. » Il a souligné également l’épreuve que cela a constitué pour les familles « privées du rite de passage, parfois même d’un rite funéraire digne de ce nom. »

Concrètement, la proposition de loi inscrit dans le code de la santé publique et dans le code de l’action sociale et des familles un droit de visite pour les patients des établissements de santé, les résidents des EHPAD ou des foyers pour handicapés. Ce droit ne peut être subordonné à une information préalable de l’établissement. Dans son 4e article, la loi instaure un droit de visite quotidien pour les patients en fin de vie ou en soins palliatifs, de la part de leurs conjoints, ascendant ou descendant « jusqu’au 4e degré ».

Enfin, la proposition de loi  inscrit dans le code de la santé publique que les dispositions liées à l’état d’urgence ne sauraient permettre au Premier ministre de déroger aux règles fixées par le texte.

Cette proposition de loi a été fortement inspirée par les témoignages de Laurent Frémont et de Stéphanie Bataille, fondateurs du collectif « Tenir ta main ». Ils ont perdu leurs pères pendant la pandémie et n’ont pu leur rendre visite dans leurs derniers instants. Ils souhaitent, par ce collectif, être les porte-parole des sans-voix. Leur comité de soutien regroupe des personnalités comme Marie de Hennezel, Laurence Ferrari ou Emmanuel Hirsch.

En mai dernier, Laurent Frémont indiquait avoir reçu 10 000 témoignages de familles qui n’avaient pu voir leurs proches en fin de vie. A ce jour, près de 48 000 personnes ont signé leur pétition pour introduire dans la loi un droit de visite aux patients hospitalisés et aux personnes âgées.

Par ailleurs, dans un rapport du 4 mai dernier, le Défenseur des droits dirigé par Claire Hédon dénonçait les nombreuses atteintes aux droits et libertés des résidents des EHPAD depuis le début de la crise sanitaire, notamment de restrictions sur la liberté d’aller et venir et sur le droit de visite qui se sont poursuivies bien au-delà des périodes de confinement. Ce rapport pointait les conséquences psychologiques pour les résidents, dont certains avaient perdu le goût de la vie ou souffraient de dépression.

La proposition de loi instaurant le droit de visite a été adoptée à l’unanimité, malgré l’opposition du gouvernement. Pour Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l’autonomie,  « le droit de visite est un principe déjà bien établi. Il ne serait pas réaliste de le rendre opposable, compte tenu des exceptions nombreuses : réanimation, urgences, maternité, psychiatrie, infectiologie, soins de suite, pour ne citer que ces cas».

La ministre a aussi mis en avant le souci des familles de protéger leurs proches du virus, alors que certaines ont  menacé d’engager des procédures pour mise en danger de la vie d’autrui. Quoi qu’il en soit, cette proposition de loi qui revêt une forte portée symbolique a peu de chances d’aboutir avant la fin du quinquennat, dans la mesure où le groupe Les Républicains ne dispose plus de niche parlementaire pour la mettre à l’ordre du jour des débats à l’Assemblée nationale.

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