Mariage gay : 66% des Français pour un référendum

02/10/2012

La course de vitesse est engagée entre les pro-mariage gay et ceux qui leur résistent. Face à la volonté gouvernementale de légiférer vite, sans trop soulever les questions gênantes, la pression pour un référendum se fait de plus en plus forte, et unitaire.
Deux Français sur trois estiment qu’ils doivent être consultés par référendum sur le « projet de loi autorisant le mariage homosexuel avec droit d’adopter des enfants […] qui va modifier en profondeur le code civil et le droit de la famille ». C’est le résultat marquant d’un sondage effectué par l’Ifop à la demande d’Alliance VITA auprès d’un échantillon représentatif de 1003 adultes. Le détail des réponses selon les sensibilités politiques montre que même une majorité des sondés se situant à gauche sont favorables à ce référendum. Un tel résultat relance le débat tout en renforçant la motivation des opposants au projet. Révélé par lefigaro.fr, premier site d’information sur Internet, le sondage a été occulté par l’Agence France Presse, après « débat au sein de l’agence »…
En l’absence du vote d’une loi organique organisant l’application du très complexe « référendum d’initiative populaire » prévu par la réforme constitutionnelle du 23 juillet 2008, le référendum en question doit être décidé par le président de la République conformément à l’article 11 de la Constitution. La loi constitutionnelle du 4 août 1995 a en effet ajou­té la possibilité pour lui d’en appeler aux Français pour des réformes relatives « à la politique économique ou sociale de la Nation ». La réforme du mariage entrerait dans ce champ social, même si ce point est controversé.
Christine Boutin, présidente du Parti chrétien démocrate, a lancé l’idée de ce référendum dès le début de l’été 2012. Des personnalités politiques variées pourraient reprendre cette revendication. Interrogée par Le Parisien, Rama Yade a d’ores et déjà estimé « légitime de proposer un référendum sur les questions sociétales », en englobant dans cette formule le vote des étrangers et le « mariage » homosexuel : « On verra si la gauche a le courage de donner la parole au peuple » a commenté la vice-présidente du Parti radical.
Au gouvernement, on affirme en substance que la mesure 31 du candidat Hollande n’a pris personne par surprise et que, d’une certaine façon, le référendum a déjà eu lieu avec son élection. « Le fait même d’avoir voté pour François Hollande était une manière de lui permettre de mettre ce beau projet en œuvre », a conclu Najat Vallaud-Belkacem, porte-parole du gouvernement. On peut lui rétorquer que de nombreuses autres promesses présidentielles sont d’ores et déjà passées aux oubliettes…En pleine campagne pour la présidence de leur parti, les ténors de l’UMP hésitent sur la conduite à tenir. En privé, certains confient leur embarras. Comment se positionner dans ce qui apparaît de plus en plus comme une grande bataille sociétale comme la France en a l’expérience, avec le risque de générer de profondes fractures au cœur de la société ?
Chez les maires, la mo­bilisation monte, avec notamment quelques voix discordantes à gauche qui rompent l’unanimisme de façade que la majorité présidentielle tentait de présenter. Élus locaux et mouvements d’adoption notent tour à tour que le lobby homosexuel est le seul à avoir été consulté par le pouvoir, alors que la réforme aurait un impact généralisé sur le mariage et la famille, et concernerait tous les Français.
Du côté des associations hostiles au mariage et à l’adoption homosexuels, au milieu des multiples pétitions et appels qui fleurissent sur Internet (on en compte une bonne dizaine), se dégage actuellement la « demande officielle de référendum national sur l’  »ouverture du mariage et de l’adoption aux couples de même sexe » ». Cinq jours après son lancement elle dépassait les 20 000 signatures, avec un exposé des motifs résolument sobre : « La question du mariage et de l’adoption d’enfants est fondamentale et doit faire l’objet non seulement d’un débat public et démocratique, auquel chaque citoyen est en droit de participer, mais aussi d’un référendum permettant de s’assurer de l’opinion de l’ensemble des Français. » Ce type d’exposé, qui n’entre pas dans l’argumentaire des pro et des anti, pourrait-il convaincre au-delà des fronts de résistance à la réforme ? Les promoteurs de l’appel tablent surtout sur la capacité de la société de revenir à la raison grâce à un vrai débat révélant les véritables conséquences du prétendu « mariage pour tous ».
Le lobby homosexuel, ne critique-t-il pas déjà un avant-projet gouvernemental qui n’intègre pas le droit à la procréation artificielle ? Remarque logique : l’institution du mariage étant liée à l’accès à la filiation, le droit d’adopter des enfants lui est indissociable, surtout dans un contexte homosexuel ; or, cette adoption sera revendiquée par un compagnon ou une compagne de même sexe, sur des enfants que l’autre aura obtenus par des procédés artificiels, notamment à l’étranger. Et dans les cas de « bricolages procréatifs », ces arrangements entre deux hommes et deux femmes qui impliquent de négocier une garde alternée avant même la conception, la revendication est déjà de reconnaître à l’enfant quatre « coparents »…
Plutôt que d’affronter de telles perspectives qui, cette fois, heurtent frontalement l’opinion, la majorité tente de passer par la petite porte d’un « mariage pour tous » escamotant délibérément la question de l’enfant. Quitte à valider une demi-réforme, insatisfaisante pour tous. Et sans cohérence.
 

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