La revue The British Medical Journal vient de publier l’enquête EPIPAGE-2 incluant au départ 5170 enfants nés prématurément entre avril et décembre 2011. Le suivi de ces enfants s’est donc déroulé sur plusieurs années et dans 25 régions. Les chercheurs de plusieurs équipes[1] pilotées par l’INSERM, se sont intéressés à leur devenir, à leur insertion scolaire, à leur recours à des prises en charge, ainsi qu’aux inquiétudes ressenties par leurs parents. L’objectif est de mieux comprendre les conséquences de la prématurité pour les enfants, plus précisément sur leur devenir neuro-moteur, sensoriel, cognitif, comportemental ainsi que pour leurs apprentissages.
Nés entre 24 et 26 semaines d’aménorrhée révolues, les enfants sont considérés comme extrêmes prématurés. Entre 27 et 31 semaines, comme grands prématurés. Entre 32 et 34 semaines, comme modérément prématurés.
Au cours de cette enquête, 3083 enfants ont été revus dans le cadre de consultations spécialisées dédiées à l’enquête à l’âge de 5 ans et demi, car cet âge « correspond à un moment clé du développement de l’enfant permettant notamment le diagnostic de difficultés d’apprentissage et l’étude des compétences cognitives qui avant cet âge sont beaucoup plus difficiles », souligne Pierre-Yves Ancel, responsable de l’équipe EPOPé.
Les résultats de l’enquête montrent qu’à l’âge de 5 ans et demi, 35% des enfants nés extrêmes prématurés, près de 45% des grands prématurés et 55% de ceux nés modérément prématurés auront une trajectoire développementale proche de la normale.
L’étude révèle que quel que soit le degré de prématurité à la naissance, plus d’un tiers des enfants présentaient des difficultés dites mineures. Elle révèle aussi que plus la prématurité est grande, plus les enfants présentent de difficultés du neuro-développement et plus la scolarité de l’enfant nécessite d’être adaptée. Alors que 93% des enfants modérément prématurés étaient scolarisés dans des classes ordinaires (sans soutien spécifique), cette part ne concernait plus que 73% des enfants nés extrêmes prématurés.
Plus de la moitié des enfants nés extrêmement prématurés bénéficiaient d’une prise en charge de soutien au développement (orthophonie, psychomotricité, ou encore soutien psychologique, etc.) ainsi qu’un tiers des enfants nés grands prématurés et un quart de ceux nés modérément prématurés. Néanmoins, 20 à 40% des enfants avec des difficultés sévères n’avait pas de soutien. « On ne peut accepter que des enfants et des familles qui ont besoin d’aide n’aient pas accès à ces aides alors qu’elles existent », a relevé le Pr Ancel lors d’une conférence en ligne.
La prématurité est une source d’inquiétudes réelles pour les parents, même quand le développement de l’enfant est considéré comme normal. Les troubles du comportement (troubles de l’attention, difficulté à maîtriser ses émotions…) sont la préoccupation la plus fréquemment signalée par les parents. L’enquête souligne ainsi l’importance de l’environnement dans lequel évolue l’enfant et insiste sur la nécessité de proposer aux familles un accompagnement coordonné, à la fois médical, éducatif et social.
La première partie de cette enquête, publiée en 2017, également via The British Medical Journal montraient que, depuis 20 ans, les enfants nés prématurément vivent mieux et ont moins de séquelles.
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[1] Enquête EPIPAGE-2, réalisée par les chercheurs de l’équipe Inserm-Université de Paris EPOPé – « Equipe de Recherche en Épidémiologie Obstétricale, Périnatale et Pédiatrique », du Centre de Recherche Epidémiologie et Statistiques (CRESS, Unité 1153) et impliquant des équipes de l’AP-HP ainsi que du CHU de Lille.