Tugdual Derville, Délégué général d’Alliance VITA
En une vingtaine de pages argumentées par le menu, c’est une fin de non-recevoir que la Commission européenne a donnée le 28 mai 2014 aux quelque 2 millions de signataires de l’initiative européenne Un de nous (« One of us »). Les députés de Strasbourg ne seront donc pas saisis de la question du financement de la recherche sur l’embryon.
Cette réponse a eu un écho particulier en France, un peu plus d’un an après un autre refus, celui du Conseil Economique Social et Environnemental (CESE) qui avait écarté une autre pétition magistrale, de plus de 700 000 Français, elle aussi inscrite dans une démarche officielle récemment mise en place pour offrir aux citoyens la capacité d’intervenir dans les décisions politiques. Dans les deux cas, le rejet de ces pétitions inédites ruine dans l’œuf le concept même de « démocratie participative ». Comme s’ils étaient tétanisés par la liberté octroyée, la technocratie (française dans le cas du CESE, européenne pour la Commission) reprend la main.
Dans son rapport, la Commission européenne commence par rappeler les fondements de l’initiative citoyenne européenne : « Introduite par le traité de Lisbonne pour encourager une plus grande participation démocratique des citoyens aux affaires européennes [elle] permet à un million de citoyens de l’Union européenne (UE) provenant d’au moins sept États membres d’inviter la Commission européenne à présenter une proposition législative dans des domaines relevant de la compétence de l’UE. » Puis elle insiste, lourdement, pour se justifier et, donc, contester toute la démarche de Un de nous. Car l’intention de ses initiateurs était bien de désavouer la pratique du financement par la Commission, d’une part des recherches détruisant l’embryon humain et d’autre part des programmes d’avortement dans les pays émergents.
En se prononçant au dernier jour de son mandat, et quelques jours après l’élection du nouveau Parlement européen, la Commission donne l’impression de faire un dernier pied de nez aux citoyens. Faut-il en conclure qu’il y aurait de « bonnes initiatives », dignes de l’Europe, et d’autres indignes d’être retenues ? La Commission est incontestablement juge et partie.
Mais où est la véritable vitalité démocratique ? Se lancer dans la collecte d’autant de signatures dans tous les pays de l’Union en saisissant le procédé neuf, relevait du défi. La technique de recueil et de validation des signatures n’avait pas encore été étudiée par les instances européennes, au point qu’il a fallu proroger le délai du recueil. Occasion pour les initiateurs de Un de nous de mettre en relation des associations de tous les pays, et à l’intérieur de chacun.
En France, ce sont les savoir-faire de la Fondation Jérôme Lejeune, des Associations familiales catholiques, du Comité protestant pour la dignité humaine et d’Alliance VITA qui ont été partagés. Et le Français Grégor Puppinck, le directeur de l’European Centre for Law and Justice (ECLJ), a été au cœur de la coordination européenne.
Malgré les apparences, derrière ce nouveau rejet s’ouvrent des perspectives prometteuses pour la cause de la vie : le succès d’une opération européenne de mobilisation de grande ampleur dénote la vitalité démocratique des associations de défense de la dignité humaine et leur unité. Dans l’élan de l’initiative, émerge une fédération des associations ayant travaillé ensemble pour Un de nous. Le refus de la Commission aura transformé l’initiative Un de nous en utopie mobilisatrice : ses initiateurs s’en servent déjà de tremplin.