Eva Joly favorable à l’euthanasie et aux soins palliatifs

25/03/2012

Source : le site de campagne d’Eva Joly

Je vous remercie pour votre invitation à m’exprimer devant vous aujourd’hui. Je suis heureuse d’avoir le temps de développer mon sentiment personnel sur ce sujet aussi sensible que celui de la fin de vie. C’est un sujet sensible car il touche à notre conception de la vie, de la mort, de la solidarité, de la liberté, de la dignité.

C’est un sujet sensible car chacun l’aborde avec son histoire personnelle, avec le souvenir des proches qu’il a vu partir, de ceux qu’il a accompagnés dans les derniers instants de leur vie. C’est aussi mon cas. Il faut d’abord reconnaître les avancées de la loi Leonetti de 2005 (…).

Personnellement, je ne crois pas que ce soit suffisant. Je pense qu’il faut avancer vers l’aide active à mourir. Mais autant vous le dire tout de suite, avant d’y revenir plus longuement, je suis aussi très sensible à certains arguments des opposants à cette aide.

Moi aussi, je refuse une société où la mort serait donnée par défaut de solidarité. Je souhaite aller au-delà de la loi Leonetti car le cas de Vincent Humbert a montré les lacunes de notre droit (…). Je veux en finir avec l’illégalité dans laquelle l’aide active à mourir est pratiquée (…). Je souhaite le pluralisme moral, à savoir le droit à disposer de soi-même et la possibilité pour chacune et chacun de choisir (…).

Soyons clairs : l’aide active à mourir est et restera une solution exceptionnelle, et elle doit être strictement encadrée. Je souhaite que l’adoption de la loi relative à ce nouveau droit soit l’occasion d’un débat serein sur les modalités d’encadrement. Ainsi, il pourrait être limité aux personnes en phase avancée d’une maladie grave et incurable, et dont la souffrance physique et psychique est insupportable, dont l’état de dépendance est intolérable pour eux-mêmes. (…).

Le chemin que je trace est clair : c’est à la personne en fin de vie de choisir. C’est un acte individuel fort. C’est le droit à disposer de soi-même. Cela ne clôt cependant pas la discussion. Car je n’imagine pas qu’une nouvelle loi autorisant l’aide active à mourir soit votée sans faire évoluer radicalement le système français d’accompagnement des personnes en fin de vie. Si c’était le cas, je crains sincèrement une dérive bien triste de notre société. (…).

En fait, j’entends tous ceux qui s’inquiètent que la mort puisse être donnée par défaut de solidarité. Moi aussi je refuse une société qui tue car elle ne sait pas répondre à la peur de l’abandon ou de la souffrance. Je sais que nous refusons tous cela ici. Nous sommes attachés à la liberté individuelle, notamment en ce qui concerne les conditions de sa propre mort. Mais nous sommes tout autant attachés à la solidarité avec les personnes qui souffrent, physiquement et psychiquement.

Ma conviction est qu’il n’y a pas de contradiction entre liberté et solidarité quand nous parlons de la fin de vie. Je souhaite revoir le taux d’encadrement dans les services gériatriques pour garantir le confort de vie des patients, y compris et surtout en fin de vie. La qualité de vie des personnes âgées est un vrai problème de société (…).

Cette solidarité doit s’exprimer par l’investissement de notre pays dans les soins palliatifs et l’accompagnement humain. La question de l’euthanasie ne peut être traitée sans parler plus globalement de la fin de vie des malades en grande souffrance. C’est pourquoi je souhaite assurer un droit universel à l’accès aux soins palliatifs (…).

Je veux que nous sortions ensemble de l’opposition entre liberté individuelle et solidarité. Je suis pour l’aide active à mourir, je suis contre une société qui tue car elle ne sait pas répondre à la peur de l’abandon ou de la souffrance.

Cela impose, avant que l’aide active à mourir ne devienne effective, pendant que ses modalités seront débattues et progressivement mises en œuvre, d’opérer un investissement massif sur l’accompagnement des personnes en fin de vie. Un investissement économique et humain. C’est par l’accompagnement que le droit à mourir dans la dignité prendra tout son sens. C’est par la solidarité qu’il deviendra véritablement une nouvelle liberté.

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