La Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) est appelée à se prononcer sur le refus d’une demande de reconnaissance d’une double maternité issue d’une « maternité partagée » dans le cadre d’un partenariat civil entre personnes de même sexe (1).
Les requérantes sont un couple de femmes homosexuelles. Leur enfant est né dans le cadre d’une FIV un peu particulière. En effet, l’une des femmes a donné ses ovules. La fécondation a été réalisée avec un donneur de sperme anonyme, et l’embryon a été implanté dans l’utérus de l’autre femme du couple. La PMA a été organisée en Belgique, car l’Allemagne réserve cette technique aux couples homme-femme souffrant d’infertilité.
En Allemagne, la loi considère que la mère d’un enfant est celle qui accouche. C’est donc la mère « porteuse » de l’enfant qui a été reconnue comme la mère et la mère « génétique » (donneuse d’ovule) a déjà adopté cet enfant, ce qui lui permet d’avoir tous les droits et les obligations parentaux, dans la mesure où l’adoption de l’enfant du partenaire de même sexe est permise.
En réalité les deux femmes veulent être reconnues comme mères de l’enfant. La mère génétique de l’enfant, a sollicité aux autorités d’être aussi inscrite en qualité de « deuxième parent » sur l’acte de naissance. Les autorités allemandes ont refusé. Les requérantes prétendent alors que le refus de reconnaitre la double maternité constituerait une discrimination fondée sur leur orientation sexuelle et une atteinte à leur droit et à celui de l’enfant à la vie privée et familiale. Et elles ont saisi la CEDH.
Le Centre européen pour le Droit et la Justice (ECLJ) a été autorisé par la Cour européenne des droits de l’homme à déposer des observations écrites dans cette affaire. Le Centre souligne qu’« En n’admettant pas un dédoublement de la maternité mentionné dans l’acte de naissance de l’enfant qui aurait ainsi donné à croire qu’il a été conçu par deux femmes, elle [ la loi allemande] se préoccupe toutefois de l’intérêt de celui-ci qui subit une grave injustice quant au besoin légitime de connaître ses origines et à son droit d’être élevé par ses père et mère. La loi allemande respecte en tout cela la jurisprudence de la Cour mais également les textes internationaux et principes développés par les organes du Conseil de l’Europe en matière de filiation ». L’ECLJ soulève également les « conséquences graves de ce cas ». Une condamnation de l’Allemagne dans cette affaire constituerait en outre un pas supplémentaire vers l’admission de la gestation par autrui (GPA) : la pratique dont ont usé les requérantes adultes est précisément une forme de GPA puisqu’une femme porte un enfant qui a été implanté dans son utérus alors qu’elle lui est génétiquement étrangère, l’enfant ayant été conçu à partir d’un ovule fourni par une autre femme. »
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(1) affaire R.F. et autres c. Allemagne.