« Il y a des formes plurielles de familles » annonçait sur Twitter le lendemain de sa nomination, Dominique Bertinotti, la nouvelle ministre chargée de la famille. « Il faut donc pouvoir traiter de la diversité des modes de famille ».
C’est une réalité, certaines familles doivent être aidées et c’est un devoir de solidarité. Car les enfants ont fondamentalement besoin du père et de la mère qui les ont conçus, idéalement dans l’amour, et de vivre sous le même toit. Quand un des composant manque, la société ou la famille élargie tentent d’y remédier, parfois avec difficulté mais au mieux qu’elles peuvent, pour préserver l’intérêt de l’enfant. Plutôt que de formes plurielles de familles, il s’agit bien d’adaptations pour réparer les accidents de la vie.
L’Etat tente de repérer la maltraitance, de protéger les enfants des conflits des parents ou de leur démission. L’intérêt supérieur de l’enfant demeure toujours le critère des mesures adoptées. Suivant ce critère, l’Etat prend soin des orphelins, parvient quand c’est possible à leur offrir un père et une mère adoptifs, pour assurer cette référence à l’altérité sexuelle à l’origine de leur engendrement. Il exige également qu’ils soient mariés pour garantir la meilleure sécurité affective possible à ceux qui en ont tant manqué. Si leur adoption par des personnes célibataires a été autorisée, cela correspond à des contextes particuliers : souci de combler le manque de familles adoptives (ce qui a pu être le cas par le passé) ou encore de favoriser l’accueil dans la famille élargie, préservant ainsi les liens affectifs et les racines familiales de l’enfant.
Dans une enquête sur les répercussions du divorce, la journaliste Agathe Fourgnaud, elle-même fille de parents divorcés, livre les témoignages d’enfants qui ont vécu cette rupture. Son constat : personne n’en sort indemne, même si les conséquences varient suivant les situations et les personnes. Il ne s’agit pas de jeter la pierre à ceux qui, souvent au terme de souffrances, d’infidélité, de violence… n’ont pu faire tenir leur couple. Parfois la cohabitation du couple devient invivable et même risquée pour les enfants. Mais il s’agit de regarder les choses en face : les enfants sont souvent victimes, malgré tous les efforts de leurs parents pour tenter de les protéger. Victimes de ces déchirements, et parfois otages des conflits parentaux. Ce n’est pas simple pour eux. Un leader politique, lui-même dans cette situation, vantait les capacités d’adaptation des enfants aux liens changeants de leurs parents. Comment peuvent-ils faire autrement ? Car ils n’ont pas de choix. C’est à eux d’adopter les nouvelles familles de leurs parents. La justice tente de tout faire pour que les enfants soient le moins lésés possible… Elle n’y parvient qu’imparfaitement, laissant les parents dans un sentiment d’injustice, souvent le père, qui ne pourra plus vivre quotidiennement avec son enfant, plus rarement la mère.
Que dire de tant de femmes abandonnées enceintes ou avec des enfants ? Courageusement, entre leur travail et l’éducation qu’elles doivent assumer seules, elles tentent de donner le meilleur à leurs enfants. La société leur vient en aide et c’est une question de justice sociale et de solidarité.
On le constate : le contexte sociétal a évolué en fragilisant la vie de certains enfants. Notre société peut-elle, en conscience, ignorer le droit des enfants pour répondre à des situations particulières d’adultes homosexuels qui expriment un « désir d’enfant » ? Sommes-nous prêts à laisser se développer une « homoparentalité », non exempte de ruptures affectives, qui prive un enfant de sa référence paternelle ou maternelle en lui imposant « deux mamans » ou « deux papas » ? Il serait gravissime d’instrumentaliser l’enfant en l’exposant à des fictions filiatives. Un enfant est un don, non un dû : c’est cette perspective qui pourrait aider les personnes homosexuelles à réorienter leur désir de paternité ou de maternité, comme d’autres qui ne sont pas homosexuels le font par ailleurs.
Certes il existe des cas d’enfants dont le père ou la mère a un mode de vie homosexuel après s’être séparé de son conjoint. Amalgamer ces situations à de l’homoparentalité est abusif car ces enfants ont bien un papa et une maman identifiés. Même si on leur demande un immense effort d’adaptation pour prendre en compte le partenaire du même sexe dans leur représentation parentale. A l’image de ce petit garçon désorienté, élevé en alternance par sa mère et son père en couple avec un homme, qui demandait récemment à sa grand-mère : « Et toi quand es-tu devenue une femme ? »
Madame Bertinotti vient d’annoncer que le gouvernement programme pour 2013 d’autoriser le mariage pour des personnes de même sexe et de leur donner un droit à l’adoption d’enfants. Les sentiments et la bonne volonté, s’ils sont nécessaires, ne suffisent pas. Comme le rappelle le pédopsychiatre Pierre Lévy-Soussan dans son audition aux Etats généraux de la bioéthique, «L’enfant a droit aux différences : il a droit à jouer avec l’identification soit à son père, soit à sa mère, soit aux deux. Il a droit à l’asymétrie parentale. La loi ne doit pas effacer ces différences qui sont si importantes pour sa maturation.» Double injustice donc pour ces enfants déjà mis à rude épreuve par l’absence accidentelle de leur père et de leur mère. On attend d’un ministère chargée de la Famille de la soutenir et de protéger ses membres, non pas de créer des situations de discrimination pour les enfants.
Alors que François Hollande entend mettre son quinquennat sous le signe de jeunesse et de la justice, nous attendons qu’il puisse prendre le recul nécessaire sur cette question si grave. Mettre les personnes homosexuelles face à leurs responsabilités, c’est aussi les respecter.
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