Le procès en appel de Jean Mercier s’est ouvert ce jeudi 8 septembre à Lyon. Une « peine de principe » d’un an de prison avec sursis a été requise à l’encontre de cet homme de 88 ans, qui avait aidé sa femme à mettre fin à sa vie en 2011.
Le 27 octobre 2015, l’octogénaire avait été condamné pour non-assistance à personne en danger à un an de prison avec sursis. Malgré une peine bien en-deçà des trois ans avec sursis requis en première instance, il avait fait appel de sa condamnation, ainsi que le parquet, et était donc rejugé à Lyon.
L’avocate générale, Fabienne Goget, a rappelé que Josanne Mercier n’était pas en fin de vie, qu’elle n’était pas atteinte d’un mal incurable mais souffrait d’arthrose et d’anxiété et que la mort n’était pas la seule issue pour cette femme de 83 ans. La magistrate a souligné que « Jean Mercier a agi au nom de convictions philosophiques et qu’il revendique son geste », évoquant « l’adhésion du couple à l’Association pour le droit de mourir dans la dignité (ADMD) », omniprésente dans ce dossier. Des militants de l’ADMD, dont son président Jean-Luc Romero, étaient même venus apporter leur soutien visible au prévenu.
L’avocate générale a précisé cependant que « ce dossier ne doit pas être utilisé pour faire avancer une cause et masquer la réalité des faits », et que ce qui compte, « c’est une peine de principe qu’il ne faut pas descendre en-deçà d’un seuil symbolique ». Elle a conclu en demandant à la Cour de confirmer le jugement du tribunal correctionnel de Saint-Étienne.
Jean Mercier a rappelé les faits de ce matin du 10 novembre 2011, lorsque sa femme, s’étant cassé le poignet, s’était réveillée en se plaignant. Elle lui avait demandé « d’apporter des médicaments » et de la morphine, et de l’aider à les décapsuler. Pour Jean Mercier, « c’était la première fois qu’elle m’implorait, on s’était promis (de s’aider à en finir, ndlr) et je ne pouvais pas faire autrement », a poursuivi l’octogénaire.
Évoquant la relation « dominant-dominé » dans ce couple marié depuis 55 ans, son avocat Maître Mickaël Boulay a fait valoir qu’il avait « tenu sa promesse à son épouse » et plaidé la relaxe.
En marge de l’audience, Jean Mercier a déclaré : « La peine infligée je m’en moque, je préférerais l’acquittement mais ce qui compte, c’est le combat que je mène pour faire avancer les choses ».
« Une chose est de comprendre la situation douloureuse de cette femme, avec sa grande dépendance et sa détresse, et de ne pas rajouter à la peine de son mari, qui est, depuis ce drame, naturellement enfermé dans l’auto-justification. Une autre est de relever comment ce drame du « suicide assisté » est aujourd’hui sciemment instrumentalisé au profit de la revendication euthanasique. Monsieur Mercier ne s’en cache plus. Comme dans les autres affaires que nous avons analysées (La bataille de l’euthanasie, enquête sur les 7 affaires qui ont bouleversé la France*) les promoteurs de l’euthanasie s’appuient sur une énergie victimaire en occultant toute alternative au suicide ou à l’euthanasie.
D’un côté nous sommes tentés de nous taire devant l’intimité des faits, mais de l’autre nous devons redire à quel point, dans ce cas particulier comme dans les autres, le suicide n’est jamais la bonne solution, alors que c’est l’accompagnement ajusté des personnes fragiles qui est la solution humaine à leur souffrance. »
La Cour rendra son arrêt le 10 novembre.
*Tugdual Derville. Salvator, 2012