Une étude récente issue de l’Université de Genève et publiée dans Nature démontre scientifiquement que la voix maternelle permet de diminuer les signes de douleur que ressentent les bébés prématurés, lorsqu’ils doivent subir des interventions médicales.
Les bébés qui naissent trop tôt doivent passer du temps dans des unités de soins intensifs ou en réanimation néonatale et ont souvent besoin d’assistance médicale. Cette situation entraîne des moments de séparation plus ou moins longs ainsi que la nécessité de gestes médicaux parfois douloureux.
L’étude s’est portée sur la voix, car il n’est pas toujours possible pour les parents de prendre leur bébé dans les bras, en particulier lorsque son état nécessite qu’il reste en couveuse.
Le premier auteur de l’étude, Mme Filippa, et ses collègues de l’Université de Genève, de l’hôpital Parini en Italie et de l’Université du Val d’Aoste, ont examiné les réactions à la douleur de 20 bébés prématurés en soins intensifs, lors d’un geste médical de routine consistant à piquer le pied pour prélever quelques gouttes de sang. L’équipe a examiné les réactions des bébés dans trois situations différentes : soit pendant que la mère parle à son enfant, soit lorsqu’elle chante, soit en l’absence de la mère. À chaque fois, l’équipe a enregistré trois types de mesures pour évaluer le niveau de douleur ressentie par le bébé : les expressions faciales du bébé, son rythme cardiaque et son niveau d’oxygène. Les expressions faciales étaient examinées par les chercheurs sans qu’ils ne sachent à quelle situation elles se rapportaient.
Les résultats révèlent que le niveau de douleur ressenti par les nourrissons baisse, en moyenne, de 4,5 à 3 (sur une échelle de 21 points) lorsque la maman parle. « Pour cet âge spécifique, il s’agit d’un changement important », précise Mme Filippa.
L’équipe a également mesuré le taux d’ocytocine dans les échantillons de salive prélevés sur les bébés et constate une augmentation significative de ce taux lorsque la mère parle à son bébé. L’ocytocine est une hormone connue pour être impliquée dans les processus d’attachement et peut également avoir un effet protecteur contre les effets de la douleur, a précisé le Dr Filippa.
La voix des mères a été étudiée en raison du lien particulier mère-enfant et de l’imprégnation de cette voix chez l’enfant pendant la vie utérine. Mais cela n’occulte en rien l’importance de la présence du père, dont la voix devient également familière à l’enfant, dès la vie utérine, et dont la présence compte auprès de son enfant. Mme Filippa a ainsi précisé qu’ils « mèneront aussi des études sur les contacts vocaux des pères ».
Les auteurs rapportent que l’étude présente certaines limites, notamment le fait que le nombre de bébés concernés était faible, et que d’autres mesures, notamment neurologiques, permettrait d’affiner les résultats. Mais pour eux les résultats sont prometteurs : « Le message clé est qu’il est très important d’impliquer les parents dans les soins précoces de leurs enfants prématurés, y compris dans des situations difficiles comme des procédures douloureuses ». Il s’agit d’une donnée évidente que les soignants habitués à la prise en charge des enfants prématurés et de leurs familles connaissent bien.
Pour Charlotte Bouvard, présidente de SOS préma : « cette étude démontre l’évidence ». Cette association, engagée au quotidien dans le soutien des familles, travaille en proximité avec les équipes soignantes et les pouvoirs publics pour donner à tous les enfants prématurés les meilleures chances de bien grandir. La psychologue de l’association, Myriam Dannay, vient d’ailleurs de publier un ouvrage pour guider les parents à chaque étape de cette traversée de la prématurité.